Les chiffres dévoilés par le ministère chatelien avaient parlé : le bac cette année, galère... pour la section L. Si la filière générale reste majoritairement plebiscitée, la section Littéraire est une fois de plus le parent pauvre - et le mal aimé - avec 17 % des 325.785 candidats. En somme, 2 % de moins que l'an passé, toutes proportions gardées. Et ce, alors qu'en S et ES on perd respectivement 0,37 % et 1,29 %.
Les enjeux de cette désertion dépassent de loin les querelles de clocher entre les lycéens : en 1990, la filière L représentait 28 % des candidats. Vingt ans plus tard, elle est moribonde. Jean-Michel Blanquer, directeur général de l’enseignement scolaire, s'était d'ailleurs exprimé en ce sens, évoquant d'un côté la perte d'élèves pour le bac STI, mais également « le déséquilibre constant, et qui s’aggrave, entre les séries du baccalauréat général : poids très faible de la série L au profit des deux autres séries ».
De là la nécessité d'une réforme, parvenait-il à retomber sur ses pattes... Mais à la Sorbonne, ce week-end, rapporte Le Figaro, les professeurs réunis n'avaient pas vraiment le coeur à la réforme, avec une réflexion telle que l'on ne croyait plus vraiment en entendre - et moins encore dans la bouche d'un prof de philo : « Un bon élève va toujours en S, un élève moyen en ES et un médiocre va en STG (sciences et techniques de gestion) et s'il n'y a pas de place en STG, il va en L. » Alors, réforme, oui, peut-être, mais dans tous les cas, il est impératif de changer ce regard sur cette section.
Alors oui, les établissements profitant d'une orientation en classe prépa disposent en effet de solides sections littéraires... mais on est loin de généraliser ce cas.
Le réservoir à pas grand-chose
Pour Romain Vignest de l'association des professeurs de lettres (APLettres), il faut être lucide : d'abord le nombre de disciplines plus restreint, participe à une certaine paupérisation. En parallèle, note Agnès Joste de Sauver les lettres (Sauv) : « En raison de la baisse continuelle du nombre d'heures de cours, le niveau d'un lycéen de terminale littéraire aujourd'hui correspond à celui d'un troisième des années 1970. »
À ce titre, on rappellera que si l'histoire avait été quelque peu chahutée au cours de l'année, devenant optionnelle aux yeux de certains pour les élèves de S. Mais justement, les mathématiques en section L sont complètement passées du côté optionnel de la force - limite facultatif. Et pour Éric Barbazo, président de l'association des professeurs de mathématiques (APMEP), la logique est intenable. « Un élève littéraire peut obtenir son bac avec un simple niveau de maths de seconde. Il aura pourtant besoin de cette matière, s'il fait des études d'économie, de droit ou même de philosophie ! »
Bien plus scandaleux que la perte de l'histoire en S, précise-t-il... Au moins tout autant...
Dans ses remarques sur les projets de programmes, l'APMEP notait d'ailleurs avec justesse :
L’intention de « donner à chaque élève la culture mathématique indispensable pour sa vie de citoyen » est une excellente résolution qui devrait être un projet pour tous les élèves et non pour les seuls volontaires à l’option mathématiques. Mais cette volonté se révèle en contradiction avec l’absence de mathématiques obligatoires dans l’enseignement des élèves de la série L. Ainsi, les programmes légitiment eux-mêmes que l’arrêt d’un enseignement des mathématiques au niveau de la classe de seconde engendrera un manque social et citoyen pour les élèves de cette série.
À méditer, sans nul doute...