Dans notre civilisation de l’image, le cinéma est roi, et « son encre est la lumière ». À première vue, on mettrait une barrière plus ou moins étanche entre cet art et la littérature. Où sont les grandes descriptions de Stendhal dans ses adaptations cinématographiques ? Où trouver les tableaux inoubliables d’Apocalypse Now chez Flaubert ? Ce serait omettre toutes les fois où les deux arts ont dialogué avec grâce, comme tous ces Hommes de l’écrit qui ont parlé avec force du 7e art.
Annie Ernaux, née Duchesne, a grandi en Normandie – à Lillebonne où elle est née en 1940, puis à Yvetot, où ses parents ont déménagé quelques années plus tard pour tenir un café-épicerie. Élève à l’école privée catholique, elle côtoie des filles de milieux plus aisés que le sien, et fait l’expérience de la honte sociale. En 1958, âgée de 18 ans, elle part pour la première fois seule, sans ses parents, travailler dans une colonie de vacances.