La grande campagne qui agite l'édition et les auteurs en Angleterre vient de voir entrer en lice une tierce autorité : le gouvernement. Tout se place autour d'un problème simple : les éditeurs souhaitent mettre en place un baguage qui indiquerait l'âge conseillé pour la lecture de tel ou tel livre. Ce à quoi une grande partie des auteurs se refuse, estimant que cela irait contre l'incitation à la lecture. De son côté, l'industrie de l'édition estime que ce serait de bon conseil pour les parents...
Dans une lettre adressée à la Chambre des communes, le ministre Ed Balls a émis quelques doutes sur la pertinence de cette idée. « Alors que nous sommes largement en faveur de tout ce qui aide les parents à choisir les bons livres pour leurs enfants, nous conseillons la prudence dans ce domaine », explique-t-il à la directrice adjointe, Helen Goofman. Le ministre encouragerait plutôt les parents « à chercher conseil auprès des bibliothécaires, des enseignants » qui connaissent la littérature jeunesse.
Et une porte-parole de rappeler que cette initiative n'est absolument pas le fait du gouvernement, mais bien une initiative des éditeurs. Si l'on apprécie que ces derniers se creusent la tête pour faire avancer ce secteur en berne, « il faut aussi tenir compte de ce que chaque enfant est unique et que les fourchettes d'âge ne peuvent être suivies aveuglément. Elles doivent servir d'indicateur », ajoute anonymement la personne.
Développer le marché... des supermarchés
Pour la Publishers Association (le SNE anglais), si les spécialistes ne sont pas remis en question, cette classification d'âge servirait surtout dans des endroits comme les supermarchés. C'est-à-dire, où l'on ne trouve pas de bibliothécaire, ni de vendeur compétents. Et cela, pour « aider les adultes » qui achètent des livres dans ces endroits. Parce qu'ils sont en plus généralement moins chèrement vendus. Ce que le ministre comprend bien : la classification n'est pas destinée aux librairies, mais au développement du livre dans les supermarchés.
La classification concernera les tranches suivantes : 5 et +, 7 +, 9 +, 11 + et 13 + / adolescent, à partir de cet automne. Et même si les auteurs, comme Philip Pullman protestent, estimant que cela « est mal conçu et porte atteinte aux intérêts des jeunes lecteurs », les négociations se poursuivent. La directrice de Scholastic, la maison d'édition qui publia Harry Potter, avait elle-même reconnu que cette idée n'était qu'une « regrettable erreur ».