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Simone Beauvoir

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Psychologie, psychanalyse

La vieillesse. Essai

Les vieillards sont-ils des hommes ? À voir la manière dont notre société les traite, il est permis d'en douter. Elle admet qu'ils n'ont ni les mêmes besoins ni les mêmes droits que les autres membres de la collectivité puisqu'elle leur refuse le minimum que ceux-ci jugent nécessaire ; elle les condamne délibérément à la misère, aux taudis, aux infirmités, à la solitude, au désespoir. Pour apaiser sa conscience, ses idéologues ont forgé des mythes, d'ailleurs contradictoires, qui incitent l'adulte à voir dans le vieillard non pas son semblable mais un autre. Il est le Sage vénérable qui domine de très haut ce monde terrestre. Il est un vieux fou qui radote et extravague. Qu'on le situe au-dessus ou en dessous de notre espèce, en tout cas on l'en exile. Mais plutôt que de déguiser la réalité, on estime encore préférable de radicalement l'ignorer : la vieillesse est un secret honteux et un sujet interdit. Quand j'ai dit que j'y consacrais un livre, on s'est le plus souvent exclamé : " Quelle idée ! C'est triste ! C'est morbide ! " C'est justement pourquoi j'ai écrit ces pages. J'ai voulu décrire en vérité la condition de ces parias et la manière dont ils la vivent, j'ai voulu faire entendre leur voix ; on sera obligé de reconnaître que c'est une voix humaine. On comprendra alors que leur malheureux sort dénonce l'échec de toute notre civilisation : impossible de le concilier avec la morale humaniste que professe la classe dominante. Celle-ci n'est pas seulement responsable d'une " politique de la vieillesse " qui confine à la barbarie. Elle a préfabriqué ces fins de vie désolées ; elles sont l'inéluctable conséquence de l'exploitation des travailleurs, de l'atomisation de la société, de la misère d'une culture réservée à un mandarinat. Elles prouvent que tout est à reprendre dès le départ : le système mutilant qui est le nôtre doit être radicalement bouleversé. C'est pourquoi on évite si soigneusement d'aborder la question du dernier âge. C'est pourquoi il faut briser la conspiration du silence : je demande à mes lecteurs de m'y aider.

01/1970

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Littérature française

Les mandarins

"Qu'est-ce qui ne va pas ? Rien, tout va très bien, dis-je d'un ton dégagé. Allons ! Allons ! je sais ce que ça veut dire quand tu prends ta voix de dame du monde, dit Robert. Je suis sûr qu'en ce moment ça tourne dur dans cette tête. Combien de verres de punch as-tu bus ? Sûrement moins que vous, et le punch n'y est pour rien. Ah ! tu avoues ! dit Robert d'un ton triomphant ; il y a quelque chose et le punch n'y est pour rien ; quoi donc ? C'est Scriassine, dis-je en riant ; il m'a expliqué que les intellectuels français étaient foutus".

10/1954

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Littérature française (poches)

L'Amérique au jour le jour

"J'ai passé quatre mois en Amérique : c'est peu ; en outre j'ai voyagé pour mon plaisir et au hasard des occasions ; il y a d'immenses zones du nouveau monde sur lesquelles je n'ai pas eu la moindre échappée ; en particulier, j'ai traversé ce grand pays industriel sans visiter ses usines, sans voir ses réalisations techniques, sans entrer en contact avec la classe ouvrière. Je n'ai pas pénétré non plus dans les hautes sphères où s'élaborent la politique et l'économie des U. S. A. Cependant, il ne me paraît pas inutile, à côté des grands tableaux en pied que de plus compétents ont tracés, de raconter au jour le jour comment l'Amérique s'est dévoilée à une conscience : la mienne".

01/1997

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Littérature française

Les inséparables

Ce court roman autobiographique suit avec émotion et lucidité l'amitié passionnée de deux jeunes filles rebelles, Simone de Beauvoir(Sylvie) et Zaza (Andrée), au long de leur éducation sexuelle et intellectuelle jusqu'à son dénouement tragique. On y retrouve les expériences fondatrices de la révolte et de l'oeuvre de la grande philosophe féministe : son émancipation mouvementée et l'antagonisme fondamental entre les intellectuels et les bien-pensants, qui formeront le socle des Mémoires d'une jeune fille rangée.

10/2020

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Littérature française (poches)

Tous les hommes sont mortels

Si l'on nous offrait l'immortalité sur la terre, qui est-ce qui accepterait ce triste présent ? demande Jean-Jacques Rousseau dans l'Emile. Ce livre est l'histoire d'un homme qui a accepté.

03/1974

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Littérature française

Journal de guerre. Septembre 1939 - janvier 1941

Ce journal de la déclaration et du début de la guerre (sept carnets) ne constitue qu'un fragment du journal que Simone de Beauvoir tint dès sa jeunesse, presque dès son enfance, et sa vie durant, quoique par intermittence. II faut le considérer comme une partie d'un tout considérablement plus vaste. Mais sa publication isolée a été conçue comme complément de la correspondance avec Sartre, dont plus de la moitié appartient à la même période noire de 1939 et 1940. II a paru intéressant de confronter les deux versions contemporaines dans leurs subtiles mais significatives différences. Surtout, le journal vient combler les trous de la correspondance, inévitables lorsque les deux épistoliers se rejoignaient : visite clandestine du Castor à Brumath, en novembre, permission de Sartre venu à Paris, en février, ou pendant leur brutale séparation, toute communication coupée, quand Sartre fut fait prisonnier en juin 1940. II permet alors de reconstituer l'histoire dans sa continuité.

10/1999

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Sociologie

Le deuxième sexe Tome 1 : Les faits et les mythes

«Nous commencerons par discuter les points de vue pris sur la femme par la biologie, la psychanalyse, le matérialisme historique. Nous essaierons de montrer ensuite positivement comment la «réalité féminine» s'est constituée, pourquoi la femme a été définie comme l'Autre et quelles en ont été les conséquences du point de vue des hommes. Alors nous décrirons du point de vue des femmes le monde tel qu'il leur est proposé ; et nous pourrons comprendre à quelles difficultés elles se heurtent au moment où, essayant de s'évader de la sphère qui leur a été jusqu'à présent assignée, elles prétendent participer au mitsein humain». Simone de Beauvoir.

02/1961

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Sociologie

Le deuxième sexe Tome 2 : L'expérience vécue

Dans ce second volume, Simone de Beauvoir entreprend " d'étudier avec soin le destin traditionnel de la femme ", c'est à dire de " situer " la femme. " Comment la femme fait-elle l'apprentissage de sa condition, comment l'éprouve-t-elle, dans quel univers se trouve-t-elle enfermée, quelles évasions lui sont permises, voilà ce que je chercherai à décrire. " D'abord sa formation : dans l'enfance, dans l'adolescence, dans l'initiation sexuelle, tout semble disposé, agencé, pour creuser davantage le fossé naturel qui la sépare de l'homme, pour transformer des différences en inégalité, et cette inégalité en infériorité. Ensuite sa situation : Simone de Beauvoir décrit la femme dans le mariage, avec ses prémisses, ses traditions, ses conséquences ; dans la maternité ; dans la prostitution, dans la société ; dans le vieillissement et la vieillesse. Enfin elle envisage les problèmes qui se posent aux femmes qui " héritant d'un lourd passé, s'efforcent de forger un avenir nouveau ".

07/2003

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Littérature française

Les inséparables. Suivi de Malentendu à Moscou

Court roman autobiographique, Les Inséparables raconte avec émotion et lucidité l'amitié passionnée de deux jeunes filles rebelles, Simone de Beauvoir (Sylvie dans le texte) et Zaza (Andrée). Un récit qui commence avec leur rencontre à neuf ans et les suit tout au long de leur éducation sexuelle et intellectuelle jusqu'au dénouement tragique : la mort de Zaza. On y retrouve les expériences fondatrices de la révolte et de l'oeuvre de la grande philosophe féministe : son émancipation mouvementée et l'antagonisme fondamental entre les intellectuels et les bien-pensants, qui formeront le socle des Mémoires d'une jeune fille rangée. Malentendu à Moscou évoque la crise vécue par un couple au cours d'un voyage en U. R. S. S. Alternant les points de vue des deux personnages, on y lit la désillusion chez un homme et une femme vieillissants et un témoignage critique sur la Russie soviétique des années 1960 : déception politique et "malentendu" sentimental s'entrecroisent, nouant histoire individuelle et histoire collective. Introductions de Sylvie Le Bon de Beauvoir et Eliane Lecarme-Tabone.

08/2022

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Philosophie

L'existentialisme et la sagesse des nations

"L'homme cherche toujours son intérêt" , "La nature humaine ne changera jamais" , "Loin des yeux, loin du coeur" , "On n'est jamais si bien servi que par soi-même" , "Tout nouveau, tout beau" , "On n'est pas sur terre pour s'amuser" ... Ces lieux communs, ces partis pris, qui constituent la sagesse des nations, expriment une vision du monde incohérente, cynique et omniprésente, qu'il convient de mettre en question. C'est en son nom en effet qu'on reproche à l'existentialisme d'offrir à l'homme une image de lui-même et de sa condition propre à le désespérer. Au contraire, cette philosophie veut le convaincre de refuser les consolations du mensonge et de la résignation : elle fait confiance à l'homme.

01/2008

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Philosophie

Lettres à Sartre (1930-1939)

Quand, en 1983, Simone de Beauvoir publia les lettres de Sartre, ses amis s'étonnèrent : "Mais les vôtres, Castor ? " A toutes les sollicitations, elle opposa la même réponse : "Mes lettres ? Ells sont perdues". Ce qu'elle crut jusqu'à la fin. En 1986, Sylvie Le Bon de Beauvoir tomba sur un gros paquet, au fond d'un placard. C'étaient les lettres, la plupart encore pliées dans les enveloppes, adressées à "Monsieur Sartre" . Simone de Beauvoir avait toujours déclaré que, si on les retrouvait, elle ne les publierait pas de son vivant, mais qu'après sa mort on pourrait le faire. Simone de Beauvoir racontait qu'un de ses plus anciens fantasmes l'incitait à imaginer que son existence entière s'enregistrait quelque part sur un magnétophone géant. Ces 321 lettres participent, à leur manière, de ce rêve d'enregistrement exhaustif. On y entend en tout cas certainement sa voix, dans ses intonations les plus fugitives comme les plus constantes, sa vraie voix vivante.

09/2009

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Littérature française (poches)

Les mandarins. Tome 1

- Qu'est-ce qui ne va pas ? - Rien, tout va très bien, dis-je d'un ton dégagé. - Allons ! Allons ! Je sais ce que ça veut dire quand tu prends ta voix de dame du monde, dit Robert. Je suis sûr qu'en ce moment ça tourne dur dans cette tête. Combien de verres de punch as-tu bu ? - Sûrement moins que vous, et le punch n'y est pour rien. - Ah ! Tu avoues ! dit Robert d'un ton triomphant ; il y a quelque chose et le punch n'y est pour rien ; quoi donc ? - C'est Scriassine, dis-je en riant ; il m'a expliqué que les intellectuels français étaient foutus.

06/1972

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Littérature française

Malentendu à Moscou. Suivi de Portrait de Jean-Paul Sartre

Longue nouvelle, Malentendu à Moscou évoque la crise vécue par un couple vieillissant au cours d'un voyage en Union Soviétique. André et Nicole, professeurs à la retraite, rejoignent Macha, la fille d'André née d'un premier mariage, en U. R. S. S. où elle leur servira de guide et d'interprète tout au long de leur séjour, en juin 1966. Malaise et désarroi s'installent progressivement, aucun des deux époux ne trouvant à ce voyage le charme espéré. Déception politique et "malentendu " sentimental s'entrecroisent, nouant histoire individuelle et Histoire collective. Par ses qualités propres comme par la richesse des échos qu'elle entretient avec l'ensemble de l'oeuvre de Simone de Beauvoir, cette nouvelle méritait une nouvelle édition. La nouvelle est suivie d'un texte de Simone de Beauvoir, Portrait de Sartre, qui lui fut commandé par Harper's Bazaar en 1946. Préface d'Eliane Lecarme-Tabone.

11/2021

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Littérature française

La femme indépendante

"La femme a toujours été, sinon l'esclave de l'homme, du moins sa vassale ; les deux sexes ne se sont jamais partagé le monde à égalité ; et aujourd'hui encore, bien que sa condition soit en train d'évoluer, la femme est lourdement handicapée. En presque aucun pays son statut légal n'est identique à celui de l'homme et souvent il la désavantage considérablement". Agrégée de philosophie, unie à Jean-Paul Sartre par un long compagnonnage affectif et intellectuel, Simone de Beauvoir (1908-1986) publie son premier roman, L'Invitée, à l'âge de trente-cinq ans. Paru en 1949, Le Deuxième Sexe, dont on trouvera ici quelques pages marquantes, fit d'elle l'une des grandes figures du féminisme du XX ? siècle et lui assura une renommée internationale qui marqua durablement sa carrière d'écrivain.

04/2023

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Philosophie

Lettres à Sartre. Tome 2, 1940-1963

Quand, en 1983, Simone de Beauvoir publia les lettres de Sartre, ses amis s'étonnèrent : "Mais les vôtres, Castor ?" A toutes les sollicitations, elle opposa la même réponse : "Mes lettres ? Ells sont perdues". Ce qu'elle crut jusqu'à la fin. En 1986, Sylvie Le Bon de Beauvoir tomba sur un gros paquet, au fond d'un placard. C'étaient les lettres, la plupart encore pliées dans les enveloppes, adressées à "Monsieur Sartre" . Simone de Beauvoir avait toujours déclaré que, si on les retrouvait, elle ne les publierait pas de son vivant, mais qu'après sa mort on pourrait le faire. Simone de Beauvoir racontait qu'un de ses plus anciens fantasmes l'incitait à imaginer que son existence entière s'enregistrait quelque part sur un magnétophone géant. Ces 321 lettres participent, à leur manière, de ce rêve d'enregistrement exhaustif. On y entend en tout cas certainement sa voix, dans ses intonations les plus fugitives comme les plus constantes, sa vraie voix vivante.

06/2011

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Littérature française

La longue marche

"Ce livre n'est pas un reportage : le reporter explore un présent stable, dont les éléments plus ou moins contingents se servent réciproquement de clés. En Chine, aujourd'hui, rien n'est contingent ; chaque chose tire son sens de l'avenir qui leur est commun à toutes ; le présent se définit par le passé qu'il dépasse et les nouveautés qu'il annonce : on le dénaturerait si on le considérait comme arrêté. Il n'est qu'une étape de cette "longue marche" qui achemine pacifiquement la Chine de la révolution démocratique à la révolution socialiste. Il ne suffit donc pas de le décrire : il faut l'expliquer. C'est à quoi je me suis efforcée. Certes, je ne tiens pas du tout pour négligeable ce qu'au cours d'un voyage de six semaines j'ai pu voir de mes yeux : se promener dans une rue, c'est une expérience irrécusable, irremplaçable, qui en enseigne plus long sur une ville que les plus ingénieuses hypothèses. Mais toutes les connaissances acquises sur place par des visites, conférences, conversations, etc. , j'ai tenté de les éclairer à la lumière de la Chine d'hier, et dans la perspective de ses transformations futures. C'est seulement quand on le saisit dans son devenir que ce pays apparaît sous un jour véritable : ni paradis, ni infernale fourmilière, mais une région bien terrestre, où des hommes qui viennent de briser le cycle sans espoir d'une existence animale luttent durement pour édifier un monde humain". Simone de Beauvoir.

04/1957

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Littérature française (poches)

Les belles images

" Non ", elle a crié tout haut. Pas Catherine. Je ne permettrai pas qu'on lui fasse ce qu'on m'a fait. Qu'a-t-on fait de moi ? Cette femme qui n'aime personne, insensible aux beautés du monde, incapable même de pleurer, cette femme que je vomis. Catherine : au contraire lui ouvrir les yeux tout de suite et peut-être un rayon de lumière filtrera jusqu'à elle, peut-être elle s'en sortira... De quoi ? De cette nuit. De l'ignorance, de l'indifférence.

02/2016

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Littérature française (poches)

La force des choses. Tome 1

Peu de temps après le jour V, je passai une nuit très gaie avec Camus, Chauffard, Loleh, Bellon, Vitold, et une ravissante portugaise qui s'appelait Viola. D'un bar de Montparnasse qui venait de fermer, nous descendîmes vers l'hôtel de la Louisiane ; Loleh marchait pieds nus sur l'asphalte et disait : " C'est mon anniversaire, j'ai vingt ans ". Nous avons acheté des bouteilles et nous les avons bues dans la chambre ronde ; la fenêtre était ouverte sur la douceur de mai et des noctambules nous criaient des mots d'amitié ; pour eux aussi, c'était le premier printemps de paix.

07/2009

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Philosophie

La vieillesse

"Les vieillards sont-ils des hommes ? A voir la manière dont notre société les traite, il est permis d'en douter. Elle admet qu'ils n'ont ni les mêmes besoins ni les mêmes droits que les autres membres de la collectivité puisqu'elle leur refuse le minimum que ceux-ci jugent nécessaire ; elle les condamne délibérément à la misère, aux taudis, aux infirmités, à la solitude, au désespoir. Pour apaiser sa conscience, ses idéologues ont forgé des mythes, d'ailleurs contradictoires, qui incitent l'adulte à voir dans le vieillard non pas son semblable mais un autre. Il est le Sage vénérable qui domine de très haut ce monde terrestre. Il est un vieux fou qui radote et extravague. Qu'on le situe au-dessus ou en dessous de notre espèce, en tout cas on l'en exile. Mais plutôt que de déguiser la réalité, on estime encore préférable de radicalement l'ignorer : la vieillesse est un secret honteux et un sujet interdit. Quand j'ai dit que j'y consacrais un livre, on s'est le plus souvent exclamé : "Quelle idée ! C'est triste ! C'est morbide ! " C'est justement pourquoi j'ai écrit ces pages. J'ai voulu décrire en vérité la condition de ces parias et la manière dont ils la vivent, j'ai voulu faire entendre leur voix ; on sera obligé de reconnaître que c'est une voix humaine. On comprendra alors que leur malheureux sort dénonce l'échec de toute notre civilisation : impossible de le concilier avec la morale humaniste que professe la classe dominante. Celle-ci n'est pas seulement responsable d'une "politique de la vieillesse" qui confine à la barbarie. Elle a préfabriquée ces fins de vie désolées ; elles sont l'inéluctable conséquence de l'exploitation des travailleurs, de l'atomisation de la société, de la misère d'une culture réservée à un mandarinat. Elles prouvent que tout est à reprendre dès le départ : le système mutilant qui est le nôtre doit être radicalement bouleversé. C'est pourquoi on évite si soigneusement d'aborder la question du dernier âge. C'est pourquoi il faut briser la conspiration du silence : je demande à mes lecteurs de m'y aider". Simone de Beauvoir.

02/2020

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Philosophie

Pyrrhus et Cinéas

"Quelle est donc la mesure d'un homme ? Quels buts peut-il se proposer, et quels espoirs lui sont permis ? " "L'infini" , "Dieu" , "L'humanité" , "Les autres" , "L'action" ... Avec Pyrrhus et Cinéas, paru en 1944, Simone de Beauvoir signe son premier essai. Ouvrant sa réflexion sous l'égide des deux figures antiques que sont Pyrrhus - roi assoiff é de conquêtes - et Cinéas - son "sage" conseiller -, elle y déploie une philosophie de l'existence où prime la dimension irréductible de la liberté. Prolongeant ainsi exemplairement L'être et le néant de Jean-Paul Sartre, paru l'année précédente, elle y fraye aussi une voie singulière. Une voie que guide une préoccupation constante : quelle éthique pour une telle liberté ?

02/2020

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Littérature française

Mémoires d'une jeune fille rangée

Je rêvais d'être ma propre cause et ma propre fin ; je pensais à présent que la littérature me permettrait de réaliser ce voeu. Elle m'assurerait une immortalité qui compenserait l'éternité perdue ; il n'y avait plus de Dieu pour m'aimer, mais je brûlerais dans des millions de coeurs. En écrivant une oeuvre nourrie de mon histoire, je me créerais moi-même à neuf et je justifierais mon existence. En même temps, je servirais l'humanité : quel plus beau cadeau lui faire que des livres ? Je m'intéressais à la fois à moi et aux autres ; j'acceptais mon "incarnation" mais je ne voulais pas renoncer à l'universel : ce projet conciliait tout ; il flattait toutes les aspirations qui s'étaient développées en moi au cours de ces quinze années.

10/1958

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Littérature française (poches)

Les mandarins. Tome 2

- Vous garder ? Je vous garderais toute ma vie ! dit-il. Il m'avait jeté ces mots avec une telle violence que je chavirai dans ses bras. J'embrassai ses yeux, ses lèvres, ma bouche descendit le long de sa poitrine ; elle effleura le nombril enfantin, la fourrure animale, le sexe où un cœur battait à petits coups ; son odeur, sa chaleur me saoulaient et j'ai senti que ma vie me quittait, ma vieille vie avec ses soucis, ses fatigues, ses souvenirs usés. Lewis a serré contre lui une femme toute neuve.

06/1972

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Littérature française

Quand prime le spirituel

Dans La Force de l'âge, Simone de Beauvoir a raconté comment, de 1935 à 1937, elle a écrit Quand prime le spirituel, son premier livre, resté inédit jusqu'à ce jour. "Je résolus cette fois de composer des récits brefs [...] je me limiterais aux choses, aux gens que je connaissais ; j'essaierais de rendre sensible une vérité que j'avais personnellement éprouvée [...] j'indiquai le thème par un titre ironiquement emprunté à Maritain. La première nouvelle décrit l'étiolement d'une jeune fille à l'institut Sainte-Marie. Dans la seconde, je m'amusais à imaginer, chez une adulte, la dégradation de la religiosité en chiennerie. Dans la troisième, l'héroïne, par son entêtement à jouer un rôle, jetait dans des désastres deux jeunes élèves qui l'admiraient [...] j'avais réussi à rendre cette distance de soi à soi qu'est la mauvaise foi. Dans la quatrième, je tentai à nouveau de ressusciter Zaza [...] J'échouai [...] Cinquième nouvelle : [...] une satire de ma jeunesse. [...] mon enfance au cours Désir et la crise religieuse de mon adolescence. [...] Ce récit était de loin le meilleur [...] "Sartre en approuva de nombreux passages."

12/1979

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Littérature française

La cérémonie des adieux. Suivi de Entretiens avec Jean-Paul Sartre

""Alors, c'est la cérémonie des adieux ? " m'a dit Sartre, comme nous nous quittions pour un mois, au début de l'été. J'ai pressenti le sens que devaient prendre un jour ces mots. La cérémonie a duré dix ans : ce sont ces dix années que je raconte dans ce livre". Simone de Beauvoir.

11/1981

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Littérature française

Lettres à Nelson Algren. Un amour transatlantique 1947-1964

De 1947 à 1964, Simone de Beauvoir écrivit à Nelson Algren des centaines de lettres d'amour. Au sortir du confinement dû à la guerre, cet amour transatlantique l'entraîne dans une aventure aussi risquée que les vols Paris-New York de ce temps-là. C'est pour elle, à la fois, la découverte enthousiaste de l'Amérique, jusque-là mythique, et l'irruption dans sa vie d'une brûlante passion. Nelson ne sachant pas le français, elle lui écrit en anglais. Elle désire ardemment faire entrer l'homme qu'elle aime, ce Huron de Chicago, dans son univers, dont il ignore tout. Ainsi bénéficions-nous d'un reportage unique sur la vie littéraire, intellectuelle et politique de ces années. Sur Sartre et son petit clan, avec leurs amours, racontées avec humour, un humour parfois féroce. Sur la vie quotidienne en France. Pendant que naissent devant nous Le Deuxième Sexe, Les Mandarins, Mémoires d'une jeune fille rangée, Simone de Beauvoir nous livre d'elle-même une autre image : celle d'une femme amoureuse.

02/1997

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Littérature française

L'âge de discrétion

"Reflets, échos, se renvoyant à l'infini : j'ai découvert la douceur d'avoir derrière moi un long passé. Je n'ai pas le temps de me le raconter, mais souvent à l'improviste je l'aperçois en transparence au fond du moment présent ; il lui donne sa couleur, sa lumière comme les roches ou les sables se reflètent dans le chatoiement de la mer. Autrefois je me berçais de projets, de promesses ; maintenant, l'ombre des jours défunts veloute mes émotions, mes plaisirs". Mémoires d'une jeune fille rangée, La force de l'âge, La force des choses... Simone de Beauvoir ne cessa de transcrire, volume après volume, décennie après décennie, l'effet du passage des années. Dans ce court récit, c'est à un âge "discret" que l'écrivain s'attache : son héroïne a soixante ans.

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Littérature française (poches)

La force de l'âge

Vingt et un ans et l'agrégation de philosophie en 1929. La rencontre de Jean-Paul Sartre. Ce sont les années décisives pour Simone de Beauvoir. Celles ou s'accomplit sa vocation d'écrivain, si longtemps rêvée. Dix ans passés à enseigner, à écrire, à voyager sac au dos, à nouer des amitiés, à se passionner pour des idées nouvelles. La force de l'âge est pleinement atteinte quand la guerre éclate, en 1939, mettant fin brutalement à dix années de vie merveilleusement libre.

06/2007

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Critique littéraire

Faut-il brûler Sade ?

Comment les privilégiés peuvent-ils penser leur situation ? L'auteur étudie trois cas : les rapports de l'intellectuel avec la classe dominante, l'idéologie de la droite des années cinquante et, en analysant son oeuvre, l'échec de Sade dans sa recherche d'une synthèse impossible entre deux classes, entre le rationalisme des philosophes bourgeois et les privilèges de la noblesse. Les privilèges sont toujours égoïstes, nous montre Simone de Beauvoir, et il est impossible de les légitimer aux yeux de tous. Or la pensée vise toujours l'universalité.

12/2011

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Littérature française

Le sang des autres

Les actes que nous appelons nôtres nous échappent aussitôt accomplis : ils éclatent dans la vie d'autrui sous des figures imprévues. A la suite d'un accident survenu dans sa jeunesse, Jean BLOMART a découvert avec horreur le danger caché dans chacun de ses gestes ; il s'est juré de ne plus jamais intervenir dans un destin étranger. Un amour s'offre : il le repousse ; malgré la pression des événements qui se déroulent à travers le monde, il s'abstient de jouer aucun rôle politique ; il espère ainsi ne pas se rendre complice de la fatalité qui pèse sur chaque homme et qui est toujours le fait des autres hommes. Mais il s'aperçoit vite que ses refus l'engagent, autant qu'une action positive. La guerre, la défaite le convainquent que nous pesons toujours sur la terre et qu'il n'y a aucun moyen de nous en évader ; inerte, agissant, même mort, nous existons à travers le monde tout entier. BLOMART se résolut alors à assumer des responsabilités qui ne peuvent s'éluder ; il n'espère pas que cette décision lui apporte la paix ; un événement douloureux vient lui rappeler que tout acte est violence et tout choix un scandale ; mais il renonce à ses vieux rêves de paix et d'innocence ; il accepte le risque, le doute, et même le remords ; il accepte sa condition d'homme. Il choisira, il agira.

03/1984

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Philosophie

Pour une morale de l'ambiguïté suivi de Pyrrhus et Cinéas

Les hommes d'aujourd'hui semblent ressentir plus vivement que jamais le paradoxe de leur condition. Ils se reconnaissent pour la fin suprême à laquelle doit se subordonner toute action : mais les exigences de l'action les acculent à se traiter les uns les autres comme des instruments ou des obstacles : des moyens [...] Chacun d'entre eux a sur les lèvres le goût incomparable de sa propre vie, et cependant chacun se sent plus insignifiant qu'un insecte au sein de l'immense collectivité dont les limites se confondent avec celles de la terre ; à aucune époque peut-être ils n'ont manifesté avec plus d'éclat leur grandeur, à aucune époque cette grandeur n'a été si atrocement bafouée. Malgré tant de mensonges têtus, à chaque instant, en toute occasion, la vérité se fait jour : la vérité de la vie et de la mort, de ma solitude et de ma liaison au monde, de ma liberté et de ma servitude, de l'insignifiance et de la souveraine importance de chaque homme et de tous les hommes [...] Puisque nous ne réussissons pas à la fuir, essayons donc de regarder en face la vérité. Essayons d'assumer notre fondamentale ambiguïté. C'est dans la connaissance des conditions authentiques de notre vie qu'il nous faut puiser la force de vivre et des raisons d'agir. S.d.B.

01/2003