L'idée de race. Histoire d'une fiction
La race a disparu, pas le racisme, dit-on. En fait, l'idée de race
n'a pas disparu, elle n'a jamais cessé d'exister avec d'autres
mots pour le dire. Dès lors qu'un groupe donné s'assigne ou se
voit assigner, selon des combinaisons variées, des traits à la
fois ethniques et culturels qui le fixent et le définissent comme
tel, dès lors aussi qu'il se met à se forger des mythes qui
l'ancrent dans une longue histoire ininterrompue, il est
possible d'user d'un terme, pourtant inadapté, comme celui de
race. Aussi, pour retracer l'histoire de l'idée de race entre
Grèce et Asie orientale, ce livre examine-t-il la race avant la
race dans l'Antiquité et l'Europe classique, puis la race à son
zénith au XIXe et dans la première moitié du XXe siècle et
enfin la race sans race, du lendemain de la Seconde Guerre
mondiale à nos jours. Au terme d'un parcours spatio-temporel,
qui scrute la fortune de l'idée de race, il apparaît alors que
l'Antiquité a forgé des récits originels dont les dérivés, les
origines gentium, ont fini par engendrer, liée le plus souvent à
l'idée de nation, l'idée plastique et infiniment malléable de
race, laquelle continue de nourrir, souvent à notre insu, les
imaginaires actuels et ce, même si d'autres termes, culture,
identité, altérité ou ethnicité, ni plus justes ni plus généreux ni
moins pernicieux, sont venus remplacer celui de race afin de
reconduire des fictions d'appartenance.
01/2012