Rio de Janeiro !
Qui n'a rêvé, en entendant ce nom, des plages de Copacabana, du Corcovado ou du Pão de Acúcar ?
Le Brésil !
Quel est l'amateur de football qui n'a pas rêvé de l'équipe mythique de ce pays ?
L'Amazone !
Qui n'est pas devenu songeur à l'évocation de ce fleuve immense qui draine une forêt sauvage, gigantesque et mystérieuse, poumon du monde, menacée par une déforestation incontrôlée ?
Rien de tout cela ne vous attend au fil des pages de ce livre par lequel se contente de nous faire part de quelques impressions de voyage, de quelques photographies fugaces prises par ci, par là, au cours de son voyage, en dehors de tous les circuits clichés de ce pays aux dimensions démesurées.
S'il n'évite par Rio ni Brasilia, si São Paulo, il n'en promène pas moins ses yeux et ses pas en dehors des sentiers battus par les agences de tourisme de ce seul pays lusophone des Amériques où se parlent aussi un drôle de portugnol et de nombreux dialectes locaux.
Au détour des ruines qui témoignent d'une période faste où les richesses naturelles du pays ont fait pousser des villes aujourd'hui en friche et menacées d'abandon, il rappelle cette histoire finalement récente –quelques siècles à peine depuis l'arrivée des premiers européens – qui ont mené de la colonisation au Pays d'aujourd'hui.
Il évoque des figures locales quasi mythiques au détour de son récit : des hommes qui ont forgé une nation, des aventuriers, des illuminés, des inconnus, des hommes illustres, des poètes et des illettrés. Proches de l'oubli ou encore vivants dans les souvenirs.
Mais le pays est trop grand, aussi le voyageur ne s'attarde-t-il pas. L'exhaustivité eût contraint à une encyclopédie plus complète mais indigeste.
La connaissance du pays et de son Histoire est immense et évoquée sans ostentation, en faisant le lien entre les traces d'un passé toujours rappelé et les chemins tournés vers l'avenir. Les points d'arrêt sont ces photographies, ces instantanés si visuels qu'on n'a aucune peine à voir, avec l'auteur, cette vendeuse de bracelets en cuir dans le musée de São Miguel das Missões.
Ces images restent parcimonieuses. Il est évident que Patrick STRAUMANN n'a pas emmené avec lui un appareil numérique qui rend impossible le tri des stocks logorrhéiques d'images conservées sur une carte mémoire ! L'argentique impose des choix, une retenue constante. Et ce sont ces choix qu'il nous livre pour nous inviter à un autre voyage.
Mon seul regret sera cette impression qu'il est resté à l'écart de toute rencontre comme pourrait le laisser penser le caractère exclusivement minéral des illustrations photographiques qui parsèment le livre. Serait-ce parce qu'il aurait subi la terrible vérité de sa citation de Wittgenstein : « Les frontières de mon langage sont les frontières de mon monde. » ?