#Roman étranger

Notes de Hiroshima

Kenzaburô Oé

En août 1963, Kenzaburô Oé, alors brillant écrivain de vingt-huit ans, part à Hiroshima faire un reportage sur la neuvième Conférence mondiale contre les armes nucléaires.
Indifférent à la politique politicienne, il est immédiatement sensible aux témoignages des oubliés du 6 août 1945, écartelés entre le " devoir de mémoire " et le " droit de se taire " : vieillards condamnés à la solitude, femmes défigurées, responsables de la presse locale et, surtout, médecins luttant contre le syndrome des atomisés, dont la rencontre allait bouleverser son oeuvre et sa vie. Dans leur héroïsme quotidien, leur refus de succomber à la tentation du suicide, Oé voit l'image même de la dignité.
Quel sens donner à une vie détruite ? Qu'avons-nous retenu de la catastrophe nucléaire ? " A moins d'adopter l'attitude de celui qui ne veut rien voir, rien dire et rien entendre, demande-t-il, qui d'entre nous pourra donc en finir avec cette part de Hiroshima que nous portons en nous-mêmes ? " A aucune de ces questions, toujours d'actualité, Oé n'apporte de réponse. Il s'interroge, nous interroge.
Ainsi confère-t-il à son " reportage " la dimension d'un traité d'humanisme d'une portée universelle.

Par Kenzaburô Oé
Chez Editions Gallimard

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Genre

Littérature étrangère

Kenzaburô Ôé est né en 1935 dans l'île de Shikoku, au sud-ouest du Japon. Il reçoit à vingt-trois ans le prix Akutagawa pour son récit Gibier d'élevage. Son œuvre composée de romans, de nouvelles et d'essais le place au tout premier rang de la scène littéraire japonaise. En 1989, le prix Europalia lui est décerné pour l'ensemble de son œuvre, et il reçoit le prix Nobel de littérature en 1994.

Écrivain original qui rejette le système de valeurs d'une société aux pouvoirs centralisés et reflète les interrogations et les inquiétudes de la génération de l'après-guerre, il incarne la crise de conscience d'un pays emporté dans le matérialisme.

Qui donc, dans les temps à venir, pourra comprendre […] qu'après avoir connu la lumière, nous avons été amenés ainsi, de nouveau, à basculer dans les ténèbres ?

SÉBASTIEN CASTILIAN

De arte dubitandi (1562)

Pour les noms de personnes qui figurent dans cet ouvrage, on s'est conformé à l'usage japonais qui veut que le nom de famille soit placé en tête, avant le « prénom ».

Toutes les notes sont dues à la traductrice qui s'est inspirée, pour le contenu de certaines d'entre elles, des informations données dans la traduction anglaise des « Notes de Hiroshima » (nouvelle édition publiée par YMCA Press, Tôkyô, 1994, sous le titre Hiroshima Notes, traduit par Yonezawa Toshi).

La traductrice exprime ses vifs remerciements à l'auteur qui, par la gentillesse et la précision avec lesquelles il a répondu à ses questions, a apporté une aide précieuse à la mise au point du texte français.

Qu'une vie d'homme puisse se jouer de façon décisive en l'espace de quelques jours, voilà un mythe auquel je ne croyais pas dans ma jeunesse. Mais à présent, quand je repense à l'expérience que j'ai vécue il y a trente-deux ans, entre le début et le plus fort de l'été, je suis bien obligé de reconnaître que ce genre de choses est tout à fait possible. De le reconnaître avec un sentiment de terreur sacrée.

Cette année-là, j'avais vingt-huit ans, et en tant que jeune romancier je peux dire que j'étais en train, à la suite du succès de mes débuts, d'édifier ma carrière. En tant qu'essayiste également : je jouais le rôle de porte-parole de la jeune génération — celle qui, confrontée à la défaite au moment de l'adolescence, avait vécu sa jeunesse à l'époque où la démocratie était en plein essor au Japon. Et pourtant, en tant qu'écrivain, je me sentais déjà dans l'impasse.

À cela s'ajoutait une crise évidente qui affectait également ma vie personnelle. Je venais d'assister à la naissance de mon premier enfant, mais il avait une importante malformation à la tête, et pour tenter de le sauver, il fallait l'opérer d'urgence. Je savais, par un médecin d'une franchise totale, un homme guère plus âgé que moi, que même si l'opération réussissait et parvenait à arracher mon fils à la mort, celui-ci resterait sans doute gravement handicapé. Autant dire que j'étais acculé de toutes parts.

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01/09/1996 238 pages 13,95 €
Scannez le code barre 9782070742776
9782070742776
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