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Dietrich Bonhoeffer

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Cinéma

Mémoires d'un fils à papa

Le nom de Marcel Ophüls sera à jamais associé au film Le Chagrin et la Pitié, incontournable dans l'histoire de la prise de conscience d'un passé français ambivalent, coincé qu'il fut pendant l'occupation allemande entre collaboration massive et faits de résistance sporadique. Son auteur, aujourd'hui âgé de quatre-vingt-cinq ans, a décidé d'écrire ses Mémoires, une épopée intime sur laquelle souffle la grande Histoire : né à Francfort en 1927, il quitte avec sa famille l'Allemagne nazie en 1933. Le Juif allemand devient français à Paris. La guerre éclate et c'est le second exil. Pendant les années 40, à Hollywood, Marcel devient américain et fait la guerre comme GI au Japon. La plupart de ses documentaires historiques seront aussi une manière de revenir sur ses pas, à l'image du Chagrin et la Pitié où le récit de l'exode fait par Mendès France croise ses propres souvenirs quand, dans la décapotable de son père, il quitte Paris vers le sud de la France. Aujourd'hui, il raconte son histoire, avec une malice et une franchise sans égal, avouant que son immense carrière de documentariste lui fut pour ainsi dire contrainte. Le fils de Max Ophüls, élevé dans la vénération du « grand cinéma », du « vrai cinéma », celui de Capra, de Lubitsch, d'Hitchcock, ou celui de son père bien sûr, ne devient documentariste qu'au terme d'une incursion avortée sur le terrain de la fiction. Son premier long-métrage, Peau de banane, comédie du remariage "à l'américaine", avec Jean-Paul Belmondo et Jeanne Moreau, est un succès public mais le suivant, Feu à volonté, film de série avec Eddie Constantine, est un ratage qui signe son arrêt définitif dans ce domaine. Heureusement peut-être pour les amateurs de documentaires, puisqu'il multiplie les chefs-d'oeuvre du genre. Marcel Ophüls a obtenu un Oscar pour Hôtel Terminus (1989), son film consacré à la vie du criminel de guerre Klaus Barbie. Les Mémoires d'un fils à papa, où l'on croise en guest star Louis Jouvet et Bertolt Brecht, François Truffaut, Marlene Dietrich et Mendès France, François Mitterrand et Simone Weil, est un roman léger et mélancolique, hanté par la figure d'un père dans l'ombre duquel il a fallu trouver sa voie : « Mon problème, c'est que je suis le fils d'un génie. ».   L'ouvrage est enrichi de photographies inédites de la vie de Marcel Ophüls.

01/2014

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Littérature étrangère

Le nègre violet. Souvenirs

Les Mémoires d'Alexandre Vertinski retracent la vie mouvementée d'un artiste unique et complet. Figure majeure et inimitable de l'art russe, poète, compositeur, chanteur, acteur, il a connu un succès retentissant en Russie comme à l'étranger et est devenu, après sa disparition, une référence pour les bardes et chansonniers russes et soviétiques. Né à Kiev en 1889, Vertinski débute sa carrière en 1916 dans le costume de " Pierrot noir ", une version expressionniste du personnage de la Comedia del Arte exprimant la mélancolie de l'âme russe. Il est devenu célèbre pendant la période de la Russie tsariste en chantant des chansons d'amour qui transportaient le public dans un monde de rêve exotique à l'eau de rose. Lorsque la Première Guerre mondiale a éclaté, suivie de peu par la révolution d'Octobre, la clientèle de Vertinski, essentiellement les élites tsaristes, a émigré dans d'autres pays européen, suivie par le chanteur en 1918. Commence alors une vie d'errance, bohème, un exil de vingt ans dans des " villes étrangères " : Constantinople, Bucarest, Varsovie, Berlin, Paris, New York, San Francisco, Beyrouth, Jérusalem, Harbin, Shanghai. Il s'installe finalement à Paris en 1923, où il chante dans les nombreux cabarets de Montmartre, pour le plus grand bonheur des émigrés russes nombreux dans le Paris des années 1920. La scène artistique française subit alors l'influence des peintres tels que Soutine, Kandinsky ou Chagall et des compositeurs tels que Chaliapine. Rien de surprenant donc, à ce que Vertinski reste neuf ans dans la capitale française, assuré d'une audience dans le groupe des Russes nostalgiques de leur pays. En 1926, il réalise l'un des premiers enregistrements. En 1932, il décide de partir à New York, où il fréquente Marlène Dietrich et Rachmaninoff. Cependant, la grande dépression des années 1930 coupe court à son rêve et à sa carrière américaine. Il part en 1935 pour Shanghai où il rejoint l'importante communauté russe venue de Vladivostok après la victoire des bolcheviks. Pendant le Seconde Guerre mondiale, Vertinski a le mal du pays (peut-être sous l'influence de ses propres chansons) et il finit par écrire une lettre à Staline lui-même pour lui demander la permission de rentrer, en échange de sa contribution à la Russie soviétique. De manière surprenante, sa demande est acceptée et Vertinski est pris au mot. Quand il revient en Russie en 1943, il devra se produire dans tout le pays sans relâche, chantant dans les kolkhozes et les usines de Kaliningrad jusqu'à Sakhaline. Vertinski donnera un total de deux mille représentations dans ces années-là, n'épargnant aucun effort pour racheter son ancien comportement " bourgeois ". Le personnage de Vertinski sera même utilisé dans les films de propagande soviétique pour incarner les méchants, pour lequels il recevra le prix Staline en 1951. Il meurt six ans plus tard à l'hotel Astor de Leningrad.

10/2017