La folle journée de Charles Antoine Gonzague Folenfant

L’hymen est-il soluble dans l’humour ? En tout cas, rien ne les oppose quand Elléa Bird et Élise Thiébaud s’empare d’un sujet qui figure parmi les tabous sociétaux qui ont encore de l’avenir. Il suffit de se souvenir que ce sont 70 vierges promises après la mort aux terroristes consciencieux…

Explorer la virginité — notion dont Freud assurait qu’elle contenait le risque des « tendances polygames » dans nos sociétés occidentales — c’est parler d’histoire, de sexualité, de patriarcat, aussi bien que la mythologie et les ramifications les plus anciennes de la société.

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Tout démarre ici avec Élise, 14 ans : « Je ne sais pas à quel âge j’ai compris que j’étais vierge. Et je ne sais pas quand j’ai compris qu’un jour, je ne le serais plus. » L’adolescente aborde ainsi le sujet pour nous et nous embarque dans une traversée des époques, autant que des personnages hauts en couleur – comme ces clitoris rockers superstars ou… des vulves que pourchassent des citrons (pressés ?).

L’humour est essentiel, mais distillé avec intelligence, tant dans le dessin d’Elléa Bird que par le scénario qui déroule Élise Thiébaut. L’autodérision ne se substitue pas au propos pour autant, au contraire : finesse et élégance, on en redemande !

« Mon frère et moi sommes entrés dans le coffre à 5 heures du matin. La voiture était grise mais, de l'intérieur, ça ne se voyait pas ». Le lecteur, quant à lui, entre dans un livre vert à l'extérieur, et rose à l'intérieur. La jolie histoire de débute un soir de pluie, au milieu d'une famille ordinaire. Des gouttes d'eau coulent sur les joues de la mère puis glissent dans le cœur du père qui vient de perdre son travail. La famille vient d'emménager dans une nouvelle maison et, face à ce grand changement, une petite fille peste contre les fleurs déchirées du papier peint et la chambre à partager avec son petit frère. Pourtant, un peu plus loin, du côté de la fenêtre, à hauteur du petit jardin en contrebas, il semblerait que de belles choses soient encore à découvrir : la nature, le ciel, les oiseaux, les insectes, la terre… L'univers de l'héroïne va alors s'élargir, son corps grandir et ses yeux s'ouvrir. Un jour, une petite fleur naît dans le creux de sa main…

Les mots de Vincent Cuvellier, mis en image par Camilla Engman, racontent avec une grande délicatesse la métamorphose d'une enfant en adolescente. Pour découvrir ce merveilleux album, voici le mode d'emploi : soulevez avec douceur le feuillage vert-tendre de la couverture cartonnée, ouvrez les yeux et enfin tendez l'oreille… Pour tous les enfants qui veulent devenir grands.

Erine, une vingtaine d'années, est une hors-clan, ou "orkla", bannie dans la zone d'exil. Elle travaille comme déterreuse de cadavres depuis qu'elle a été expulsée du Clan des Dresseurs, l'un des six qui dirigent la Cité. Le travail uni des six Clans est la base de l'équilibre de cette dernière.

Le jour de la Fête des Echanges, où les adolescents qui veulent changer de Clan se soumettent à l'approbation des patriarches. Arkadi, un adolescent difforme que la jeune femme a pris sous son aile, leur obtient des places pour assister à la cérémonie. La monnaie d'échange: des baumes, volé par le jeune homme. Baumes qui semblent particulièrement intéresser la haute société, qui se les arrache... Sans le vouloir, Erine et son pétillant compagnon difforme, Arkadi, vont se retrouver mêlés à une aventure dont le dénouement entraînera la survie ou la chute de la cité...

, nouveau roman de Marie Pavlenko, rappelle beaucoup l'excellent Livre de Saskia, du même auteur : narration à la première personne de l'indicatif, style naturel et sympathique... On remarque aussi le même point positif, une bonne retranscription des pensées d'une jeune adulte, sans fioriture ni impression qu'Erine soit plus âgée. Le lecteur ressentira probablement un véritable coup de coeur pour Arkadi, jeune homme adorable et énergique. 

La Fille-Sortilège est beaucoup plus léger à lire que le Livre de Saskia, en effet, l'atmosphère oppressante et sérieuse y est moins omniprésente. Les rebondissements sont fréquents et imprévus, ce qui est un énorme point positif, et l'intrigue est bien tenue, le suspens étant conservé jusqu'à la fin. Un autre coup de coeur, donc, à emmener à la plage pendant les prochaines vacances !

Pour fêter leurs 20 ans, les Sinsemilia font une petite tournée de quelques dates dans les salles qui ont compté pour eux ! Et la première date c’était vendredi et c’était en bas de chez moi ! (les concerts où il y a pas besoin de faire une heure de route et d’être là 2h à l’avance, c’est quand même vachement bien ! :) )

Beaucoup de leurs chansons m’ont accompagné durant mes années lycées à travers les albums Résistances, Tout ce qu’on a et bien sûr Debout les yeux ouverts et son célèbre « Tout le bonheur du monde ». Mais depuis il faut bien l’avouer je les ai quelques peu délaissé et du coup j’appréhendais un peu ce concert en me disant que je n’allais pas connaitre beaucoup des chansons ! 2h30 de show où Mike et Riké les chanteurs ne s’arrêtent pas une seconde, les musiciens non plus et durant lesquelles je connaissais finalement une bonne partie des chansons, dont les paroles me sont revenues comme par magie ! J’ai pris beaucoup de plaisir à me replonger dans l’ambiance des années lycées et à me souvenir des bonnes choses !

Alors si vous aussi les Sinse ont fait parti de votre jeunesse, sachez que la tournée des 20 ans, accompagnée d’une touche d’émotion et de « Joyeux anniversaire » chantés par le public, se termine le 17 décembre à Lyon et toutes les dates sont par ici.

Pour une rentrée enivrante, embarquez avec La fille à la moto d'Oji Suzuki édité par Atrabile.

Ce recueil regroupe des courts récits de ce disciple de Yoshiaru Tsuge qui devint rapidement une figure phare de la revue Garo au cours des années 70. Ces histoires exhalent ainsi un esprit libertaire caractéristique de son temps autant à travers une pléiade de personnages marginaux que dans l'exploration de scénarios destructurés.

L'auteur met en scène des artistes fauchés, androïdes éperdus ou jeunes adultes désoeuvrés et tout aussi désargentés, autant de protagonistes qui se lisent comme des doubles fictionnels de l'auteur (certains prennent ostensiblement ses traits) qui composent un portrait saisissant d'une jeunesse nipponne un peu perdue, presque déracinée au sein d'une société dans laquelle elle ne se reconnaît pas.

Ce souffle de liberté resplendit dans ces séquences qui semblent désorganisées, où la succession des anecdotes ne suit pas nécessairement un déroulé logique mais davantage une entropie sensible. On
retrouve beaucoup de l'esprit de la Beat Generation évidemment et en particulier du lyrisme de la prose spontanée développée par Kerouac et que l'auteur semble ici adopter dans ces planches en grande partie improvisées.

La fille à la moto est un très bel album, qui pourrait paraitre deroutant au premier abord mais qui se révèle vite fascinant, lunaire et aérien : une bouffée de poésie soutenue par des planches pleines de vie.

Ce texte fut un grand succès aux États-Unis pour le précieux témoignage qu’il constitue.

Une “fille de samouraï”, née alors que se met en place dans son pays ce virage à 180° de l’ère Meiji. Éduquée dans la rigueur absolue d’une vieille famille feodale, elle s'inscrit dans cet entre-deux : d’un pays fermé au reste du monde à une imitation de l’Occident et son industrialisation.

Avec une langue distanciée, une forme linéaire et simple, et un esprit subtilement spirituelle, elle raconte cette jeunesse d’un autre temps, son adolescence de déclassée, ses parents ayant perdu les avantages du système féodal précédent. Puis son mariage aux Etats-Unis avec un japonais dans l’import-export. Deux filles qui naissent et le décès précoce de son mari l’a pousse à retourner dans son pays natal afin de donner a ses enfants une éducation.

Elle retrouve enfin à nouveau le “Nouveau Monde” et y dévient une professeure de littérature et civilisation japonaise. La conscience, ou la lucidité, naît toujours d’une double appartenance. Impossible de voir son cul quand on est assis dessus. Elle regarde l’Amérique et le Japon. Au pays de l'oncle Sam, l'intégration est réussie :  le respect et le pouvoir d’adaptation légendaire des nippons ne sont pas étrangers a cette réussite. Elle se convertit même au méthodisme. Une synthèse.

Et pointe un moment, au bout de ce raffinement et de cette recherche de l'excellence par un constant et effrayant dépassement de soi, une forme de poésie.

Les récits des entre deux mondes, deux époques, tels Les mémoires d’outre-tombe de Chateaubriand, portent la vigueur des périodes troublées et galvanisantes.

C’est enfin un portrait de femme de la fin du XIXe-début XXe siècle, qui affirme une certane individualité, malgré une éducation et une époque.

Amélie Nothomb réalise la préface de cette nouvelle édition par les éditions Bartillat : “Etsu Sugimoto raconte son parcours avec tant de fausse candeur que cela devient presque de l’espièglerie. Qui plus est, c’est un texte bouleversant. (...) Elle est irrésistible.”

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Dans la série , deux nouveaux titres paraissent et vont permettre au jeune lecteur dès 4 ans de retrouver l'ambiance tendre et très colorée de l'illustrateur Marc Boutavant.

Par un matin ensoleillé mais venteux, l'ours Edouard convainc son ami Edmond l'écureuil d'aller passer une journée à la plage. Au fur et à mesure de la promenade qui doit les mener vers la mer, le temps se montre de plus en plus incertain mais ne décourage pourtant pas Edouard, même lorsque la pluie s'en mêle et menace le pique-nique organisé par Edmond.

Si les contrariétés agitent la journée, elles ne parviennent pas à inquiéter l'amitié qui lie les deux compères mais fortifient et renforcent, bien au contraire, les sentiments d'attachement et de tendresse et livrent alors une jolie histoire, sensible et subtile qu'une écriture poétique et délicate intensifie juste comme il faut.

Les illustrations aux coloris variés et nuancés, empreintes de douceur, jamais sombres ni réellement tristes,  sans excès, expriment  parfaitement la complicité entre les deux personnages, tout l'équilibre de la relation qui les rend si nécessaires l'un à l'autre.

Cette absence de rivalité, le dessin la saisit avec une justesse précise et touchante. Le lecteur ressent immédiatement et au fil des pages le sentiment d'amitié qui crée l'harmonie et le bonheur. Il est confortablement installé dans une histoire où il se sent bien, la savoure comme une gourmandise. Ses parents aussi, assurément.

Aussi, pour prolonger le plaisir, l’album La Chose, des mêmes auteurs et issu de la même série, en publication simultanée.