— Non, il ne s’agit pas d’une formule magique, mais plutôt de la réaction de l’Union des écrivaines et des écrivains québécois (UNEQ) à « l’ortograf altêrnativ » proposée par le site Internet de la Ville de Montréal « aux personnes qui ont des incapacités intellectuelles ou de graves problèmes de lecture ou de langage ».
Alertée par la lettre de Serge Provencher, « Sit fasil a lir e a konprandr » (Le Devoir, 7 mars 2012, p. A-8), l’UNEQ a exploré la section « Accès simple » du site de la Ville de Montréal mise en ligne depuis juin 2002 à la suite du Sommet de Montréal. Contrairement à la Ville qui se targue d’être la « première municipalité au monde à mettre sur pied un tel site Internet » qu’elle qualifie d’ « avant-gardiste », l’UNEQ déplore le choix qui a été fait de répondre à un problème de langage par une simplification à outrance qui dénature la langue à laquelle ce site veut donner accès.
Préoccupée plus que jamais par le haut taux d’analphabétisme fonctionnel qui sévit au Québec, près de 50 % de la population, l’UNEQ interroge les édiles municipaux sur cette ortograf altêrnativ qui offre un baragouinage dépourvu de bon sens. Bien que les intentions de la Ville et de ses partenaires (Groupe Défi Apprentissage de l’Université de Montréal, Comité régional des association [sic] pour la déficience intellectuelle (CRADI), l’Association québécoise des personnes aphasiques, Regroupement pour la Trisomie 21, Mouvement des Personnes d’Abord de Montréal) paraissent on ne peut plus louables, l’UNEQ ne croit pas que la solution proposée soit la bonne.
Pourquoi ne pas se contenter des sections « texte simplifié » et « version sonore » ? Une «version audiovisuelle» (You Tube) pourrait aussi être offerte. Nous ne pensons pas qu’il soit plus simple de lire ce charabia qu’un texte simplifié, accompagné d’images ou de pictogrammes adéquats. Le message sous-jacent en est un du refus d’une langue claire, simplifiée certes, mais correcte et qui ne sombre pas dans le méli-mélo. Cette approche, symptomatique d’une démission devant la déliquescence du français dans la société québécoise, semble à l’UNEQ contribuer à infantiliser davantage une population déjà victime de préjugés. Si ces personnes ont des difficultés de lecture, pourquoi leur apprendre à lire une langue qui n’existe nulle part ailleurs que sur le site de la Ville ?
L’Union des écrivaines et des écrivains québécois est un syndicat professionnel créé en 1977. L’UNEQ regroupe près de 1 400 écrivains : des poètes, des romanciers, des auteurs dramatiques, des essayistes, des auteurs pour jeunes publics, des auteurs d’ouvrages scientifiques et pratiques. L’UNEQ travaille à la promotion et à la diffusion de la littérature québécoise, au Québec, au Canada et à l’étranger, de même qu’à la défense des droits socio-économiques des écrivains.