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Kafka; Goldschmidt

Extraits

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Critique littéraire

Gloire à nos illustres pionniers

"J'ai trouvé le titre de ce recueil de nouvelles dans les Promenades sentimentales au clair de lune de Sacha Tsipotchkine : "L'homme, mais bien sûr, mais comment donc, nous sommes parfaitement d'accord : un jour, il se fera ! Un peu de patience, un peu de persévérance : on n'en est plus à dix mille ans près... Pour l'instant, l'homme n'est qu'un pionnier de lui-même... Gloire à nos illustres pionniers !" Il n'y a pas eu préméditation de ma part : en écrivant ces récits, je croyais me livrer seulement au plaisir de conter. Ce fut en relisant le recueil que je m'aperçus de son unité d'inspiration : mes démons familiers m'ont une fois de plus empêché de partir en vacances. Mes airs amusés et ironiques ne tromperont personne : le phénomène humain continue à m'effarer et à me faire hésiter entre l'espoir de quelque révolution biologique et de quelque révolution tout court, sans oublier évidemment l'illusion très littéraire de Kafka, lorsqu'il affirme que "le pouvoir des cris est si grand qu'il brisera un jour les rigueurs décrétées contre l'homme". Voilà où j'en suis. Et dire que mon intention était entièrement louable et que je croyais vraiment faire plaisir au lecteur, le distraire agréablement, sans aucune arrière-pensée. Enfin, ce sera pour une autre fois." Romain Gary.

05/1962

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Critique littéraire

Babel ou L'inachèvement

" Un texte primitif très bref, d'une trompeuse clarté, construit, en vingt lignes, avec la rigueur sans bavure d'une nouvelle de Kafka, et fixé depuis plus de deux millénaires, semble s'être dissous dans la conscience de notre civilisation, n'y laissant que ce maigre résidu : la tour de Babel. Image connue, mais embrumée à nos yeux, véhiculée par un confus souvenir biblique, point d'appui d'une métaphore signifiant vaguement à la fois désordre extrême et impossibilité de s'entendre. Extrait peut-être d'une épopée archaïque, ce texte s'inscrivit cependant, originellement, dans le temps réel de ceux qui le notèrent. Il marquait pour eux l'aboutissement d'une expérience, quelle qu'elle fut, et en tirait la leçon. Par la suite, tous les discours touchant Babel constituèrent la glose de ce récit premier, de siècle en siècle plus affaiblie et parfois aberrante, jusqu'à la banalité d'aujourd'hui. Car le mythe de Babel n'est à proprement parler signe de rien, et comme il ne comporte pas de héros et ne connaît de personnages que collectif et sans nom, il se dérobe aux descriptions trop nettes et semble même demeurer extérieur à ce que peut avoir de plus dramatique la représentation de noter destin. Pourtant, cet aspect, dont il n'est pas impossible de dégager, avec quelques attentions, la perspective. " P. Z.

02/1997

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Philosophie

Fantaisie d'un réaliste

Un homme eut le mérite de précéder Freud dans son explication du "mystère du rêve" : le Viennois Josef Popper (1838-1921), qui se rendit célèbre sous le nom de Lynkeus - ce héros grec à la vue perçante. Freud lui-même lui a rendu hommage, d'abord dans la seconde édition de L'Interprétation des rêves, ensuite dans deux articles consacrés à sa mémoire. Chaque fois il s'est plu à souligner non pas sa dette (qui est nulle), mais sa "rencontre" avec un aîné dont la pensée s'était formée dans un tout autre contexte que la sienne.
Josef Popper-Lynkeus, en effet, était un ingénieur génialement doué qui put s'enorgueillir de plusieurs inventions techniques. C'était aussi un réformateur social, dont l'influence ne fut pas négligeable en Europe centrale dans le premier tiers de ce siècle. C'est enfin et surtout l'auteur d'un unique ouvrage littéraire, les Fantaisies d'un réaliste, où, s'inspirant très largement du rêve, il s'est trouvé sans le savoir sur la voie du fondateur de la psychanalyse.
Ces contes, souvent naïfs, parfois cruels, conservent le charme des oeuvres écloses loin des courants esthétiques dominants, fruits singuliers d'un tempérament original. On y décèle aussi, non sans surprise, une inspiration qui évoque l'atmosphère mentale des fables du jeune Kafka. L'influence des Fantaisies semble ici évidente.

02/1987

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Littérature française

L'hôpital. Récit en noir et blanc

On ne franchit pas impunément le grand portail de l'hôpital. Dans un institut situé aux confins d'une ville, un homme se trouve brutalement plongé dans un espace-temps indéfini, en marge de la réalité et de la conscience. Il décrit la vie quotidienne de ce microcosme où s'invente une mythologie de la survie. L'Hôpital est le tableau sidérant d'un enfermement que trouent le vol des mouettes dans le ciel, l'écoute du ressac de l'océan, les bruits des radios voisines, les rires et les jeux des pensionnaires, l'affabulation et la convocation de la mémoire. C'est aussi l'odyssée d'une communauté et d'un homme qui ne vont nulle part lorsqu'il n'y a plus rien à dire. Publié une première fois au Maroc en 1990, introuvable à ce jour, L'Hôpital est un livre essentiel de la littérature maghrébine. A l'instar du Passé simple de Driss Chraïbi, de Nedjma de Kateb Yacine, de L'Institut Benjamenta de :Robert Walser ou des récits de Kafka, il est de ces textes rares qui à la fois affirment leur autonomie littéraire absolue et expriment en profondeur la société de leur temps. Habité par un désespoir et une révolte qui lui donnent son intensité tragique, L'Hôpital est un texte universel et un acte de liberté qui résonne ici et maintenant.

10/2012

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Religion

LES NEUF PORTES DU CIEL. Les secrets du hassidisme

Lorsque Jiri Langer revint pour la première fois de la lointaine Galicie, après s'être plongé corps et âme dans l'extraordinaire culture des hassidim, il apparut à tous ses proches comme véritablement transfiguré. Comment reconnaître, dans ce mystique fervent aux airs de vagabond céleste, le jeune juif qui était naguère tout prêt à s'intégrer dans la petite bourgeoisie tchèque ? Seuls son frère et son ami Franz Kafka parviendront à comprendre la profondeur et la fulgurance de sa métamorphose. Après plusieurs autres séjours dans les communautés hassidiques, Jiri Langer commence à témoigner par écrit ; Les Neuf Portes du Ciel rendent compte de la sainteté et des pouvoirs miraculeux des maîtres spirituels qu'il a rencontrés, de leur foi sans limite, de leur humilité joyeuse et de leur simplicité d'âme. Cette oeuvre unique du point de vue littéraire, avec ses anecdotes, ses exagérations et ses incantations, guide le lecteur sur un parcours initiatique qui mène à la sagesse dansante des hassidim. Publié à Prague il y a soixante ans, ce recueil de haute spiritualité, détruit par les nazis, est aussi un document inestimable : comme dans Les Récits hassidiques de Martin Buber, mais avec le réalisme du témoin oculaire, Jiri Langer nous fait revivre une tradition à jamais disparue, emportée dans la tourmente de la Shoah.

07/1998

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Poésie

Dialogues des morts sur l'amour et la jouissance

Georges Bataille converse sur l'amour et la jouissance avec Timothy Leary et Edith Piaf, Rosa Luxemburg avec Nelson Mandela, Victor Hugo avec Nina Simone, Maya Deren avec Mahatma Ghandi. L'atmosphère libre et fantastique de ce livre, composé de dialogues des morts et de récits de rêves, est celle des contes, dont le gai savoir se transmet de bouche à oreille. Dans les paroles que s'échangent les défunts comme dans les proses de la nuit, les traits sont brefs et clairs, les chutes parfois absurdes dans leur morale, cruelles aussi, souvent tendres. Les récits de rêves traduisent par la fable des sensations, des lectures et des expériences : rêve de la maison de poussière, rêve du chien de Goya, rêve de la vipère noire, rêve de Robert Walser, rêve de Franz Kafka. L'appropriation joue avec le dilemme qui s'installe entre rêvé de et rêvé par, invitant le lecteur à s'inclure dans cette situation onirique, au fil d'anecdotes révélatrices et d'historiettes. Cela étant, le livre propose de jouir pleinement de notre faculté d'imaginer et de raconter face à ce qui nous inquiète ? : l'amour et le genre, les relations sociales et les émotions, la mort et notre place dans l'univers, la folie et la logique du progrès, la vérité du langage et le chaos du monde.

05/2023

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XVIIe - XVIIIe siècle

Piranesi. The Complete Etchings, Edition français-anglais-allemand

Le plus célèbre graveur sur cuivre du XVIIIe siècle, Giovanni Battista Piranesi (1720-1778), dit Le Piranèse, a forgé sa renommée grâce à sa série d'eaux-fortes représentant la Rome antique. Ses surprenantes gravures en clair-obscur, qui imprègnent les ruines archéologiques de la cité de drame et de romantisme, sont vite devenues les souvenirs préférés de ceux qui e ectuaient le Grand Tour, parcourant l'Italie en quête de culture et d'enseignement classiques. Aujourd'hui, Le Piranèse est non seulement célèbre pour avoir façonné l'image que l'Europe se fait de Rome, mais aussi pour ses séries élaborées de prisons fantasmagoriques, les Carceri, qui ont depuis infl uencé des générations de créateurs, des Surréalistes à Samuel Taylor Coleridge en passant par Edgar Allan Poe, Jorge Luis Borges et Franz Kafka. Librement inspirés de décors plutôt que des véritables cachots sordides de l'époque, ces images très travaillées défient le réalisme architectural, préférant les jeux de perspective, d'éclairage et d'échelle. Les escaliers existent sur deux plans simultanés, de vastes plafonds voûtés semblent s'élancer jusqu'aux cieux, les distinctions entre dedans et dehors s'effacent. Vues d'en bas, peuplées de petites silhouettes fragiles, ses prisons prennent l'aspect de monstrueuses mégapoles carcérales, considérées aujourd'hui encore comme des chefs-d'oeuvre du drame existentialiste.

07/2022

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Littérature française

L'était une fois dans l'Ouest. Hiver

Entre la Cité soumise aux radiations et la forêt voisine se trouve une petite maison isolée, en lisière de la civilisation. Un couple y habite. Leurs enfants sont loin désormais, sûrement perdus dans des dunes de sable, la violence alentour est tenue coûte que coûte hors des murs quand bien même le monde extérieur et l'hiver hostile se pressent à leur porte. Mais peut-on se tenir toute une vie à l'abri des intrusions barbares ? Ce roman déviant a la vitalité du théâtre de rue et l'ampleur des fictions fragmentaires retrouvées dans les carnets de Kafka. Telle pourrait en être la matrice : C'était un après-midi de dimanche. Ils étaient au lit dans les bras l'un de l'autre. C'était l'hiver, la pièce n'était pas chauffée ; ils étaient étendus sous un lourd édredon de plumes. Alternant le point de vue de la femme et de l'homme portant sur leur environnement et leur intimité un regard tendre et tendu, projetant autant leurs illusions que leurs fantasmes, Thibault de Vivies retourne le roman dedans-dehors pour en dévoiler l'inquiétante alchimie. Fiction, diction et poésie la fois : cet inattendu mélange, c'est un peu Adam et Eve entre les feux du western crépusculaire et le décor étrange des contes de fée.

10/2021

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Littérature étrangère

L'homme sans maladie

Architecte de renom zurichois, Samarendra Ambani (dit Sam), fils d'immigrants indiens, se considère comme un "grand artisan du bonheur des autres". Sa vie tranquille - un travail honnête, une charmante compagne, une bonne hygiène de vie - va virer au cauchemar lorsqu'il décroche le contrat d'un opéra à Bagdad. A peine arrivé dans la capitale irakienne, il devient la victime innocente d'une violence qui le dépasse. Il rentre chez lui brisé, mais ne retient pas la leçon. Quelques mois plus tard, il accepte le projet de construction de la Bibliothèque nationale de Dubaï. Lors de son séjour dans l'état du Golfe, Sam découvre que l'histoire se répète impitoyablement et qu'un passeport européen n'est pas une garantie de retour... L'Homme sans maladie (dont l'ironie corrosive du titre, clin d'oeil à Musil, reflète bien l'esprit du roman) est une analyse à la fois caustique et tragique de notre époque. Grunberg dresse un bilan féroce de nos démocraties viciées par l'apparence trompeuse de la sécurité occidentale, les institutions corrompues des monarchies pétrolières, et les excès de l'architecture moderne - miroir de notre volonté de toute-puissance. Tel un Kafka contemporain, il entraîne son héros, naïf et idéaliste, à travers des tribulations grotesques et cruelles, pour mieux le réduire en cafard d'une dérisoire comédie humaine.

08/2014

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Littérature française

L'arbre transformé

L’arbre transformé, c’est un saule dans le jardin d’enfance du narrateur en banlieue parisienne. C’est aussi l’arbre d’une généalogie qui transparaît dans ce que l’on voit. C’est enfin la forme d’un écrit qui s’invente avec une vie, aux aguets de la permanence et du mouvement. D’est en ouest, des Habsbourg et de la Troisième République au début de notre siècle, un homme explore sa mémoire, se cherche, apprend à prendre la parole en son nom. Il part d’abord en quête du passé de sa mère, Judith, une poétesse hongroise qui vit sa propre mère déportée en 1944 et réchappa elle même de justesse du ghetto de Budapest. Étudiant, le narrateur lit Montaigne et va découvrir la maison natale de son père Max, à Bayonne. D’un paysage à l’autre, il évoque les avatars familiaux de ce dernier, aventureux, énigmatiques voire inquiétants, depuis la fortune coloniale du grand-père André, en Indochine, jusqu’aux trois mariages et aux trois fils de Max. Celui-ci fut architecte dans le Loiret où conduit un troisième voyage, avant que nous descendions le fleuve jusqu’en Vendée. On comprend alors que le jeune homme, bilingue et qui vient lui-même de quitter une épouse hongroise, demeure imprégné d’images sadiennes : Gilles de Retz, Bataille, Kafka.

04/2010

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Philosophie

Esprits d'Europe. Autour de Czeslaw Milosz, Jan Patocka, Istvan Bibo

Pourquoi faisons-nous l'Europe ? À la question de son sens et des valeurs qui la fondent, de nombreux intellectuels d'Europe centrale ont consacré leur œuvre, leur engagement, leur vie même. Le moment est venu de redécouvrir cette extraordinaire communauté d'esprits, dominée par trois figures exemplaires : Czeslaw Milosz (1911-2004), poète et essayiste polonais, prix Nobel de littérature ; Jan Patocka (1907-1977), philosophe tchèque, grand inspirateur de la dissidence, mort assassiné par la police politique ; et le Hongrois Istvan Bibo (1911-1979), l'un des penseurs les plus pénétrants des " hystéries collectives " qui secouent à intervalles réguliers le Vieux Continent. C'est autour de la trajectoire, des idées et du rayonnement de ces trois consciences de notre temps que s'organise cet essai. Au-delà, tout un continent immergé de la culture européenne se révèle à nous, entre affinités électives et influences réciproques : de Kafka à Kertész et de Koestler à Kundera, mais aussi de Musil à Milosz, de Husserl à Patocka ou encore de Hannah Arendt à Istvan Bibo, et de Sandor Marai à Zygmunt Bauman. Instruits par les catastrophes du XXe siècle, ces penseurs rendent à nouveau visibles les fondements éthiques de la civilisation européenne. Pour qu'aujourd'hui, la Réunification ne s'accomplisse pas dans le désenchantement de l'homme et de la démocratie.

03/2005

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Littérature française

Puisqu'il y a des rêves meilleurs

De manière insidieuse et ironique, toutes les nouvelles de ce recueil communiquent une impression d'" inquiétante étrangeté ". Une vingtaine de textes courts - entre nouvelle, conte et fiction critique - donnent la parole à des personnages qui n'en reviennent toujours pas d'être au monde, et dans ce monde-ci. Habitant d'autres contrées, les authentiques héros de fiction n'en finissent jamais, au contraire, de vivre leur histoire, de la poursuivre au-delà de sa fin connue. Les cinq longues nouvelles de la seconde partie donnent la suite inattendue de mythes et de légendes, d'œuvres cinématographiques ou littéraires, ayant pour thème l'enlèvement : Zeus et Ganymède, le joueur de flûte de Hamelin, King Kong et La Planète des singes, Le Roman de la momie, et Miss Waters, un roman de H. G. Wells dont l'héroïne est e sirène. Alliant densité et subtilité, l'écriture de Jean-Luc Moreau frappe autant qu'elle séduit. En s'absorbant dans une réflexion minutieuse sur l'" être ici ", elle s'attache à évoquer un sentiment proche de la difficulté d'être qui peut faire songer à celui de Robert Walser ou d'Henri Thomas, voire de Kafka ou de Beckett. Précis, parfois sarcastique, ce ton très personnel aboutit à un effet à la fois ravageur et feutré, de l'ordre du fantastique intime.

08/1999

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Critique littéraire

Flaubert à la Motte-Picquet

"Un jour, dans le métro, un homme s’assoit à côté de moi et ouvre un carnet sur ses genoux. C’est une liste de lectures, où se mélangent les auteurs dans une succession improbable : Gustave Flaubert côtoie Marc Levy, Franz Kafka jouxte Barbara Cartland. Sous mes yeux, l’homme ajoute un titre : Goethe, Les Souffrances du jeune Werther. C’est le livre que lit la jeune femme sur la banquette opposée. Je comprends soudain : ce qu’il consigne, ce ne sont pas ses lectures personnelles mais celles des usagers du métro. Dès cet instant, comme frappée par une épiphanie, je décide ni plus ni moins de lui piquer son idée et de profiter de tous mes trajets pour essayer de dresser une cartographie de la lecture souterraine. Pendant des mois, j’ai noté les titres, observé les mains qui feuillettent, les corps penchés sur les livres ou les tablettes, pour en tirer un petit recueil d’observations, promenade ludique au pays de la lecture envisagée comme activité underground". Dans ce récit volontiers poétique et souvent drôle, Laure Murat fait l’inventaire de tous les livres qui se trouvent à portée de ses yeux dans le métro. Un livre pour tous les lecteurs… qui ne peuvent s’empêcher de regarder par-dessus l’épaule de leur voisin de strapontin.

09/2015

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Histoire ancienne

La tour de Babylone. Que reste-t-il de la Mésopotamie ?

Si l'on en croit Franz Kafka, il ne subsisterait de l'antique Mésopotamie qu'une fosse, une empreinte négative, autrement dit rien ! Elle a existé, cependant, et elle existe toujours. D'aucuns l'ont rencontrée. Boris Vian en parle avec enthousiasme, dans L'Automne à Pékin, même s'il lui préfère un autre nom, celui d'Exopotamie. L'autobus 975 y conduit. On y mange des sauterelles. On y fait des fouilles archéologiques. On y construit une ligne de chemin de fer. On y fait l'amour. Ce livre se veut un voyage à travers le temps et l'espace, la Mésopotamie en bandoulière. Il donne à voir l'image que s'en sont faite les hommes de lettres, les artistes et les érudits, mais aussi le public, en Occident et en Orient, depuis l'Antiquité jusqu'à nos jours. Avec la redécouverte scientifique de la Mésopotamie, son écriture cunéiforme et son architecture de terre, par les archéologues et les épigraphistes, au cours du XIXe siècle, cette image subit une profonde modification. Au passage, le mythe biblique de la tour de Babel, tout particulièrement, est revisité. Où l'on voit que la Mésopotamie accompagne le XXe siècle dans ses errances. Si elle n'offre pas de recettes pour résoudre : les problèmes du monde contemporain, elle apprend toutefois à envisager autrement le rapport entre soi et le monde.

10/2003

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Critique littéraire

Voyages imaginaires

L'écrivain Alberto Manguel montre dans ce recueil de récits de voyages la part essentielle que l'imagination a toujours occupée dans la découverte du monde. Depuis l'origine, les hommes ont éprouvé le besoin de s'inventer des royaumes et des terres lointaines qui n'existent pas encore dans la réalité. L'Iliade et l'Odyssée, avant Robinson Crusoe, en sont de merveilleux exemples. " Beaucoup des premiers voyages sont des quêtes de l'impossible ", souligne-t-il. Tout périple est une quête à la fois magique et spirituelle. Dans sa préface, Manguel restitue au voyage sa dimension d'utopie en évoquant Thomas More et en citant Stevenson : " Mieux vaut voyager avec espoir qu'arriver à destination. " Contrairement à la géographie des encyclopédies et des atlas, la géographie imaginaire n'a pas de frontières. Ses lieux existent dans un espace illimité et occupent un paysage dont l'abondance est infinie - les rives d'Utopies, le pays des Merveilles, l'Eldorado, le pays d'Oz, l'île de Peter Pan, les enfers et le paradis de Dante, l'Odyssée d'Ulysse, les voyages de Gulliver, l'île de Robinson, le château de Kafka... Alberto Manguel a choisi parmi d'innombrables textes six oeuvres originales et méconnues, dont celles d'auteurs canadien, américain et hongrois. L'une d'elle, Herland de Charlotte Perkins Gilman, est ici traduit pour la première fois en français.

05/2016

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Théâtre

Emma est moi. La sagesse d'une clown

Meriem Menant est une comédienne qui a créé, depuis une vingtaine d'années, son personnage, son double, Emma la clown, et qui se produit, en "one woman show" (ou avec Catherine Dolto) sur de multiples scènes. Dans ce livre témoignage, elle raconte son parcours d'artiste, la vie, l'amour, la création, le rire... Elle l'a écrit sous forme de dialogue entre Emma la Clown et elle-même. Parce que "Emma parle plus facilement que moi, dit-elle, il est donc normal qu'elle écrive une grande partie du texte." Emma est une clown métaphysique qui fait rire sur des sujets graves. Une clown poète qui a fait sienne cette définition de Kafka pour qui l'oeuvre est "la hache qui fend la mer gelée en nous." A travers ce texte-dialogue singulier et très drôle, le lecteur perçoit ce qu'est cette forme de création artistique où l'auteur ne peut être dissocié de son personnage. Meriem Menant raconte sa formation, ses expériences existentielles, comme la première fois qu'elle a fait rire et qu'elle s'est sentie vivre, les secrets de famille découverts, tout ce qui nourrit sa création. Le récit drôle et profondément original d'une expérience de vie infiniment touchante parce qu'elle révèle une personnalité désarmée, vulnérable, comme tous les clowns, mais courageuse, et même irréductible.

09/2015

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Littérature étrangère

La panthère et autres contes

Pitol a dit avoir écrit ses premières histoires dans un chalet. Il s'y remettait d'une rupture. Il se proposait d'haïr le monde, mais ne le pouvait pas. Dans la matinée, il est monté sur une crête pour s'entourer d'une romantique, décadente et quasi diabolique athmosphère. A la recherche des falaises abruptes, il lui est venu à l'esprit les falaises de Devon, souvenir d'un voyage en Angleterre, et entre ce désir de voyager et de contempler un magnifique paysage il a somnolé sur l'herbe ; il est rentré à la maison jubilant d'aller lire James, Kafka, Faulkner, Borges, Rulfo. Une nuit il a écrit une première histoire, "Victorio Ferri raconte une histoire", puis d'autres, amer et cruel, sur les caractères hantés par le diable. Il a alors tourné autour de la réalité de ses personnages, plus vive et plus attractive que la vérité. Tout y est comme à l'envers du décors et il a été dit de lui qu'il "tord" la réalité. Sont présentes dans ce recueil des nouvelles écrites depuis cinquante ans et sélectionnées par Pitol lui-même pour en faire une anthologie. Pitol est un écrivain essentiel, nous sommes heureux de présenter cette anthologie personnelle de ses meilleures histoires, ces nouvelles sont postfacés par un long texte d'Enrique Vila-Matas.

02/2017

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Tchéquie, Slovaquie, Prague

Prague. Edition 2023-2024

Nouvelle mise à jour du Routard, le guide de voyage n°1 en France ! André Breton disait de Prague qu'elle était "la capitale magique de l'Europe" . Découvrez cette ville éminemment romantique, imprégnez-vous de son incomparable patrimoine architectural et artistique en déambulant dans son centre-ville, classé à l'Unesco. Dans Le Routard Prague, mis à jour par nos spécialistes, vous trouverez : - une première partie en couleurs pour découvrir la ville à l'aide de photos et de cartes illustrant les coups de coeur de nos auteurs ; - des itinéraires thématiques et géographiques, avec toutes les infos et astuces dont vous avez besoin pour réussir et profiter pleinement de votre séjour ; - des activités (assister à un concert de musique classique, faire la tournée des clubs, marcher sur les pas de Kafka...) des visites (la Maison municipale, le pont Charles, la colline du château royal...), à partager en famille, entre amis ou en solo ; - plus de 10 cartes et un plan détachable de la ville avec toutes les bonnes adresses du Routard positionnées ; - et, bien sûr, le meilleur de la destination et des pas de côté pour découvrir Prague hors des sentiers battus... Merci à tous les Routards qui sont solidaires de nos convictions depuis bientôt 50 ans : liberté et indépendance d'esprit ; découverte et partage ; sincérité, tolérance et respect des autres.

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Poésie

Dans la mêlée des étoiles

Dans cette collection, les recueils ont la particularité d'être tous suivis d'un entretien en fin d'ouvrage entre l'auteur(e) et Thierry Renard, directeur de la collection. Dans la mêlée des étoiles est un poème autobiographique revenant sur la relation de Claude Gobet avec son père disparu. Claude Gobet nous livre à travers les pages de Dans la mêlée des étoiles un poème qu'on pourrait qualifier d'autobiographique. L'auteur tente de comprendre l'origine de ses blessures à l'âme et revient sur le souvenir amer d'un père renfermé, tyrannique et rabaissant. Au fil des pages, l'auteur rend également hommage aux êtres chers qui ont su le protéger et lui apporter l'amour qui lui manquait. Si la colère de l'auteur contre son père est manifeste, sa volonté de comprendre la psychologie et ses efforts d'introspection laissent entrevoir l'amour et la tendresse qu'il lui conserve. Les noms d'Alice Miller, Whitman, Camus, Pagnol, Kafka, et d'autres, sont autant de figures qui viennent accompagner Claude Gobet dans sa démarche cathartique. Par une écriture en vers libres et un style volontairement tranchant et minimaliste, Claude Gobet revient sur un passé douloureux. Les phrases en italiques viennent scander la fin de certaines strophes comme des morales, des prophéties ou des respirations ouvrant à la réflexion.

03/2023

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Genres et mouvements

Désappartenir - Psychologie de la création littéraire

Comment les données marquantes d'une enfance particulière non seulement déclenchent une vocation littéraire, mais aussi influencent la forme sous laquelle elle se manifestera ? Entre enquête littéraire et autobiographie, Sophie Képès traque les sources cachées de l'écriture de Kafka, Pierre Michon, Virginia Woolf, Joyce Carol Oates, Tolstoï, Tchekhov, Danilo Kis, en fouillant dans les secrets des prémisses de leur vie. Ce faisant, elle dévoile sa propre trajectoire marquée par une mère atteinte du syndrome de Münchhausen et révèle comment l'écriture, et plus largement la littérature, peut devenir, pour chacun d'entre nous, un bastion. Cet ouvrage part du constat que la plupart des critiques littéraires ne se sont que très peu attardés sur les événements traumatisants survenus dans l'enfance des écrivains. Et pourtant, en se penchant sur l'itinéraire de quelques auteurs phares qui semblent n'avoir rien en commun, des lignes de force apparaissent, des liens entre les souffrances de l'enfance et le processus de création littéraire émergent de façon évidente. Sophie Képès écrit sous son nom et sous le pseudonyme de Nila Kazar. Lauréate de plusieurs résidences nationales et internationales, elle publie romans, nouvelles, documents, articles, traductions du hongrois, et collabore à des films de fiction et des documentaires. Elle enseigne la création littéraire et le scénario à l'université. Illustration de couverture : Ermite dans un paysage, Musée Sainte-Croix, Poitiers

10/2023

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Critique

L'art de la faim suivi de Conversations avec Paul Auster

On connaissait Paul Auster romancier et poète. On découvrira l'essayiste avec l'Art de la faim, un recueil qui nous donne, au fil de réflexions et d'essais sur l'œuvre des autres, les clefs pour mieux entrer dans son œuvre à lui. Car, quand il parle de Hamsun, de Kafka ou de Beckett, de Jabès ou de Perec, de Celan ou d'Ungaretti, de Dupin ou du Bouchet, Paul Auster ne nous fait pas seulement revisiter des domaines qui nous sont plus ou moins familiers, il nous fait d'abord entrevoir comment aller vers les choses par l'écriture, et du même coup nous éclaire sur sa sensibilité de créateur. La démarche vaut aussi pour des textes consacrés à des écrivains moins connus de ce côté de l'Atlantique. De telle sorte qu'au désir de découvrir ces œuvres nouvelles pour nous s'ajoute le plaisir d'une reconnaissance complémentaire dans l'univers austérien. On notera encore que des interviews particulièrement étoffées, auxquelles s'est prêté Paul Auster, apportent un témoignage révélateur sur les démarches romanesques d'un écrivain aujourd'hui universellement reconnu. Et notamment sur la genèse de ses derniers romans, Moon Palace et la Musique du hasard, qui ont soulevé, en France comme aux États-Unis, l'intérêt que l'on sait.

01/1992

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Actualité médiatique France

Le prix de nos larmes. Le roman noir des millions versés aux victimes du terrorisme

Combien vaut une vie détruite par le terrorisme en France ? Dans un document inédit et bouleversant, le journaliste Mathieu Delahousse dévoile les dessous de l'indemnisation des victimes d'attentats terroristes. Depuis 2015, 225 millions d'euros ont été versés à 6 324 personnes frappées par des attentats sur le sol français. Les enveloppes accordées suivent des cheminements méconnus et soulèvent des tabous douloureux. Combien pour la perte d'un proche ? Combien pour des crises d'angoisse et des nuits pleines de cauchemars ? Ou pour un traumatisme qui empêche de reprendre le travail ? Durant deux ans, Mathieu Delahousse a exploré la façon dont se jaugent les vies brisées par les attentats. Seul à suivre, pour la première fois, les audiences du nouveau " juge de l'indemnisation des victimes d'attentats terroristes " et en recueillant la parole de dizaines de rescapés, il nous fait découvrir le roman noir de ces procédures toujours insatisfaisantes. Des comptes d'apothicaires engendrent des malaises infinis. Des malentendus terribles s'exacerbent. Des courages insoupçonnés s'éveillent, tandis que des profiteurs n'hésitent plus à se glisser parmi les réelles victimes... Heureusement que des juges, figures rassurantes de Marianne trop longtemps absentes auprès des endeuillés, viennent remettre un peu d'ordre dans des procédures qui semblent inspirées à la fois de Kafka et de Courteline.

05/2022

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Critique

La poétique de l’horreur dans l’œuvre romanesque de Jean-Pierre Martinet. 1970-1980

A la différence de la peur des récits fantastiques, qui est liée à des phénomènes surnaturels et à l'idée de l'étrange, la peur "martinetienne" peut être rattachée à un malaise existentiel, et à une question de conscience de la fragilité des systèmes régissant la vie de l'homme moderne. On peut ainsi rapprocher l'oeuvre de Martinet de celle de Kafka, en rupture avec le monde fantastique. Humains, les personnages souffrent pourtant d'un manque d'altruisme engendré par leur environnement existentiel qui suscite l'impression horrifique. Cette angoisse est permanente chez tous les protagonistes. Il ne s'agit pas d'une mélancolie passagère, mais bien d'un profond désespoir exprimé à travers l'humour noir. Ainsi, la narration, espace de tension extrême, devient une marge fictionnelle, où se jouent, burlesquement, des destins tragiques. Et la tension narrative, jamais relâchée, explique les tendances meurtrières chez le sujet, de même que son désir de mort, ou de suicide. L'écriture fébrile de Martinet n'atteint jamais son acmé et perdure, hantant durablement le lecteur. Enfin, l'alternance entre plusieurs voix, par le biais d'un "je" à tendance schizophrène, apporte une dimension intrigante aux récits de l'auteur. Et le rêve de J. -P. Martinet d'écrire un bon polar ou un scénario pour le cinéma apparaît, en filigrane, à travers ses textes, avec des perspectives du genre policier parodié.

04/2024

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Tchéquie, Slovaquie, Prague

Prague et ses environs. Edition 2024-2025. Avec 1 Plan détachable

Nouvelle mise à jour du Routard, le guide de voyage n°1 en France ! André Breton disait de Prague qu'elle était " la capitale magique de l'Europe " . Découvrez cette ville éminemment romantique, imprégnez-vous de son incomparable patrimoine architectural et artistique en déambulant dans son centre-ville, classé à l'Unesco. Dans Le Routard Prague, mis à jour par nos spécialistes, vous trouverez : - une première partie en couleurs pour découvrir la ville à l'aide de photos et de cartes illustrant les coups de coeur de nos auteurs ; - des itinéraires thématiques et géographiques, avec toutes les infos et astuces dont vous avez besoin pour réussir et profiter pleinement de votre séjour ; - des activités (assister à un concert de musique classique, faire la tournée des clubs, marcher sur les pas de Kafka...) des visites (la Maison municipale, le pont Charles, la colline du château royal...), à partager en famille, entre amis ou en solo ; - plus de 10 cartes et un plan détachable de la ville avec toutes les bonnes adresses du Routard positionnées ; - et, bien sûr, le meilleur de la destination et des pas de côté pour découvrir Prague hors des sentiers battus... Merci à tous les Routards qui sont solidaires de nos convictions depuis 50 ans : liberté et indépendance d'esprit ; découverte et partage ; sincérité, tolérance et respect des autres.

02/2024

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Littérature hébraïque

Pipelines

"Les histoires les plus courtes sont souvent les meilleures". Le Figaro Un étrange nain russe surgit de la tête d'un agent du Mossad. Un écrivain amer décide de supprimer ses rivaux. Un passant apprend au détour d'une rue que tous les bus sont morts... Paru en 1992, Pipelines signait l'entrée fracassante sur la scène littéraire israélienne d'Etgar Keret. Entre le surréalisme de Kakfa et la fantaisie de Lewis Caroll, ce recueil inaugure l'esthétique tragi-comique de la brièveté qui deviendra sa marque de fabrique et bouleversera les codes de la littérature contemporaine. Romancier, auteur de bandes dessinées et cinéaste, Etgar Keret est considéré comme l'écrivain israélien le plus insolent et le plus salutaire de sa génération. Son oeuvre est aujourd'hui traduite dans plus de vingt-cinq langues. Traduit de l'hébreu par Rosie Pinhas-Delpuech

10/2023

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Littérature française

Tu n'écriras point

" Mademoiselle Albertine est partie ! " Juin 1986 : dix ans après le départ de son " Albertine ", le narrateur de ce livre revient sur les lieux de la disparition. Il retrouve son Midi, son village des Corbières, et sa maison familiale, comme si rien - ou presque - n'avait changé... lorsque s'annonce le retour de la Fugitive. Doit-il l'attendre ? Doit-il, à son tour, la fuir ? Il consulte les vieux livres de chevet (Proust bien sûr, qui semble l'inviter à retrouver le temps, mais aussi la comtesse de Ségur), ces livres que sans doute il n'a pas su lire, puisqu'il découvre (un peu tard...) qu'ils auraient pu lui servir de conseillers, de guides, voire d'oracles ; et il interroge des images : sept cartes postales oubliées, représentant le village d'autrefois, qu'il recompose comme les morceaux d'un impossible puzzle, dans l'espoir qu'elles lui racontent à nouveau une histoire qu'il n'a toujours pas comprise. Ce voyage dans le temps le replonge au milieu des années soixante-dix : l'époque où Bayreuth célébrait son centenaire, et où les metteurs en scène revisitaient - magnifiquement, et sarcastiquement - les œuvres du passé. L'époque où régnaient le " second degré ", l'esprit critique, l'ironie - celle d'une génération stérilisée à la fois par sa culture et son ironie. Au radical défi de Kafka, " Dieu ne veut pas que j'écrive, mais je sais que je dois écrire ", comment répondre aujourd'hui ?

08/2003

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Littérature étrangère

Le temple étrusque

Les conseillers municipaux d'une petite ville d'Italie dénuée de toute attraction touristique décident d'y faire élever un petit temple étrusque. Personne cependant ne sait à quoi peut ressembler un temple étrusque, et l'indispensable main-d'oeuvre étrusque fait manifestement défaut. Pressés de suivre les habitants de la ville que la canicule chasse, qui vers la mer et qui vers la montagne, les conseillers désigneront comme maître d'oeuvre un jeune postier venu réparer le téléphone, Atanassim, qui les convainc sans peine qu'Oscar, Astor et Ménius, trois nègres campant dans les bois proches, pourraient faire de très présentables Étrusques. Les travaux commencent dans la ville désertée. Atanassim multiplie sur le papier tous les dessins imaginables du futur monument, le trou s'approfondit, devient cratère, et, d'écroulement en écroulement, la ville est bientôt entièrement détruite... Composé de dix-huit rapides chapitres au centre desquels prend place une majestueuse paraphrase de l'Épopée de Gilgamesh, ce roman de Wilcock n'est rien de moins, sous la forme d'une sotie froidement délirante, qu'une tentative de mythologie de certains traits du monde actuel. On a souvent nommé Swift, Kafka ou Borges à propos de l'auteur. La démesure humoristique de ce dernier livre en même temps que la précision extrême d'un style narratif où le moindre détail surprend par son insolite justesse font également penser, cette fois, à Jarry aussi bien qu'à Raymond Roussel.

04/1985

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Littérature française

Il n'y a pas d'Indochine

Paru en 1995 aux Belles Lettres, Il n'y a pas d'Indochine est composé de 25 histoires dont chacune se passe dans un lieu particulier. New York, Le Caire, Athènes, Londres, Lille, Strasbourg... Sous la conduite du narrateur, nous faisons ce que l'on pourrait appeler des visites d'idées. La postérité, le génie, l'idéalisme, les prétendus grands hommes, l'apparition du marbre blanc dans la sculpture grecque, les chansons de variété, les aquariums, tout cela surgit à Tunis, dans les jardins de la Fontaine à Nîmes ou en buvant un café à Vienne. Il n'y a pas d'Indochine est le livre d'un Charles Dantzig méconnu, celui d'avant son Dictionnaire égoïste, d'avant son Encyclopédie capricieuse. Pourtant, c'est déjà lui : les compagnons de voyages sont les créateurs, écrivains (Proust, Kafka, Pasolini, Wilde), cinéastes ou peintres (Coppola, Klimt, Van Gogh). On trouvera ses premières listes (comme la liste de la parade en l'honneur de Nelson Mandela à New York), ses fictions mêlées à l'essai (comme dans le chapitre où le narrateur se transforme en Arc de Triomphe et décrit Paris arrondissement par arrondissement), son style alerte, ses aphorismes et sa désormais célèbre irrévérence. Il n'y a pas d'Indochine, cela veut dire : il n'y a pas d'exotisme. Comme l'écrit Charles Dantzig : "Arrivé en Chine, on cherche encore l'Asie. On a trouvé des hommes".

10/2013

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Littérature étrangère

Moscou-sur-vodka

Soliloque d'un pochard lyrique dans le train de banlieue qui l'emmène pour le week-end chez sa bien-aimée, récit canularesque d'une soûlerie colossale - si colossale que le voyageur se retrouve finalement à son point de départ... -, ce roman paraît tout à fait singulier dans une littérature soviétique qui s'est toujours voulue littérature sérieuse, traitant de problèmes sérieux. Ici, rien n'échappe à la dérision. Ni les gloires consacrées, ni les dogmes de l'histoire officielle, ni les clichés du marxisme-léninisme. Non plus que d'autres idées reçues, comme les valeurs religieuses, la sollicitude envers le moujik ou la sanctification de la Russie. L'irrespect étant le propre de l'ivrogne, celui-ci s'abandonne à la joie sacrilège de secouer tous les cocotiers. Pourtant, en appelant "poème tragique" cette gigantesque farce qui, en effet, finit mal, Vénédict Erofeiev nous invite à ne pas en négliger la substantifique moelle. Le rire où nous entraîne ce crescendo de fantasmes se révèle, au bout du compte, dérision lui aussi. Car il n'exprime rien d'autre que le désespoir absolu auquel un univers clos réduit quiconque tente de s'en évader. Alliant la démesure de Rabelais, l'acuité de Gogol, la cruauté pathétique de Kafka, Moscou-sur-Vodka est l'oeuvre clandestine d'un auteur resté mystérieux jusqu'à sa mort en 1990. Sa parution aux Editions Albin Michel en 1976 fut un véritable événement.

01/1976

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Essais

La topologie psychanalytique en question

On trouvera dans les dix textes du présent volume, leur pré-face, préliminaires, et le texte de Bentham qui leur est une sorte de postface, l'exposition de tout un jeu de retournements de surfaces sur elles-mêmes, de coupes et de coupures, de variations, de passages à l'infini, mais aussi de suturations, de coutures, dont la psychanalyse s'est servie ces sept ou huit dernières décennies dans sa pratique et ses explications. Elle n'en est pas encore le classement si jamais il sera possible un jour ; mais si cette présentation est encore très loin d'en systématiser les formes, elle est aussi désormais très loin de se contenter de la métaphore de l'enfilade des pièces - salon / antichambre / chambre - dont Freud avait usé dans son Introduction à la psychanalyse pour figurer l'inconscient dans son rapport avec la conscience et le préconscient. Les "techniques" que nous venons de citer se sont considérablement enrichies, en un demi-siècle, en s'inspirant délibéré-ment du travail que les mathématiciens ont effectué, sous le nom de topologie, en analysis situs, en algèbre et en probabilité. Ce qui ne signifie nullement, comme on le verra avec Kafka, Mi-chaux, Quignard, mais aussi dans Grothendieck, un abandon de la littérature, dont les scènes qui, pour exprimer le rapport au corps, l'anorexie, l'obsession, sont aussi, à leur façon, des coupes, des coupures et retournements, ne sont pas sans devoir à la pensée rigoureuse des mathématiciens.

03/2023