#Essais

Lemures

Jean-Louis Cornille

Face à l’oeuvre de Raharimanana, devenue incontournable, on propose de remonter le temps afin de mieux comprendre la violence langagière qui s’y exhibe. Ne s’expliquerait-elle pas par la trop longue fascination teintée de respect que témoignèrent à l’égard de la langue française ses prédécesseurs, Rabearivelo et Rabemananjara ? Ce qui leur faisait défaut, c’est bien cette violence symbolique exercée à l’encontre d’une langue venue du dehors. Ce double rendez-vous raté permet de comprendre qu’un Raharimanana se voit dans la nécessité aujourd’hui de ressasser encore et toujours un même devoir de violence. Celui-ci, une fois accompli, permettra à un Johary Ravaloson de s’en «dégager», d’évoluer en roue libre. Si le parcours anthologique de l’oeuvre de ces quatre auteurs est aussi une «hantologie», c’est que les fantômes de toutes sortes y abondent : ombres dans leurs poèmes, doubles dans leurs récits, spectres et suppôts dans leur correspondance comme dans leurs traductions, larves et lémures dans leurs cahiers. Or paradoxalement ces revenants ne sont pas seulement issus de la terre malgache, de ses contes ou de sa tradition orale : ce sont, de Baudelaire à Segalen, en passant par Rimbaud, ou Leconte de Lisle, traducteur d’Homère, tous des auteurs bien français. Francophones, encore un effort avant d’être révolutionnaires ?

Par Jean-Louis Cornille
Chez Traverse(s)

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15/12/2022 116 pages 15,00 €
Scannez le code barre 9782493970343
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