des maisons littéraires du groupe Hachette, pour l'édition 2015 du Salon du livre de Paris. Mais loin d'être une manifestation d'humeur, comme ce fut le cas en 2010, les raisons de ce choix sont plus profondes. L'édition hexagonale est en crise, et cette dernière trouve un écho tout particulier dans la manifestation, véritable caisse de résonnance du secteur du livre, dont elle émane.
ActuaLitté, CC BY SA 2.0
Le commissaire général du Salon, Bertrand Morisset, nous indiquait que l'organisation avait conscience des difficultés rencontrées. Charge aux organisateurs de « répondre aux attentes de nos clients, et leur proposer les solutions qui répondent aux contraintes qui sont les leurs. À nous d'être inventifs et de soumettre les solutions qui sauront satisfaire les exigences budgétaires ». Vœux pieux ? « Il faut une solution pour que les maisons du groupe Hachette puissent se retrouver au Salon, pour ne pas pénaliser les lecteurs qui viendront rencontrer leurs auteurs. »
La question financière était première, mais le commissaire général rappelle : « Voilà quatre ans, nous avons diminué le coût des stands de 17 %, pour aller dans le sens de ce que demandaient nos clients. Et les espaces Coup de pouce représentent également des solutions adaptées aux besoins : les petites structures peuvent profiter de la manifestation, et nous ne réalisons pas de profit sur ces stands. »
L'impératif est de monter au créneau, défendre l'oriflamme du Salon : « En dehors de la rentrée littéraire et du Salon, quand parle-t-on du livre, dans son ensemble, pour célébrer la lecture et les auteurs ? Quand on assiste à la faillite d'une enseigne ou qu'une crise éclate, parce qu'un acteur anglo-saxon est mis en avant ? Ce n'est pas le livre, c'est son économie qui intéresse les médias. »
Mais les faits sont là : le marché, en cette année 2014, est difficile, et rares sont les mois où les librairies ont réellement travaillé avec un chiffre d'affaires acceptable. La crise rencontrée n'est pas celle du Salon, « elle implique toute l'édition, c'est une crise du marché, et nous devons adapter nos offres pour y répondre ». Surtout qu'il est compliqué, pour un éditeur, de justifier la position : « Si l'on décide de ne pas s'y rendre, il faut s'expliquer. Et les auteurs nous demandent alors pourquoi ce choix. Et si l'on y va, ce sont des contraintes, et tous ne sont pas emballés... C'est pénible », nous confie une attachée de presse.
"notre recette n'est pas mauvaise, puisqu'elle inspire les autres"
Le Salon souffrirait-il alors d'un certain épuisement ? « Il incarne un certain gigantisme, qui, en cette période, peut faire peur – comme tout ce qui est trop grand. Il n'en est pas moins sollicité à l'international : avec plus de cinquante pays présents, contre une vingtaine voilà encore une dizaine d'années, il jouit d'une reconnaissance internationale. Notre Salon est respecté et réputé dans le monde entier, pour sa capacité à accueillir le public », se gargarise le commissaire.
Évidemment, pour conquérir les professionnels, on s'inspire des modèles allemand ou anglais, « mais personne n'invente : nous adaptons, tous se copient. Évidemment nous cherchons à assimiler les outils des autres grandes foires internationales ; Paris le mérite bien ! Et notre recette n'est pas mauvaise, puisqu'elle inspire les autres. »
Dans l'inventivité, on ne cache pas non plus une remise en question de l'époque. L'an passé, la mode du selfie, et les autographes sur un petit bout de papier, sont autant de choses pour lesquelles le Salon engage sa responsabilité. « Se recentrer sur les livres, c'est la première étape. Les selfies avec les auteurs, c'est sympathique, bien entendu. Cela n'empêche pas un peu de pédagogie, pour aller avec les paillettes : se prendre en photo, oui, lire les livres et les comprendre, c'est mieux. »
Et d'ajouter : « Le Brésil, qui était opposé à une législation portant sur le prix unique du livre, jusqu'à présent, va devoir compter avec les turbulences qu'entraîne l'apparition d'Amazon sur le marché. Désormais, ils envisagent un projet législatif, et souhaitent disposer des informations que la France peut leur apporter en la matière. Le Salon sait faire converger les intérêts de chacun. »
Les organisateurs assurent qu'ils entendent les difficultés rencontrées, et s'engagent vis-à-vis des exposants. « Notre obligation est d'adapter notre offre. Nous ne pouvons ni priver le public des auteurs qu'ils souhaitent rencontrer, ni rester sans réagir, quand nos clients nous font part de leurs demandes. »