#Roman francophone

De la supériorité des femmes

Alexandre Lacroix

" Elle dort. Maintenant, quand elle s'endort à mon côté, j'éprouve une confuse contrariété. Il me semble qu'elle m'échappe, qu'elle ne tombe pas dans le sommeil parce qu'elle a besoin de repos, mais par pur égoïsme. Elle dort contre moi, pour me montrer à quel point ma présence lui est indifférente. Pour son amant, elle était toujours en forme, gorgée de vitalité. Avec moi, la nuit, elle se laisse choir comme une masse. Même les rêves de Mathilde m'incommodent et me paraissent appartenir au registre de ses infidélités. À côté d'elle, je veille. Je crois que je déteste l'amour, et la fin de l'autonomie qui l'accompagne. "

Par Alexandre Lacroix
Chez Flammarion

0 Réactions |

Editeur

Flammarion

Genre

Littérature française

 

 

 

 

 

 

Jeudi 17 août :

improvisons notre vie,

mais soyons amoureux

 

 

Ma femme écrit très bien. Elle a un don pour ça. Sincèrement, et sans vouloir la flatter, elle est capable de merveilles sitôt qu'elle s'attelle au traitement de texte. Moi, je ne me débrouille pas trop mal, sans fausse modestie. Mais j'ai un rapport trop technique à l'écriture, j'en ai fait mon métier. Il m'arrive d'écrire pour écrire, ou bien pour faire du style, sans avoir rien à dire. Je peaufine des tournures, ménage des transitions, des descriptions anodines. Il y a dans mes ouvrages des passages à vide, des absences. Tandis que ma femme… Elle ne fait pas de livre, c'est entendu. Quand elle écrit, elle donne libre cours à son intensité. C'est le trop-plein de ses émotions qui dévale dans sa prose, qui l'irrigue et lui confère une chaleur communicative. Vous levez le sourcil ? Vous n'êtes pas convaincu ? Tenez, jugez-en par vous-même :

 

Lettre à cœur ouvert

À toi Stéphane,

Mon amant que j'aime,

 

Ai-je bien eu cette discussion avec toi, hier soir ? Elle parlait d'amour, du tien et du mien. Que nous faisions un pacte, celui de lui donner une chance. Une chance véritable d'exister entre nous.

Tu me disais, hier, que souvent tu dis non, plutôt que dire oui. Tu me disais, aussi, de me fier aux actes. Pourquoi n'es-tu pas sorti avec moi de ce bar ? Nous aurions pu avoir un moment de tendresse, des caresses d'amant, comme nous les aimons tant.

Ce soir tu sèmes la confusion dans mes sentiments. Je ne ferai pas silence, je te l'avais promis. Je t'écris sans détour. Car je t'aime mon amour.

Et voilà où j'en suis. Je t'aime de telle sorte que je veux tout avec toi. Je ne vois pas de limite. Ceci n'est pas concret. Plutôt des libertés qu'on se permet d'avoir. Comme celle de se rejoindre, si l'envie nous prend au corps. Ou celle de s'appeler, quand l'autre nous manque trop. Demain, nous préparons chacun notre départ. Qu'à cela ne tienne, voyons-nous, nous aurons bien le temps de cuver notre peine durant ces quinze jours ! Nous dormirions ensemble dans le même lit ce soir, enlacés et repus d'une journée si pleine.

Égarons-nous ensemble, prenons des libertés. Que notre amour soit une ligne blanche autour de laquelle s'organisent les autres. Ils peuvent prendre beaucoup de place, ce n'est pas un problème. Avec notre confiance, nous pourrons beaucoup nous tourner vers eux. Vers nos enfants d'abord, vers nos conjoints ensuite, sans nous mettre en péril. Mais consolidons-nous, notre union à nous.

Protège-moi Stéphane, donne-moi de l'importance. Ne mets pas à l'épreuve chaque jour mon amour. Je risque de douter de celui que tu me portes. Le danger vient de nous.

Improvisons notre vie, mais soyons amoureux.

Tu vois ce soir je souffre.

Je n'échangerais rien contre un moment de tendresse passé avec toi. Dans tes bras. Sentir l'odeur de ta peau, de ton souffle, de tes cheveux, vaut plus à mes yeux que n'importe quoi d'autre. J'ai besoin de sentir ton amour. Que tu as besoin de moi. Que je ne suis pas seule dans cette aventure-là.

Commenter ce livre

 

04/01/2008 225 pages 18,30 €
Scannez le code barre 9782081209220
9782081209220
© Notice établie par ORB
plus d'informations