Le paysage, autour de lui, est accidenté et aride. Personne n'a jamais envisagé de coloniser ces espaces pour y laisser paître un troupeau. Ce serait peine perdue. D'abord il n'en reviendrait que des bêtes faméliques. Ensuite, cela prendrait trop d'énergie avant de retrouver un point accessible en véhicule pour emmener le bétail.
C'est pour cela que ces montagnes ont été surnommées la Lune. A cause de leur éloignement. A cause de leur hostilité.
Mais c'est dans cet univers difficile que william Gasper marche. Il marche pour s'éloigner du monde car il n'aime pas particulièrement la compagnie. Il est aussi un peu irritable au point de savoir qu'il lui est préférable de s'éloigner de ses semblables plutôt que de risquer des rencontres susceptibles de se terminer tragiquement.
Alors William Gasper s'éloigne souvent et longtemps du conteneur qu'il a loué à Mary-Gail Henry qui vit seule à proximité de sa station service. Un conteneur qu'il a un peu rafistolé, qu'il déserte la nuit (quand il est, rarement, là) pour préférer dormir à la belle étoile et dans lequel il a installé une caisse consciencieusement fermée à clé.
Une caisse qui renferme tout un tas d'armes diverses mais qui ont toutes un point commun : ce sont des armes puissantes, des armes de spécialiste.
Car avant de s'éloigner du monde, William Gasper a eu sa vie mêlée aux armes : à l'armée comme tireur d'élite et puis, après, ailleurs, autrement, pour d'autres motivations.
Ne vous laissez pas rebuter par les vingt cinq premières pages (ce qui a bien failli être mon cas) : les chos es tardent à se mettre en place mais quand elles y sont, elles ont tôt fait de vous prendre par la main, puis de vous captiver pour vous mener dans les terres insolites d'un homme hors du commun.
Télérama a parlé de la « foudroyante alchimie » de ce « brûlot [qui] fait de l'abjecte folie des hommes, du grand art ». C'est tout à fait cela.
Les dissertations de William Gasper ne manquent pas de sel : l'impossible devient vrai quand il professe que « les anomalies appartiennent au réel […]. Qui peut croire ce que l'on écrit sur les trous noirs ? » !
Cet homme, dont sa logeuse ne veut voir que le caractère solitaire, se dévoile progressivement pour apparaître, en pleine lumière, comme l'incarnation de cette « abjecte folie ».
Avec ses fantômes.
Avec son code de l'honneur.
Et l'interminable qui-vive de la bête traquée qui sait que « le passé n'est réel que pour la mémoire, et la mémoire est un petit courant électrique plus fragile qu'une toile d'araignée ». Mais tant que ce petit courant passe…
Retrouvez L'homme qui marchait sur la lune sur Comparonet