Expressio propose de faire découvrir sur ActuaLitté une expression de la langue française, pour explorer les petites perles de notre langage, et en comprendre les évolutions. Aujourd'hui approchent les Rencontres nationales de la librairie, à Bordeaux, et pour les libraires, la situation donne envie de Péter les plombs. En avant...
Signification
1. S'énerver brutalement et fortement
2. Devenir fou
Origine
Aujourd'hui, dans les habitations relativement modernes, les dégâts causés aux appareils électroniques par les court-circuits et surtensions électriques sont limités (j'ai bien écrit « limités », pas « complètement empêchés ») par des disjoncteurs, ces petits boitiers munis d'un interrupteur, qu'on trouve rassemblés dans le tableau électrique central.
Lorsqu'un problème électrique survient, le disjoncteur saute et coupe le courant vers les prises et points lumineux qui lui sont reliés. Si le problème n'est pas un défaut d'un des appareils, il suffit de relever la petite manette du disjoncteur pour rétablir le courant dans la partie concernée. Comme quoi la modernité n'a pas que des inconvénients...
Mais autrefois, lorsque la technologie électrique n'était pas aussi avancée, la protection du réseau électrique intérieur se faisait par des fusibles qu'on appelait aussi des plombs, ellipse de plomb de sûreté ou plomb fusible, appellations qui datent de la fin du XIXe siècle.
Ces choses fabriquées en porcelaine étaient ainsi nommées parce qu'elles comportaient un fil de plomb d'un diamètre variable selon l'intensité maximum du courant qui pouvait le traverser. En effet, la particularité de ce fil, qui était un point de passage obligé du courant, était de fondre lorsque ce dernier était trop fort, comme dans le cas d'une surtension due à un orage, par exemple. Du coup, en fondant, le plomb coupait l'électricité vers la zone alimentée et en protégeait les appareils connectés.
Très pratiques pour l'époque, ces plombs avait quand même un défaut : pour remettre le courant, il fallait impérativement avoir en réserve du fil de plomb de différents diamètres et une lampe de poche ou une bougie, puisqu'il fallait y voir quelque chose pour remplacer le fil fondu et qu'il n'était pas question, comme on peut le faire maintenant, de tâtonner dans le noir pour trouver la manette du disjoncteur.
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Ce plomb qui fondait ou qui pétait et qui, du coup, empêchait le fonctionnement de ce qu'il alimentait a produit la métaphore des années 1980 qui nous intéresse ici.
On y compare en effet le cerveau à un appareil électrique alimenté à travers des plombs ; et lorsque son propriétaire s'énerve brutalement ou se met à avoir un comportement aberrant, c'est que son cerveau ne fonctionne plus parce qu'il n'est plus alimenté, donc que ses plombs ont pété.
Et c'est tout naturellement, avec l'évolution de la technologie, la disparition progressive des fusibles (qui sont entretemps passés par des formes plus modernes et plus aisément remplaçables que les fils de plomb) et la généralisation des disjoncteurs que « péter les plombs » est petit à petit remplacé par « disjoncter ».
Exemple
« La qualification du Barça, mercredi, fut conforme à la dimension irrationnelle et dramatique qui rend les derniers tours de la Ligue des champions uniques en leur genre. Ballack et Drogba en ont pété les plombs en agressant quasiment l'arbitre M. Ovrebo. »
L'Équipe - Article du 6 mai 2009
« Vladimir Poutine a littéralement disjoncté à l'issue du sommet UE-Russie, lundi à Bruxelles. Mais seuls les Russes ont eu le privilège de s'en apercevoir. Les interprètes, fournis par le Kremlin, se sont en effet bien gardés de traduire en anglais rien n'était prévu pour le français les propos de leur dirigeant. »
Libération - Article du 13 novembre 2002
Impossible d'oublier la chanson immortelle de Disiz La Peste