L’Université Technique de Munich vient de prendre une décision qui peut paraître surprenante. Tous ses cours de Master seront désormais donnés en anglais, d’ici six ans. Une annonce qui ne fait pas plaisir à tout le monde, comme on peut s’en douter.
LA langue de Shakespeare est déjà bien représentée au sein de l’institution. En effet, 30 des 99 Masters sont déjà dispensés en anglais. D’ici 2020, c’est l’ensemble des cours qui sera dans cette langue, suite à une recommandation du président de l’université, Wolfgang Herrmann. Selon ce dernier, « l’anglais est la lingua franca du monde universitaire et économique. »
Pourtant, l’établissement dispose déjà d’une bonne visibilité à l’échelle mondiale, puisqu’elle figure notamment à la 87e position du classement établi par le Times Higher Education en 2014. Mais les responsables de l’Université Technique de Munich veulent faire mieux et estiment que l’anglais est la voie à suivre.
Cette décision a entraîné des protestations de responsables politiques et étudiants. Johannes Singhammer, un député de Munich, estime qu’il s’agit là d’un « mauvais signal » envoyé par l’université, qui tendrait à faire de la langue allemande une langue morte.
Les syndicats étudiants sont aussi partagés. Leur représentant, Sebastian Biermann, avance que le passage à l’anglais n’est pas nécessaire pour toutes les matières. Pour l’informatique, oui, pour l’ingénierie, non. Par ailleurs, les responsables de l’université font valoir que les étudiants eux-mêmes plébiscent ce changement. Pas tout à fait, toujours selon Sebastian Biermann : « Cette décision vient des dirigeants de l’université, et pas des étudiants ou des départements de l’université ».
Même le monde économique ne semble tout à fait convaincu par la mesure. Le dirigeant d’un cabinet de consulting, Anglo German Consulting, estime que ce n’est pas « nécessaire. »
EN FRANCE, LA QUESTION EST LOIN D’ÊTRE RÉGLÉE
Les cours en anglais au niveau de l’Enseignement supérieur font aussi débat en France, où l’on constate les mêmes réticences. En mai 2013, l’Assemblée octroyait la possibilité de dispenser des cours en anglais dans les universités françaises, en dépit d’une forte opposition. Cette mesure s’inscrit dans le fameux projet de loi sur l’enseignement supérieur et la recherche.
Genevivèe Fioraso s’était félicitée de cette décision. « Je me réjouis que l’on y soit arrivé, après toutes ces discussions », déclarait la ministre de l’Enseingement supérieur.
Face à la levée de boucliers de certains députés, du monde universitaire, de l’Académie française (pour ne citer qu’eux!), la ministre, aujourd’hui secrétaire d’État, avait tenu à rassurer tout le monde : « Il ne s’agit, en aucun cas, de remettre en cause la primauté de l’enseignement en français ou la défense de la francophonie. Il s’agit au contraire d’élargir le socle de la francophonie auprès des jeunes, notamment des pays émergents, qui, aujourd’hui, ne viennent pas dans notre pays ».
Comme dans le cas de l’Université Technique de Munich, la raison d’être de la promotion de l’anglais dans les pays où il ne s’agit pas d’une langue officielle est l’attractivité des établissements, ni plus ni moins.
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Sebastian Biermann
Munich Cityscape
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