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Lucie Mougenot

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Littérature étrangère

Malva

Depuis son étrange paradis, Malva raconte sa courte vie et surtout celle de ses parents, Pablo Neruda et Maria Hagenaar. Voyageant au gré de ses réminiscences et de ses lubies à travers le monde et les époques, elle revient sur leur rencontre en Indonésie, leur mariage, leur installation à Buenos Aires puis à Madrid. Elle s'évertue à saisir ce qui les a liés puis séparés, à approcher le feu poétique et politique dont brillait Pablo. Profondément blessée par le choix de son père de quitter le foyer après sa naissance, Malva veut comprendre ce qui l'a poussé à la fuir, elle, sa fille atteinte d'hydrocéphalie, et à l'effacer de sa mémoire. Cherchant obstinément à circonscrire la douleur de l'abandon, ivre de la parole dont elle a été privée pendant ses huit années sur terre, Malva harangue, non sans malice, ceux qui partagent son sort d'enfant délaissé : Daniel Miller, Eduard Einstein, Lucia Joyce et d'autres. Jusqu'à l'auteur, Hagar Peeters, dont l'enfance a été marquée par l'absence paternelle. Son père, journaliste en Amérique latine, a notamment couvert l'enterrement de Pablo Neruda et rendu hommage au courage des Chiliens venus en masse accompagner le cercueil et crier, à la barbe de la junte, que le poète restait "présent, maintenant et toujours ! ". C'est aussi ce que proclame Malva, d'une petite voix aigre-douce, tout en revendiquant sa place dans l'histoire de son père. Hagar Peeters, déjà très remarquée pour son oeuvre poétique, révèle ici son talent de romancière en explorant avec une grâce piquante, émaillée de réalisme magique sud-américain, le mystère de l'amour et de l'abandon, la force du souvenir et de la poésie.

03/2019

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Littérature étrangère

Le noyau blanc

Rüdiger Stolzenburg a presque la soixantaine. Chargé de cours à l'université de Leipzig, il n'a aucune chance de voir sa carrière universitaire progresser ; en général, lorsqu'un poste de professeur se libère, il est attribué à un collègue de l'Ouest. Son champ de recherches - le librettiste et compositeur Weiskern - n'intéresse personne : impossible donc de trouver des crédits de recherche. Sa vie privée n'est guère plus enthousiasmante, bien qu'il collectionne les femmes, jeunes, voire même très jeunes, et piétine allègrement l'amour de la seule femme qui tienne vraiment à lui. Or, Stolzenburg a des difficultés financières, car dans la nouvelle Allemagne son maigre salaire de chargé de cours ne suffit plus à lui assurer le train de vie auquel il aspire, d'autant que le fisc de la réunification vient de lui notifier un redressement d'impôts assez conséquent. Rüdiger croit voir son heure de chance dans une proposition qui lui parvient via Internet : un collectionneur l'informe être en possession de manuscrits inédits et inconnus de Weiskern pour lesquels il cherche un acquéreur. Pris d'une passion furieuse pour ces textes, il remue ciel et terre pour trouver l'argent. Envisage même de se laisser acheter par un étudiant en échange d'un diplôme. Christoph Hein a habitué ses lecteurs à son regard lucide et à ses descriptions sobres et incisives. Dans ce roman il souligne la façon dont la chute du Mur et la réunification ont profondément modifié le cours de la vie des Allemands de l'Est. Son héros, naïf, mal à l'aise avec les règles d'une société dans laquelle chacun est en concurrence avec tous pour conquérir sa place au soleil, est l'éternel perdant de ce nouvel ordre du monde.

09/2016

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Littérature française

Caprices

Tel un musicien pour se délasser se laisse aller à une composition sans plan déterminé, pour nous faire entendre ses fantaisies sur les thèmes les plus variés, Francis de Miomandre nous ouvre un univers des plus variés où il accueille les plus humbles choses de la vie quotidienne : une bulle de champagne, une touffe de chiendent, une pierre. Les ayant accueillies il les pénètre, leur insuffle son âme emplie d'amour universel, leur prête nos sentiments humains, nos rêves, nos déceptions, et jusqu'à nos larmes. Puis il nous enchante par de petites histoires, vrais contes d'Andersen où l'humour se mêle au lyrisme et nous révèle quelques-uns des symboles les plus pathétiques de notre absurde existence, nous fait entrevoir les vérités les plus profondes. Ce livre que l'on peut ouvrir n'importe où, lire dans tous les sens sans perdre un iota de son charme et de sa haute portée philosophique est enveloppé d'un halo de féerie, d'une vapeur somnambulique, et l'on se demande où est le réel, où est le rêve parce que les envols du songe reposent sur les bases solides de la plus lucide connaissance de la réalité. Caprices est un pas de plus sur la voie royale que l'artiste a empruntée depuis Direction Etoile, Le Fil d'Ariane, Samsara, Les Jardins de Marguilène, Fugues, avec une sûreté sans cesse plus grande. Tout frémissant d'amour bouddhique et nimbé du sourire tendre et mélancolique de la sagesse, Caprices, dans un style de plus en plus dépouillé et ruisselant de poésie, nous amuse, nous enchante et nous laisse au bord de cette angoisse métaphysique qui préoccupe tant d'écrivains plus réalistes.

02/1960

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Littérature étrangère

L'archipel du goulag. Tome 2

" Dans sa lutte inégale contre le pouvoir terrestre, usurpateur et mystificateur, l'homme désarmé n'a pas eu depuis des siècles, sous aucune latitude, de défenseur plus lucide, plus puissant et plus légitime qu'Alexandre Issaïevitch Soljénitsyne... " " C'est probablement le livre de ce siècle. Il va écraser sous sa masse, sous son poids spirituel et temporel, tout ce qui a été publié depuis la guerre... " Ces deux phrases résument les milliers de réactions qui ont salué de toutes parts la publication du premier tome de l'Archipel du Goulag. Ce volume central plonge à présent le lecteur au cœur même de l'histoire et de la géographie de l'Archipel. On assiste à son surgissement, à sa consolidation, à son essaimage et à sa prolifération à la surface de ce pays qui a fini par devenir une sorte d'immense banlieue de ses propres camps, vivant du travail exterminateur d'une nouvelle nation d'esclaves, tout en s'imprégnant peu à peu de ses mœurs et de ses mots. Voici décrite par le menu cette " culture " concentrationnaire qui s'est perpétuée pendant des décennies chez des dizaines de millions d'indigènes de l'Archipel, avec ses rites, ses règles, sa tradition orale, sa hiérarchie et ses castes, jusqu'à engendrer comme une nouvelle espèce infra-humaine -les zeks, peuplade unique dans l'Histoire, la seule sur cette planète à avoir connu une extinction aussi rapide et à la compenser par un mode de reproduction non moins accéléré : les flots successifs d'arrestations massives. Impossible à un seul rescapé de tout vouloir décrire en quelques centaines de pages, précise Soljénitsyne ; ajoutant toutefois : " Mais la mer, pour savoir quel en est le goût, il n'est besoin que d'une gorgée. "

09/1974

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Littérature française

Les enfants du quartier sombre

« Avant de se lever et partir, ils ont tous compris, à travers tous les récits de Conakry-Matin, les vicissitudes inutilement vécues. Ils comprennent à ce point que leurs rêves ont fondu, puisqu'ils savent pertinemment qu'ils sont loin d'obtenir gain de cause auprès de monsieur Emploi, cambré à verser le sang à flots comme gage de survie. De même, ils viennent de loin pour marcher vers le devenir, éclairant ceux qui sont insensibles ; ils veulent aller vers cette raison longtemps désavouée. Aussi, ils partent avec la conviction qu'ils y arriveront dans l'ivresse de la liberté en marche. » Tragédie moderne, chronique lucide de la société guinéenne, ce roman choral est un uppercut qui renvoie directement à l'horreur du Stade du 28 septembre, voilà plus de quinze ans. Comme l'explicite la préface d'Alimou Camara : « Les Enfants du quartier sombre, c'est le récit d'une marche, inéluctable et tragique, vers la mort. Mohamed Salifou Kéita dépeint dans son roman le quotidien d'une jeunesse en perdition qui se rebelle, une jeunesse qu'on perd et qui se perd dans la ville de Conakry. De fait, l'organisation d'une marche de protestation contre les puissants de la ville occupe le « cercle » des jeunes désœuvrés, chômeurs et déflatés. Les quatre meneurs, férus de littératures, de philosophies, de discussions et de débats sans fin, sont sans illusions sur l'issue de la marche. Maracaibo, Conakry-Matin, Decoya et Houssei sont comme des âmes damnées et errantes de la ville. [...] C'est le roman d'une ville et de ses habitants. Une humanité qui se débat pour rester debout ; une ville dont le cœur palpite et dont le pouls bat au rythme de ses quartiers sombres. » Une œuvre bouleversante mais nécessaire.

10/2015

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Policiers

Alibis N° 60, automne 2016 : Spécial "Personnages récurrents"

LES FICTIONS : « Fragile comme des empreintes dans la neige  », de Richard Ste-Marie  ; «  Le Faux-cils  », de Johanne Seymour  ; « La Ruée vers l'or  », d'André Jacques  ; «  La Tête de violon  », de Jean Lemieux  ; «  La Burqa de fer  », de Jean-Jacques Pelletier. L'ARTICLE : « Conversation avec Norbert Spehner », de Philippe Turgeon. Avec « Fragile comme des empreintes sur la neige », Richard Ste-Marie convie le lecteur à une rencontre exclusive entre ses deux personnages fétiches : Hämmerli, le tueur à gages amateur d'opéra et Pagliaro, sergent-détective qui se démarque de tous les clichés du policier habituel. Quant à elle, Johanne Seymour propose une enquête de Kate McDougall qui trouve un indice bien particulier… « Le Faux cils » lui donnera beaucoup de fil à retordre ! L'islam est sans nul doute l'un des sujets brûlants de l'actualité mondiale. Jean-Jacques Pelletier s'y attaque avec « La Burqa de fer ». Gonzague Théberge, enquêteur à la retraite, tombe sur un cadavre au cours de sa promenade quotidienne. Tout semble pointer vers un meurtre aux motivations racistes… sinon pourquoi le corps serait-il enfermé dans une burqa de fer ? « La Tête de violon » de Jean Lemieux met en scène André Surprenant, sergent-enquêteur pour la Sûreté du Québec, qui doit remonter aux origines d'un violon pour comprendre les motivations d'un crime. Finalement, nous assistons à une conversation entre le lieutenant-détective Lucien Latendresse et l'antiquaire Alexandre Jobin qui mène à la résolution d'un crime dans « La Ruée vers l'or » d'André Jacques. Les lecteurs sont choyés : le numéro 60 d'Alibis contient une entrevue exclusive avec Norbert Spehner, spécialiste du roman policier et critique régulier dans plusieurs médias. De nombreuses critiques de romans viennent clore ce soixantième numéro.

03/2017

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Théâtre

Théâtre. Tome 2, Le voyage de derrière la montagne ; Le drame du Fukuryu-Mary

Le tome II du Théâtre de Gabriel Cousin contient deux pièces consacrées à des problèmes actuels. Les choeurs sont promus au rang de protagoniste et les véritables héros en sont la foule, la vie quotidienne et l'homme moyen. Le Drame du Fukuryu-Maru est l'histoire d'un couple japonais qui se débat entre les préjugés anciens et les exigences de la vie moderne. Une jeune fille de famille aristocratique, Matsuyama, défigurée et stérile depuis l'explosion de la bombe atomique de Nagasaki, refuse l'amour d'un jeune pêcheur, Urashima. Au cours d'une campagne de pêche, celui-ci subit à son tour les effets radioactifs de l'expérience de la bombe H. Matsuyama accepte alors son amour et décide de se faire faire une opération de chirurgie esthétique. Pendant son absence Urashima meurt. Et Matsuyama, dont l'opération a réussi, veut rejoindre son fiancé pendant la procession des cendres. Mais la foule l'en empêche : redevenue belle, elle ne sera pas seule, le peuple a besoin de beauté pour vivre. Le voyage de derrière la montagne met en scène la vie quotidienne d'un petit village d'une région du tiers-monde où règne l'angoisse de la faim. La vieille Orin réfléchit sur sa vie et cherche une bru pour son fils veuf qui la conduit au sommet de la montagne parmi les squelettes de vieillards ayant déjà accompli ce pèlerinage. Sous prétexte d'atteindre le dieu, elle se laisse mourir de faim, abandonnant sa nourriture aux plus jeunes. Mais son petit-fils, plus lucide et moins résigné, rêve à une vie meilleure et espère aller un jour de l'autre côté de la montagne où la faim est inconnue.

11/1964

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Critique littéraire

Drôle de vie

Née à Bologne en 1916, fille d'une exilée russe juive et d'un extravagant père italien, Elisabeth Naldi rencontre Roger Vailland en 1949. C'est une renaissance, pour elle comme pour lui. Elle a trente-trois ans, a connu la scène, deux maris, la Résistance en Italie. Il est écrivain, communiste, libertin, il émerge de la drogue. Ensemble, ils entrent dans la passion d'une vie dédiée à la littérature, la politique et aux ballets nocturnes. Fuyant Paris, ils s'installent à la campagne, dans l'Ain, près des paysans et des ouvriers. C'est là que Roger, poursuivant l'œuvre commencée avec Drôle de jeu et Bon pied bon œil, écrit Beau Masque, 325000 francs, La Loi (prix Goncourt 1957), La Fête, La Truite. Il meurt à cinquante-sept ans d'un cancer du poumon. Elisabeth reste seule dans leur maison de Meillonnas, où elle assume avec courage et humour son nouveau rôle de veuve d'écrivain, en même temps que son statut de personnage de roman. Toute leur vie, Elisabeth et Roger auront cherché un bonheur loin des convenances. Avec la liberté de ton d'une femme lucide et pleine de fantaisie, Elisabeth raconte la storia Vailland, l'ascèse de l'écriture et du militantisme, mais aussi les filles et l'alcool quand Roger avait bien travaillé, les relations avec le " Parti ", ainsi qu'avec d'autres couples fameux - Aragon et Elsa Triolet, Sartre et Beauvoir... Elle livre sa vérité propre, tragique et loufoque à la fois, et, au fil d'épisodes cocasses et de portraits grinçants, jette une lumière nouvelle sur une époque que l'Histoire et la littérature ne sont pas près d'oublier. Elisabeth est morte juste avant la parution de ces mémoires (1984), écrits avec Philippe Garbit, producteur à France Culture, et réédités à l'occasion du centenaire de la naissance de Roger Vailland.

02/2007

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Education nationale

Quelle université pour le XXIe siècle ?

En France, il y a désormais un ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation. Si l'on se réfère à ce titre, les universités relèvent de l'enseignement supérieur. Mais que deviennent-elles ? Trois logiques au moins s'affrontent : la logique financière et organisationnelle, la logique administrative et la logique des finalités. Et cinq options sont envisagées. Restaurer l'université selon une forme ancienne devient impossible. La réformer par de nouvelles structures devient insuffisant et constitue même une impasse. Certains veulent sa disparition. Enfin, d'autres en font l'analyse d'une destruction calculée. Pour l'auteur, il y a une cinquième voie. Dans cet essai, il propose deux lectures : l'université au XXIe siècle et l'université pour le xxi° siècle. La première peut être en partie appréhendée en termes de tendances lourdes, faisant de l'université un enseignement supérieur parmi d'autres. La seconde peut être esquissée en référence à des finalités. La première s'exprime en termes d'abord quantitatifs, la seconde en termes qualitatifs. Si les ouvrages sont nombreux sur l'école, ils sont rares concernant l'université et alors souvent centrés sur l'histoire, ou plus récemment sur le "management". L'auteur, outre son vécu, privilégie ici, dans un premier temps, des analyses secondaires et des auteurs, dont certains trop oubliés en ce domaine, comme Gaston Bachelard, Jean Fourastié, Henri Laborit et Edgar Morin. Puis il étudie les principaux auteurs contemporains ayant travaillé sur l'université. Dans un second temps, il écoute et recueille des dires et écrits d'universitaires, d'étudiants, de seniors et d'observateurs. Un essai courageux, lucide et qui propose des perspectives mettant l'accent sur les finalités.

02/2021

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Littérature étrangère

J'ai vécu si peu. Journal du ghetto d'Oradea

" Je ne veux pas mourir, mon petit Journal ! Je veux vivre, même si je dois être la seule à rester ici ! Je me cacherai dans une cave, un grenier ou n'importe quel trou jusqu'à la fin de la guerre. " C'est la dernière note du Journal. Quelques jours plus tard, Eva Heyman est envoyée avec ses grands-parents vers Auschwitz, où elle est morte dans une chambre à gaz le 17 octobre 1944. Elle avait treize ans. Commencé le 13 février 1944 et interrompu le 30 mai 1944, ce bref Journal a été écrit en partie entre les murs du ghetto d'Oradea, le plus grand du nord-ouest de la Transylvanie, considéré comme un modèle par les autorités fascistes de Budapest. La jeune adolescente y consigne avec une lucidité troublante son inquiétude qui, au fil des jours, devient panique devant l'évolution des événements : " Je pense toujours que nous avons vécu le pire et après je me rends compte que tout peut toujours être pire et même pire que pire... " À treize ans, Eva connaît et comprend des faits que d'autres, bien plus âgés, ignorent. Ses parents sont des intellectuels progressistes et donnent une appréciation lucide de l'évolution de la guerre, ressentent le danger de mort qui les guette. Ce texte, d'une grande sensibilité, montre une fillette intelligente, pleine de vie, qui veut se réjouir de la beauté des choses, qui aime les gens et a confiance en eux. Ainsi, sans le vouloir, et dans un récit d'une sincérité et d'une pureté impressionnantes, Eva Heyman a légué à la postérité l'une des plus importantes sources documentaires sur le sort des Juifs de cette région.

05/2013

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Théâtre

Les Contens. Comédie nouvelle en prose française

Fils du grand humaniste Adrien de Turnèbe, et élevé selon ses voeux, le jeune Odet vit sa carrière trop tôt fauchée : il mourut le 20 juillet 1581, à l'âge de 28 ans, ne laissant à la postérité pratiquement que cette comédie. En plus d'un sens, Les Contens sont une oeuvre unique, et passent, à très juste titre, pour le chef-d'oeuvre de notre comédie renaissante. Ils représentent l'aboutissement le plus achevé, le fleuron de tout l'effort mené depuis une trentaine d'années pour créer en France le genre de la comédie littéraire moderne. Si Les Contens, composés par Turnèbe en 1580 ou 1581 mais laissés manuscrits à sa mort, restent, par l'art et la pensée du dramaturge, une oeuvre singulière, ils se nourrissent des acquis français, eux-mêmes tributaires des sources italiennes. Dans la marche de l'intrigue, dans l'organisation du mouvement scénique des Contens, Turnèbe déploie déjà ses talents. C'est aussi un des attraits des Contens d'avoir su restituer la vie sur la scène - impression qui est due en grande partie à la prose choisie par Turnèbe. Il fait surtout merveille dans l'invention des personnages ; ayant observé la vie, il peut être original, alors même qu'il s'inspire fortement des traditions comiques italiennes et françaises de la Renaissance. Pas plus que le rire n'est éclatant chez Turnèbe, la satire n'est virulente. Pourtant le regard du dramaturge est aigu, acéré sur le monde qu'il met en scène, assez profondément immoral, mais sans cynisme. On voit chez Turnèbe plus d'indulgence que de mépris pour les hommes tels qu'ils sont, plutôt un détachement lucide mais souriant. Plus grinçants, Les Contens n'apporteraient pas ce bonheur au lecteur.

01/2020

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Littérature étrangère

Les cinq derniers jours du prophète

Ce roman évoque, le récit surprenant de la dégradation psychique d'un être, Rahmi Sônmez, poète révolutionnaire, surnommé " Le prophète ". A travers ce personnage à la fois lucide et perdu, drôle et déroutant, Tahsin Yücel nous donne un kaléïdoscope de la Turquie urbaine de la seconde moitié du XXe siècle. Nous accompagnons alors ledit prophète dans son parcours où, dans un état de semi conscience, voire de schizophrénie, il est persuadé que ses rêves se réalisent alors qu'ils sont en train de s'effondrer. C'est le récit d'une douce folie qu'alimente une quête sociale, identitaire et aussi littéraire, celle qui, pour le narrateur, cimente le tout. Le livre s'ouvre sur la présentation des deux amis inséparables que sont Rahmi Sônmez et Fehmi Gülmez. Leur cheminement individuel nous mène de façon inexorable aux cinq derniers jours d'errance qui incarnent et ponctuent la vie de Rahmi Sônmez au cours de laquelle il aura passé son temps, lui, le poète révolutionnaire - certainement plus poète que révolutionnaire - à vouloir être emprisonné, ce fait étant à ses yeux la seule preuve tangible de la réalité de son identité politique. Cette œuvre littéraire, très proustienne, dans la construction des phrases, a l'immense mérite de montrer une juste image de la Turquie de l'époque enfouie sous le joug étatique. La langue semble évoluer en même temps que le personnage qui passe d'un état de souffrance maximum dans la non réalisation de ses rêves à un état de paix intérieure une fois passé de l'autre côté du miroir ; un miroir souvent déformant quand les femmes désirées, les gardiens de cimetière, les geôliers, les enfants et petits-enfants " luciolisés " par la société de consommation naissante, envahissent de désespoir et de fausses illusions le coeur presque brisé du vieil homme. Ce roman a obtenu le prix Orhan Kemal en 1993.

03/2006

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Littérature étrangère

Les outrages

Le Houellebecq danois débarque en France ! Propulsé dans une Europe en crise face à l'islamisation, la montée de l'extrême droite ainsi que la recrudescence de réfugiés, Nielsen imagine une société danoise qui aurait trouvé sa solution : exporter tous ses étrangers sur un terrain racheté au Mozambique. Dans ce contexte intense, une galerie de personnages en crise se déploie. Il y a Stig, issu de la scène rock radicale, devenu un grand galeriste d'art contemporain toujours plus provoc. Son épouse, chercheuse en intelligence artificielle, mutée dans un labo en pleine campagne, les forçant à quitter Copenhague. Leur fille Emma, très fragile, qui a décidé contre leur accord de partir seule au Mozambique pour défendre la cause des immigrés. Et Christian, l'artiste star de Stig, très porté sur la gente féminine et en crise d'inspiration, jusqu'à ce qu'il croise la très jeune Mia, qui va restimuler sa créativité. Alors que Stig, propulsé avec horreur dans une communauté huppée de milliardaires ayant fuit la ville pour renouer avec la nature, trouve un plan diabolique pour que le monde de l'art ne l'oublie pas, sa fille découvre l'amour parmi les opprimés mais aussi les limites de son champ d'action, et Christian se retrouve pris au piège par Mia qui s'avère loin d'être stable mentalement... Dans un monde où le cynisme est roi, chacun va tenter de sauver sa peau, mais à quel prix ? Lecture explosive où humour très noir, plume ciselée, provoc et sexe gouvernent, Les Outrages est avant tout follement intelligent et cruellement lucide. Un roman choc qui ose nous bousculer pour mieux nous montrer les dérives de l'être humain.

01/2019

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Beaux arts

Peintres et vilains. Les artistes de la Renaissance et la grande guerre des paysans de 1525

Ce livre est la chronique illustrée d'une dissidence, une enquête qui soulève un pan de l'histoire méconnue des débuts diablement subversifs de la Réforme et éclaire les liens entre les divers bouleversements qui ont changé à jamais la face du monde au XVle siècle. Il offre un aperçu, aussi vivant qu'instructif, d'un formidable mouvement artistique qui advint en consonance avec un redoutable mouvement social et religieux. Dans la Rhénanie de 1525, la plèbe en révolte inspira les artistes les plus novateurs, parmi lesquels les plus radicaux côtoyèrent l'insurrection et ses meneurs, au péril de leur vie. Tel fut l'engagement des maîtres allemands du début de la Renaissance : Lucas Cranach l'Ancien, Albrecht Dürer, Hans Holbein le Jeune, mais aussi le turbulent Urs Graf et le truculent Hans Sebald Beham, ou Matthias Grünewald, l'anabaptiste subtil. Ils entreprirent de représenter le mode de vie des gens du peuple, transposant les aspirations des pauvres et relatant leurs tribulations comme leurs actes de résistance. C'est ainsi que ces transgresseurs sublimes ont porté témoignage de cette révolte aux relents d'hérésie et de lutte des classes que fut la guerre des Paysans. Composant le grand livre d'heures du petit peuple, les graveurs et peintres allemands de ces temps de trouble voulurent faire entrer dans le tableau la simplicité débonnaire des danses et débauches des paysans comme leur ardeur à se débarrasser des princes et évêques de toute confession. C'est cette histoire héroïque - et tragique par son sanglant dénouement - que narre Maurice Pianzola, mais aussi les artistes qui ont fourni les illustrations de son récit savant (mais limpide) et passionnant (mais lucide). Son ouvrage est une contribution essentielle à l'histoire de l'art, mais aussi à l'histoire sociale et à celle des aventures de la liberté.

11/2015

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Construction européenne

Les défis de l'Europe. Les racines d'une civilisation et les limites d'une bureaucratie

Envahie, divisée et culpabilisée, l'Europe semble se résigner à s'effacer discrètement et à sortir de l'histoire. Aux yeux de nombreux Européens, leur continent, mutilé et défiguré par les technocrates de Bruxelles, n'apparaît plus que comme une entité géographique sans frontières ni souveraineté, sorte de prélude à la construction d'un grand espace cosmopolite. Une civilisation aussi ancienne que la nôtre ne peut pourtant pas être réduite à quelques dizaines d'années de piètre gouvernance bureaucratique. L'Europe est avant tout une unité ethnique, anthropologique, culturelle, spirituelle et politique, une unité qui peut devenir un centre dans les eaux agitées et tumultueuses de l'actuel désordre mondial. Et si c'était justement dans une prise de conscience de leurs racines et des défis auxquels leur civilisation est confrontée au XXIe siècle que les Européens pouvaient retrouver le chemin d'une existence propre et originale ? C'est à une juste estimation de ces défis qu'est consacré l'essai de Pietro Ciapponi. Cet essai, écrit en Italie, nous offre une vision lucide des enjeux et des épreuves militaires, écologiques, technologiques et démographiques qui attendent nos peuples et dévoile l'immense potentiel qui sommeille encore en eux. De ce fait, il mérite une large diffusion à l'échelle européenne. Il est temps de reprendre conscience de nos origines et de tracer notre route vers des destinées plus glorieuses. Pietro Ciapponi, né en 1996, a grandi à Sondrio, en Lombardie. Nourrissant depuis toujours un vif intérêt pour la politique, l'histoire et la philosophie, il s'inscrit à l'université de Milan et obtient un diplôme en sciences politiques en 2021. La même année, il publie son premier essai, Les défis de l'Europe, aux éditions Passaggio al Bosco.

01/2023

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Spécialités médicales

Les États modifiés de conscience

On regroupe sous l'étiquette " états modifiés de conscience " un certain nombre " d'états seconds " au cours desquels le sujet vit une modification plus ou moins profonde de son état ordinaire de conscience, de sa perception de l'espace, du temps et de sa propre identité. Ces états peuvent se produire naturellement et nous pouvons en faire l'expérience, parfois, au moment de nous endormir. Un autre exemple est le rêve lucide où le rêveur sait qu'il rêve. La modification de l'état de conscience ordinaire se produit également dans l'expérience dite de " hors corps " - quand le sujet a l'impression de " quitter son corps " - dans la transe sexuelle de l'orgasme et celle du seuil de la mort. La modification de l'état ordinaire de conscience peut se produire encore par l'effet d'une induction hypnotique, par la consommation des drogues et par la pratique du yoga ou de la méditation zen. Elle peut surgir dans une foule, une émeute, une révolution ou être provoquée par un culte de possession comme le vaudou, un concert de rock, une séance de psychanalyse ou de bio-énergie. De nombreuses sociétés cultivent ces états qu'elles produisent par des ethnométhodes pour marquer certaines circonstances importantes de la vie quotidienne. Les Grecs et les Romains faisaient de même. Par contre, la civilisation occidentale a tendance à les ignorer, à les classer parmi les états anormaux ou paranormaux alors qu'ils sont en général normaux. Toutefois, depuis la " révolution psychédélique " des années 60, une nouvelle génération de psychologues et d'anthropologues commence à les étudier systématiquement soit en laboratoire, soit sur le terrain. Le présent ouvrage fait le point de ces recherches au carrefour de la psychologie et de l'ethnologie.

10/1987

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Littérature française

Je m'appelais Marie

« — Vous connaissez bien le proverbe : "Quand on tend une main aux Arabes, ils te coupent les deux mains !" Jamais ils n'accepteront. Pour eux, c'est tout ou rien ! Ca ne marchera pas, nous dit Antoine. — Qui sait ? répond Lucien d'un air pensif... Moi je crois qu'il ne faut pas généraliser et nous avons tous des connaissances, des amis musulmans qui souhaitent, et vous le savez bien, nous garder en Algérie. Je crois que c'est plutôt l'OAS qui ne voudra pas de ce marché, de ce partage... — Oui, mais comment il se ferait, ce partage ? ajoute Joseph... Qu'est ce qu'ils nous laisseraient ? Un département ? Une ville pour un million de pieds-noirs ? Oran ? Alger ? Constantine ? Le Sahara ? Et avec la nouvelle richesse du pétrole, ça m'étonnerait que les Arabes acceptent ! — Et si ça se faisait, on aurait des frontières ? Tu vois un peu d'ici la chose ! renchérit Jean Claude... Nous, les femmes, nous laissons parler les hommes. Nous en avons déjà discuté entre nous, et nous sommes persuadées que la France est en train de nous abandonner et que, tôt ou tard, il va bien nous falloir partir ! Partir ! Ce mot fait mal. » Avec en toile de fond la Seconde Guerre mondiale, et plus tard la guerre d'Algérie suivie d'un douloureux exode en 1962, une femme s'efforce de construire sa vie. Elle connaîtra des instants de bonheur, mais aussi de tragiques périodes de douleur, marquées par une terrible malédiction qui la poursuivra d'Oran à Nîmes, jusqu'à sa mort. Dans ce roman inspiré de faits réels, l'auteur donne la parole à la tante de son épouse, Marie Rodriguez (1924-2002), nous confiant son destin dramatique au travers d'une saga familiale authentique et déchirante.

08/2015

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Histoire des idées politiques

L'anarchisme et notre époque. Suivi du Manifeste de l'armée insurrectionnelle d'Ukraine et autres textes... ainsi que de "Makhno est mort !"

"L'anarchisme, ce n'est pas seulement une doctrine qui traite de la vie sociale de l'homme, comprise dans le sens étroit que lui prêtent les dictionnaires politiques et, parfois, lors de meetings, nos orateurs propagandistes. C'est aussi un enseignement qui embrasse la vie de l'homme dans son intégralité." Ainsi commence cette nouvelle édition de ces textes, trop souvent négligés par les penseurs d'aujourd'hui, signés du plus célèbre anarchiste ukrainien de la Révolution russe et de la terrible guerre civile qui ensanglanta la future URSS dans les années vingt. Des textes fondateurs de la pensée politique de celui qui réussit à tenir tête à Lénine, Trotsky comme à l'armée des contre-révolutionnaires sous les ordres du général Dénikine. Ce recueil est précédé de la vibrante nécrologie que Lucile Pelletier, célèbre militante anarchiste française, écrivit en 1934 dans la revue libertaire, La Révolution prolétarienne, en hommage à Nestor Makhno. Paysan, ouvrier, anarchiste, ennemi des bolcheviks comme des Russes blancs, chef de guerre, théoricien, révolutionnaire, accusé d'antisémitisme, leader des paysans ukrainiens, homme d'action, prisonnier politique, "terroriste", mais aussi organisateur de talent, Nestor Makhno est un personnage fascinant que les textes que nous publions ont peine à cerner. Réfugié à Paris en 1925 — après avoir vécu d'incroyables aventures dans une Europe centrale en ébullition depuis son départ d'Ukraine en 1921 — malade, épuisé, Nestor Makhno, tout d'abord ouvrier fondeur puis tourneur chez Renault, bénéficie dans les derniers jours de sa vie de la solidarité des anarchistes français. C'est Hélène Châtelain qui définit le mieux Makhno : "La légende construite parla propagande soviétique en fait un anarchiste-bandit-antisémite contre-révolutionnaire ; pour ceux de Gouliaïpolié, il défend au contraire la liberté et les pauvres, et les journaux makhnovistes montrent qu'il a aussi défendu les Juifs".

08/2021

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Policiers

Absences

Amanda O’Toole, soixante-quinze ans, a été retrouvée morte à son domicile, amputée des quatre doigts de la main droite. La police soupçonne la voisine et amie d’Amanda, le docteur Jennifer White – chirurgien orthopédiste à la retraite – d’être l’auteur de ce meurtre. Mais Jennifer est atteinte de la maladie d’Alzheimer et ne sait pas elle-même si elle est coupable. Elle partageait une relation extrêmement intime avec Amanda, même si ces deux femmes énergiques et orgueilleuses avaient été aussi par moments des adversaires redoutables. Amanda entendait parfois régir la vie de son amie et, sous prétexte d’honnêteté, dévoiler certains secrets qui auraient dû rester enfouis, relatifs notamment au mari de Jennifer, James, avocat retors, décédé depuis peu. Sans enfant et marraine de Fiona, la fille de Jennifer, Amanda instaurait une rivalité et un rapport de forces constant avec son amie, plus brillante, plus gâtée qu’elle par la vie. C’est la voix de Jennifer qui raconte cette amitié complexe et sa vie passée, de façon fragmentée, par des bribes, des souvenirs, des conversations, ou encore par le biais d’un journal qu’elle tient pour tenter de combattre la détérioration de son esprit et où ses enfants et amis sont amenés à témoigner de temps à autre. Ils émergent également de ce brouillard de la conscience, tour à tour confuse et lucide, de Jennifer : Amanda, bien sûr, Fiona, mais aussi Mark, le fils de Jennifer, ambigu comme son père, ou encore Magdalena, la garde-malade dévouée mais qui a des secrets, elle aussi. Jennifer White finira-t-elle par retrouver dans sa mémoire malade des révélations sur le meurtre d’Amanda ? Est-ce elle qui l’a tuée et lui a ainsi mutilé la main ? Pour quelle raison ? Face à une personnalité aussi imprévisible et tourmentée, la vérité ne peut être simple.

03/2013

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Histoire du droit

L'iniquité

L'affaire Dreyfus est une affaire d'Etat devenue par la suite un conflit social et politique majeur de la Troisième République, survenu en France à la fin du XIXe siècle autour de l'accusation de trahison faite au capitaine Alfred Dreyfus, juif d'origine alsacienne, qui est finalement innocenté... Blackboulé aux élections générales de 1893, Clemenceau n'est plus rien. Ne jouissant d'aucune fortune personnelle, n'étant pas disposé à exercer son métier de médecin, le chef radical se consacre entièrement au journalisme. Son quotidien, La Justice, faisant faillite, il devient rédacteur à L'Aurore en 1897 où, à partir de novembre, il commence d'écrire sur l'Affaire. D'abord persuadé, comme Jaurès et tant d'autres, de la culpabilité de Dreyfus, regrettant même presque son abolitionnisme dans un article de 1895 qu'il aura l'honnêteté intellectuelle de placer au début du premier volume, Clemenceau est convaincu par Lucien Herr de l'irrégularité du procès de 1894. Dès lors, chaque jour, sa plume va grincer, écorcher, trancher dans le vif et sans répit. On se souvient que c'est lui qui trouve le titre de l'article de Zola, "J'accuse" , paru le 13 janvier 1898 ; on se souvient aussi qu'il participe à la défense de l'écrivain dans le procès que lui intente l'état-major, procès au terme duquel le jury, sourd à l'avertissement de Clemenceau ("Nous comparaissons devant vous. Vous comparaissez devant l'Histoire"), condamne Zola qui choisit l'exil. Henry s'est suicidé, Picquart est en prison et les dreyfusards ont enfin obtenu qu'on révise le procès de 1894. Ses articles, Clemenceau les a rassemblés tels qu'écrits dans l'urgence, dans la fièvre d'une affaire complexe aux multiples rebondissements...

07/2022

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Ouvrages généraux

Histoires de l’Europe. Œuvres choisies

Pour qui s'intéresse à l'histoire intellectuelle du premier XX ? siècle, Henri Pirenne (1862-1935), père de l'école historique gantoise, incarne une figure majeure. Formé à l'historiographie allemande - qui considère les facteurs collectifs et inconscients plutôt que les faits politiques et le rôle des individus -, auteur d'une Histoire de la Belgique à succès, symbole de la résistance à l'occupation allemande pendant la Première Guerre mondiale, l'historien belge a développé au cours des années 1920 une nouvelle vision de l'histoire de l'Europe en ouvrant deux immenses chantiers dont les chercheurs, aujourd'hui encore, n'ont pas fini de débattre : l'histoire urbaine et l'origine des villes ainsi que les conséquences pour l'Europe de la progression de l'islam au VII ? siècle. En résultèrent deux grands livres parus après sa mort : Histoire de l'Europe (1936) et Mahomet et Charlemagne (1937), dont les lignes principales avaient été tracées depuis 1922. Les travaux de Pirenne sur l'histoire du Moyen Age publiés dès la fin du XIX ? siècle l'avaient déjà gratifié d'une forte notoriété, impressionnant par son souci d'incorporer la démographie historique et la recherche statistique en histoire économique et sociale. Précurseur et pionnier, il fut l'un des premiers à se pencher sur les apports d'une histoire comparative, développant des méthodes originales et novatrices, ainsi qu'un véritable art de la synthèse. Composée d'ouvrages fondamentaux, devenus des références historiographiques, et d'un vaste choix d'articles, discours, essais et journaux qui donnent à voir l'ampleur des thèmes abordés par Pirenne, cette édition "Quarto" propose au lecteur de retracer le cheminement d'un intellectuel dont l'influence marquera la création de la revue des Annales par Marc Bloch et Lucien Febvre.

09/2023

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Littérature chinoise

Rouges étaient les flots

Ce récit autobiographique raconte La Révolution culturelle vue par un enfant, devenu jeune homme, de 1966 à 1977, au sein de sa famille dans la grande ville de Harbin au nord-est de la Chine. L'auteur mêle la petite et la grande histoire, qu'il a appris progressivement à déchiffrer, au cours des événements, et bien des années après, où les instants isolés révèlent soudain leur sens grâce à ses souvenirs et, sans doute aussi, à son imaginaire. C'est aussi l'occasion de découvrir une famille sur trois générations, et la mémoire d'un passé plus lointain, emporté par les flots d'une histoire démesurée, celle des rêves et des expériences de Mao, mais aussi des espoirs et des désenchantements de tout un peuple, entrainé dans une épopée tantôt tragique, tantôt tragi-comique. Une galerie de personnages : une grand-mère bouddhiste, un bibliothécaire taciturne, des gamins du voisinage, un vieux photographe exproprié, amoureux de Tchaïkovski, un jeune conteur de Victor Hugo devenu peintre, un couple d'artistes au destin brisé, un soldat désemparé après sa démobilisation, un baryton qui a raté son suicide, une belle danseuse foudroyée par la maladie, une jeune colporteuse de rumeurs qui diffuse le faux testament du Premier Ministre Zhou Enlai... autant de figures qui viennent entrelacer leurs drames à ceux du père de l'auteur, chef d'entreprise broyé par la tourmente politique, et de sa mère, courageuse mais inquiète du destin de ses enfants piégés dans le chaos et la violence. Un témoignage poignant, écrit avec pudeur et retenue, dans un style maîtrisé et lucide, sur la Chine d'une époque particulière, qui croule sous le poids de son Histoire, où ville et campagne se découvrent, où destruction et création s'entrecroisent et donnent à voir un pays où les destins individuels se jouent sur fond d'hystérie collective.

05/2023

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Littérature française

Cacophonie

Sur les rives du continent clair-obscur, dans une ville ocre aux matins bleus, une grande maison jaune. Le ressac de la mer, les rumeurs de la rue adjacente et les chants d'oiseaux pourraient en faire un paradis. C'est d'ailleurs ainsi que la voyait Sali, veuve de l'ancien propriétaire, qui vit là depuis sept ans, lorsque ses multiples fugues hors du continent ne la font pas dériver ailleurs. Amère désillusion cependant : alors qu'elle imaginait y trouver un enracinement possible, un lieu, enfin, d'appartenance, la femme vieillissante est progressivement rejetée par sa belle-famille. Dans cette maison où elle pensait se reconstruire, son être entier commence à s'émietter. Prisonnière d'un espace immense, d'une rue qui semble l'observer, d'un flot d'images télévisées et de pensées qui l'assaillent, Sali suffoque et ne sait plus que faire. Partir ? Mourir ? Se résigner ? Non, il ne faudrait jamais se résigner dans un monde où, malgré le règne des apparences, la folie du sang et la médiocrité si bien partagée, des hommes et des femmes tentent, à leur manière, de survivre. Récit aux allures de monologue intérieur, Cacophonie plonge le lecteur au coeur de la détresse et des pensées d'une femme en butte à la solitude mais aussi aux prisons qu'elle se construit. Y reviennent, lancinantes, la douleur de l'abandon maternel et la difficulté de la quête de soi. Un texte âpre mais lucide et nécessaire sur le monde contemporain, l'Afrique et la construction de soi. Un texte dont les pages vibrent de la violence du cri longtemps contenu mais qui, cependant, n'abandonne pas l'espoir qu'a chacun de trouver, un jour, sa place dans le monde, le "canari où se reposer"

07/2014

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Littérature française

On l'appelait Maïco. Marie-Claude Vaillant-Couturier, la révoltée

Marie-Claude Vaillant-Couturier, dite Maïco, est la fille gâtée de Lucien Vogel, éditeur d'avant-garde, et d'Yvonne de Brunhoff, soeur du créateur de Babar. Adolescente à l'aube des années 30, Maïco danse aux bals russes, pose pour Vogue, croise Aragon, Picasso, Gide, Malraux, bien d'autres... Apprentie peintre à Berlin en pleine montée du nazisme, elle en revient métamorphosée et se tourne vers la photo. Elle fréquente alors les jeunes Capa, Cartier-Bresson, Gerda Taro, qui, comme elle, voient en l'URSS le seul rempart contre le nazisme. En 1933, son reportage clandestin au camp de Dachau est un scoop mondial. Elle rencontre alors Paul-Vaillant Couturier, rédacteur en chef de L'Humanité, leader communiste et prophète vénéré des " lendemains qui chantent " . Coup de foudre absolu. L'amour et la politique ne feront désormais qu'un. A la mort de Paul, en 1937, la jeune veuve de 25 ans incarne les espoirs du héros du Front Populaire. Résistante de la première heure, déportée à Auschwitz puis à Ravensbrück, son courage est inébranlable. Libérée par l'Armée Rouge, elle choisit de rester auprès des mourants et afin que " le monde sache l'horreur concentrationnaire " . Seule femme à témoigner au procès de Nuremberg, Maïco avance sans faillir vers Göring et les accusés nazis, devant une assistance saisie par un " effroi sacré " , selon Joseph Kessel. Les images de sa déposition implacable font le tour du monde. " Regardez-moi, car à travers mes yeux, ce sont des centaines de milliers de morts qui vous regardent, par ma voix ce sont des centaines de milliers de voix qui vous accusent " . Devenue député, elle fera voter à l'Assemblée Nationale l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité, sans jamais renier son dévouement à l'URSS et sa foi en l'idéologie stalinienne.

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Notions

Vouloir la vérité. Philosopher dans la nuit

"Ce livre voudrait offrir un itinéraire en philosophie, a priori éloigné de l'actualité donc ; mais il part malgré tout de nos inquiétudes d'aujourd'hui. Alors que la violence semble s'imposer de nouveau, dans les confrontations géopolitiques, mais aussi dans notre société et même dans les mots de la vie publique, faut-il nous y résigner ? Est-ce se bercer d'illusion que de croire qu'un bien peut advenir ? La politique et la vie éthique peuvent-ils se fixer pour cap une vie meilleure, une vie heureuse ? " François-Xavier Bellamy, longtemps professeur de philosophie, poursuit dans l'action politique une réflexion amorcée dans les livres. En parallèle de son engagement, il n'a jamais interrompu l'aventure qui dure depuis dix ans d'un cours de philosophie en public : deux fois par mois, au théâtre Hébertot à Paris et à travers toute la France, il écrit et anime des conférences sur des questions toujours nouvelles, qui réunissent chaque année des milliers de spectateurs. Ce projet devient pour la première fois l'objet d'un livre. François-Xavier Bellamy nous confie aujourd'hui trois grandes méditations : sur un monde sans violence, sur la possibilité du progrès, et sur la quête du bonheur. Avec pour fil rouge la perspective de renouer avec l'espoir, qui semble avoir fui nos conversations comme notre débat public... Ces étapes permettent de retrouver, avec les auteurs qui ont fait l'histoire de la pensée, le chemin d'une réflexion plus lucide sur les défis qui nous attendent. Mêlant lectures, choses vues, éléments d'histoires, évocations, citant Platon, Racine ou Alain, François-Xavier Bellamy nous offre une occasion de repenser la quête de nos vies et notre place dans l'histoire, avec la liberté philosophique et le ton pédagogique qui sont la marque de ces rencontres.

10/2023

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Nietzsche

Les foudres de Nietzsche et l'aveuglement des disciples

Etant donnée l'hostilité ouverte, constante, déterminée, et même violente que Nietzsche a manifestée contre la démocratie, le socialisme, le progrès social, l'égalité - y compris, soit dit en passant, l'égalité entre les hommes et les femmes -, il n'aurait jamais dû, semble-t-il, y avoir un Nietzsche de gauche. Et pourtant il y en a bel et bien eu un, et c'est même celui-là qui a occupé dans la période récente le devant de la scène et est devenu plus ou moins le Nietzsche officiel. Il n'en demeure pas moins qu'entre ceux qui ont cherché à faire de lui un penseur nazi et ceux qui ont considéré comme allant au contraire à peu près de soi qu'il était un penseur de gauche, on se demande réellement à qui il faut décerner la palme dans l'art de ne pas lire un auteur. Depuis des décennies, Nietzsche est en France l'objet d'une double méprise : l'invention absurde mais tenace d'un Nietzsche de gauche (Deleuze) et son enrôlement dans une vaste entreprise de reformatage du concept de vérité (Foucault) que toute sa philosophie contredit. Lecteur assidu, resté longtemps discret, Jacques Bouveresse n'a jamais cru à ces fables. Poursuivant la réflexion engagée dans Nietzsche contre Foucault (Agone, 2016), et au terme d'une longue plongée dans les Fragments posthumes, dont il a tiré un trésor de citations, retraduites puis agencées avec soin, il offre ici un double portrait du philosophe : Nietzsche en chercheur de vérité, moraliste ironiste, lucide et passionné ; Nietzsche en penseur politique, défenseur d'un radicalisme aristocratique selon lequel la masse du peuple doit obéir, travailler et être asservie pour que l'élite puisse être libre, commander et créer.

10/2021

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Notions

Contre la détestation de l'Homme par l'Homme. Plaidoyer pour la personne humaine

Quelle drôle d'époque qui désespère d'elle-même et des hommes, alors même qu'elle est censée célébrer la jouissance immanente et perpétuelle ! L'homo festivus a la gueule de bois... Les raisons en sont en effet multiples : la préservation de la planète, la volonté de ne pas dévaloriser la femme, la difficulté d'octroyer du temps et de l'argent pour élever des enfants, etc. obligent l'homme moderne à se déconstruire et à se réinventer. L'heure n'est plus à l'insouciance. Ces bonnes intentions ne font cependant pas son bonheur, bien au contraire, nous expose Véronique Bourgninaud : elles engendrent un antihumanisme fondamental et implacable, nourri désormais du transhumanisme, des études de genre et de l'antispécisme en particulier. Avec conviction, l'auteur démontre ainsi que ces nouvelles prétentions à l'amélioration physique et "morale" du genre humain sont des impasses intellectuelles et éthiques. Plus grave, elles ne font qu'accentuer le désespoir des hommes et la détestation de l'homme par lui-même. Comment l'homme contemporain peut-il se libérer de cet enfermement intellectuel et moral qui conduit à la négation de lui-même ? A quelle condition retrouvera-t-il la dignité et le sens du bien, du beau et du juste qu'il n'aurait jamais dû perdre ? Avec intuition et justesse, l'auteur nous livre des clés pour surmonter le vertige du vide qui nous guette et retrouver le sens de la transcendance si intimement liée à l'homme. Un essai lucide et plein d'espérance pour une époque qui meurt de ne plus en avoir. Véronique Bourgninaud est diplômée de l'Ecole supérieure de commerce de Paris et docteur en histoire moderne. Elle a enseigné la bioéthique pendant quatre ans à l'institut de formation Capsud Méditerranée à Toulon. Elle habite désormais Paris où elle travaille dans une fondation médicale et scientifique.

10/2023

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Epistémologie

Jacques Rancière, aux bords de l'histoire. Recherche sur les noms de l'histoire

"Poétique du savoir : étude de l'ensemble des procédures littéraires par lesquelles un discours se soustrait à la littérature, se donne un statut de science et le signifie" . C'est de cette façon, en apparence modeste, que Jacques Rancière débute Les noms de l'histoire (1992). Mais comment comprendre cette affirmation a priori paradoxale selon laquelle une telle poétique utiliserait des "procédures littéraires" pour mieux se soustraire à la littérature ? Que penser, en outre, de cette idée selon laquelle l'historiographie telle qu'elle s'est pratiquée jusqu'ici aurait systématiquement occulté les conditions même de toute historicité ? L'essai s'avère rapidement être une critique lucide et radicale des fondements mêmes du savoir historique, prenant appui sur certaines hypothèses majeures que le philosophe n'aura de cesse de développer durant tout son parcours : le nouage entre politique et esthétique, l'alliance entre littérature et démocratie caractérisée par un désordre salutaire de la parole. Pourtant, malgré le caractère familier de ces termes pour le lecteur de Jacques Rancière, l'essai conserve toute sa densité, et même une certaine part d'équivocité : c'est parfois entre les lignes qu'il convient de traquer la position de l'auteur, et surtout de cerner les contours de cette "histoire hérétique" vers laquelle il nous entraîne et qui conserve toute son actualité. Fruit d'un travail collectif consacré à cet essai, le présent ouvrage a pour ambition de rassembler des contributions dissensuelles : à l'image de la philosophie qui les inspire, celles-ci, en confrontant Rancière à ceux avec qui il entre en dialogue (Michelet, Benjamin, Althusser, Thompson et d'autres), visent à leur tour à éclairer la force, et parfois les zones d'ombre, de la poétique de cette pensée qui se veut elle-même "hérétique" .

10/2021

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Critique littéraire

Kazuo Ishiguro : Poétique de la mémoire et de l’oubli

L'étude s'oriente essentiellement vers l'identification, la typologie et le décryptage des silences, amnésies narratives et mensonges romanesques qui caractérisent les récits de Kazuo Ishiguro. Ces multiples "trous" narratifs dessinent un discours en lambeaux que le lecteur/narrataire devra élucider et "recoudre", au besoin. Dans l'évocation de son expérience onirique et nostalgique, le narrateur se plaît à jouer à cache-cache avec le lecteur/narrataire, créant ainsi une nette dissonance entre attentes légitimes du narrataire et promesses implicites du protagoniste. Cette technique d'obscurcissement de la trame des romans et nouvelles étudiés s'illustre par la dissimulation des noeuds de l'intrigue qu'aggrave l'occultation de la réalité spatio-temporelle des récits. Si le présent est perçu comme le temps où le personnage romanesque, en proie à la désillusion et au doute, procède à une lucide réévaluation du combat de sa vie, le passé se décline comme un long parcours souvent jalonné d'erreurs et de faux calculs. Au soir de sa vie, le narrateur intradiégétique livre un discours parsemé de non-dits, de quiproquos, de simulacres et de leurres narratifs. L'engagement littéraire d'Ishiguro s'appuie donc sur des choix narratifs qui bannissent la verbosité et la solennité souvent associées au discours occidental. Aussi, l'emphase narrative classique laisse-t-elle souvent la place au silence des mots. Par le truchement de l'oubli narratif qui cherche à abroger le temps et l'espace, la quête herméneutique se mue en une randonnée au fond de soi-même, même si le "moi" reste prisonnier de sa tendance à agir dans l'ombre afin de mieux s'illuminer à travers "l'autre". Enfin, l'exploitation très poussée des potentialités du souvenir et de la mémoire, à laquelle s'ajoute le dédoublement du protagoniste, aboutit, chez Ishiguro, à une véritable technique de la "désinformation" romanesque.

01/2021

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Littérature française

Aux Jardins des Acacias. Suivi d'un entretien avec René Ceccatty

Petites Cendres, travesti qui se produit tous les soirs au cabaret La Porte du Baiser, court le long de l'Océan Atlantique. Elle fait du jogging et pense de façon obsessionnelle aux Jardins des Acacias, un refuge médicalisé pour les malades du sida. Cela se passe dans un décor de rêve, sur une île tropicale et c'est le crépuscule, le soleil sombre. C'est le crépuscule de sa vie, car elle-même, Petites-Cendres, est contaminée. C'est aussi le crépuscule pour le vieil Adrien, poète de 90 ans, qui regarde la mer et pense à son poème "Rendre compte". Et pourtant, aux Jardins des Acacias, le Docteur Dieudonné et son assistante Lorraine veulent redonner vie à tous les malades. Notamment à Angel, un enfant accidentellement contaminé, que les lycées américains ont rejeté. Autour de la joggeuse, bien des ombres circulent. Celle de Daniel, le romancier qui écrit peut-être son dernier roman "Les étranges années" et pense à sa fille Mai, jeune étudiante qui découvre la violence de la vie. Celle de Fleur, le compositeur de génie, qui vient de rencontrer un personnage sulfureux, le prêtre pédophile Wrath, ancien médecin, porteur d'une sorte de mal métaphysique. Celle de Charles, grand écrivain disparu. Celle de Christophe, le serial killer devenu, sous une autre identité, comédien. Celle de Bryan, le sympathique taxi-vélo qui recueille Lucia, vieille femme sénile qui a fui l'asile de vieillards où elle était maltraitée. Pendant les quelques heures où Petites Cendres court, elle reprend des forces et peut-être qu'aux Jardins des Acacias, ce n'est pas la tragédie qui attend tous ces personnages, mais une merveilleuse rédemption, dans une croisière en mer que tous projettent pour reprendre espoir.

08/2014