Morgan Daucé

C'est à l'adolescence que mon goût pour les romans de science-fiction culmine... En lisant de Arthur C. Clarke, je peux enfin comprendre la fin du film de Stanley Kubrick ! Isaac Asimov, Fredric Brown, Philip K. Dick et bien d'autres m'enchantent au quotidien. Je dépense mon argent de poche en achetant des volumes de la collection "Présence du futur" chez Denoël. 

La Chronique BD de BDfugue.com

Je snobe (bêtement) la S-F francophone, Jacques Sternberg mis à part, mais c'est un auteur atypique. Adapté au cinéma par Alain Resnais, c'est tout dire ! Ce faisant, je passe à côté d'un écrivain dont nombre de fans parlent encore aujourd'hui avec des trémolos dans la voix : Stefan Wul. Ou plutôt Pierre Pairault, chirurgien-dentiste de son état, qui délaisse la fraise pour la plume le temps d'écrire douze romans entre 1956 et 1959, publiés dans la collection Anticipation chez Fleuve Noir. 

Les éditions Ankama lancent aujourd'hui un ambitieux programme d'adaptation en BD de ces œuvres mythiques. Deux titres paraissent simultanément : Oms en série avec Jean-David Morvan au scénario et Mike Hawthorne au dessin, et Niourk confié à Olivier Vatine : un beau casting ! Et de beaux albums grand format avec un trompe-l'œil assez puéril à mon sens - mais c'est peut-être mon côté Schtroumpf Grognon qui s'exprime là - sous forme de coins usés et craquelés !

J'imagine que cette maquette veut évoquer les bouquins représentatifs d'une littérature de "mauvais genre". De petits livres, à l'illustration de couverture criarde au possible, achetés sur un quai de gare et fourrés négligemment dans un sac de voyage. Une réputation collant à la science-fiction pendant très longtemps, et colportée par les gens ayant le monopole du "bon goût"... Oms en série n'en est pas à sa première transposition en images. La planète sauvage de René Laloux est un coup de tonnerre dans le ciel cinématographique en 1973, avec l'immense Roland Topor au dessin. 

OMS EN SÉRIE TOME 1 ; TERR. SAUVAGE

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L'idée de départ a de quoi fasciner : sur la planète Ygam vivent les Draags, gigantesques humanoïdes très évolués technologiquement et spirituellement. Les plus jeunes se divertissent avec les Oms, petites créatures ramenées d'une lointaine planète dévastée, Terra. Pour la plupart des Draags, elles ne sont pas considérées comme intelligentes et peuvent même se révéler nuisibles quand elles échappent à la surveillance de leur maître. Imaginer les humains ravalés au rang d'animaux domestiques induit toute une réflexion sur l'idée de culture et de civilisation. 

Jean-David Morvan choisit pour la BD de creuser les liens familiaux qui existent aussi bien chez les Oms que chez les Draags, et de pointer les similitudes entre le mode de vie des Draags et celui des hommes de notre siècle. Le résultat est troublant aussi bien que touchant... Ajouté au dessin impeccable de Mike Hawthorne, recréant cet univers de science-fiction à la fois daté et intemporel à la perfection, cet album est une grande réussite ! 

NIOURK TOME 1 ; L'ENFANT NOIR AVEC EX-LIBRIS OFFERT

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Avec Niourk, adapté par Olivier Vatine, c'est un autre pan de l'imaginaire Wulien qui se trouve exploré : dans un monde qui suit l'apocalypse, l'homme est revenu au stade primitif, dominé par les superstitions et ne cherchant qu'à survivre aux attaques d'animaux hostiles. Sur cette terre où quelques tribus rassemblent les derniers représentants de l'humanité, la horde de Thôz attend le retour du sorcier, "Celui-qui-sait" pour mettre à mort l'enfant noir, désigné comme paria et responsable de tous les maux. 

Ce dernier décide de partir à la recherche du vieux sage pour infléchir sa décision. Chemin faisant, il découvre le cadavre du sorcier dans les vestiges de la civilisation moderne, en l'occurrence un grand centre commercial. Une voix off vient en contrepoint de son aventure (qui me donne l'impression de lire un vieux Rahan où tout le monde parle à la troisième personne !!!) : l'enfant uniquement mû par son instinct est devenu adulte réfléchi et nous conte son cheminement, laissant présager l'évolution dont il va faire preuve au fil des tomes à venir... 

On attend la suite avec curiosité !

Voyage d’un autre genre au plus près de la nature, Carnet de voyage auprès de mon arbre est une invitation à prendre le temps d’ouvrir les yeux et à faire silence face à l’infiniment beau de la nature invisible.

Sur la terre comme au ciel, d’animaux en insectes les rencontres rythmes les observations de ce Christophe Colomb du quotidien.

Edmond de Garenne propose ici le cahier naturaliste d’un lapin à la découverte de la vaste forêt dont il est résident. Photo, dessins, croquis et notes d’observation sont autant d’anecdotes que nous partage ce petit mammifère curieux sur la vie secrète des animaux.

Une trouvaille douce et poétique à partager au plus vite.

 

L’enfant des Lucioles est une bande dessinée en forme de quête initiatique. On y suit Fifrèle et sa famille de lutins, les Trotte-Source, alors que les constructions des humains ont asséché leur douce vallée.

C’est dans ce contexte de déréglement climatique que la jeune lutine va découvrir avec stupeur ses premiers pouvoirs magiques. Il y a peut être une autre solution pour le petit peuple…

Un récit tout en douceur qui s’atèle à traiter d’importants sujets d’actualité comme la cohabitation avec la nature et l’écologie mais aussi des réflexion sur la famille et le passage à l’âge adulte. Ce premier tome d’une tétralogie est une belle découverte à partager d’urgence.

   

Un matin, la mort vient prendre un dernier café avec le grand père d’Holly, Sam. Après une dernière visite en rêve au son de son saxophone, c’est l’heure des adieux. Comment surmonter la tristesse et le vide d’un tel départ ?

C’est avec l’aide du Gardien de l’Espoir que la petite fille apprendra à réparer les coeurs brisés.

Il est toujours difficile d’évoquer la mort et le deuil avec les plus petits. Ces thèmes, encore tabou en édition jeunesse, sont abordés de manière douce, poétique et lumineuse avec l’histoire d’Holly et de son grand père. De plus l’album a été mis en musique par Louis Boudot, compositeur et guitariste.

Un album tout en délicatesse à lire et à écouter, seul ou à plusieurs.

 

Qu'il est beau le dernier album d'Anne Herbauts, Quand Hadda reviendra-t-elle ? De la chambre à la cuisine, de la salle de bain au balcon, tout rappelle Hadda.

Cet album nous immerge dans une douce mélancolie, presque vaporeuse et pourtant chaleureuse. En miroir du récit, les dessins mettent en scène la poésie du dialogue solitaire (mais l'est-il vraiment ?) qui se déploie au fil des pages : à l'absence de personnage résonne la présence de l'artiste à travers le bruissement matériel de l'image.

Les craies frottent sur l'espace de la feuille, offrent des aspérités visuelles et manifestent ainsi le travail minutieux autant que physique qui s'actualise par notre regard.

Avec ce livre, Anne Herbauts interroge sur les empreintes que nous laissons au monde, qu'elles soient tangibles, enregistrées sur le papier, ou sensibles voire sentimentales, incarnées dans les objets qui nous entourent et appellent le souvenir des êtres chers.

   

Descendant d'un dirigeable, quelques hommes à fier allure découvrent un arbre sans pareil. Avec les feuilles de l'arbre, ils bâtissent un palais d'émeraude le dépouillant ainsi de son habit de verdure. Réveillé par la mise à nue de sa queue feuillue, un dragon enraciné dans l'arbre sort de son sommeil et souffle sur le palais afin de faire connaître aux hommes à fier allure sa colère … est une fable écologique sans texte, illustrée d'une manière sobre et élégante par et racontant les dangers des déforestations et plus largement ceux de l'épuisement des ressources naturelles de la planète. Les jeunes lecteurs pourront clairement faire le lien entre cet appendice feuillu attaqué tirant un monstre souterrain de son sommeil et les catastrophes naturelles métaphoriquement mises en image sous la forme d'un souffle qui vient rectifier l'impudence humaine. L'Arbre est un bel album grand format invitant les plus petits au respect de la nature. Même si la réalité est moins douce, cette version est une belle petite graine d'onirisme pour de meilleurs lendemains.

Et si nous écoutions un peu de Jazz… Du Jazz, mais pourquoi faire ? Bonne question ! Pour s'endormir et les mélodies se trouvent dans  aux Editions Didier jeunesse.

Cet album, c'est la réunion d'une quinzaine de classiques sélectionnés avec un immense talent par un grand guitariste de jazz, mais c'est aussi une traduction sans égale des paroles par Valérie Rouzeau et bien entendu, des illustrations toutes plus belles les unes que les autres d'Ylia Green.

On se balade au fil des pages, on laisse son esprit vagabonder au gré des musiques qui nous bercent et des images qui nous enchantent, remplies  de sensibilité, de poésie et d'une future nostalgie qui ne nous quittera plus.

C'est beau, c'est intelligent, Les plus belles berceuses de jazz va permettre à nos enfants de découvrir la plus belle part de cette musique mondialement connue leur plus jeune âge.
Franck Sinatra, Sarah Vaughan, Nat King Cole, Judy Garland des grands noms, de grandes voix qui vont susurrer des paroles chaudes et réconfortantes et nous, enfants comme parents, nous allons nous laisser aller à cette douce léthargie. Un seul mot : encore !