Edmund Leach

Beach Stars tomes 1 et 2 de Masahiro Morio est un manga sur le beach volley. Alors bien sûr on s'attend à se trouver face à un Jeanne et Serge bis ou a ce que ça ressemble à tout autre manga sur le sport. Et ça n'est pas vraiment le cas.

Iruka Nanasé Est une jeune lycéenne qui fête ses 17 ans. Sa plus grande passion est le volley-ball. Son rêve est de grandir un peu parce que quand on fait 1m50 à 17 ans c'est quand même un peu difficile d'être prise au sérieux surtout en tant que joueuse de volley. Mais voilà que le jour même de son anniversaire Iruka constate avec horreur que le club de volley de son lycée a été fermé faute de membres. La jeune lycéenne est en pleine déprime.Quelques jours plus tard, ses amis et anciennes coéquipières la traîne à Odaiba pour aller faire un peu de shopping et se détendre sur la plage. Là, Iruka aperçoit des filets de volley-ball plantés dans le sable et des gens qui jouent au beach volley.

Ne résistant pas à l'appel du ballon, elle fil sur la plage pour essayer de prendre possession d'un terrain. Ce faisant, elle va croiser la route de Sanaé Hayakawa, une joueuse de beach volley pressentie pour représenter le Japon dans cette discipline aux Jeux Olympiques de Londres en 2012. Sanaé traite Iruka de naine et lui fait comprendre que vu sa taille, elle n'a aucun espoir dans le Volley (ou le beach volley). Iruka lui propose un match pour lui montrer de quel bois elle se chauffe. Mais le beach volley se n'est pas la même chose que le volley-ball, le match tourne donc très vite à l'avantage de Sanaé, cependant Iruka montre de très bonnes aptitudes pour cette discipline qu'elle ne connaît pas. À la fin du match, elle a pris sa décision, elle va se mettre au beach volley.

Un titre addictif qui sent bon l'été

Attention Beach Stars est un titre très addictif. Dès que l'on en commence la lecture, il est très difficile de s'arrêter, et nous, à la rédaction, nous avons dévoré les deux tomes d'un coup. Il faut dire que le personnage d'Iruka est très attachant, son côté gaffeuse mais très déterminée fait d'elle un personnage que l'on a envie de suivre. Un peu à l'image d'ailleurs de son effet sur les autres personnages du manga. De ce point de vue là Masahiro Morio a fait un excellent travail. De manière générale, tous les personnages sont bien travaillés et paraissent crédibles, même les plus loufoques.

L'histoire en elle-même contient tous les codes du genre et fonctionne à merveille. On a une héroïne douée mais handicapée par sa taille. Elle compense cela par une grande détermination et une formidable énergie. L'auteur a quand même le bon goût de nous épargner la romance un peu fleur bleue du genre Jeanne et Serge. Bon, par contre on ne va pas vous mentir, comme dans nombre de manga sur le sport, les personnages ont des coups spéciaux complètement incroyables et des aptitudes qui dépassent un peu l'entendement. Mais après tout, doit-on réellement s'en plaindre ? Ça rajoute un peu de piments et ça laisse rêveur. D'un autre côté, l'humour qui est très présent vient contrebalancer le tout avec un peu d'autodérision. Et quelque part certains coups spéciaux semblent plausibles, étant donné, par exemple, l'importance du vent dans ce sport.

Beach volley et fan service

Au niveau du dessin, c'est là aussi une belle réussite. Bon les décors et les arrières-plan ne sont pas légions et ne fourmillent pas vraiment de détails, mais le mangaka réussit à faire ressortir de ses planches une ambiance estivale. Le charac-design est un des points forts. On notera au passage une très forte proportion de fan service, cela dit comment pourrait-il en être autrement avec un manga sur le beach volley ? Enfin, le mangaka en rajoute quand même un peu pour le plaisir. Les matchs quant à eux, sont très bien rendus. L'action est claire, dynamique et bien détaillée. La lisibilité des parties est vraiment un autre des points forts de ce titre.

Beach Stars tomes 1 et 2 de Masahiro Morio, nous a vraiment enthousiasmé. L'histoire est passionnante, les personnages bien bâtis, l'humour est décapant et les dessins très efficaces. Les matchs sont des temps forts où se mêlent suspens et grand spectacle, le tout avec beaucoup de dynamisme et de clarté. Enfin, il se dégage vraiment quelque chose de ce titre. Pour peu on se croirait à la plage. Pour nous, c'est le manga de l'été. Et puis ben l'hiver, ça nous rappellera notre bel été. Bref, c'est léger, c'est addictif, c'est que du bonheur.

Beach Stars tomes 1 et 2 de Masahiro Morio est édité par Kurokawa. Les deux tomes comptent 224 pages et on pourra se les procurer pour 6,90 €. Le tome 3 devrait sortir le 27 août.

Dans la série , deux nouveaux titres paraissent et vont permettre au jeune lecteur dès 4 ans de retrouver l'ambiance tendre et très colorée de l'illustrateur Marc Boutavant.

Par un matin ensoleillé mais venteux, l'ours Edouard convainc son ami Edmond l'écureuil d'aller passer une journée à la plage. Au fur et à mesure de la promenade qui doit les mener vers la mer, le temps se montre de plus en plus incertain mais ne décourage pourtant pas Edouard, même lorsque la pluie s'en mêle et menace le pique-nique organisé par Edmond.

Si les contrariétés agitent la journée, elles ne parviennent pas à inquiéter l'amitié qui lie les deux compères mais fortifient et renforcent, bien au contraire, les sentiments d'attachement et de tendresse et livrent alors une jolie histoire, sensible et subtile qu'une écriture poétique et délicate intensifie juste comme il faut.

Les illustrations aux coloris variés et nuancés, empreintes de douceur, jamais sombres ni réellement tristes,  sans excès, expriment  parfaitement la complicité entre les deux personnages, tout l'équilibre de la relation qui les rend si nécessaires l'un à l'autre.

Cette absence de rivalité, le dessin la saisit avec une justesse précise et touchante. Le lecteur ressent immédiatement et au fil des pages le sentiment d'amitié qui crée l'harmonie et le bonheur. Il est confortablement installé dans une histoire où il se sent bien, la savoure comme une gourmandise. Ses parents aussi, assurément.

Aussi, pour prolonger le plaisir, l’album La Chose, des mêmes auteurs et issu de la même série, en publication simultanée.

Voyage d’un autre genre au plus près de la nature, Carnet de voyage auprès de mon arbre est une invitation à prendre le temps d’ouvrir les yeux et à faire silence face à l’infiniment beau de la nature invisible.

Sur la terre comme au ciel, d’animaux en insectes les rencontres rythmes les observations de ce Christophe Colomb du quotidien.

Edmond de Garenne propose ici le cahier naturaliste d’un lapin à la découverte de la vaste forêt dont il est résident. Photo, dessins, croquis et notes d’observation sont autant d’anecdotes que nous partage ce petit mammifère curieux sur la vie secrète des animaux.

Une trouvaille douce et poétique à partager au plus vite.

Comment ça va vous ne connaissez pas Michel ??? Ça tombe bien, ce début d'année nous régale avec la sortie du nouvel album de la série, "La bataille des Dombarelles" et le recueil des trois premiers tomes, Tête de cortège ! 

Avec Michel, Pierre Maurel met en scène un personnage attachant, engagé et authentique. Journaliste radio présent sur tous les fronts, il mène l'enquête et dénonce les injustices sociales au cœur de nos villes et jusque dans nos campagnes. 

L'auteur développe des récits sous forme d'enquête d'investigation (Michel serait-il la Élise Lucet de la bande dessinée ?) particulièrement bien ficelées, mêlant humour et critique sociale se concluant toujours de manière inattendue mais très ingénieuse. On retrouve l'engagement de Lupano avec ses Vieux fourneaux, l'humanité de Ken Loach et la légèreté de Bruno Heitz. 

Une des grandes richesses de l'écriture de Pierre Maurel est de toujours revenir à l'humain : la trame principale n'est pas toujours celle qu'on pense, et les grands enjeux politiques soulevés ne passent jamais avant les vicissitudes des différents acteurs de cette série dont on se prend vite d'affection. 

Et que dire du dessin de Pierre Maurel, virtuose sans en mettre plein la vue, vivant, précis, habité par un plaisir de faire qui participe pleinement à l'atmosphère de gaieté qui se dégage de ces albums. 

Impossible de choisir un album préféré, alors autant tous les lire ! 

Signalons au passage le soin apporté par L'employé du moi à l'édition des titres, proposant des livres soignés sans être trop luxueux, à peine moins larges que le format traditionnel, fine délicatesse qui se fait le reflet de ces belles histoires. 

Dans le tome un de (Dupuis), l'héroïne - une anti héroïne plutôt, car elle n'est guère flamboyante et n'affronte pas des situations extraordinaires - me fait irrésistiblement penser aux protagonistes des films de Mike Leigh. À l'instar de son confrère Ken Loach, le cinéma de Mike Leigh regorge de personnages tout sauf glamours, cabossés par la vie et plongés dans les ennuis jusqu'au cou. 

La Chronique BD, avec 

Sans doute pénibles à côtoyer au jour le jour, ils se révèlent profondément attachants dans leur volonté farouche de s'en sortir, avec de l'humour (on est en Angleterre) et quelques pintes (on est en Angleterre) pour se donner du courage. Lewis Trondheim au scénario et Stéphane Oiry au dessin nous proposent donc de suivre Maggy, une jeune femme un peu enrobée, accro à la bière autant qu'à la cigarette, et chômeuse depuis deux ans. 

Trois jours avant Noël, Maggy est aux anges, car sa voisine de palier vient de lui trouver un emploi chez un détective privé. Mais une fois franchie la porte de l'agence dudit privé, elle déchante : le bureau est minable, et le maître des lieux, Anthony Wight, est en train de cuver son whisky. 

Décrochant le téléphone à sa place, elle prend un message farci d'insultes et lardé de menaces. Puis elle reçoit la dame d'à côté qui veut savoir si l'enquête menée pour retrouver son canari avance un peu. Bref, elle prend des initiatives pour se rendre indispensable à son patron, quitte à magouiller pour tirer sa propre épingle du jeu. Ainsi, elle se rend dans une animalerie pour acheter un canari - quoi de plus semblable à un canari qu'un autre canari ? - et toucher la récompense en prétendant avoir retrouvé celui de la vieille dame. 

Pourtant, dès le lendemain, la voilà au chômage technique : Wight est à l'hôpital après un sévère tabassage par des inconnus, que Maggy imagine être les auteurs du coup de fil vindicatif de la veille. Fouillant dans le portefeuille du détective, elle y trouve des tickets pour une salle de jeu. Sous leur apparente banalité, voilà sans doute ce que recherchent les mystérieux agresseurs : ces petits bouts de papier auraient-ils une valeur cachée ?... 

Maggy Garrisson, sur

BDfugue.com

Et Maggy Garrisson est-il bien un polar ? Tous les codes sont respectés, les éléments constitutifs de ce genre sont bien présents, mais agencés par Lewis Trondheim, maître de l'ironie grinçante, et cela change tout. Un détective privé, des hommes de main, un patron de bar, une femme-flic... Autant de personnages que rencontre Maggy au fil d'un parcours souvent chaotique et toujours surprenant. Grande gueule, lucide vis-à-vis d'elle-même et des autres, terriblement fûtée, cette femme veut qu'on l'accepte telle qu'elle est. 

Malheureusement, son besoin d'être aimé n'est jamais payé de retour, ce qui entretient chez elle une forte tendance à l'auto-dépréciation.

Cette ambiance cafardeuse n'est pourtant jamais pesante, grâce à l'humour qui est constant : il faut voir comment Maggy se débarrasse des malfrats qui veulent récupérer les fameux tickets, en menaçant de tout casser, à commencer par elle. Affectant l'indifférence et maniant le sarcasme avec brio, elle les désarçonne complètement ! Autre scène d'anthologie, l'investigation qu'elle mène dans un bar auprès de clients mâles, avec une méthode... bien particulière !!! 

Maggy Garrisson nous promène de Londres à Brighton d'une façon très réaliste grâce au dessin puissamment évocateur de Stéphane Oiry (mention spéciale à l'encrage), et sans temps morts du fait des savoureux dialogues de Lewis Trondheim. Have a nice trip !

Parfois, je range ma bibliothèque... et je retrouve un album dédicacé il y a bien longtemps ! Octobre 1992, festival BD de Chambéry. L'invité d'honneur se nomme Enki Bilal, et le lieu qui abrite expositions et dessinateurs est bien au diapason de son univers : c'est un sous-sol !!! Je me promène avec mes albums sous le bras, et je profite de ce que Riff Reb's n'est pas très occupé pour lui faire dédicacer le dernier

Occupé, il l'est si peu qu'il discute avec son voisin et dessine un personnage qui n'a rien à voir avec l'histoire ! Pas grave, il lui rajoute une bulle où il dit : "Qu'est-ce que je fous là ?" Excellent !!! Malgré tout, celui que je ne veux rater à aucun prix, c'est Marc-Antoine Mathieu, dont le deuxième volume des aventures de Julius Corentin Acquefaques, prisonnier des rêves (Delcourt) vient de sortir. Je peux parler tranquillement avec lui, il est peu connu à l'époque : on est encore loin de 3 secondes (Delcourt), évènement médiatique en 2011.

T.1 L'origine

Je découvre un homme sympathique et cultivé, au profil atypique dans le monde de la bande dessinée, car il est également scénographe, et je lui confie ma passion pour ses livres qui respirent l'intelligence et la drôlerie. Acquefacques, c'est - au sens propre et phonétique du terme - Kafka à l'envers : le même univers bureaucratique et absurde, mais sous un angle rigolo. Ledit Julius Corentin est donc fonctionnaire au ministère de l'humour (sic), chargé d'évaluer le potentiel comique de nouvelles histoires supposées drôles.

Il habite dans un minuscullissime appartement et crise du logement oblige, n'a pas d'autre choix que d'être célibataire. "Une femme, c'est trois unités d'espace vital en moins", comme le lui rappelle son voisin de palier (stricto sensu : il vit sur le palier !) Dans L'origine, premier album de la série, il reçoit sous pli et à intervalle régulier une planche de BD racontant ce qu'il est en train de vivre. Fortement perturbé, il demande conseil à ses amis Edmond et Sigismond Dalenvert qui eux, habitent un gigantesque appartement. Avec une contrepartie : c'est en fait une cage d'ascenseur dont il faut laisser passer la cabine 50 à 60 fois par jour en démontant le plancher à toute vitesse.

T.3 Le processus

Mais la vérité est ailleurs, dans un univers parallèle tridimensionnel dont une "anti-case" nous donne un aperçu !!! Une case de l'album est évidée, ce qui amène un personnage à redire page 42 ce qu'il a dit en page 40, et Julius à se répéter en page 41 et 43. Rassurez-vous, c'est beaucoup plus simple à lire qu'à expliquer, franchement bidonnant et tout à fait vertigineux ! Dans La qu..., deuxième album de la collection, c'est Le procès de Kafka qui est parodié : Julius est condamné pour un tiroir laissé ouvert pendant une inspection des contrôleurs de l'espace vital. Il doit traverser le Rien (ce qui n'est pas rien) pour découvrir... une autre réalité ?

Si vous êtes par mes propos alléchés, Le processus, Le début de la fin du début ou La 2333ème dimension poursuivent et renchérissent dans cette voie ironique et surprenante : une page se déploie en accordéon, formant un kaléidoscope, la fin d'un album nous amène à le relire à l'envers, un chapitre est soudainement en relief etc. Marc-Antoine Mathieu est un joueur, au sens le plus noble du terme, un acrobate qui jongle avec les codes narratifs de la bande dessinée, un virtuose qui use de toutes les potentialités que contient ce médium. Arrêtez de me lire : lisez-le lui !