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Dora Ohrenstein

Extraits

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Littérature française

Le Blé en herbe et autres écrits

Claudine à l'école est le grand succès de mars 1900. Le livre est signé Willy. On sait généralement qu'il s'agit du pseudonyme d'Henry Gauthier-Villars, qui l'utilise pour signer les productions de l'atelier qui lui écrit ses ouvrages. Cette fois, pourtant, le texte sort du lot. Il ne ressemble à rien de connu, la langue est nouvelle, le ton insolent, le propos scandaleux. C'est qu'il n'est pas de la plume d'un des scribes habituels de Willy : il est de sa jeune femme, Sidonie-Gabrielle, née Colette. Colette : il faudra attendre 1923 et Le Blé en herbe pour que ce nom apparaisse seul sur la couverture d'un livre. Avant cela, il y aura eu d'autres "Willy" , des "Colette Willy" et même des "Colette (Colette Willy)" . Mais on a vite compris. Catulle Mendès écrit à Colette : "vous avez créé un type" . Claudine en effet est un type, et elle deviendra un mythe. Colette en créera d'autres : celui de Sido, sa mère, "le personnage principal de toute [s]a vie" ; celui de Gigi, jeune fille élevée pour devenir une femme entretenue et qui échappe à ce destin ; et celui de Colette elle-même, qui se construit au fil de plusieurs vies - elle fut danseuse, mime, actrice, journaliste, directrice d'un institut de beauté, publicitaire... comme si la littérature ne pouvait suffire à lui assurer l'indépendance et la liberté qui sont, avec l'aptitude au plaisir, ses valeurs les plus hautes. Des tenues succinctes portées sur la scène du Moulin Rouge à la croix de grand-officier de la Légion d'honneur reçue en 1953, la ligne droite n'est pas le chemin le plus court. Mais l'oeuvre de Colette s'est nourrie de ce sinueux parcours. Colette appelle "littérature" tout ce qu'elle n'ai me pas : l'emphase, la "ciselure" et les idées générales, qui lui vont aussi mal, dit-elle, que les chapeaux empanachés. L'année du Blé en herbe, elle déclare à Simenon : "Supprimez toute la littérature, et ça ira". "C'est le conseil qui m'a le plus servi dans ma vie" , dira le romancier. C'est aussi ce qui préserve l'oeuvre de Colette du vieillissement. L'ouverture de Chéri, en 1920, a époustouflé les lecteurs. Cent ans plus tard, on l'admire toujours. Mais le style ne serait rien s'il n'était au service d'un regard d'une extraordinaire sensibilité. Colette, nous dit Antoine Compagnon, rend présents "le monde de l'enfance, l'étoffe de la sensation, l'émotion de la mémoire" . On la crédite aussi d'avoir été "la première femme qui ait vraiment écrit en femme" (A. Maurois), la première à explorer ainsi les amours adolescentes (Le Blé en herbe), à entretenir une réelle connivence avec la nature et "les bêtes" , à poser ce qu'on appellera la question du "genre" (dans Le Pur et l'Impur, en 1941), etc. Mais ce sont ces trois domaines - l'enfance, la sensation, la mémoire - qu'il faut retenir si l'on veut lui rendre justice. Elle les partage avec Proust, dont elle admira

02/2023

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Pléiades

Œuvres

Les choix de Georges Duby (1919-1996) furent ceux d'un historien formé à la géographie : la vie des hommes est inscrite dans l'espace, qui lui-même influence les rapports sociaux. Sa thèse, en 1952, donne le ton : il va se consacrer à l'étude des sociétés, en France, entre le Xe et le XIIIe siècle, et en explorer toutes les dimensions, économiques, sociales, idéologiques, esthétiques, sexuelles. Compagnon de route de l'école des Annales, il est avant tout un esprit indépendant. Semble-t-il se rallier à l'histoire événementielle en acceptant de consacrer en 1973 un livre au Dimanche de Bouvines ? Cette bataille, au fond, ne l'intéressait pas, dira-t-il ; "Bouvines innovait en m'obligeant à observer le jeu de la mémoire et de l'oubli, à traiter le discours dont un événement a fait objet au fil des siècles, comme constituant cet événement lui-même". L'art, lui, intéresse l'historien des sociétés, qui y voit "l'expression d'une organisation sociale, de la société dans son ensemble, de ses croyances, de l'image qu'elle se fait d'elle-même et du monde". Au milieu des années 1960 ont paru chez Skira trois volumes sur l'art médiéval. Le Temps des cathédrales (1976) en est issu, fruit d'un impressionnant travail de lecture, d'interprétation des sources et de montage de textes venant de la tradition chrétienne. Le livre captive le grand public éclairé. La renommée de Duby ne cesse de croître. Un texte d'accès moins aisé comme Les Trois Ordres ou l'Imaginaire du féodalisme (1978) attire lui aussi les lecteurs. La représentation de la société divisée en trois catégories fonctionnelles - ceux qui prient, ceux qui combattent, ceux qui travaillent - n'est-elle pas l'une des grandes figures de l'imaginaire historique français ? On propose bientôt à Duby de prêter sa voix à l'évocation radiophonique du destin de Guillaume le Maréchal, régent d'Angleterre. De cette expérience naît, en 1984, un récit "biographique". Nouvelle entorse à la "nouvelle Histoire" ? En apparence seulement. Duby démonte dans ce livre le fonctionnement de la société chevaleresque. Il donne carrière à son désir d'écrire un ouvrage d'histoire sérieuse susceptible d'être lu "comme un roman de cape et d'épée". Nouveau succès. En Italie, l'ouvrage sera comparé au Nom de la rose. C'est aux femmes, aux Dames du XIIe siècle, qu'avec une grande liberté de pensée et d'écriture Duby consacrera ses derniers livres. Il aborde là l'histoire "la plus ténébreuse" , celle d'êtres sans voix, et découvre des femmes "si fortes que les hommes s'efforçaient de les affaiblir par les angoisses du péché". Les trois petits volumes parus en 1995 et 1996 témoignent de l'art avec lequel Duby met son savoir à la portée d'un large public. Il n'ignore pas que le réel ou le vécu sont inaccessibles. "Tout historien s'exténue à poursuivre la vérité ; cette proie toujours lui échappe". Mais l'écriture est là pour suggérer le probable...

09/2019

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Hindouisme

Parole et silence. Un patrimoine de l'Inde hindoue

Un livre passionnant qui révèle des aspects peu connus sur l'unité reliant Parole et Silence. Parole et silence, voilement et dévoilement, essence et puissance, deux aspects de la même réalité ? Cet essai incite à devenir attentif à cette part inaudible, cachée, qui se tient au coeur de la Parole et qui, sitôt découverte, devient un seuil vers l'inconnu, l'infini. Sans y prêter vraiment attention, nous partageons avec tous les êtres humains une communauté essentielle : la parole. Sous sa pluralité veille un lien mystérieux, comme en dehors des mots. Qui ne se souvient, au cours d'un voyage, d'avoir su, contre toute attente, communiquer avec une personne d'une autre langue, sans avoir un seul mot en commun ? Le phénomène de la parole nous est si familier que sa magie passe inaperçue. Jacques Scheuer nous conduit de découverte en découverte : il y a plus de trois millénaires en effet, est née en Inde une recherche aussi originale qu'intense sur la nature et les fonctions de la parole. Elle suscite l'admiration, aujourd'hui encore, par des intuitions remarquables, non seulement dans le cadre de l'histoire des idées mais également pour l'intelligence de l'expérience religieuse et spirituelle. Avec la concision et la profondeur qui le caractérisent, Jacques Scheuer, spécialiste internationalement reconnu de la culture religieuse indienne (hindoue et bouddhiste), nous convie à un cheminement à travers les grands textes hindous qui jalonnent les courants majeurs de l'hindouisme. La parole n'y est pas vue comme un simple moyen de communication entre êtres humains, mais comme la puissance originelle, universelle, divine, d'où tout émane et en laquelle tout se résorbe. Cette Parole n'est pas distincte de la Conscience absolue. Elle englobe, anime et " informe " tout ce qui est. Ainsi, Au fil des pages, l'auteur, avec une grande pédagogie, nous initie à une vision vivante, holistique, de la parole, qui certes a évolué mais est demeurée inébranlable pour l'âme hindoue, de nos jours encore. Nous découvrons que, depuis bien longtemps, pour les hindous, non seulement la pensée est parole, mais aussi le corps, le monde, l'oeuvre d'art, comme toute réalité. L'émerveillement ne s'arrête pas là. Des Veda aux Upanishad, du yoga au Tantra, en passant par la Bhagavad-Gîtâ et la bhakti, jusqu'aux poètes contemporains tels que Tagore, se dévoile, au coeur de la parole, une dimension profonde, socle des paroles inspirées, qu'elles soient liées aux cultes, aux rituels, à l'expression poétique... C'est en effet, selon les maîtres indiens, la part de silence, de sens inexprimé, qui rend la parole vivante et efficiente. Jaillissant de la source universelle, elle hérite ainsi de la puissance du silence originel, assimilé à l'infinie potentialité primordiale, à la Vibration de la Conscience absolue. Dira-t-on que le silence est une modalité de la parole, ou la parole une variation bien tempérée du silence ? Déjouant les pièges du formalisme, le livre que nous offre ce passeur dans l'âme qu'est Jacques Scheuer, parvient à restituer ce climat d'étrangeté qui force le respect car il contient un sentiment du sacré.

10/2022

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Littérature française

Un bel amour en Chataîgneraie

En 1864, Léon et Rosa, vivent le début d'un grand amour. Léon, 20 ans, part enseigner à Paris et ne pense qu'à Rosa qu'il a quittée sans oser avouer ses sentiments. Il s'y risque dans une première lettre que Rosa, 18 ans, lit en cachette. Constitué par ces 22 lettres conservées de père en fils depuis plus d'un siècle, l'ouvrage est présenté par Pierre-Julien Quiers, l'un des descendants actuels du couple. L'écriture des deux jeunes gens est belle, le style remarquable. Le lecteur, au coeur de cet échange épistolaire amoureux, partage les sentiments et les craintes des deux tourtereaux. Rien ne m'incitait à aller dans ce coin reculté du Cantal, sinon mon père et son "secret" de Noël. Minuit avait sonné, les enfants avaient encore le nez fourré dans les papiers cadeaux, quand d'un air mystérieux mon père nous invita à le suivre au salon. Il se mit à lire lentement les lettres qu'il tenait serrées dans les mains... Vingt-deux lettres pour un pèlerinage amoureux à travers une époque, un lieu. Romance corsetée et pourtant libre, d'un autre âge, qui mêle crainte du qu'en dira-t-on, prudes réticences, coquetteries, où chaque personnage tient son rôle, jeunes amoureux, intermédiaire bienveillant, père que l'on imagine bourru et réticent pour la forme. Ce voyage m'avait ébloui. J'aurai voulu qu'il se poursuive encore. Mais la correspondance s'achevait. "Voilà l'histoire de Théodule (Léon) et Rosa, conclut mon père au terme de la dernière lettre. Jean-Pierre Joseph, leur fils et mon grand-père, était un homme austère. Il n'avait ni la fine gaité de sa mère, ni la fougue romantique de son père, comme si, toute sa vie, il avait porté secrètement le poids du grand amour brisé de ses parents. Il a pieusement conservé les lettres et les a transmises à mon père qui m'en a donné, à son tour, la garde. Je te les remets pour que tu les remettes à ton fils. Qu'il puisse vivre à vingt ans les même émois" . EXTRAIT Mademoiselle Je suis à me demander en commençant cette lettre si réellement je vous surprendrai beaucoup. Il est vrai je ne vous ai jamais dit quels étaient mes sentiments à votre égard, mais deux cours ne se comprennent ils pas sans parler ! Vous êtes trop intelligente pour n'avoir pas compris ce que signifiaient ces paroles à double sens, ces regards échangés avec avidité, ces visites sans but. Oui, ma chère Rosa, puisqu'il faut vous le dire, mon cour est à vous. J'ai bien hésité et bien pensé avant de prononcer ce mot, mais je ne peux plus le cacher, mon cour me le défend. Plaise à Dieu que mon amour soit partagé ! Il m'est si doux de croire que vous aimez aussi. Mon Dieu, que je serais malheureux si je me trompais ! Mais non, Rosa, je ne me trompe pas, je l'ai lu dans vos beaux yeux, dans votre beau sourire, nous sommes faits l'un pour l'autre. répondez-moi cependant au plus tôt afin que je ne reste pas dans cette cruelle incertitude...

01/2005

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Histoire de France

Je brulerai ma gloire

Historien de la condition des auteurs, des Grecs anciens à nos jours, Jacques Boncompain a couronné ses recherches par la publication d'un Dictionnaire de l'épuration des gens de lettres jugé " si nécessaire " par Jean d'Ormesson, fruit du dépouillement systématique des dossiers de la Commission nationale d'épuration conservés aux Archives Nationales. Des années durant il a vécu dans la compagnie de plus de 3000 auteurs, interprètes, producteurs et agents, sommés de rendre compte de leur comportement sous l'Occupation. Les côtoyer a changé son regard sur " un temps où manque toute lumière ", selon le jugement de Saint-Exupéry, et incité à élargir son étude aux deux principaux acteurs politiques du temps, le maréchal Pétain et le général de Gaulle. D'où ce nouvel essai. Le propre du Maréchal est d'être toujours demeuré en retrait. A Verdun, pendant la guerre du Rif, ambassadeur en Espagne, à chaque fois les autorités en place sont venues le chercher. Ce l'est de manière encore plus éclatante en 1940. Jules Jeanneney, Président du Sénat, reconnaît : " Il est incontestable qu'à ce moment tous les yeux étaient tournés vers le maréchal Pétain. Il était une sorte de bouée de sauvetage vers laquelle toutes les mains se tendaient. Il était certainement le seul nom autour duquel on pourrait faire l'union et la concorde de notre pays... " A 85 ans il ne s'est pas défaussé. Toute sa vie, entre deux solutions, il a choisi la plus exigeante. Doté des pleins pouvoirs, l'expatriation serait la plus facile. Par esprit de sacrifice il décide de rester en métropole et de s'interposer, autant que faire se peut, entre le peuple et l'envahisseur. Comme en 1916, mais en sous main, il va mener une guerre d'attente de l'arrivée des Américains. Au général Héring qui le félicite de son élévation au sommet de l'Etat, il répond tout de go : " A titre de martyr seulement. " Sans illusion sur ce qui l'attend il dit autrement : " Je brûlerai ma gloire. " Impossible, face à Hitler et la soldatesque allemande, d'empêcher toute atrocité. En fin de partie, il le sait, toutes lui seront comptées à charge, sans que soient prises en compte celles qu'il aura réussi à parer. D'avance il accepte d'être déshonoré par ceux qui lui devront la vie. Son amour de la France passe l'entendement, aussi ne sera-t-il pas compris. . Pendant quatre ans il va louvoyer et tenter de trouver un gentleman agreement avec Churchill qui dira en 1941 à son envoyé, le colonel Groussard : " Moi aussi, si je gouvernais votre pays, je ne dirais pas aux Allemands : " ; Je vous déteste ! " ; , parce qu' ; il faut toujours éviter le pire, avec acharnement... Moi aussi, je biaiserais, je chercherais à gagner du temps, à propos de tout : mais j' ; aiderais par tous les moyens possibles ceux qui restent mes compagnons d' ; armes... Dites à Vichy que je respecte profondément la personne du maréchal Pétain. Jamais je n' ; ai cru que cet homme puisse souhaiter la victoire allemande. " Telle n'est pas aujourd'hui l'opinion dominante, preuve que sur la période trouble de l'Occupation tout n'a pas encore été dit. Ce livre a le mérite d'ouvrir d'autres perspectives.

11/2019

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Critique littéraire

Histoire de la poésie française. Tome 4, La poésie du XVIIIe siècle

Un siècle sans poésie ? Voire. Disons qu'elle se déplace, qu'elle s'affirme plus volontiers dans la prose : Diderot, Marivaux, Montesquieu, Laclos, Jean-Jacques, Chamfort, Saint-Pierre, Restif, Sade, Buffon, Lacépède, Volney, Cazotte, Mercier le Prophète, Cousin de Grainville. Des esprits curieux (Fabre d'Olivet, Court de Gébelin, Plis) poussent très loin l'étude des correspondances. Qui lit encore l'oeuvre versifiée du roi Voltaire ? Apprécié, lu, discuté en son temps, poète par éclats avec des formules déjà hugoliennes, lassant, futile ou accordé à l'histoire, qui aurait cru que ce serait le prosateur qu'on retiendrait ? N'existe-t-il plus de poètes en vers ? Les strophes de Jean-Baptiste Rousseau annoncent Valéry. Louis Racine a de rares envolées. Voltaire croit que Saint-Lambert passera à la postérité. La Motte fait la distinction entre poésie et vers. Voici Je discret Fontenelle et le joyeux Piron fils, Sainte-Aulaire, Sénécé. Ils ne valent pas un inconnu, Claude Cherrier, avant-goût de Jacques Prévert. Et puis Gentil-Bernard, Marmontel, Rulhière parfois vigoureux, Voisenon frétillant, Bernis acceptable en partie, le bon Pompignan, le charmant Gresset, Dorat et Moncrif, le maçon Sedaine, cent autres. De l'esprit en petite monnaie, des épigrammes, de la crème fouettée. Quelques joyeux compères : Vade, Collé, Panard. Des poètes bizarres. Des épopées ridicules. Autour de Florian, un flot de fabulistes. On ne rejette pas d'emblée la poésie didactique. Delille, Roucher, Rosset, Watelet et leurs comparses font un effort pour poétiser arts, sciences, industrie, nature. Ils sombrent, parfois étonnent. La poésie mnémotechnique invente de curieux enseignements. Célèbres à d'autres titres, Jean-Jacques, Diderot, Helvétius, d'Alembert écrivent au besoin en vers. Et aussi les économistes comme Turgot, Condorcet et Dupont de Nemours qui transcrit en vers le chant des oiseaux. Et Marivaux, Beaumarchais, Chamfort, Rivarol, rimeurs occasionnels sont parfois significatifs des tendances. Hors des frontières, il se passe déjà quelque chose : en Belgique, en Suisse, au Québec, en Amérique. Les princes d'Europe, les grands étrangers s'expriment en vers français. On rencontre la poésie féminine, le théâtre en vers, la survivance occitane, les provinces. Le romanesque annonce le romantisme. Gessner, Thompson, Gray influencent les Français. Voici Colardeau le sentimental, Feutry le sombre, Malfilâtre l'exquis, Gilbert l'infortuné, La Harpe élégiaque. Des poètes venus des îles : Léonard l'idyllique, Bertin le sensuel, Parny père du poème en prose. Legouvé, Millevoye, Arnault, Cubières, Chênedollé, Thomas peuvent étonner le lecteur : on pense à Lamartine, Hugo, Musset. André Chénier plus parnassien que romantique reste mal connu. Et aussi son frère Marie-Joseph. On les rencontre longuement. Mauvais, l'Organt du jeune Saint-Just ? Cette épopée étrange, mal faite, licencieuse, avec des airs de complainte rabelaisienne, exprime cependant le sentiment d'une jeunesse exigeante comme le fera Rimbaud. La Révolution : les poètes sont mal préparés pour répondre à l'événement. La chanson populaire, anonyme souvent, prend le relais. Les hymnes, les pamphlets, les chants contre l'esclavage des noirs par exemple rythment l'histoire. "Il nous faut un barde !" s'écrie Bonaparte. Chateaubriand et Mme de Staël sont ailleurs. L'académisme pompier fleurit : folies didactiques, héroïques et théâtrales ampoulées, ridicules. Mais déjà quelques-uns osent un oeil vers les poètes des nations voisines. Dès la chute de l'Empire, des enfants, des adolescents sont présents au monde. Ils se nomment Lamartine, Hugo, Vigny, Sainte-Beuve, Musset. Le phénix va brûler pour renaître de ses cendres. La plus belle période va naître. Tout recommence.

10/1990

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Littérature française

L'arrivant et l'autre

Au départ c'est une simple proposition du second au premier : écrire, ou plutôt s'écrire, échanger des textes. Un essai, une tentative pour comprendre ce qui peut les rapprocher : " L'idée d'un monde qu'on n'accepte pas, dont on sait les urgences. Ecrire pour ne pas céder à la panique. Ecrire pour articuler ce que l'on a à se dire, ce qui bat en nous et ce pour quoi on se bat ", lui écrit-il. Très vite le sujet s'impose, tout simplement parce qu'on ne peut pas ne pas en parler. Les migrants. Il ne s'agit là ni d'informer ni d'analyser. D'autres l'ont fait, le font. Ni même de faire preuve d'originalité, mais d'affirmer un point de vue. Celui d'Européens placés devant la détresse de ces personnes chassées de leur pays par la guerre, la misère, les persécutions, la ruine... Il s'agit de témoigner de ce qui nous bouleverse, brouille notre représentation du monde, trouble nos certitudes. Témoigner, non pas à proprement parler de la situation de ceux qu'on appelle les migrants comme s'ils avaient vocation à ne jamais trouver de point de chute, mais du miroir que nous tendent ces personnes qui, dans le plus grand dénuement, se présentent à nos frontières. "?De qui parlons-nous ??", s'interrogent Eric et Michel. Etrangers, réfugiés, demandeurs d'asile : ces termes expriment une réalité juridique. Clandestins, sans-papiers, immigrés stigmatisent. Expatriés, ce n'est pas cela. Exilés, oui, mais pas seulement. Des arrivants. C'est Michel qui a proposé ce terme après l'avoir entendu à la radio, car tout de suite, il a parlé à son oreille et il a résonné dans sa bouche de comédien. Arrivant. Cependant, comme tous les mots, il ne leur paraît pas tout à fait satisfaisant. Il a le défaut de sa qualité. Suffisamment neutre pour ne pas véhiculer de mauvaises interprétations, trop neutre pour être véritablement politique. Il est vrai au sens où il signifie une réalité mais il est insuffisant. Ils l'ont cependant gardé, face à cet autre qu'est chacun de nous, dans l'attente que se révèle, s'il existe, le mot juste, celui qui dira tout, à la fois le départ, le voyage et l'arrivée, la peur et l'espoir, la solitude, l'attente et la fatigue, la mer et les montagnes, les frontières à franchir, les passeurs, la police et, aussi, les solidarités qui naissent et qui s'affirment. Il n'en est plus si su?r. Elle l'a attendri. Elle l'a se?duit. Mais y avait-il de l'amour dans ses gestes ? C'est peut-e?tre une question qu'il ne devrait pas se poser. Maintenant, il en est certain, s'il l'a aime?e un jour, il ne l'aime plus. Sa petite personne est trop su?re d'elle et trop folle. Elle est capable de tout sur un coup de te?te. Son proce?s ne l'a pas gue?rie. Il faut fuir. Tant que des milliers de kilome?tres ne les se?pareront pas, Frank ne pourra pas refaire sa vie. Ce n'est pas seulement qu'il ne pourra pas refaire sa vie, c'est bien pire que cela : il ne se sentira pas en se?curite?.

01/2018

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Suspense

l’énigme d’Isolabona

Un roman où trois ados sont les héros d'une nouvelle aventure en Ligurie, pleine de mystère et de rebondissements. â¢Ce qui devait être des vacances entre ados se transforme en une palpitante enquête. â¢La découverte d'un village ligure, son histoire, ses coutumes. â¢Le mystère serait-il la mémoire des maisons d'Isolabona ? â¢Un secret les menace et jusqu'au dénouement, les périls seront grands. â¢Des épreuves mais néanmoins leur courage les guidera face à l'ombre qui guette. â¢L'amour, le sens de l'honneur les entraînent dans un labyrinthe d'émotions. â¢Le latin, pour communiquer, remplacera un temps la langue anglaise. Après le formidable dénouement du Mystère du petit manteau bleu, nous retrouvons Lou, Ludovic et Léa Bienaymé, détectives malgré eux, confrontés à une fulgurante enquête menée en Italie où rien ne va se passer comme prévu. Ces ados sont de la trempe des aventuriers ! Pourtant quelle terrible émotion pour Léa, la benjamine, quand ils se retrouvent seuls par une nuit d'hiver dans un pays inconnu, sans en comprendre la langue et n'ayant même plus de connexion internet. Ce ne sont là que les prémices d'une incroyable épopée, où ils seront confrontés à la nature et à un déchaînement de forces incontrôlables. Qu'ils regardent d'un côté ou de l'autre, ils n'aperçoivent que l'écume des torrents de montagne et, sur une île, un village fortifié, désert, situé non loin du pays des sorcières. C'est Isolabona, l'ancien fief de la famille Doria, illustre famille génoise. Ce sera la découverte d'un magnifique village ligure, de son histoire et de ses coutumes. Lou, grâce au latin, espère bien communiquer avec les villageois, s'il en reste ? De hautes maisons de pierre, des ruelles étroites, surmontées d'arches, soutiennent et lient les maisons entre elles. Un secret, à n'en pas douter, hante ce village comme un mauvais sort ? Bien trop fureteurs, ces jeunes devront faire face à des situations inouïes, à des sortilèges ! Ils pénètrent dans une curieuse maison, s'y perdent et, par le plus grand des hasards, franchissent le seuil d'un autre monde où, certaines nuits de pleine lune, s'élève au pied d'une tour la mélodie envoûtante d'une harpe... La sublime Paolina et son frère, l'énigmatique Gianni, donneront une note plus surprenante à leur aventure. Les lumières sont éteintes, seuls les jeunes veillent, emportés dans le labyrinthe d'une enquête pleine de sensations et de rebondissements. Mais seront-ils en mesure d'échapper au danger qui les guette et de résoudre l'énigme qui fit trembler jadis Isolabona ? A propos de l'auteure : Après Le Mystère du petit manteau bleu, Maroushka Dobelé nous livre aux Editions du Volcan son deuxième roman jeunesse, L'Enigme d'Isolabona, où l'on retrouve le trio d'ados détectives malgré eux. Le parcours de Maroushka Dobelé se résume en deux mots : danse et écriture. Pendant toute sa formation de danseuse classique, elle n'a jamais cessé d'écrire. La toute jeune ballerine inventait des contes féeriques qu'ensuite, dans une autre forme d'écriture, elle chorégraphiait. Après une carrière de danseuse et de chorégraphe, elle ne danse plus aujourd'hui qu'avec les mots.

12/2022

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Décoration

Les "Fables" de La Fontaine. Quatre siècles d'illustration

Les Fables de La Fontaine : L'œuvre la plus lue - par petits et grands - de la littérature française a été aussi la plus illustrée. C'est par centaines en effet que se comptent depuis 1668 les éditions des Fables signées d'artistes aussi divers que François Chauveau, Jean-Baptiste Oudry, J.-J. Grandville, Gustave Doré, Benjamin Rabier, Jean Lurçat, Marc Chagall... A travers l'image, Alain-Marie Bassy nous fait vivre l'histoire d'une oeuvre littéraire sur quatre siècles, dissipant au passage nombre d'idées reçues, ouvrant de nouveaux espaces, de nouveaux horizons. Un descriptif bibliographique précis des éditions consultées, deux index détaillés, font, en outre, de ce livre superbement illustré, un ouvrage de référence irremplaçable. La Fontaine, dans ses Fables, est avare et paresseux. Avare de descriptions, de notations de décor, d'époque, de couleur, de circonstance. Sa véritable paresse est de confier au lecteur le soin de construire un univers imaginaire où il dessine à touches rapides des silhouettes en mouvement. Il se contente de mobiliser notre attention et notre imagination. D'où vient que ce recueil, qui néglige avec autant de désinvolture la description et le symbole, soit devenu, en quatre siècles, l'œuvre la plus illustrée de la littérature française ? Car elle le fut, dès l'origine, par le burin de François Chauveau, et depuis 1668, les éditions illustrées se comptent par centaines. Et, au-delà de l'illustration du livre, la peinture, la sculpture, les arts décoratifs, aujourd'hui le cinéma d'animation et la publicité s'emparent des sujets des Fables. Premier paradoxe de l'œuvre du fabuliste. Mais ce n'est pas le seul. Car depuis quatre siècles, le crayon des illustrateurs n'est pas innocent. Si on lit les Fables avec plaisir à l'âge mûr, on les découvre dès l'enfance. Or les illustrations suppléent à l'imaginaire parfois défaillant de l'enfant. Elles fixent une vision de l'œuvre dans sa sensibilité. Qui a découvert les Fables à travers l'illustration d'un Chauveau ou d'un Grandville, d'un Oudry ou d'un Benjamin Rabier, n'en conserve pas à l'âge mûr le même souvenir. Les illustrations des Contes de La Fontaine sont sans doute plus connues et plus appréciées des bibliophiles que celles des Fables. Mais rarement une illustration a eu autant d'importance dans le destin historique d'une œuvre littéraire. Grandeur et faiblesse des Fables : second paradoxe, aussi surprenant que le premier. Enfin, si l'illustrateur fixe une vision, c'est qu'il effectue des choix, c'est qu'il porte un jugement - intuitif ou explicite - sur l'œuvre. En passant du système des textes au système des images, des reclassements s'opèrent : l'œuvre s'inscrit dans des traditions de genre et de goût différentes de celles que reconnaît le critique littéraire. Ne découvrira-t-on pas avec étonnement, chez ce poète qui passe pour le chantre de la France, une affinité certaine jusqu'au XIXe siècle, avec les conceptions des paysagistes hollandais ? Troisième paradoxe. A travers le prisme de l'illustration, hommes, bêtes et lieux se transforment. De François Chauveau à Jean Lurçat ou Marc Chagall, on assiste à l'affrontement de l'homme et de l'animal pour l'empire de la Fable ; on s'émeut de la longue agonie de la mythologie des Fables ; on découvre de nouveaux espaces, de nouveaux horizons. Les Fables de La Fontaine, quatre siècles d'illustrations, 296 pages, 168 illustrations en noir et 9 illustrations en couleurs.

10/1986

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Manga

Pack Boy's Love Partie 30 . Avec 5 Mangas Yaoi

Ce pack manga contient : It will be attacked if i walk (176 pages - Volume : One Shot) : Ayumi Hirakawa, élève modèle au lycée, ne comprend pas l'intérêt que lui porte son sempai Isezaki, qui vient d'une riche famille, et qui a le monde entier à ses pieds. Le fait qu'Ayumi semble être le seul à résister à son charme n'a pas l'air de plaire à Isezaki, qui décide de tout mettre en oeuvre pour le faire tomber amoureux de lui...La situation s'annonce dangereuse pour Ayumi ! Parce que c'est l'essentiel (162 pages - Volume : One Shot) : Ryûji, salarié sans la moindre once de délicatesse, et Tomoya, barman gay, sont amis depuis le collège. Ce dernier avait déjà dit à Ryûji qu'il n'était pas du tout son genre, et leur amitié semblait inébranlable. Pourtant une nuit bien arrosée, alors que Ryûji vient de voir sa demande en mariage rejetée, Tomoya le console en lui disant " je suis content que tu ne l'aies pas épousée ", avec ce sourire empli de tristesse dont il a le secret. Sans même savoir pourquoi, Ryûji éprouve tout à coup un irrépressible désir pour cette main qui lui caresse la tête... ! ? Loveism (176 pages - Volume : One Shot) : Depuis le lycée, Kento Amano est désespérément amoureux de son sempai, Ryôsuke Momo, qui accepte de coucher avec n'importe qui, mais qui refuse d'entamer une relation amoureuse sérieuse. Persuadé qu'il s'agit d'une façon de combler un manque d'amour, Amano décide de faire de son mieux pour le rendre heureux, mais Ryôsuke continue encore et toujours à repousser ses avances, jusqu'à ce qu'ils finissent par se perdre de vue.Quelques années plus tard, affamé et sans domicile, Amano retombe par hasard sur Ryôsuke, qui lui propose de l'héberger et de l'employer. Le jeune homme est fou de joie à l'idée d'habiter avec son sempai adoré, mais Ryôsuke le prévient : Amano ne sera qu'un "serviteur" pour lui ! Par ailleurs, Amano ne tardera pas à se rendre compte qu'il ne s'agit pas du seul obstacle dressé sur sa route...Comment je suis devenu majordome (175 pages - Volume : One Shot) : "A partir d'aujourd'hui, tu seras majordome ! "Kiyotsugu, chef du clan Dôma et otaku sur les bords, décide un jour de revisiter entièrement le look des membres de son clan, afin d'éviter qu'ils soient pris pour des yakuzas. Fujizuka, qui s'occupe de lui depuis son enfance, écope donc de la fonction de majordome, ainsi que de l'habit assorti. Mais, si Kiyotsugu semble beaucoup s'amuser à rhabiller les membres de son clan et à s'affubler lui-même de tous les accoutrements possibles et imaginables, il semblerait que ses actes cachent une motivation plus sérieuse...Fujizuka parviendra-t-il à comprendre les intentions de Kiyotsugu, alors que celui-ci multiplie les tentatives maladroites pour exprimer ses sentiments ? Kiss and Loving (192 pages - Volume : One Shot) : Ayumi Hirakawa, élève modèle au lycée, ne comprend pas l'intérêt que lui porte son sempai Isezaki, qui vient d'une riche famille, et qui a le monde entier à ses pieds. Le fait qu'Ayumi semble être le seul à résister à son charme n'a pas l'air de plaire à Isezaki, qui décide de tout mettre en oeuvre pour le faire tomber amoureux de lui...La situation s'annonce dangereuse pour Ayumi !

09/2015

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Mondes fantastiques

Eragon Tome 4 : L'héritage

Tome 4 de la série Eragon. Remporter l'ultime combat contre l'Empire ou périr, les rebelles n'ont plus d'autre choix... Pourquoi Galbatorix, l'usurpateur, ne détruit-il pas l'armée en marche vers Urû'baen, sa capitale ? Il en aurait le pouvoir. Alors, que trame-t-il ? Pourquoi laisse-t-il les Vardens et leurs alliés, les nains, les elfes, les Urgals et aussi... les chats-garous ! poursuivre, sous le commandement de Nasuada, leur conquête de ses places fortes ? Belatonatombe, ainsi que Dras-Leona. Et Aroughs, réputée imprenable, est conquise grâce à l'astuce et à la témérité de Roran. Le cousin d'Eragon mérite plus que jamais son surnom de Puissant Marteau ! Certes les soldats et les magiciens de l'Empire se défendent. Mais les Vardens ont avec eux Eragon et Saphira, qui font des ravages dans les rangs ennemis. Murtagh et Thorn eux-mêmes ne sont pas de taille à les arrêter. À moins que... Murtagh, bien que lié à Galbatorix par un serment de fidélité prononcé en ancien langage, et donc impossible à rompre, ne fait peut-être pas tout ce qu'il pourrait pour les vaincre... Cependant, l'avancée des Vardens se trouve dramatiquement stoppée sur la route d'Urû'baen. Leur camp est dévasté par une attaque de Thorn et Murtagh, qui enlèvent Nasuada. Comme la jeune femme l'avait décidé, au temps de sa prise de pouvoir, c'est Eragon qui doit prendre sa place à la tête des armées rebelles. Or le garçon est loin de se sentir prêt pour une telle responsabilité, pas plus que pour combattre prochainement Galbatorix en personne. En vérité, après cet enlèvement, il perd tout espoir de venir à bout du tyran. Il comprend que celui-ci ne veut pas les tuer, ni lui ni Saphira, mais les soumettre, comme il a soumis Murtagh et son dragon. Eragon se souvient alors des mystérieux conseils donnés par Solembum, le chat-garou, alors qu'il n'était encore que l'apprenti de Brom. Le premier lui a permis de trouver le métal dont a été forgée Brisingr, son épée. Le deuxième, tout aussi énigmatique, disait : "Quand tout te semblera perdu, rends-toi au Rocher de Kuthian, il t'ouvrira la Crypte des Âmes". Eh bien, le moment est venu. Mais où se trouve le Rocher de Kuthian ? Solembum prétend l'ignorer. C'est pourtant lui qui va lâcher une phrase étrange - dont il ne se rappellera pas ensuite l'avoir prononcée - révélant l'emplacement du rocher. Il est sur l'île de Vroengard, où se dressait Dorú Areaba, l'ancienne cité des dragons et des Dragonniers, qui fut rasée par Galbatorix et les Parjures. Une magie d'une puissance inimaginable semble avoir effacé de toutes les mémoires ce Rocher de Kuthian, car Glaedr lui-même - qui est mort, mais dont Eragon conserve précieusement l'Eldunarí, le coeur des coeurs, dans un coffret - ne s'en souvient pas. Le dragon d'or est néanmoins d'avis qu'ils doivent prendre le risque et se rendre sur Vroengard. Est-ce un piège de Galbatorix ? A moins qu'une entité inconnue, un formidable magicien, ait décidé de leur venir en aide ? Tandis que Nasuada lutte de tout son courage pour ne pas prêter allégeance à Galbatorix en dépit des tortures qu'il lui inflige, Saphira emporte Eragon et Glaedr au-dessus de l'océan, à travers la pire tempête qu'ils n'aient jamais affrontée

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Poésie

Un sol trop fertile

L'enfant, l'arbre, la vie, c'est toujours la même lutte, celle d'un enfant, aujourd'hui d'un homme, qui est "en danger d'être soi". Mais cette fois-ci, qui est laissé face à l'énigme simple de la violence, de l'enfance meurtrie. Plus de détour, ou de baume, de fils ou de verger - qui tenaient les livres précédents de Cédric Le Penven, en constituaient le fil et la vie - mais le face à face nu et brutal, comme s'il fallait d'abord être seul. Le problème de la peur et des coups, c'est qu'ils nous infectent et finissent par nous battre de l'intérieur et que la vitre sur quoi sa propre vie bute, c'est soi. Ce journal intérieur s'approche au plus proche de la blessure, il y a là une posture de défi, comme s'il fallait tenir tête désormais pour sauver en soi l'enfant qui ne le pouvait pas ; mais surtout une position de survie, c'est à dire regarder cette violence dévorante droit dans les yeux, sans s'y dissoudre, sans qu'elle ne finisse de happer l'homme qui est là aujourd'hui. Ecrire n'est pas suffisant et vivre semble un peu trop - que faire face à une colère noire ? La maison, les frênes par la fenêtre, les livres familiers de la bibliothèque, le verger patiemment cultivé, c'est l'édification d'une cabane grandeur nature - à la grandeur de la vie - où se réfugier. Comment apaiser en soi un enfant qui ne dort pas ? En regarder un autre grandir, ignorant de son importance et de son rôle, à la fois terreau et tuteur d'un père qui l'accompagne dans la vie. Cédric Le Penven s'entoure de la croissance des autres, pour se confirmer peut-être à soi-même qu'une main peut aider à grandir plutôt que mettre à terre, guider plutôt que frapper. Il fait tourner le prisme de la main et du poing, facettes d'une même chair, qui projettent alternativement les lumières et les ombres. Main qui caresse, qui cultive, que l'on serre, ou que l'on agite de loin, qui indique une direction ou dit non, main qui frappe, qui ferme, blesse, étrangle, ou cache ou rafraîchit un visage. Main qui palpe l'écorce des arbres, flatte la chienne en promenade, plonge dans l'eau de la rivière, cueille un fruit, accueille les êtres aimés : la vie devient enfin un environnement familier au sein le monde, dont l'indifférence apaisante aide à vivre autour de la cabane. Au milieu des chênes et des causses, dans les herbes ou sous le regard des vaches, le long des ruisseaux, des ombres douces et des prunes d'été, Cédric Le Penven regarde la beauté du monde se faire et se défaire. Dans le vol des oiseaux, les branches nues qui se chargent de feuilles, de fleurs et de fruits, les paysages qui traversent les saisons. Et soi au milieu, peut-être pas pour trouver une place qui nous attende, mais pour en dégager soi-même l'espace matinal de la croissance et de la beauté - en quête des autres, de l'amour des autres, comme s'il fallait toujours dans une dernière angoisse se faire pardonner ce que l'on pourrait être.

04/2021

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Littérature française

Sulak

Il était jeune, il était beau, il s'appelait Bruno Sulak, et fut, au début des années 80, l'homme le plus recherché de France. Gentleman braqueur, il défraya la chronique judiciaire et séduisit tous ceux qui l'approchèrent, jusqu'au célèbre policier qui mit fin à cinq années de cavale effrénée. De sa vie tourmentée, Philippe Jaenada a fait un roman biographique captivant. Comme le dira plus tard le commissaire Georges Moréas, en d'autres circonstances, Bruno Sulak aurait pu devenir un des meilleurs flics de France. Mais le hasard a fait de lui un braqueur, sans doute le plus audacieux et le plus fascinant de son époque. Après avoir grandi à Marseille et brièvement fréquenté quelques voyous, Bruno intègre l'armée. Doté d'une mémoire prodigieuse, doué dans toutes les disciplines, il est rattrapé par un vol de motocyclette commis à l'adolescence. On le chasse sans le moindre égard. Il rejoint alors la Légion, comme son père. Sportif émérite, il s'entraîne au parachutisme, et bat le record de chute libre. Mais on lui refuse l'homologation de son exploit, à moins de s'engager pour 5 ans de plus. Une injustice qui le pousse à faire le mur pour aller passer le week-end en famille. Pendant son absence, l'ordre est donné à son régiment d'embarquer pour le Zaïre et ce qui n'était qu'une escapade devient une désertion. Il ne peut plus rentrer et bascule alors dans la délinquance. Avec son fidèle complice Drago, il se lance alors dans le braquage de supermarchés, rencontre la belle Thalie, une jeune fille de bonne famille qui va participer à certains vols à mains armée, au volant de la Simca que Bruno utilise comme une signature à chacun de ses hold-up. Incarcéré une première fois, il étudie l'anglais et le droit, puis s'évade au nez et à la barbe des gardiens. Il s'attaque à des bijouteries, se présente chez Cartier en tenue de tennisman, une raquette à la main, profite d'une visite officielle d'Helmut Khol pour aller cambrioler un joailler parisien dans un quartier truffé de policiers... Adepte de la non-violence, il n'a jamais blessé personne, avait toujours deux balles à blanc dans son revolver au cas où on le forcerait à tirer. Généreux, épris de liberté, révolté par l'injustice, il se tint jusqu'au bout à son code d'honneur et ne dénonça jamais ses complices. Mais sa dernière incarcération à Fleury-Mérogis lui fut fatale: son ultime tentative d'évasion tourna à la tragédie et suscite encore la polémique. Il fallait toute l'ironie et le second degré de Philippe Jaenada pour trouver la bonne distance vis-à-vis de ce personnage magnifique. Construit sous forme d'anecdotes croisées, son récit nous permet de suivre en simultané l'évolution des personnages clefs qui vont s'associer à Sulak. Avec son humour pince-sans-rire et son style inimitable (usage immodéré des parenthèses, digressions en chaîne... ), Jaenada imagine ce que la vie de Sulak aurait pu être si tel ou tel événement ne s'était produit, montrant par là les hasards qui président au destin d'un homme. D'une grande tendresse à l'égard de son personnage, il dresse le portrait d'un homme intègre et retrace avec nostalgie cette époque où les gangsters avaient encore du panache.

03/2024

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Littérature comparée

Revue de littérature comparée - N°3/2022. Comparatismes à travers le monde III

Virginie Tellier, Quel(s) comparatisme(s) en Russie ? Entre Europe et Asie, la Russie est depuis le XIXe siècle ouverte aux langues et aux cultures, ce qui en fait un lieu idéal pour la littérature comparée. Cette contribution propose une vue d'ensemble de la discipline de la littérature générale et comparée en Russie, en adoptant un point de vue historique. Elle rappelle les sources de la pensée comparatiste, le développement du comparatisme comme discipline et considère la situation actuelle de la discipline. Elle étudie en particulier les débats autour des notions de "crise" et "critique" de la littérature comparée, de sa relation à la linguistique, à la traductologie ou à la notion de littérature mondiale. Elisaveta Popovska, Le comparatisme littéraire en Macédoine du Nord : évolution et tendances L'article suit le trajet évolutif du comparatisme littéraire en Macédoine du Nord, dresse un état des lieux de la discipline et envisage les perspectives pour un possible développement à l'avenir. Il étudie les étapes qui, depuis l'introduction de la méthode dans les milieux intellectuels et académiques du pays, embrassent les processus d'institutionnalisation, les projets de coopérations, les préoccupations théoriques. Cet article finalement constate le rapprochement progressif des études littéraires avec les études culturelles, dans un effort d'harmonisation de la pensée scientifique avec la mission culturelle. Ainsi, ces dernières années, l'intérêt pour les phénomènes corrélés par un "inter-" : interlittérarité, intertextualité, interculturalité, intermédialité... subit des changements et reconnaît une nouvelle orientation qui privilégie la transversalité comme méthode d'analyse, laquelle se manifeste essentiellement dans l'approche de la littérature en tant que transnationale et de la théorie en tant que transcendantale. Tayeb Bouderbala, La littérature comparée en Algérie Cette étude se veut une analyse de la situation de la littérature comparée en Algérie depuis la période coloniale. Il est question de la grande aventure accomplie par la littérature comparée au lendemain de l'Indépendance. Les réformes successives de l'enseignement supérieur ont renforcé le statut et la position privilégiée de cette discipline phare au sein des études littéraires, des langues étrangères et des humanités en général. Des potentialités humaines, techniques, scientifiques et matérielles sont mises à contribution pour régénérer ce champ stratégique et hautement humaniste de cette connaissance. Hanitra Sylvia Andriamampianina, Aspects du comparatisme et de la littérature générale et comparée à Madagascar A Madagascar, les disciplines littéraires sont les parents pauvres des études universitaires en Arts, Lettres et Sciences humaines. L'article soulève les principales problématiques de la vie littéraire dans le pays, en présentant d'abord les grandes lignes de l'histoire littéraire, ensuite les études et les travaux de critique littéraire. Il met l'accent sur le lien étroit, conscient ou non, entre la vie littéraire et l'enseignement de la littérature à Madagascar, avec son prolongement en littérature comparée. Cet article a été réalisé en collaboration avec Nivo Gabrielle Rantoandroharirojo et Caroline Solange Pierre. Sandra Nitrini, La littérature comparée au Brésil (un aperçu des cinq dernières décennies) Cet article se propose de dresser un panorama de la littérature comparée au Brésil au cours des quarante dernières années. L'histoire de ce domaine d'études littéraires est étroitement associée aux activités de l'Association Brésilienne de Littérature Comparée, qui, avec ses congrès et ses publications, regroupe les universités dispersées d'un pays à l'échelle d'un continent. L'aperçu des diverses recherches dans les programmes de post-graduation des universités qui ont accueilli la direction d'Abralic depuis 1986 jusqu'à aujourd'hui ainsi que le relevé des thèses soutenues et des livres issus de ces recherches constituent un échantillon de ce qui a été mené à bien dans le domaine de la littérature comparée au Brésil jusqu'à aujourd'hui. Lila Bujaldón y Paula Simón, Trayectoria de la Literatura Comparada en la Argentina En este artículo nos proponemos describir el recorrido de la Literatura Comparada en la Argentina desde su independencia (1810) hasta la actualidad. En dicho recorrido pueden identificarse cuatro períodos. Después de la "pre-historia" de la disciplina, con un comparatismo considerado ingenuo, su "pre-institucionalización" y su "institucionalición" con la fundación de la Asociación Argentina de Literatura Comparada en 1992 y la celebración periódica de Jornadas Nacionales, el cuarto y último período, es decir, la actual "post-institucionalización" se caracteriza con el surgimiento de nuevos centros y áreas de investigación especializados, publicaciones académicas y la ampliación de la oferta de formación en Literatura Comparada a nivel de posgrado. Dora Nunes Gago, Parcours comparatistes à Macao Cet article est une brève réflexion sur les pratiques des études littéraires, dans le cadre du comparatisme, plus particulièrement des études luso-chinoises développées au département portugais de l'Université de Macao, au cours des dix dernières années. Les défis rencontrés, les projets et travaux développés, les thèses réalisées et soutenues, seront abordés.

11/2022

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Histoire de France

Journal d'un interné. Drancy 1942-1943

Drancy de Georges Horan est un manuscrit inédit récemment découvert par sa famille. Connu pour ses 56 estampes publiées en 1947 sous le titre Drancy, seuil de l'enfer juif (dont la réédition a lieu en parallèle par les éditions Créaphis), Horan livre ici un texte exutoire et cathartique rédigé dans les semaines qui suivent sa libération du camp en mars/avril 1943. La sincérité et l'immédiateté du texte lui confèrent une portée particulière. "Ecrit pour [lui], pour [s]e libérer d'une obsession", ce texte à usage privé ne le force pas à l'optimisme, contrairement à sa correspondance avec sa famille. Il fait preuve d'humour, d'ironie et de lucidité, s'autorise un style très personnel qui ajoute à ce texte une indéniable dimension littéraire, rare pour ce type de document. Il s'agit de "fixer sur le papier" ce dont il fut le témoin au cours de son internement, débuté le 10 juillet 1942. Encouragé par René Blum, jeune frère de Léon, il a dessiné ces "choses vues" mais il les a aussi décrites. Ce texte inédit, qui documente notamment l'été 1942, une des pires périodes du camp, éclaire ses dessins d'un jour nouveau et donne des clefs de compréhension sur ce moment majeur pour l'histoire du camp de Drancy. Celui-ci devient alors le camp de transit de l'ensemble des camps d'internement des juifs de zone occupée, comme de zone libre, principalement vers Auschwitz-Birkenau. Son témoignage sur les déportations en gare du Bourget est exceptionnel : de "corvée de Bourget" il est "porteur de bagages" pour les départs et les arrivées. Thomas Fontaine, historien et directeur du musée de la Résistance national, développe en postface l'importance du rôle de cette gare dans le processus de déportation et de l'enjeu mémorial qu'elle constitue. Extraits de texte (avant-propos de Georges Horan) : 16 avril 1943. J'écris ceci pour moi. Pour me libérer d'une obsession. J'essayerai difficilement d'être objectif et m'appliquerai à n'être qu'un témoin, un oeil attentif. Si la subjectivité ne veut point se soumettre, tant pis. [...] J'écris pour moi-même. Peut-être en donnerai-je une lecture, afin que personne ne m'interroge plus sur Drancy. Je suis intoxiqué de Drancy, saturé. Toutes ses images - j'en ai fait des centaines, peut-être un millier – me sont familières ; elles sont impressionnées dans ma pensée, et mes yeux les reconstituent. Je dors encore sous leur maléfique influence. Je n'ai que ce moyen de leur échapper ; les fixer sur le papier. Elles s'useront. Mais auparavant je dois leur donner un corps, une forme. Je ne suis malheureusement ni Callot ni Goya ni Picasso. Mais j'ai promis aux compagnons de retracer leur misère. C'est un devoir. De ces centaines de croquis, de silhouettes, je dois tirer une documentation vengeresse. [...] Je dois dire pour ceux qui ne le peuvent. Certaines affirmations déplairont parce que vraies. Je ne dresse pas un réquisitoire : il se dégagera lui-même. Je ne plaide pas une cause ; d'autres le feront. J'ai vu fort peu de noblesse ; mais énormément de laideur, de bassesse et d'horreur. Quoique je fasse je ne saurai jamais dépeindre l'épouvante des nuits précédant les déportations : les hurlements désespérés des femmes, les lamentations, les pleurs, les gémissements des enfants et des bébés. Je suis tellement inférieur à la tâche à accomplir. Dussé-je revivre péniblement en ma chair, en mon esprit, en mon coeur les tourments qui ont cessé provisoirement pour moi, que je dois l'entreprendre. Et que mes compagnons et les autres me pardonnent si je ne réalise que partiellement ce travail épouvantable.

10/2017

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Ecrits sur l'art

Ces petits tas d'ombre et de lumière

Dans la monographie qu'il a consacrée en 2016 à Frédéric Benrath, Pierre Wat notait très justement que la peinture est vécue chez ce dernier "? comme un art épistolaire et amical ? ". Mais ce caractère "? adressé? " de l'aventure picturale de Benrath fut également prolongé - ou redoublé - par l'intense correspondance écrite dont il ne cessa de l'accompagner tout au long de sa vie. "? Cette correspondance qui s'établit entre nous, écrit Benrath le 20 juillet 1975, ces lettres établissent vraiment une "correspondance" entre nos pensées affectives et nos idées sur les choses et les gens, sur l'art et la littérature. Cela est très important, tu le sais puisque tu réponds si bien ? ". Mais, comme le dira Michèle (ou Alice) dans une lettre du 29 décembre 1980, à un moment où elle prend un peu plus d'indépendance, "? T'écrire, c'est aussi écrire ? "? : le destinataire tend à disparaître et à être absorbé dans l'acte d'écriture auquel il a pourtant servi de point de départ. La correspondance publiée ici est extraite des plus de 500 cartes postales et lettres plus ou moins longues qu'échangèrent Frédéric Benrath et Michèle Le Roux, rebaptisée Alice en 1976 (puis Alice Baxter l'année suivante qui vit la sortie du film de Marguerite Duras intitulé Véra Baxter), à partir de leur rencontre en août 1969. Ils s'écrivirent très fréquemment jusqu'en 1981, lorsqu'ils étaient bien sûr séparés, mais aussi lorsqu'ils étaient tous deux à Paris, leur arrivant assez souvent d'aller eux-mêmes apporter la lettre qu'ils avaient écrite à son destinataire, soit en la glissant dans la boîte prévue à cet effet, soit en la lui remettant directement de la main à la main au moment de se retrouver. Leur correspondance, longtemps maintenue "? secrète ? " se poursuivit jusqu'à la mort de Benrath en 2007. La partie retenue de cette correspondance porte principalement sur la création artistique. De très nombreuses lettres de Benrath sont étroitement liées à sa vie de peintre. "? Je suis persuadé, affirme-t-il le 20 juillet 1975, que l'écriture et en ce qui me concerne la correspondance est le processus qui déclenche la réflexion, la remise en cause, en un mot ce qui me tue et me fait renaître à autre chose ? ". Et quelques jours plus tard (le 29 juillet)? : "? Je crois que ma correspondance en général, mais celle que j'ai avec toi surtout, m'aide non seulement à exorciser mes démons, mais à les utiliser, à renverser de ce fait leur nocivité, à les rendre créatifs si je puis dire ? ". Benrath y réfléchit sur son art en même temps qu'il y déverse sa souffrance et s'abandonne à ses doutes. Les lettres paraissent parfois lui servir à repousser l'affrontement avec la création, mais elles l'aident en même temps à surmonter l'angoisse et l'empêchent de ne pas s'effondrer totalement. Cette correspondance peut se lire, entre autres points de vue, comme l'échange d'un artiste à un autre artiste, entre une jeune presque-peintre, encore à l'état d'ébauche, à l'état embryonnaire, et un peintre avéré, déjà riche d'une longue expérience. L'une se destinant à la peinture devint écrivain à part entière de textes exclusivement consacrés à la peinture. L'autre se destinant à une double carrière de peintre-poète devint peintre à part entière, sans avoir pour autant totalement abandonné certaine recherche en écriture. Etrange chassé-croisé en pied-de-nez au destin. D'où cette double réflexion (pourrait-on dire "? réflection ? "? ? ), menée de front, sur la création artistique, à la fois littéraire et picturale. Subtil et inextricable jeu de reflets et de miroirs.

10/2022

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Archéologie

Des couvents fragiles. Pour une archéologie des établissements mendiants (France méridionale, Corse, Ligurie, Piémont)

Normal021falsefalsefalseFRX-NONEX-NONE / Style Definitions / table. MsoNormalTable {mso-style-name : "Tableau Normal" ; mso-tstyle-rowband-size : 0 ; mso-tstyle-colband-size : 0 ; mso-style-noshow : yes ; mso-style-priority : 99 ; mso-style-parent : "" ; mso-padding-alt : 0cm 5. 4pt 0cm 5. 4pt ; mso-para-margin-top : 0cm ; mso-para-margin-right : 0cm ; mso-para-margin-bottom : 8. 0pt ; mso-para-margin-left : 0cm ; line-height : 107% ; mso-pagination : widow-orphan ; font-size : 11. 0pt ; font-family : "Calibri", sans-serif ; mso-ascii-font-family : Calibri ; mso-ascii-theme-font : minor-latin ; mso-hansi-font-family : Calibri ; mso-hansi-theme-font : minor-latin ; mso-bidi-font-family : "Times New Roman" ; mso-bidi-theme-font : minor-bidi ; mso-fareast-language : EN-US ; } Malgré une présence importante, aujourd'hui encore, de nombreuses traces de couvents mendiants médiévaux, l'historiographie ne s'est pas suffisamment arrêtée sur la question de leur fragilité. Grâce aux recherches archéologiques et historiques les plus récentes, il est désormais possible d'apporter des réponses aux questions de l'installation, de l'implantation et du rôle de ces couvents dans les sociétés et les espaces urbains médiévaux et modernes. En outre, ce livre traite aussi des relations des communautés religieuses avec les fidèles, de leurs spécificités spatiales et dévotionnelles - en lien avec leur apostolat - et de leurs rapports avec les choses matérielles. Normal021falsefalsefalseFRX-NONEX-NONE / Style Definitions / table. MsoNormalTable {mso-style-name : "Tableau Normal" ; mso-tstyle-rowband-size : 0 ; mso-tstyle-colband-size : 0 ; mso-style-noshow : yes ; mso-style-priority : 99 ; mso-style-parent : "" ; mso-padding-alt : 0cm 5. 4pt 0cm 5. 4pt ; mso-para-margin-top : 0cm ; mso-para-margin-right : 0cm ; mso-para-margin-bottom : 8. 0pt ; mso-para-margin-left : 0cm ; line-height : 107% ; mso-pagination : widow-orphan ; font-size : 11. 0pt ; font-family : "Calibri", sans-serif ; mso-ascii-font-family : Calibri ; mso-ascii-theme-font : minor-latin ; mso-hansi-font-family : Calibri ; mso-hansi-theme-font : minor-latin ; mso-bidi-font-family : "Times New Roman" ; mso-bidi-theme-font : minor-bidi ; mso-fareast-language : EN-US ; } Dans de très nombreuses villes, les couvents médiévaux ont été comme effacés de la topographie urbaine. En Languedoc, en Provence ou en Ligurie, la disparition très fréquente de ces établissements n'a pas été suffisamment soulignée par l'historiographie, sans doute parce qu'il reste, malgré tout, quelques beaux monuments qui font oublier quantité de destructions. La Révolution française, la vente des biens nationaux et les suppressions napoléoniennes ne sont pas seules responsables. C'est cette fragilité des couvents des ordres mendiants que ce livre tente de saisir en mêlant les avancées les plus récentes des recherches archéologiques et historiques dans ces régions de l'arc méditerranéen qui va des Pyrénées orientales à la Riviera ligure, jusqu'à remonter, au nord, en Auvergne, Dauphiné et Savoie. Les reconstitutions architecturales, l'étude du bâti et des matériaux de construction, l'archéologie funéraire et l'analyse des sources écrites apportent un nouvel éclairage aux dynamiques de l'installation, de l'implantation et du rôle des couvents dans les sociétés et les espaces urbains médiévaux et modernes. Ce sont aussi les relations des communautés religieuses avec les fidèles, leurs spécificités spatiales et dévotionnelles - en lien avec leur apostolat - et leurs rapports si particuliers avec les choses matérielles que ce livre s'attache à retracer. Avec les contributions d'Alain Badin de Montjoye, Simone Balossino, Silvia Beltramo, Agnès Bergeret, Fabien Blanc-Garidel, Aurélie Bouquet, Claire Bourguignon, Aurora Cagnana, Aymat Catafau, Jacques Chiffoleau, Sandrine Claude, Isabelle Doray, Patrick Ferreira, François Guyonnet, Margot Hoffelt, Philippe Jansen, Fanny Lelandais, Clément Lenoble, Véronique Lelièvre, Egle Micheletto, Jean-Marc Mignon, Emmanuel Moureau, Antonio Musarra, Céline Pallier, Fabienne Ravoire, Hélène Réveillas, Amélie Roger, Elodie Sanchez, Barbara Strano, Robert Thernot, Antonella Traversa, Alain Venturini.

10/2023

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Collège parascolaire

Maxi Annales 3e. Sujets & corrigés. Avec 100 sujets, Edition 2021

Les Annales ABC du Brevet pour réviser et préparer toutes les épreuves du Brevet 2021. Toutes les matières 3e : - MATHS - FRANCAIS - HISTOIRE-GEO-EMC - PHYSIQUE-CHIMIE-SVT-TECHNO - ORAL + Rédigé par des enseignants ! + Maxi-Annales ABC du Brevet 2021 - Toutes les matières Conforme aux programmes du Brevet Des sujets sur tout le programme - Les sujets complets pour s'entraîner sur toutes les matières du Brevet 2021. - Pour l'épreuve orale, des sujets conçus par nos auteurs pour mieux se préparer. - Tous les corrigés détaillés avec des rubriques d'aide. - Un minutage pour se mettre dans les conditions de l'épreuve. La méthode gagnante pour préparer le Brevet - Les épreuves expliquées et les critères d'évaluation. - Les conseils pratiques des correcteurs.

07/2020

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Livres 3 ans et +

Fables

Les Fables occupent une place singulière dans notre mémoire : par le souvenir que nous gardons de ces poèmes devant lesquels nous sommes restés enfants, mais aussi par la grâce de tant de vers devenus proverbiaux  et que notre parole quotidienne fait renaître. Et tout se passe comme si une correspondance secrète se maintenait de siècle en siècle entre ces Fables et l'identité de notre pays comme de notre langue. Le premier recueil paraît en 1668, et le second dix ans plus tard. Le succès est immense et les poèmes, alors, appartiennent pleinement à leur temps : la France du règne de Louis XIV. Mais le mystère de leur pouvoir est de s'émanciper très vite de cet environnement immédiat, d'éclairer nos réalités successives, d'allier de manière toujours éclatante le particulier et l'universel. Dans cette "comédie à cent actes divers, / Et dont la scène est  l'Univers" , le texte se dérobe à toute signification définitive. Mais La Fontaine, à chaque page, nous convainc que la poésie, à ses yeux, demeure instrument de connaissance : il existe une beauté du savoir - et nous ne cessons pas de la retrouver en lui. Edition de Jean-Charles Darmon et Sabine Gruffat.

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Grands textes illustrés

Les fables de la fontaine

Ce recueil inédit rend hommage au génie du fabuliste Jean de La Fontaine à l'occasion du 400e anniversaire de sa naissance. 50 fables illustrées par Quentin Blake et lues par Denis Podalydès, sociétaire de la Comédie-Française.

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Littérature étrangère

Sur les jantes

" Je suis Berl Pickett, le Dr Berl Pickett. Mais je signe chèques et documents "I. B. Pickett", et il faut sans doute que je m'en explique. Ma mère, une femme énergique s'il en fut, ardente patriote et chrétienne évangélique, choisit mes prénoms en l'honneur du compositeur de God Bless America. C'est ainsi que je m'appelle en réalité Irving Berlin Pickett, et que je suis parfaitement conscient du caractère ridicule de mon nom. Mon père aurait préféré "Lefty Frizzell Pickett", et c'eût été encore pire. En tout état de cause, mon nom, comme ma vie même, a quelque chose d'une reprise, d'un emprunt, difficile à contester. " Sur les jantes est sans doute le roman le plus tendre, le plus subtil de Thomas McGuane depuis longtemps. Berl Pickett est médecin à Livingston, petite ville du Montana. Il y mène une vie plutôt calme jusqu'au jour où, pensant venir en aide à l'une de ses amies, il s'efforce de camoufler sa tentative de suicide. C'est le début d'une série de péripéties complexes puisque, lorsque cette dernière succombe à ses blessures, il devient le principal suspect, se voit interdit d'exercer et encourt le risque d'être poursuivi pour non assistance à personne en danger. Disposant désormais de beaucoup de temps libre, Berl reprend son activité antérieure : peintre en bâtiments. Entre les missions qui lui sont confiées, il a tout loisir pour se replonger sur son passé et se remémorer les événements qui ont marqué son passage à l'âge adulte : comment, à l'âge de 14 ans, sa tante l'a initié à la vie amoureuse en se chargeant de lui apprendre les choses de la vie ; le comportement de sa mère, profondément conditionné par ses croyances : " Sa religion avait entouré ma mère d'une impénétrable réalité, et la guerre avait eu le même effet sur mon père. J'éprouvais le sentiment qu'au fond j'avais toujours été seul depuis ma naissance. " ; le médecin qui, très tôt, a repéré le potentiel en lui et grâce auquel il a trouvé sa voie professionnelle ; les aventures qu'il a eues avec quelques femmes : Jocelyn, une pilote aux activités suspectes dont il s'est pris de passion, et une collègue, Jinx Mayhall, beauté tranquille qui le déconcerte par les questions insidieuses et sans motif qu'elle lui pose incessamment : " Elle soupirait sans arrêt et paraissait troublée. Finalement, elle tendit la main et prit la mienne. J'aurais du mal à décrire ce que je ressentis : le souffle coupé, je fixai droit devant moi les collines désertes couvertes d'armoise. Elle me lâcha la main et reposa la sienne sur le volant. Je lui demandai à quoi elle pensait et elle répondit : "Au car de ramassage scolaire". " ou encore : " C'était dommage, parce que j'étais un homme de nature affectueuse qui tombait facilement amoureux, et j'aurais pu connaître des expériences enrichissantes si je ne m'étais pas constamment méfié aux moments les plus agréables. " Face aux manœuvres vengeresses du directeur administratif de la clinique où il travaille, l'accusation qui pèse sur lui de non assistance à personne en danger, les activités louches et inquiétantes de l'aviatrice, et surtout les conséquences d'une affaire où il a poussé au suicide le mari assassin d'une de ses patientes, Berl, poursuivi par la calomnie et abandonné par presque tous ses collègues et amis, s'efforce de prendre de la distance vis-à-vis des différentes épreuves de son existence. Entre comédie et tragédie, McGuane ancre son récit dans une région qu'il connaît bien pour l'avoir lui-même traversée, ce qui lui permet de mettre l'accent sur les décalages au sein d'une société disparate et moderne où l'on réalise que son héros est coupé du monde, qu'en voulant prendre un avion le 11 septembre 2001 ce n'est que lorsqu'il arrive à l'aéroport qu'on lui dira que les vols sont suspendus. Si la satire des égoïsmes est partout présente, le rire le dispute à l'émotion, comme toujours chez McGuane, exprimée en demi-teintes, mais néanmoins palpable.

01/2012

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Bibles

Jésus a dit

Paroles des évangiles Qu'appelle-t-on "évangiles" ? Voilà une question à laquelle on répond un peu facilement : "Des récits qui racontent la vie de Jésus" . Et pourtant, c'est inexact, car l'objectif des évangélistes ne consistait pas à élaborer une simple biographie du Christ. Ni Marc, le plus ancien, ni Jean, le plus récent, n'ont accordé une ligne à ce qui précède le début de la prédication de Jésus. Matthieu ne fait exception que pour la visite des mages et la Fuite en Egypte. Luc commence avant la naissance, mais reste muet sur ce qui suit la douzième année. Alors ? Les évangélistes ont voulu essentiellement transmettre le message de Jésus, tel qu'il apparait aussi bien dans ses actes que dans ses paroles. C'est cela, la "Bonne Nouvelle" (traduction littérale du grec "euangelion"). On dira qu'une nouvelle vieille de deux millénaires n'est plus si "nouvelle" que cela. Assurément, l'expression française est équivoque. On devrait dire "bon message" , "bonne annonce" . En langage très contemporain : on se trouve là devant une info qui ne peut pas devenir ringarde. Des paroles pour tout le monde Du reste, Jésus parlait simple, cela se sent surtout dans les trois premiers évangiles. Parce qu'il s'adressait essentiellement à des gens simples, simples de culture ou simples de coeur. Il prenait en compte les situations et les choses de la vie quotidienne, que nous rencontrons encore dans notre existence à nous au bout de deux millénaires. Cela n'empêchait pas qu'il réponde avec science et autorité aux théologiens de son temps, soit quand ils venaient lui poser des questions souvent piégées, soit quand ils venaient, comme Nicodème, recueillir son enseignement. Bien sûr, les évangélistes qui nous rapportent les propos de Jésus étaient tous chrétiens, professant la foi dans la résurrection du Christ. Mais les gens à qui parlait Jésus ne l'étaient pas, eux. Forcément : on ne peut pas adhérer à l'annonce de la résurrection d'un personnage qui n'est pas encore mort. Comme lui-même, comme les apôtres, comme les disciples, la plupart des auditeurs de Jésus étaient juifs. Mais la population de ce qu'on appelait alors la Palestine comportait aussi de très nombreux païens : Romains des troupes d'occupation et de l'administration impériale, marchands grecs ou levantins, cananéens des pays voisins. Sans compter les Samaritains, monothéistes et reconnaissant la Torah comme les juifs, mais considérés par ceux-ci comme schismatiques. Les paroles de Jésus, qui que nous soyons, nous sont encore destinées. L'accueil des rejetés Il est clair que Jésus ne méprisait pas dans leur ensemble les élites sociales, morales et religieuses de son temps. Mais il épinglait volontiers l'autosatisfaction, voire l'hypocrisie d'individus "comme il faut" qui en faisaient partie. En retour, ces derniers n'aimaient guère son attitude accueillante à l'égard de gens considérés comme non fréquentables. Parmi ces derniers, les publicains, c'est-à-dire des juifs qui percevaient sur leurs compatriotes les impôts réclamés par l'occupant romain (païen ! ), se montrant ainsi traîtres à leur Dieu comme à leurs concitoyens, car ils exigeaient plus qu'ils ne devaient et empochaient la différence. Jésus faisait scandale en allant jusqu'à manger chez eux. Il ne jetait pas l'anathème sur les prostituées, ce qui ne revient pas à dire qu'il encourageait la prostitution. Il ne fuyait pas les lépreux, dont on considérait que leur maladie était une punition du Ciel pour leurs péchés. "Je ne suis pas venu juger le monde". , dit-il. Pourquoi ce livret ? Les citations qu'il contient sont toutes des passages où les propos de Jésus sont rapportés au style direct. Aussi courts que possible, pour qu'une longue lecture n'en dilue pas la saveur et pour qu'il soit facile de les méditer. Ils n'ont pas été choisis parmi ceux qui fondent les dogmes du christianisme et qui pourraient poser des difficultés à des personnes dont c'est le premier contact. Ces paroles sont faites pour être livrées à toutes les personnes qui, d'une manière ou d'une autre, peuvent y puiser un enrichissement personnel et à qui il ne viendrait pas forcément à l'idée de se mettre à leur recherche dans un gros livre.

02/2024

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Livres 3 ans et +

Le Petit Poucet

Il était une fois un bûcheron et une bûcheronne qui avaient sept enfants, tous garçons. Quand le dernier vint au monde, il n’était guère plus gros que le pouce, ce qui fit qu’on l’appela le petit Poucet. Les parents, qui ne parvenaient plus à nourrir leurs enfants, décidèrent un jour de les abandonner dans la forêt noire et profonde…

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Littérature française

Mélancolie vandale. Roman rose

Dans Berlin réunifiée, Kornelia Sumpf, cinquante-trois ans, (“fruit débile des amours d’une charogne et d’un fossoyeur”) condamnée à rester à jamais “une empotée de l’Est”, travaille comme interprète à la prison de Moabit où le détenu est souvent basané et insuffisamment germanophone. Elle est désormais la compagne, prétendument comblée, d’un homme plus jeune qu’elle, Ali, son ultime conquête, qui a été élevé, dans ce qui fut Berlin-Ouest, par une mère turque, richissime et foutraque, prénommée Utkügul, dont la fortune permet à son aboulique de fils de passer son temps en tête-à-tête avec l’écran de son ordinateur (et les vidéos pornos afférentes). Bien avant de rencontrer Ali, l’homme aux “lèvres-saucisses”, Kornelia a adopté la petite Viorica, d’origine roumaine (on dira “Rom”, sous peu), devenue une pré-adolescente paumée, d’humeur aussi maussade que le temps qui sévit à Berlin, en cet hiver 2010, et dont la fascination pour la société de consommation triomphante entraîne des échanges aussi fréquents qu’embarrassants avec la puissante caste que forment les vigiles de supermarchés. Afin d’échapper à la suffocante emprise de la dévoratrice Utkügul, restée “à l’Ouest”, le couple turco-germanique, fier de sa mixité, vit dans le modeste (et peu amène) pavillon familial de l’ancien Berlin-Est dans le quartier de Lichtenberg, où, cloué sur un fauteuil roulant, le père de Kornelia, dit “petit-papa”, achève son existence dans la hargne et ce mutisme aussi “réflexe” que tactique auquel l’a rompu sa longue expérience de communiste impénitent et de délateur professionnel aux temps “heureux” de la stasi. A son corps défendant, et comme à son insu, sa fille Kornelia, quand elle a terminé sa journée de “traductrice du malheur” à la prison de Moabit, semble passer son temps à traverser dans les deux sens un Mur qui n’existe plus, comme si ce dernier faisait défaut à l’ordre bénéfique naguère providentiellement assigné à l’univers. En proie à des nostalgies bancales et à des haines confuses, cette femme de devoir, au sourire (socialiste) inoxydable mais dont la jeunesse s’enfuit inexorablement, l’est en effet aussi à des désirs, désordonnés et violents, sur lesquels elle n’est pas en mesure de mettre un nom, sinon celui de sexe (par provocation, impuissance et manque d’imagination réunis) ou de consommation (activité enfin autorisée, sinon prescrite). Mais, dressée par la rda, une Kornelia Sumpf ne peut rêver de posséder une Audi que juchée sur la selle de son vélo, prolétaire symbole d’une liberté de circulation qui s’étend désormais jusqu’à la célèbre Alexanderplatz (oncques immortalisée par Döblin et à présent livrée aux promoteurs). Sur son vélo, Kornelia roule, dérape dans la neige, tombe, se blesse, rencontre le parcours d’un marathon en folie où des vieillards cacochymes repoussent leurs limites au risque de leur vie, fait des rencontres, assiste à des accidents, se trompe de chemin, se met en retard, nouvelle Alice déjantée au pays sans merveilles, se cherche un avenir, une histoire qui serait enfin à elle et comblerait le manque, souffrant, sans le comprendre, du temps qui passe, de l’inassouvissement, de la solitude harassante qui règne dans une ville qui, pour avoir fait de la notion de communauté retrouvée son nouvel étendard, fièrement brandi à la face du monde, n’a, à l’instar de l’Europe dite unie, réussi à se fonder en transmission d’aucune sorte. Aussi mal à l’aise vis-à-vis d’un passé familial caviardé que frustrée par le morne présent qui lui est dévolu, cette “femme gauchère” porte sur ce qui l’entoure un regard tour à tour exalté et agressif, qui, tout en “scannant” avec trop d’ironie une vie sans espoir et des destinées sans grandeur (vieillards en déshérence ou “actifs” aliénés s’entassant dans l’enfer du métro), lamine les mythologies de la défunte rda comme les illusions de l’Allemagne nouvelle. Dans le décor chaotique d’une modernité violente placée sous le signe du marché libéral qui a pris ses quartiers en des lieux où, hier encore, sévissaient de tout autres mœurs et pratiques, sous les cieux plombés d’une ville immense dont la division fut l’un des symboles majeurs du xxe siècle, se déploie, tel un plan crypté (et cruellement poétique), l’impitoyable cartographie d’un monde aussi interdit d’authentique mémoire qu’il est assujetti au “devoir” de célébrer sans trêve cette dernière, quitte à la soumettre à une marchandisation aussi décomplexée que florissante. Ecrit à “l’impersonnel” (au “on”), Mélancolie vandale (non sans dérision sous-titré : roman rose) propose avec cet hommage paradoxal et désabusé rendu à une ville emblématique, une vision de nos temps contemporains aussi désespérée que lucide. Tant il est vrai que, avec ce roman puissamment baroque, aussi tragique que farcesque, Jean-Yves Cendrey, en avatar de Jérôme Bosch (ou en passager sidéré embarqué sur quelque nef des fous), semble ici sonner l’alerte sur la renaissance possible de la “bête immonde”, ce monstre familier aux multiples visages si prompt à prospérer, en temps de paix, sur tous les territoires abandonnés à sa férocité vorace.

01/2012

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Livres 3 ans et +

Le Petit Poucet

Il était une fois un bûcheron et une bûcheronne si miséreux qu'ils décident d'abandonner leurs sept fils dont le plus jeune s'appelait le Petit Poucet. Avisé, ce dernier sauve ses frères en semant des petits cailloux sur le chemin de leur maison. Mais il échoue plus tard lorsqu'il sème des morceaux de pain. Alors que les sept frères trouvent refuge chez un ogre qui entend les dévorer, le Petit Poucet à l'idée d'échanger les bonnets de ses frères avec les couronnes des sept filles de l'ogre. Dupé, l'ogre tue ses filles tandis que le Petit Poucet et ses frères s'enfuient. Furieux, l'ogre part à leurs trousses. Mais le Petit Poucet a plus d'un tour dans son sac...

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Perrault

Miniconte le petit poucet

" Quand j'étais petite fille, j'ai lu le Petit Poucet en allemand. Ce conte me paraît maintenant très différent. Est-ce la langue française, ou bien les années qui ont passé ? Comment vais-je faire pour donner une âme à tous ces personnages ? L'ogre, gros, brutal, repoussant, mais aussi, niais et vulnérable. Le Petit Poucet, vif, agile, intelligent, qui va jusqu'à retourner la force de l'ogre contre lui-même ? Comment les sept frères peuvent-ils retourner vivre chez leurs parents après tout ce qu'ils leur ont fait subir ? Je prends mes pinceaux, mes couleurs et me lance à la poursuite de ce monde cruel, cherchant à répondre à toutes ces questions. " Katja Gehrmann

11/2022

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Economie

Les déchirures. France Télécom, Goodyear, Air France, Continental, paysannerie...

L'entreprise mauvaise-mère ! Ce texte de Maxime Vivas est salutaire : il nous rappelle que les actes chemisophes ne sont que l'autre face d'une violence beaucoup plus forte qui régit la vie des entreprises. La gauche s'est longtemps accordée sur le fait que l'entreprise était d'abord un lieu d'extorsion de la plus value, que les patrons ne sont riches que parce qu'ils exploitent leurs salariés en ne payant que ce qui est socialement nécessaire à un moment donné pour reproduire la force de travail. Le patronat avait dû au cours du XXe siècle mettre du social dans son eau de messe (car on ne dira jamais assez la responsabilité des églises dans la soumission des petits aux grands) compte tenu de la peur des rouges et d'un rapport de force plus favorable aux salariés. La lutte des classes existe donc bien avant même que les classes n'aient conscience d'elles-mêmes. Louis Althusser disait que la lutte ne ressemblait pas à un match de foot rassemblant deux équipes qui préexisteraient avant d'en venir aux combats plus ou moins civilisés. La lutte des classes existe dès qu'une minorité s'approprie le fruit du travail de tous les autres. Maxime Vivas nous rappelle donc en creux cette vérité première mais, en évoquant l'évolution des modes de management, il nous montre aussi que le pire est toujours possible, il nous permet de nous souvenir que depuis qu'existe l'entreprise au sens moderne du terme, les patrons n'ont eu de cesse de dépouiller les salariés non seulement de l'essentiel de la valeur qu'ils créent, mais aussi de leur savoir-faire, de leur culture de métier, de leur solidarité, etc. L'entreprise d'antan était un bagne mais les frontières de classes étaient plus visibles/lisibles. Le coup de génie du patronat moderniste a été sa volonté de s'emparer non plus seulement des gestes et de l'intelligence des salariés mais de leur âme, de leur sensibilité, de leur être. Ainsi après la maudite taylorisation des gestes, on a vu se généraliser la taylorisation du sourire. Conséquence : l'entreprise, malgré (ou grâce à ?) tous ses beaux discours sur l'importance des mal-nommées "relations humaines" refuse d'accéder à la reconnaissance de l'autre. La France est, selon deux rapports du Bureau International du travail (ONU), en tête des pays "avancés" pour la violence au travail. L'INSEE estime, pour sa part, que sept millions de Français sont concernés. La médecine du travail évalue à plus de 90 % les médecins ayant déjà eu connaissance d'au moins un cas de harcèlement au travail et 21 % d'entre eux considèrent ce phénomène comme fréquent : 97 % des victimes souffrent de complications morbides se traduisant par des insomnies, de l'anxiété, de la dépression, des troubles digestifs ou cutanés, etc. On veut croire que ce harcèlement serait le fait de "petits chefs" pervers ou de "pauvres" patrons obligés d'en user à cause des rigidités du droit du travail (sic). Si la France est championne de la violence au travail, ce n'est pas parce que les managers français seraient plus sadiques que les autres, ni parce que les salariés français seraient plus fragiles, mais parce que les Français accordent une bien grande importance au travail. J'ai personnellement tendance à le regretter mais les Français, contrairement aux autres peuples, classent le travail, avant la famille, avant les amis, avant le politique ou le religieux. Nous souffrons au travail car nous sommes plus que d'autres prisonniers de l'idéologie du travail et parce que les nouveaux modes de management nous empêchent de travailler comme nous le souhaiterions, c'est-à-dire correctement, conformément à l'image que le salarié français, amoureux de son travail, se fait du travail "bien fait", du travail "comme-il-faut". Cet amour du travail bien fait n'est pas le propre des constructeurs de cathédrales, comme on l'entend trop souvent, mais des ouvriers, des employés, des cadres, d'ici et maintenant. L'entreprise ne peut entendre cette prétention à bien travailler, c'est pourquoi elle multiplie aujourd'hui les fiches de post e et les fiches techniques dans le but de tout formaliser , dans le but de standardiser, d'uniformiser, faute d'admettre une vraie coopération d ans le travail. Conséquence : elle n'a de cesse de déshumaniser ce qui réside au coeur du travail humain, l'importance des collectifs de travail , la primauté aussi de l'utilité même du travail. L'entreprise moderne est devenue, pour cette rais on, une "mauvaise mère" qui dévore son personnel. Loïck Roche, directeur de l'école supérieure de commerce de Grenoble, explique ainsi dans "Psychanalyse, sexualité et management" que les deux modes de management qui tendent à se développe r le plus vite sont le management oral et anal et non le management génital. Par manager oral, il désigne ces nouveaux chefs, champions dans l'art de la parole, incapable de supporter qu'une autre parole que celle officielle puisse simplement exister, grands amoureux des honneurs (grands bureaux, belles voitures de fonction, etc.), spécialistes de la manipulation mentale sous prétexte de motivation toujours insuffisante des salariés. Par manager anal, il désigne ces nouveaux chefs, qui n'agissent que pour dominer, qui n'ont en tête que l'idée de punir et de surveiller, qui cèdent au fantasme de toute-puissance, non seulement en pervertissant les relations humaines mais en s'appropriant de s rémunérations obscènes, etc. Le manager dit génital serait celui qui sait reconnaître en l'autre un autre, avec sa culture propre, avec ses intérêts spécifiques, autant dire que ce manager "démocratique" se fait rare. L'entre prise moderne pourrait donc très bien exister aujourd'hui sans harceler pour exclure mais elle ne peut plus se passer d'une nouvelle forme d e harcèlement visant à intégrer à sa sauce managériale, MEDEFienne afin d'empêcher tout autre parole que la sienne d'exister... L'absence de droit à la parole a toujours été le terreau le plus propice au développement de la contre-violence salariale, celle des grèves dures et des séquestrations de cadres ou patrons. Les actes chemisophobes relèvent donc, non seulement de la légitime défense de ceux qui ont le sentiment d'être privés de parole donc d'existence véritable, mais d'un moindre mal. Ces actes chemisophobes ne sont-ils pas préférables aux "jambinisations" qui consistaient à tirer dans les jambes des petits chefs les plus salauds dans l'Italie des années soixante-dix ? La vision "bisounours" de l'histoire ne sert que ceux qui ont le monopole de la parole. Renforcer les droits collectifs des salariés dans l'entreprise serait la meilleure assurance possible pour préserver en état les chemises des dirigeants. Celles et ceux qui ont le sentiment légitime de ne jamais être entendus, celles et ceux qui perdent dans l'affaire bien plus que leur chemise ont le besoin parfois de poser des actes symboliques forts. Ces actes chemisophobes relèvent bien d'une thérapie face aux vagues de suicide.

05/2016

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Sciences historiques

L'ogre historien. Autour de Jacques Le Goff

" Le bon historien ressemble à l'ogre de la légende, disait Marc Bloch. Là où il flaire la chair humaine, il sait que là est son gibier. " Jacques Le Goff n'a guère eu à forcer son talent pour se glisser à son tour dans la peau de l'ogre. La métaphore illustre à souhait l'énergie physique et intellectuelle, la force de travail peu commune de cet historien qui tient de Michelet, mais aussi de Balzac. C'est à l'évoquer, lui et son œuvre et, plus encore, sa manière de faire de l'histoire que nous avons voulu consacrer ce livre pour le lui offrir.

01/1999

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Gestion des ressources humaine

Un compromis salarial en crise. Que reste-t-il à négocier dans les entreprises ?

Présentation des auteurs François Alfandari est docteur en science politique, membre du laboratoire Triangle, ses travaux portent sur l'étude du syndicalisme et des relations professionnelles, ainsi que sur l'engagement et les mobilisations collectives. Il a récemment publié " Transmettre un syndicalisme politique. La CGT dans un hôpital psychiatrique publicA ", La nouvelle revue du travail, 22, 2023 et a participé avec le Collectif Mosaïc à la direction d'un ouvrage méthodologique, Enquêter sur les relations professionnelles, ENS Editions, 2023. Sophie Béroud est professeure de science politique à l'Université Lyon 2, membre de Triangle. Ses travaux de recherche portent sur les transformations contemporaines du syndicalisme, les conflits du travail et les formes de mobilisation des travailleurs précaires. Parmi ses publications récentesA : A En luttesA ! Les possibles d'un syndicalisme de contestation, Paris, Raisons d'agir, 2021 (avec Martin Thibault)A ; A Sur le terrain avec les Gilets jaunesA : approche interdisciplinaire du mouvement en France et en Belgique, Presses Universitaires de Lyon, Lyon, 2022 (co-direction avec Anne Dufresne, Corinne Gobin et Marc Zune). Chloé Biaggi, docteure en sociologie (ENS de Paris), est actuellement chercheuse postdoctorante au LABERS (Université de Bretagne Occidentale). Ses travaux s'inscrivent dans le domaine de la sociologie du travail et des relations professionnelles. Sa thèse porte sur la gestion du fait syndical et des conflits au travail par les directions d'entreprises. Elle a récemment publié " Une négociation sans contrepartie ? Ethnographie d'un usage patronal de la négociation collective dans une filiale industrielle " (Socio-économie du travail, 2021) et " "J'en peux plus... j'arrête". Les ressorts de la (dé)mobilisation professionnelle d'un DRH" (La Nouvelle Revue du Travail, 2021). Charles Chamarre (ex-Berthonneau) est docteur en sociologie rattaché au Laboratoire d'Economie et de Sociologie du Travail (LEST). Il a réalisé sa thèse sur les formes d'engagement syndical dans des secteurs précaires et a publié plusieurs articles issus de cette recherche, dont " Un syndicalisme bridé. Expériences ordinaires de délégué·es dans des mondes du travail précairesA ", paru dans la revue Sociologie du Travail en décembre 2022. Il travaille aujourd'hui comme consultant en santé, sécurité et conditions de travail pour les CSE au sein du cabinet 3E Acante. Baptiste Giraud est maître de conférences en science politique à l'Université d'Aix-Marseille et chercheur au Laboratoire d'Economie et de Sociologie du Travail (LEST). Ses recherches portent sur les recompositions des conflits du travail, du syndicalisme et des relations professionnelles. Il est notamment le co-auteur du manuel Sociologie politique du syndicalisme (Armand Colin, 2018), avec Sophie Béroud et Karel Yon. Il a récemment aussi co-dirigé l'ouvrage collectif Le travail syndical en actes. Faire adhérer, mobiliser, représenter (Editions du Septentrion, 2020) avec Yolaine Gassier. Tristan Haute est maître de conférences en science politique à l'Université de Lille et chercheur au CERAPS. Ses recherches portent sur le vote, dans le champ politique et dans le champ professionnel, ainsi que sur la participation des salariés en entreprise (syndicalisation, recours à la grève...) ou encore sur les attitudes des salariés à l'égard des syndicats. Parmi ses publications récentesA : " Diversité et évolutions des attitudes des salariés à l'égard des syndicats en France ", Travail et Emploi, 2021/1, n°164-165, p. A 137-160A ; avec Pierre Blavier et Etienne Penissat, " Du vote professionnel à la grève : les inégalités de participation en entreprise ", Revue française de science politique, 2020/3-4, n°70, p. A 443-467. David Sanson Après un doctorat en sociologie, David Sanson est actuellement professeur adjoint (eq. MCF) à l'Université du Québec à Montréal. Prenant appui sur une ethnographie longitudinale réalisée au sein de collectifs ouvriers et militants d'une grande entreprise française, sa thèse explore les effets politiques du néo-management, en étudiant tout particulièrement les dynamiques inégalitaires et les mécanismes d'aliénation que l'appareillage gestionnaire contemporain produit auprès des classes populaires. Ses travaux actuels développent une approche critique des pratiques managériales hégémoniques, attentive aux multiples rapports de domination, aux dynamiques de relations professionnelles (coopérations, conflits, négociations) et aux pratiques de résistances des salarié. e. s en organisation. Camille Signoretto est maîtresse de conférences en sciences économique à l'Université Paris Cité, chercheuse au laboratoire Dynamiques sociales et recomposition des espaces (Ladyss), et également membre affiliée au CEET-Cnam et associée au LEST. Economiste du travail, ses travaux de recherche portent sur les relations de travail et d'emploi, et plus particulièrement leurs évolutions dans un contexte de changements socio-productifs et de réformes législatives qui ont marqué le monde du travail ces dernières décennies. Elle a récemment dirigé un numéro spécial de la revue Socio-économie du travail s'intitulant " Le "dialogue social" en pratiques et en contextesA " (n°10, 2021-2)A ; ou encore publié avec Aurélie Peyrin et Philippe Méhaut " Flexibilité et transformation des relations d'emploiA : une segmentation des pratiques de gestion de la main-d'oeuvre ", dans Relations industrielles / Industrial Relations, 77(4), 2022. Argumentaire de présentation de l'ouvrage Au terme d'une trentaine d'années de réformes ininterrompues des règles du dialogue social, parachevées par les ordonnances Travail de 2017, la négociation collective d'entreprise s'est imposée comme le nouveau pilier du système des relations professionnelles. En lien avec les politiques de flexibilisation du marché du travail, le dialogue social en entreprise est légitimé comme le moyen de concilier de façon plus équilibrée et efficace les impératifs de compétitivité des entreprises avec la défense des intérêts des salariés. L'institutionnalisation accrue du dialogue social en entreprise comme son éloge politique apparaissent pourtant en fort décalage avec la fragilisation importante de la capacité effective des salariés et de leurs représentants à peser sur la répartition de la valeur et les règles du rapport salarial. Les syndicats ont en effet beaucoup perdu de leur ancrage militant dans un système productif profondément bouleversé, marqué par la précarisation de la condition salariale et le " despotisme du marchéA " qu'impose la financiarisation de l'économie. Le tissu productif français n'en reste pas moins composé de modèles socio-productifs distincts, tant du point de vue des types de marché des entreprises, du profil de leur main d'oeuvre, des modalités de leur encadrement que de la présence syndicale. Combinant analyse statistique et enquêtes de terrain, cet ouvrage collectif montre comment s'articulent dans ces différents contextes socio-productifs les formes de la domination patronale, de conflictualité au travail et de pratiques du dialogue social. Ce faisant, il donne à voir selon quelles modalités différentes se reconfigurent, sous l'effet des transformations du capitalisme et des réformes néo-libérales, les usages des dispositifs du dialogue social en entreprise, les logiques de construction du compromis salarial et la capacité des salariés et de leurs représentants à le négocier. Points forts de l'ouvrage : Revisiter les transformations du dialogue social par le croisement de plusieurs traditions d'étude et l'articulation de plusieurs méthodes de recherche Cet ouvrage réconcilie en effet deux traditions de recherche qui ont jusqu'alors eu tenance à se tourner le dosA : l'analyse socio-économique des modèles productifs d'un côté, la sociologie des relations professionnelles de l'autre. Le croisement de ces approches ouvre une perspective originale pour apporter à l'analyse des modèles productifs une plus grande attention aux dimensions politiques des rapports de domination et des logiques du compromis salarial qui les caractérisent. Il permet en retour d'apporter un regard renouvelé sur les dynamiques de recompositions des relations professionnelles et des pratiques du dialogue social en lien avec la transformation du capitalisme. L'ouvrage s'appuie en outre sur une pluralité de méthode, en articulant l'exploitation des données statistiques de l'enquête REPONSE avec des enquêtes de terrain en entreprise. 2 - Penser ensemble les transformations les logiques de domination du capitalisme et les recompositions des pratiques de dialogue social Alors que la sociologie des relations professionnelles a eu tendance à étudier les logiques de fonctionnement des dispositifs institutionnels de la négociation collective comme s'ils fonctionnaient de manière autonome, le décloisonnement théorique opéré dans cette recherche vise au contraire à montrer qu'une approche par les contextes socio-productifs, attentive à la manière différente dont se configurent les rapports de domination et de résistance au travail, permet de mieux rendre compte de la dynamique différente des conflits et des négociations qui se jouent dans les espaces de la représentation du personnel. Cette perspective donne en particulier la possibilité de mieux cerner comment s'articuler la variété des formes de capitalisme (capitalisme familial, capitalisme administré, capitalisme financier) qui composent le modèle productif français, la dynamique des conflits et des usages des dispositifs du dialogue social en entreprise, et les logiques des compromis salariaux qu'ils servent à construire. Cet ouvrage est ainsi tout à la fois une contribution à l'analyse des transformations du modèle productif capitaliste français et des recompositions des rapports de domination et de compromis qu'ils rendent possible. 3 - Un regard original sur les métamorphoses du syndicalisme En raison de l'érosion de ses effectifs, le syndicalisme français est souvent associé à l'image d'un monde en crise et son utilité régulièrement questionnée. L'ouvrage s'attache à cet égard à éviter un double écueilA : celui d'une vision enchantée du dialogue social d'un côté, celui d'une vision trop unilatérale du déclin de l'influence syndicale. Si l'enquête montre effectivement combien le syndicalisme est mis à l'épreuve par les transformations du capitalisme dans sa capacité à organiser les salariés et défendre leurs intérêts, elle montre cependant aussi d'abord que, loin d'être uniformément affaiblie, leur capacité d'agir reste très dépendante et variable en fonction des contextes socio-productifs de leur ancrage. Elle montre aussi les organisations syndicales restent pourvoyeuses de ressources qui expliquent leur capacité beaucoup plus grande que les élus du personnel non syndiqués à tenir leur rôle de façon autonome des directions et à prendre en charge la défense des intérêts des salariés. 4 - Une enquête élargie aux représentants du personnel non syndiqués La comparaison entre élus du personnel non syndiqués et syndiqués constitue une autre grande originalité du dispositif d'enquête. Alors que les premiers constituent un angle mort de la sociologie des relations professionnelles, ils sont en effet au contraire partie intégrante de notre recherche. Cela permet de mieux mettre en lumière la variété des conditions de formation des instances représentatives du personnel et des modalités d'engagement possibles dans des mandats de représentants des salariés. Ce détour apparaît d'autant plus nécessaire que les nouvelles règles de la négociation collective ont ouvert la possibilité aux directions d'entreprise d'engager des négociations avec des représentants du personnel non syndiqués, majoritairement présents dans les petites entreprises. Notre enquête permet ainsi d'apporter un éclairage sur les contraintes singulières qui déterminent les modalités d'appropriation des dispositifs de la négociation collective et du dialogue social dans les petites entreprises familiales notamment. 5 - Eclairer les modalités d'intégration du dialogue social dans les politiques de domination patronale Attentif à la structure organisationnelle et sociale des usages des dispositifs de la représentation du personnel, cet ouvrage est enfin une contribution à l'analyse de la variété des significations et des pratiques que recouvre le concept flou de " dialogue socialA " dans les stratégies des directions des entreprises. Si elles s'articulent dans certains contextes à la recherche de compromis avec les représentants syndicaux, elle s'arrime au contraire dans d'autres au maintien de stratégies de répression anti-syndicale. Cette enquête documente de ce point de vue la manière dont les recompositions des modalités d'organisation du travail, des politiques managériales de gestion du personnel et les modalités d'appropriation des dispositifs du dialogue social par les directions d'entreprise varient ensemble. Elle apporte ainsi un éclairage sur la façon dont les formes de la domination patronale se différencient et se reconfigurent en s'articulant autour de trois types d'usages des dispositifs de la représentation du personnel, selon qu'ils sont réinvesties dans une simple logique de légalisation des relations professionnelles, comme un instrument de management des relations avec les syndicats ou bien utilisés de manière plus offensive pour refonder le rapport salarial.

10/2023