Pierre Bockel. L'aumônier de la liberté
Il aurait pu vivre mille autres vies, mais il a choisi de répondre
"au secret appel du Christ" et de s'engager sur un chemin tout
entier orienté vers les autres. Originaire de la patriotique ville
de Thann, l'Alsacien Pierre Bockel (1914-1995) fut ordonné
prêtre à Lyon en 1943 alors qu'il avait rejoint dès 1940 un des
premiers réseaux de la Résistance française, créé en Alsace.
L'abbé-maquisard contribua en septembre 1944 à la formation
de la Brigade Alsace-Lorraine commandée par André Malraux
dont il devint l'ami, participant comme aumônier militaire à
tous les combats de cette unité de la France Libre jusqu'à la fin
du conflit mondial. Aumônier universitaire après la guerre
puis, de 1967 à 1986, archiprêtre de la cathédrale de
Strasbourg ("ma fiancée", la surnommait-il), Pierre Bockel fut
de tous les mouvements qui participèrent au renouveau et à
l'ouverture de l'Eglise catholique avant et après le concile
Vatican II: oecuménisme, dialogue avec les juifs,
réconciliation franco-allemande et ouverture européenne,
voyages et camps de jeunes, création de revues, publication de
livres, chroniques dans la presse et homélies. Son activité
inlassable se déployait et se renouvelait sans cesse au service
d'une foi qu'il voulait modeste et lumineuse. L'amitié avec
André Malraux fut le fil rouge d'une vie que le mystère du mal
et de la mort hantait. Ils avaient tous deux fait le pari de la
liberté et de la fraternité et leur dialogue ininterrompu ouvre
de fécondes réflexions, plus que jamais stimulantes, sur le
sacré et la transcendance. Tous ceux qui ont côtoyé Pierre
Bockel, comme Daniel Froville, qui signe ici une biographie
aussi documentée qu'inspirée confirment la justesse du
commentaire d'André Malraux sur son ami : "Toute noblesse
humaine est langage de Dieu".
05/2012