Recherche

Henry Ernest Dudeney

Extraits

ActuaLitté

Essais biographiques

Souvenirs de ma vie

Anna Klumpke (1846-1942) arrive dans la vie de Rosa Bonheur (1822-1899) en 1889. Elle sert alors d'interprète - Anna Klumpke est américaine - à un admirateur new yorkais de passage en France. Rosa Bonheur est une peintre si connue aux Etats-Unis que son tableau Le Marché aux chevaux est accroché au Metropolitan Museum, et l'on offre aux enfants une poupée à son effigie. Neuf ans après cette première rencontre, A. Klumpke est de retour au château de By, demeure de Rosa. Entre les deux femmes, une profonde affinité se fait jour. Venue pour quelques semaines, Anna finit par rester. Admirative, enthousiaste et attentive, Anna ne doute pas un instant que le monde puisse être fasciné par le témoignage de Rosa Bonheur. Elle en fera oeuvre littéraire et historique. Tout au long de leurs entretiens, Rosa Bonheur évoque ses origine, sa formation tout autant que sa vie personnelle dont ces années communes avec Nathalie Micas. Il est ici question du féminisme, des droits des femmes, du statut des femmes peintres aussi bien en France qu'outre Atlantique. Elle évoque la reconnaissance officielle - elle est la première artiste femme à être faite Chevalière de la Légion d'honneur -, le succès de ses toiles sur le marché de l'art lui offrant une indépendance financière. Il est ici question des personnalités de l'époque qu'elle côtoie et apprécie comme Buffalo Bill, le duc d'Aumale, l'impératrice Eugénie et bien d'autres encore. Ce livre brosse ainsi le tableau d'une artiste à redécouvrir qui recouvre quasiment tout le XIXe siècle. Natacha Henry assure l'édition révisé de ces entretiens.

02/2022

ActuaLitté

Islam

Oublie le chemin, tu parviendras à Dieu. Etudes sur les paradoxes de la mystique musulmane

Pierre Lory nous montre comment l'islam a pu dire Dieu qui se rapproche de l'homme ; comment cette improbable rencontre se lit dans le Coran, comment elle se lit aussi dans la nature, comment elle se traduit dans la mystique. La littérature mystique musulmane des premiers siècles rapporte des dires souvent étranges, des énoncés apparemment contradictoires de ses grands représentants. Ainsi Bastâmî (m. 848) : " Gloire à moi, gloire à moi ! Combien grande est ma puissance ", ou al-Hallâj (m. 822) : " Je suis le (Dieu) Vrai ", ou Abû Sa'îd de Mayhanâ (m. 1049) : " Il n'y a que Dieu sous mon manteau ". Moments indicibles, où le fini et l'infini se rejoignent, où les états mentaux implosent, où les concepts se volatilisent. Cet ouvrage essaie de montrer que ces paradoxes ne représentent pas un aspect marginal de la spiritualité en islam, mais bien au contraire, qu'ils nous ramènent en son centre le plus profond. Parler de " mystique " revient pour les Soufis à évoquer une rencontre entre la conscience humaine concrète d'une part, et un Etre divin qui lui est complètement incommensurable, d'autre part. Ici, seul le paradoxe parvient à " dire " quelque chose de ce qui a été vécu par le mystique, car " l'expression de l'inexprimable, c'est cela le paradoxe par excellence " (Henry Corbin). Ce que les paradoxes de soufis et des ésotéristes nous dévoilent, c'est l'omniprésence active d'une Intelligence voire d'un Amour divins circulant dans l'ensemble de la création, mais tout particulièrement dans son miroir le plus complet : la forme humaine, accomplie dans la personne des grands saints.

09/2023

ActuaLitté

Poches Littérature internation

Pénombre de l'aube. Essai d'autobiographie d'un concept de race

Né métis en 1868 dans le petit village de Great Barrington, dans le Massachusetts, trois ans à peine après la guerre de Sécession qui mit fin à l'esclavage dans les Etats du Sud, William Edward Burghardt Du Bois va devenir l'un des plus importants activistes de la lutte pour les droits civiques des Noirs aux Etats-Unis, puis, au fil de ses voyages en Europe et en Afrique, un des initiateurs du panafricanisme. En 1940, à l'âge de 72 ans, il publie, sous le titre original Dusk of Dawn, une récapitulation de sa vie à la lueur du "concept de race", qui a selon lui, avec les colonisations et l'esclavagisme, déterminé les rapports entre les peuples du monde. Tout son parcours l'y a incité : jeune étudiant découvrant la ségrégation dans le Tennessee, premier Afro-Américain à obtenir un doctorat à Harvard - où il suit les cours et les conseils de William James -, producteur infatigable de recherches sur les conditions de vie des Noirs à l'université d'Atlanta, chef en 1905 du Niagara Movement qui donnera naissance en 1909 à la NAACP (National Association for the Advancement of Colored People), toujours en activité aujourd'hui, créateur du magazine The Crisis, tribune d'idées et arme de combat. Du Bois cependant avait encore vingt-trois années fructueuses à vivre. Il mourra à Accra, communiste et citoyen ghanéen. Traduit pour la première fois en langue française et présenté par Jean Pavans, spécialiste de Henry James, ce document capital, d'une haute tenue littéraire, restitue la pensée de cette figure incontournable de l'histoire noire américaine, avant les combats de Martin Luther King et Malcolm X.

09/2020

ActuaLitté

Science-fiction

Nemesis le sorcier Tome 3 : Les hérésies complètes

Voici enfin la grande conclusion de la saga de NEMESIS, l'alien aux allures de démon créé par PAT MILLS (La Grande Guerre de Charlie, Judge Dredd, Marshal Law, Slaine...) et KEVIN O'NEILL (La Ligue des Gentlemen Extraordinaires, Marshal Law...). Dans ce combat sans merci mené à travers l'espace et le temps (et notamment par un détour dans l'Angleterre de Thatcher), NEMESIS le rebelle et TORQUEMADA le dictateur à la tête de l'Empire Humain, assoiffés de haine et de vengeance, sont prêts à employer tous les moyens pour se détruire l'un l'autre dans un étrange mais implacable mimétisme. Pris dans le feu croisé, dégâts collatéraux du conflit, les humains et des aliens auront-ils encore un espace pour vivre en paix à l'issue de l'affrontement final ? Série culte parue dans le magazine 2000AD, l'équivalent de Métal Hurlant outre-Manche, cette grande saga totalement inédite en Français se déroule dans un univers de science-fiction mélangeant "Space Opéra" , conflits cosmiques et paradoxes temporels. Mais elle est aussi avec Pat MILLS au scénario, un divertissement engagé contre les systèmes totalitaires et religieux toujours propres à légitimer les discriminations, tout en tournant en ridicule leurs figures éminentes . Série-phare du magazine britannique, elle est à nouveau illustrée par certains des dessinateurs les plus talentueux de l'univers 2000 AD, tels que Kevin O'NEILL, John HICKLENTON, ou encore Henry FLINT (Judge Dredd, ABC Warriors, Rogue Trooper...). Enfin, cet ultime volume de l'intégrale de NEMESIS fourmille de bonus tels que des histoires en plus (l' "Ere d'après Nemesis & Torquemada" , histoires courtes additionnelles) et une nouvelle galerie de couvertures originales en couleurs.

01/2022

ActuaLitté

12 ans et +

Phaenix Tome 2 : Le brasier des souvenirs

Anaïa Heiche poursuit sa vie dans le Sud de la France, où elle a déménagé quelques mois plus tôt avec ses parents et où elle a découvert qu’elle était détentrice d’un secret qu’elle a oublié. En effet, deux garçons qu’elle a rencontrés à la fac, Eidan et Enry, attendent d’elle qu’elle se souvienne… Pour recouvrer la mémoire, Anaïa aura à emprunter un chemin où musique et sentiments se mêlent étroitement, jusqu’à la découverte de sa véritable identité, de son destin unique. Prise alors dans le tourbillon du brasier de ses souvenirs, elle va prendre conscience qu’un terrible danger la guette, et menace par la même occasion le Phénix, l’oiseau mythique. C’est au cours de cette épreuve qu’Anaïa devra affronter ses propres démons, réparer ce qui a été défait et vaincre un ennemi inattendu. Portée par un amour plus fort que tout, parviendra-t-elle à écarter le péril mortel qui la guette ?

04/2013

ActuaLitté

Télévision, radio

Les radios locales : histoires, territoires et réseaux

En 1981, la loi autorisait les radios associatives françaises à diffuser leurs émissions en modulation de fréquence après une "bataille" qui a fait l'objet d'un autre livre chez le même éditeur : Radios libres, 30 ans de FM. La parole libérée ? (2016). Quarante années plus tard, près de 640 d'entre elles continuent à émettre quotidiennement, à côté d'autres stations locales, les unes publiques, les autres commerciales. Fruit du travail de plusieurs spécialistes, cet ouvrage revient sur les origines de ces radios locales. Mais il examine surtout leur devenir, les relations aux territoires - en métropole, d'outre-mer, en Belgique et au Congo - ainsi que leur mise en réseau politique, économique et technique. Ont contribué à cet ouvrage : Anne Briqueler, Philippe Caufriez, Raphaël Dapzol, Cécile de David-Beauregard, Alann Hery, Bernard Idelson, Jean-Jacques Ledos, Thierry Lefebvre, Cécile Morin, Pierre N'sana Bitentu, Nathalie Potard-Antiope, Sebastien Poulain, Pascal Ricaud.

08/2021

ActuaLitté

Questions du quotidien

Ces microbes qui nous veulent du bien

Nous sommes plus microbes qu'humains et c'est une bonne nouvelle ! Si 43 % de notre organisme est composé de cellules, tout le reste est constitué de micro-organismes. Ils sont partout : sur notre peau, nos muqueuses, dans notre estomac, notre foie, bref dans tout notre corps. "Ils", ce sont les microbes. Ecrit par un médecin bactériologue, cet ouvrage dévoile le pouvoir méconnu de notre microbiome, l'écosystème formé par les virus, bactéries et autres champignons qui cohabitent avec nous. Comment influence-t-il notre santé ? Que révèle-t-il de notre façon de vivre ? Que dit-il de nos futures maladies ? ... Quand nous mangeons, quand nous voyageons, notre flore intestinale change ; nous respirons grâce aux bactéries qui peuplent nos poumons ; et c'est le microbiome cutané qui nous défend contre des agressions extérieures, au prix de tumultueuses micro-batailles... Geneviève Héry-Arnaud raconte la vie de tous ces microbes et délivre de nombreux conseils pour en obtenir le meilleur.

04/2021

ActuaLitté

Comics divers

S!CK N° 23

De Breaking Bad à Better Call Saul, ce nouveau numéro plonge dans l'oeuvre abyssale de Vince Gilligan. Un western des temps modernes que nous avons déchiffré sous l'angle du désert, du vide, et des vastes étendues de sable qui emprisonnent Walter White, Saul Goodman et Jesse Pinkman. Au programme, une analyse de plus de 60 pages dans les profondeurs d'une oeuvre passionnante, véritable révolution télévisuelle. Dans ce numéro, on revient aussi sur la création du Demogorgon et les effets spéciaux de Stranger Things avec Julien Hery, reponsable VFX de la saison 4. On se plonge dans le revival des Tortues Ninja avec les créateurs du jeu Shredder's Revenge, on a discuté de western étrange avec Sebastien Colantonio (créateur de Wierd West et des jeux Dishonored), avant de plonger dans l'univers fascinant de Solar Ash et ses références Ghibli, en compagnie de l'équipe de développement du jeu !

11/2022

ActuaLitté

Cinéma

Hawks. Biographie

Peu de cinéastes ont été aussi acclamés qu'Howard Hawks. On a célébré sur tous les tons ses westerns fabuleux (Rio Bravo, La Rivière Rouge), ce chef-d'œuvre du film de gangsters qu'est Scarface, ses deux films noirs mythiques (Le Grand Sommeil, Le Port de l'angoisse) et ses comédies étourdissantes comme L'Impossible Monsieur Bébé. Grâce à lui, Lauren Bacall et Rita Hayworth sont devenues des stars. Son œuvre a inspiré les cinéastes du monde entier, de Jean-Luc Godard à Bernardo Bertolucci, de Martin Scorsese à Brian De Palma. Lorsqu'on lui demande comment il passera les quinze dernières minutes de sa vie, Quentin Tarantino déclare que ce sera en regardant Rio Bravo, ajoutant : " Quand je deviens sérieux avec une fille, je lui montre Rio Bravo et, elle a intérêt a l'aimer ! " Parce que Hawks fût l'un des cinéastes les plus interviewés et qu'il a longuement commenté ses films, on croyait tout connaître de lui. Erreur. Cette biographie prodigieusement documentée montre que cette œuvre et cette vie recelaient bien des secrets. Le regard admiratif, chaleureux mais lucide de Todd McCarthy détruit de nombreuses légendes, rétablit une vérité souvent malmenée. On découvre dans ce livre qui fera date que les récits de Hawks - dans lesquels il était au centre de tout, voyait toujours juste, donnait de judicieux conseils à Humphrey Bogart, John Wayne et Josef von Sternberg, remettait à leur place Jack Warner, Harry Cohn et Darryl Zanuck - n'étaient que le fantasmatique et extravagant reflet de l'imagination qui nourrissait ses films. La réalité se révèle autrement complexe : Hawks est le genre d'homme pour qui le mot énigme semble avoir été inventé. Ainsi, le livre fourmille de révélations sur le mystère de la double version de La Rivière Rouge ou sur l'acharnement des censeurs contre Scarface. On apprend de manière irréfutable qui écrivit et tourna vraiment La Chose d'un autre monde. On découvre enfin quelle part prit William Faulkner dans l'élaboration des scénarios qu'il écrivit pour Hawks. Howard Hawks fut le premier à produire ses propres films et à marquer vigoureusement son indépendance face aux studios. Associé d'Howard Hughes et ami d'Ernest Hemingway, il fut aussi le cofondateur du "gang des motards hollywoodiens", un joueur invétéré poursuivi par les bookmakers, un gentleman, un séducteur... et un fieffé, menteur ! Robert Capa disait à son sujet : "Il y a deux sortes de mythomanes : ceux qui le sont parce qu'ils n'ont jamais rien fait de leur vie et ceux qui en ont tellement fait qu'ils restent perpétuellement insatisfaits. Lui est le prototype de la seconde catégorie. "Mais quand, vers la fin, Hawks déclara : J'ai eu une vie formidable", pour une fois, il n'exagérait pas.

11/1999

ActuaLitté

Beaux arts

Autoportraits cachés

Les titres affichés de certaines oeuvres ne disent pas tout du sujet. Ils passent sous silence que, parfois, le peintre s'est glissé dans la scène qu'il a représentée. Dans la toile, se cache un autoportrait. C'est ainsi que, par exemple, Botticelli " assiste " à L'Adoration des Mages, que El Greco est présent lors de L'Enterrement du comte d'Orgaz, comme Vélasquez l'est à Bréda le 5 juin 1625 lorsque le ville capitule... Ingres quant à lui se représente derrière Jeanne d'Arc dans la cathédrale de Reims lors du sacre du Charles VII. Or ce sacre a eu lieu le 17 juillet 1429. Ingres a achevé sa toile en 1854... Singulier et très anachronique jeu de cache-cache. Rassembler des oeuvres de Michel-Ange et de James Ensor, de Memling et de Véronèse, de Rembrandt et de Masaccio, de Dürer et de Raphaël, de Ghirlandaio et de Dali, c'est devoir s'interroger sans cesse sur la, les raisons qui ont conduit les uns et les autres à vouloir se représenter ainsi. Pour quelle raison, par exemple, Michel-Ange fait-il le choix de se représenter dans le Jugement dernier de la chapelle Sixtine comme la peau écorchée de saint Barthélémy ? Pourquoi Van Eyck fait-il le choix de n'être qu'un reflet dans le miroir convexe accroché derrière les Arnolfini et un autre reflet sur le bouclier de saint Georges dans La Vierge au chanoine Van der Paele ? Max Ernst au XXème siècle, comme Rubens au XVème, ont-ils les mêmes raisons de se représenter entourés d'amis ? Pourquoi Rembrandt se représente-t-il parmi les bourreaux qui dressent la croix sur laquelle le Christ vient d'être cloué ? Une invitation passionnante, éclairante et sans précédent qui permet de mettre en évidence les songes et les ambitions des plus grands peintres de l'histoire de l'art.

10/2020

ActuaLitté

Philosophie

Osons l'utopie pour construire un monde meilleur. Esquisse d'une autobiographie politique

L'auteur de cette Esquisse d'une autobiographie politique s'est proposé de reconstruire l'itinéraire d'un intellectuel critique, lucide et "rebelle", celui d'un enfant de guerre, né en Silésie, en 1942, et jeté dans un monde brutal et inhumain, celui de l'Allemagne de l'après-guerre. Il décrit le drame d'une enfance malheureuse, encore ombragée par le nazisme, dans un milieu caractérisé par le refoulement collectif des crimes nazis, par l'anticommunisme et par la restauration, sur les ruines du IIIe Reich, en Allemagne de l'Ouest, d'une société bourgeoise parlementaire "démocratique", ayant conservé les mentalités autoritaires du passé. Il raconte aussi comment cette rupture affective et politique avec la société allemande fera de lui assez tôt un homme "révolté", politiquement engagé pour la vraie démocratie et le progrès social et pour une société égalitaire et fraternelle, sans maître et esclave et sans domination de l'homme sur l'homme. Arrivé à Paris, en septembre 1967, il se jettera "corps et âme" dans la révolte de Mai 68, vécue par lui-même comme "le plus grand mouvement anti-autoritaire d'émancipation du XXe siècle". C'est ce même intérêt pour les mouvements politiques d'émancipation qui le conduira aussi au Chili, à l'époque de "L'Unité populaire" de Salvador Allende (1970-1973), et au Portugal, pendant la révolution des "oeillets" (1974-1975), où il sera le témoin d'une révolution démocratique antifasciste dont il analysera les raisons et les contradictions dans un de ses livres. L'émancipation sera aussi le leitmotiv de sa propre philosophie sociale critique très orientée vers l'écosocialisme, vers un marxisme "ouvert" non dogmatique et un cosmopolitisme citoyen rejetant le racisme, l'antisémitisme, le souverainisme et le nationalisme, sous ses diverses variantes, et dont le mot d'ordre inspiré d'Ernst Bloch est : osons l'utopie de la construction d'un monde meilleur !

10/2019

ActuaLitté

Philosophie

Theodor W. Adorno, un des derniers génies

Disciple d'Adorno dont il a suivi l'enseignement à Francfort dans les années 1960, Detlev Claussen trace le portrait de son maître sous les traits inattendus d' "un des derniers génies" . Il n'ignore pas le paradoxe selon lequel pour être génial il faut croire à son absolue singularité, quand il faut en douter pour être philosophe. Il n'ignore pas non plus qu'Adorno est le philosophe chez lequel le doute augmente la singularité. Aussi s'emploie-t-il à faire apparaître toute l'exigence d'après laquelle Adorno a déployé sa réflexion et composé son oeuvre, non pas en suivant le mouvement d'une visée idéale, mais en s'efforçant avec tout son être de se frayer une voie étonnamment vivante à travers les doutes et les objections. Cette vie philosophique comprise comme frayage ouvert aux contingences des rencontres et des lectures conjure d'emblée l'entreprise pieuse ou antiquaire. Il ne s'agit pas de suivre la trajectoire solitaire d'une vie illustre, ni de lire une oeuvre insulaire. Nul théâtre d'un seul cerveau. Aucun ecce homo. Detlev Claussen compose la biographie intellectuelle d'Adorno (1903-1969) en veillant à rendre indissociables les thèmes de sa pensée, les variations des problèmes posés et l'ensemble des chocs historiques, des bouleversements sociaux et politiques, propres au XXe siècle. La force incomparablement instructive de cette biographie est de nous introduire à une cohérence qui n'est pas systématique, ni close sur elle-même, mais qui, sans s'atomiser ni se perdre, montre Adorno exposé à tout ce qui s'apparentait à sa pensée, à tout ce qui y ressemblait en différant. L'extraordinaire richesse de ses échanges épistolaires avec Max Horkheimer, Siegfried Kracauer, Hanns Eisler, Walter Benjamin, Bertolt Brecht, Ernst Bloch, Thomas Mann, Herbert Marcuse et Fritz Lang en a gardé la trace. Celui qui pense est traversé autant qu'il traverse. Aussi cette biographie est-elle irréductiblement une histoire de la singularité philosophique d'Adorno et une introduction inédite au "cercle" ou au "mouvement" de Francfort.

01/2019

ActuaLitté

Notions

Ce qui nous soulève. Tome 2, Imaginer recommencer

InsoliteCNL – De quoi procèdent nos gestes de soulèvement ? D'une certaine puissance à en finir avec quelque chose. Mais, aussi, à imaginer que quelque chose d'autre est en train de recommencer. Ce livre propose les éléments d'une anthropologie de l'imagination politique dont on s'apercevra, très vite, qu'elle ne va pas sans une philosophie du temps et de l'histoire. A la structure tous azimuts du premier volume de cette enquête répond ici un propos concentré sur le moment politique, intellectuel et artistique lié au soulèvement spartakiste de 1918-1919 en Allemagne.

Que se passe-t-il lorsqu'une révolution, ayant chez beaucoup fait lever l'espoir, se trouve écrasée dans le sang ? Que reste-t-il de cet espoir ? On découvre qu'à partir du Malgré tout ! lancé par Karl Liebknecht et Rosa Luxemburg à la veille de leur assassinat, c'est toute la pensée moderne du temps et de l'histoire qui se sera trouvée remise en chantier, " recommencée " : notamment par Ernst Bloch et Walter Benjamin, les deux personnages principaux de ce livre (qui s'opposèrent à la pensée du temps mise en place, à la même époque, par Martin Heidegger). C'est toute une constellation qui gravite ici autour de Bloch et de Benjamin. Elle compte des penseurs tels que Hannah Arendt ou Theodor Adorno, Martin Buber ou Gershom Scholem ; mais aussi des écrivains tels que Franz Kafka ou Kurt Tucholsky ; des dramaturges tels que Bertolt Brecht ou Erwin Piscator ; des artistes visuels tels que George Grosz ou John Heartfield, Käthe Kollwitz ou Willy Römer. La leçon que nous proposent ces survivants d'une " révolution trahie " est considérable. Elle innerve toute la pensée contemporaine à travers le prisme de l'imagination politique. Elle nous incite à repenser l'utopie à l'aune d'un certain rapport entre désir et mémoire : ce que Bloch nommait des images-désirs et Benjamin des images dialectiques. Elle nous aide, ce faisant, à ouvrir la porte et à faire le pas.

10/2021

ActuaLitté

Histoire internationale

L'incendie du Reichstag et ses suites. Berlin, 27-28 février 1933 - La première étape de la dictature nazie

L'incendie du Reichstag marque le point de départ de la dictature nazie. Dans la nuit du 27 au 28 février 1933, alors qu'Hitler est chancelier depuis seulement vingt-huit jours, un brasier ravage la salle des séances du Reichstag. Cinq hommes sont accusés des faits : Marinus van der Lubbe, jeune conseilliste hollandais, Ernst Torgler, le chef des communistes au Reichstag, Georgi Dimitrov, Blagoï Popov et Vasil Tanev, trois communistes bulgares activistes du Komintern. A l'issue d'un procès très controversé, van der Lubbe est condamné à mort. L'incendie du Reichstag est un événement multiforme : politique et judiciaire. Hitler en comprend rapidement le sens symbolique et, avec Göring, Goebbels et Rick, il se lance dans l'exploitation politique de l'incendie. Hitler obtient du président Hindenburg la signature du célèbre décret "pour la protection du peuple et de l'Etat" qui, juxtaposé à la loi des pleins pouvoirs adoptée peu après, permet aux nazis de mettre sous l'éteignoir toute forme d'opposition ou de contre-pouvoir. Adossé à une riche documentation, ce livre balaie l'ensemble du spectre lié à l'incendie du Reichstag. Ainsi, la montée du nazisme, son installation au pouvoir, le jeu des conservateurs, la lutte féroce entre les communistes et les sociaux-démocrates, le procès de l'incendie, le contre-procès, les manipulations et la propagande des nazis et des communistes, l'aspect législatif, électoral et judiciaire, tous ces éléments imbriqués les uns aux autres sont ici largement développés, de même que les réactions de la population allemande et de la presse étrangère. Une analyse approfondie de chacun de ces aspects permet au lecteur de posséder tous les atouts nécessaires pour une compréhension globale de cet événement. Enfin, la controverse entre historiens, née à la fin des années cinquante et qui perdure encore de nos jours fait également l'objet d'un traitement complet.

01/2020

ActuaLitté

Philosophie

Lumières pour enfants. Emission pour la jeunesse

Ce volume prend sa place naturelle après Trois pièces radiophoniques déjà parues dans la même collection. Il regroupe en effet les émissions destinées à la jeunesse réalisées par Benjamin avant la mainmise des nazis sur la radio. Ici, Benjamin cherche à renouveler le conte. « Comment ? Par des récits qui semblent inspirés de Baudelaire et de Kafka, des récits qui associent curieusement l’escroquerie et la catastrophe et qui, comme en passant, traduisent la vision benjaminienne de l’Histoire comme une catastrophe continue. De qui est-il question ? De brigands et de charlatans, de sorcières au bûcher, d’escrocs, d’imposteurs, de marginaux, de personnages suspects comme Cagliostro ou Faust, de bootleggers de la Prohibition, et même d’un faux messie blasphémateur, le fameux Sabbataï Zevi dont Benjamin a découvert l’existence grâce à son ami Gershom Scholem. Autant de personnages qui cherchent à survivre dans un contexte général de catastrophe : le tremblement de terre de Lisbonne, les inondations du Mississippi, la destruction de Pompéi, etc. Les contes pour enfants de Benjamin ne sont pas des contes de fée, ils adressent plutôt un avertissement aux jeunes gens, un avertissement prophétique […]. En cela, ces contes de la catastrophe imminente demeurent fidèles à la vocation des contes traditionnels qui, dans l’esprit de Benjamin et d’Ernst Bloch, doivent aussi être des récits d’émancipation, animés malgré tout par un principe d’espérance, ô combien fugitif, à l’opposé des mythes asservissants ». (Jean Lacoste, La Quinzaine littéraire) Que Benjamin ait été aussi un conteur, on le savait déjà. Mais ici, à travers les prismes de l'enfance et la profusion labyrinthique de récits hantés par le merveilleux, c'est le projet d'une pédagogie libre qui s'énonce familièrement, à la façon des devinettes. Tant dans le « je me souviens » berlinois qui ponctue le livre que dans l'évocation d'évènements lointains, ces « lumières » pour enfants clignotent pour tous comme le butin enjoué de ce collectionneur d'histoires qu'était Benjamin.

05/2011

ActuaLitté

Histoire de France

Milena

C'est en 1937, fuyant l'hitlérisme, que Margarete Buber, jeune allemande et militante communiste, se réfugie en compagnie de son mari Heinz Neumann, ancien député au Reichstag, à Moscou, où ils seront arrêtés pour "déviationnisme". Heinz disparaîtra aussitôt, sans doute exécuté, et Margarete sera déportée en Sibérie pendant deux ans. En 1940, le NKVD la livre à la Gestapo qui l'interne à Ravensbrück. C'est dans ce camp, à son arrivée, au mois d'octobre, qu'elle rencontre Milena Jesenská, célèbre journaliste tchèque, qui avait été la destinataire des admirables Lettres à Milena de Franz Kafka, au début des années vingt. Pendant près de quatre ans, jusqu'à la mort de Milena à l'infirmerie du camp, le 17 mai 1944, les deux femmes vont vivre un bouleversant compagnonnage. Au milieu de la misère et de l'horreur quotidiennes (dont le récit occupe près d'un tiers du livre), les deux femmes se racontent leur vie. La vie amoureuse de Milena, sa brève liaison avec Kafka, ses deux mariages, d'abord avec l'écrivain juif Ernst Polak, puis avec l'architecte Jaromir Krejcar, sa carrière étonnante de journaliste, ses traductions de Kafka en tchèque, sa force et sa désinvolture face à l'invasion nazie en 1939, et ses désillusions de militante communiste, Margarete les rapporte fidèlement, tenant la promesse faite à Milena qui lui disait sur son lit d'agonie "Tu leur diras qui je fus, n'est-ce pas ? Tu auras pour moi la clémence du juge". Margarete s'était effacée devant son amie. Le présent livre n'est pas seulement la biographie d'une femme exemplaire, la traversée d'une époque magnifique (Prague et Vienne dans la tourmente artistique et intellectuelle de l'entre-deux-guerres). C'est avant tout un témoignage d'amour d'une femme exceptionnelle pour une autre femme exceptionnelle : un hymne à l'engagement et à la vie, surgi du fin fond de ce que les hommes ont inventé de pire. Traduit de l'allemand par Alain Brossat.

ActuaLitté

Surréalisme

Le surréalisme dans l'art américain

En 1940-1941, un groupe d'artistes surréalistes réunis autour d'André Breton trouve refuge à Marseille puis, quittant l'Europe en guerre, arrive à New York. On considère généralement que ce " passage de Marseille n a été l'élément déclencheur d'une autonomie complète de l'art américain, qui, une fois fécondé par les artistes européens en exil, aurait pris son indépendance avec l'expressionnisme abstrait. Ce catalogue propose, d'une manière largement inédite, une histoire plus complexe et moins nationaliste, en montrant d'abord que l'introduction du surréalisme aux Etats-Unis dès le début des années 1930 a suscité très tôt des interprétations originales et encore mal connues. 11 intègre ensuite l'expressionnisme abstrait, qui triomphe dans les années 1940, au sein d'un surréalisme transatlantique plus large, avec ses versants figuratifs et abstraits. 11 montre enfin l'existence d'une " autre tradition ", où, malgré le silence et le déni des critiques et des historiens de l'art, le surréalisme a continué à constituer un courant souterrain de l'art américain pendant les trois décennies qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale, non seulement en peinture et en sculpture, mais aussi dans la culture visuelle populaire ou le cinéma expérimental. Quatre décennies durant, les artistes, entre attirance et répulsion, n'ont cessé de réactiver le potentiel créatif et déstabilisant du surréalisme. Prendre en compte ce potentiel conduit à abandonner les regroupements figés par l'histoire de l'art traditionnelle et à mettre en valeur de nouvelles constellations, qui mêlent artistes très connus et artistes injustement ignorés : Marcel Duchamp y côtoie Joseph Cornell, Jasper Johns, Robert Morris et H. C. Westermann ; Max Ernst etJoan Miró voisinent avec Dorothea Tanning, Jackson Pollock, Mark Rothko, Helen Frankenthaler et Wes Wilson ; Salvador Dali et René Magritte fraient avec Pavel Tchelitchew, Kenneth Anger,James Rosenquist et Paul Thek ; Yves Tanguy et Alberto Giacometti résonnent avec Louise Bourgeois, Eva Hesse et Claes Oldenburg.

05/2021

ActuaLitté

BD tout public

Le retour à la terre Tome 1 : La vraie vie. Edition spéciale

Ah, la campagne, les petites fleurs, les bébêtes qui montent qui montent, et tout et tout... Quel citadin n'a rêvé d'aller s'y ressourcer ? Manu Larcenet a chopé le virus l'an dernier. A lui et à Mariette, sa compagne, le gazouillis des oiseaux, le doux bruit des ruisseaux et tout et tout ! Quand, comme Manu, on a passé sa vie en banlieue parisienne, ça change. Toujours timide, Manu était à cent années-lumière d'imaginer que le récit de sa nouvelle vie pouvait intéresser le moindre lecteur. Et puis, il est difficile de s'occuper d'un châtaignier de 45 mètres déposé dans son jardin par des voisins sympas tout en s'observant par la fenêtre ! Heureusement, parmi les amis venus découvrir le nouveau monde de l'auteur des Cosmonautes du Futur, se trouvait Ferri, l'homme qui raconte les folles aventures d'Aimé Lacapelle, le détective paysan qui trace son sillon dans Fluide Glacial. C'est Ferri qui s'est collé au récit des avatars de nos deux citadins depuis leur arrivée aux Ravenelles, 89 habitants (dont une jolie boulangère). Mais tout n'est pas rose quand on se met au vert ! Quel citadin exilé, n'a pas ressenti sur le coup de 18h le manque lancinant du bruit du Périf ? L'eau-de-vie de M. Henri le proprio peut consoler, mais on sent parfois le besoin d'un réconfort moral. Problème, allez dénicher un psy aux Ravenelles (89 hab.) ! Il serait plus facile d'y trouver un ancien maire ruiné par le fisc et installé, à poil et barbu, dans un arbre centenaire. C'est dire ! D'autant que certains effets secondaires sont redoutables. Manu, guitariste et chanteur punk plutôt urbain (avec des accents hardcore assez prononcés), concocte désormais des ritournelles que ne renieraient pas Francis Cabrel. C'est ça aussi, vivre aux Ravenelles (89 h.) ! Tête des Groggies, l'ancien groupe rock du Manu de Juvisy, lorsqu'ils déboulent en visite ! Ca sera l'occasion de découvrir que M. Henri se débrouille comme un chef à l'accordéon. Dès qu'il comprendra qu'il doit jouer en mi majeur et non en sol, ça promet des boeufs campagnards du feu de Dieu ! Pas chiens, Larcenet et Ferri traitent ce retour à la terre par histoires courtes d'une demi-page. 90 (bonnes) idées en 45 planches ! Ca rend généreux la vie au grand air ! Sitôt l'album refermé, on rêve d'une suite. Peut-être Manu nous présentera-t-il alors la boulangère des Ravenelles (89 h.) !

03/2010

ActuaLitté

Histoire de France

Les compagnons de l'ombre. Les services spéciaux français face à l'histoire, 1940-1945

Les Compagnons de l'Ombre est né de la volonté commune de la DGSE et de l'ordre de la Libération, à l'occasion des 80 ans de l'Appel du 18 juin, de rendre hommage aux cinquante membres des services spéciaux français qui perdirent la vie dans la lutte contre l'envahisseur nazi, et dont l'engagement et le sacrifice furent récompensés par l'attribution de la croix de la Libération. Certaines figures sont déjà connues du grand public, à l'image de l'emblématique Pierre Brossolette ou du grand philosophe Jean Cavaillès, mais leur parcours est ici envisagé sous l'angle inédit de leur appartenance aux services secrets français, passés dans l'Histoire sous le nom de BCRA. D'autres figures, restées quasi inconnues, émergent enfin de l'ombre qui entoura le combat souterrain des "soutiers de la gloire", selon les termes de Brossolette. On découvre avec ces cinquante Compagnons de la Libération des figures singulières : de Jacques Voyer qui ment sur son âge pour s'engager dans la France libre à Henri Drouilh, qui à plus de 50 ans,embarque pour des opérations aériennes clandestines au-dessus de la France occupée. De Pierre Briout, l'ajusteur devenu saboteur, à Roger Coquoin, directeur du laboratoire de chimie de Paris, de Georges Lamarque, un déçu du pétainisme,à Henri Labit, un des engagés de juin 1940,du colonel Gentil, ancien combattant des deux guerres mondiales issu de l'armée d'Armistice, à Albert Kohan ou Jan Doornik, qui, sans même être nés français, combattent pour les valeurs de la France. Tous, cependant, se ressemblent par leur volonté de combattre dans la clandestinité pour libérer la France, à l'image d'Honoré d'Estienne d'Orves qui préfère affronter l'indignité de la condamnation pour désertion plutôt que la honte du renoncement. Les cinquante biographies de Compagnons sont regroupées en dix chapitres thématiques dont les introductions permettent de découvrir les relations entre les services du général de Gaulle à Londres et la Résistance en France, la naissance des métiers et des méthodes de l'action clandestine, tant sabotage, transmissions, opérations aériennes, que filières d'évasion, et l'émergence, au cotés des services britanniques, MI6 et SOE, du modèle de service secret et spécial français dont la DGSE est l'héritière. Les Compagnons de l'Ombre repose sur l'exploitation de plus de 8 000 documents, souvent inédits, des archives françaises et britanniques et propose une riche iconographie (plus de 1 000 illustrations) issue des fonds du ministère des Armées et des musées de la Résistance, mais aussi des collections de la DGSE et de son Service Action.

01/2021

ActuaLitté

Généralités

Les guerriers de Dieu - La violence au temps des troubles de. La violence au temps des troubles de religion (vers 1525- vers 1610)

C'est en se focalisant sur une violence jugée " inouïe " par les contemporains que ce livre entend proposer une explication de la grande cassure religieuse du XVIe siècle français. Tout aurait commencé vers 1525, quand monte dans le royaume de François Ier une grande angoisse du châtiment divin. Le monde se surenchante prodigieusement : sur terre et au ciel apparaissent des signes prophétiques qui proclament l'imminence de la fin des Temps et la faute d'une humanité qui a oublié Dieu. Survient le temps des guerriers de Dieu, le temps d'un " Triomphe de la guerre ". Deux imaginaires s'opposent aux lendemains de la mort du roi Henri II. Les huguenots, recourant à une violence désacralisatrice, s'efforcent d'éradiquer les " pollutions " d'une Eglise romaine ennemie du Christ : images et reliques saintes, prêtres... Les violences des papistes sont des violences mystiques qui visent le châtiment de tous ceux qui ont rompu avec Dieu : elles marquent sur les corps des hérétiques les signes effroyables de la colère du Christ accomplissant l'ordre des Temps. Cette histoire, qui, de part et d'autre, est celle d'une quête du pardon divin, culmine en intensité lors de la tragédie de la Saint-Barthélemy. Pour les guerriers de Dieu, après 1572, s'ouvre le temps du " repli " de la violence. Aux protestants survivants, le massacre révèle une situation d'impureté culpabilisante ; aux catholiques, parce que se défait l'illusion d'une alliance retrouvée avec Dieu, il suggère que la France demeure infidèle et corrompue. La faute n'est plus celle des seuls hérétiques, elle est désormais celle de tous. Et l'angoisse prophétique revient en force avec le temps de la Ligue, " sainte union " mystique de préparation pénitentielle à la venue de Dieu et d'intériorisation de la tension d'agression. La violence de sang devient alors comme impossible, surtout après qu'elle semble s'être accomplie, lors du régicide d'août 1589, dans la " force " de Dieu venue en un seul fidèle, le dominicain Jacques Clément. Au terme de cette dynamique d'expansion et de réduction du désir de violence, s'impose l'ordre d'un roi de la raison : Henri IV se veut le roi pacificateur du royaume parce que son règne va inaugurer la fin du temps des angoisses, le monarque providentiel de toute éternité appelé à agencer sur terre un " bonheur " humain. La véritable " modernité " du XVIe siècle ne serait-elle pas là ? " Tout dans ce livre étrange, fascinant, dérange, bouscule, piétine les certitudes d antan. Rien ne se comprend plus après comme avant, ou plus exactement, tout commence à se comprendre " Pierre Chaunu.

02/2022

ActuaLitté

Revues

Kometa N° 1, automne 2023 : Impérialisme

Kometa, une nouvelle revue tournée vers l'Est pour comprendre le monde Ils sont dans le numéro 1 : Emmanuel Carrère, Christophe Boltanski, François-Henri Désérable, Iegor Gran, la poétesse ukrainienne Luba Yakimchouk, Mishka Assayas, Milan Kundera. Nouvelle revue trimestrielle née du choc de l'invasion russe en Ukraine, Kometa a pour ambition de bousculer notre regard et de comprendre cette planète mouvante en mettant l'Est au centre de la carte. Elle met l'emphase sur le récit littéraire et les échanges épistolaires pour raconter des histoires hors normes. Kometa, c'est... Une collection conçue pour décrypter le monde, née en à cheval entre la France et la Suisse208 pages de récits littéraires, photographie d'auteurs, débat d'idées, échanges épistolaires, cartes et recommandations culturelles, pour saisir ce monde d'une incroyable complexité. De grands auteurs connus en France, et des plumes de l'Est à découvrirUne revue indépendante, sans publicité, qui soutient des auteurs en exil ou qui résistent de l'intérieur Numéro 1 - Impérialisme En envahissant l'Ukraine, Vladimir Poutine applique la forme d'exercice du pouvoir la plus commune dans l'Histoire. Kometa voyage au coeur de cet impérialisme qui inverse la réalité en prétendant mener une guerre de libération aux visées anti-impérialistes. Inédit : un long récit d'Emmanuel Carrère, parti en Géorgie sur les traces de sa cousine Salomé Zourabichvili, présidente de ce petit pays du Caucase tiraillé entre la Russie et l'Europe. Exclu Kometa : Le premier Russe condamné pour s'être opposé à la guerre nous écrit clandestinement de prison. Avocat, militant des droits humains et élu, il avait cru à la politique. Mais ça, c'était avant Poutine. Depuis sa cellule, il raconte. Iegor Gran, auteur du roman à succès Z comme zombie (2022), plonge au coeur d'un réseau social orthodoxe de 40. 000 mères et épouses qui prient pour leurs soldats. Fille d'un mineur de charbon et d'une ouvrière, la poétesse ukrainienne Luba Yakymtchouk raconte comment un soldat russe dort dans sa maison. Kometa ce sont aussi des pages idées, avec le théoricien du postcolonialisme Achille Mbembe ; livres, avec François-Henri Désérable ; musique avec Michka Assayas... L'équipe Cinq cofondateurs issus de l'édition, du journalisme, du mécénat : Serge Michel, Léna Mauger, Grégory Rozières, Perrine Daubas et Paola Woods. Une comité éditorial, qui rassemble des personnalités comme Pierre Haski, Anna Colin Lebedev, Emmanuel Carrère, Christophe Boltanski (...) Une équipe cosmopolite de maquettistes, de journalistes, de photographes. Infos clefs Sortie le 11 octobre 208 pages 22 euros

10/2023

ActuaLitté

Autres

Philosophie N° 154

Ce numéro s'ouvre sur la traduction, par Timothée Moreau, d'un texte de Willard Van Orman Quine intitulé "L'usage et sa place dans la signification" ("Use and its place in meaning") dans la version parue dans le recueil Theories and Things de 1981, et présenté ici par Bruno Leclercq. Quine y explicite les relations entre sens et usage au moyen d'une théorisation de la notion de "signification cognitive". La présentation rédigée par Bruno Leclercq fait le point sur les convergences et les divergences entre les conceptions quinienne et wittgensteinienne du sens comme usage. Il se poursuit avec "L'autre de la justice : Habermas et le défi éthique du postmodernisme", rédigé par Axel Honneth en 1994, présenté es traduit par Emmanuel Levine. Honneth y montre que si les éthiques dites "postmodernes" de Jean-François Lyotard et Stephen White ne dépassent pas le cadre de l'éthique de la discussion, Jacques Derrida a élaboré, à partir de Levinas, un point de vue moral corrigeant et complétant l'idée kantienne d'égalité de traitement. En tension perpétuelle avec les principes habermassiens de justice et de solidarité, la sollicitude (care) prend en compte la singularité et la vulnérabilité des individus exclus de la discussion et révèle la nécessité morale de leur porter une aide unilatérale et illimitée. Dans "Foucault après la révolution. L'universel, le singulier et la légitimité", Daniel Liotta pose la question de savoir quel statut Foucault attribue à la valeur de l'intolérable, tout en soumettant à la critique l'idéal révolutionnaire ; l'analyse des subjectivations et les références au droit, qui constituent deux principes du combat politique et deux figures de l'universalité, semblent permettre de la préciser. Comment la généalogie peut-elle cependant penser la légitimité juridique, et comment celle-ci peut-elle s'articuler à une analyse des subjectivations ? Il s'agit, pour Foucault, de déterminer à la fois une politique indépendante de l'idéal révolutionnaire et une éthique philosophique. Dans "L'esthétique artistique transcende l'esthétique sensible. Sur la phénoménologie de l'art de Henri Maldiney", Charles Bobant tente de démontrer que la phénoménologie maldinéenne de l'art connaît une évolution théorique significative. Alors qu'il soutient dans ses premiers textes que l'art dévoile l'espace du paysage, c'est-à-dire l'étant dissimulé par l'objet, Henri Maldiney défend ensuite la thèse selon laquelle l'art révèle le lieu d'être, ou l'être entendu comme lieu. Après quoi il s'efforce de mettre en évidence le caractère problématique de la thèse de l'art comme ontophanie. D. P.

06/2022

ActuaLitté

Littérature française (poches)

Insoupçonnable

Faut-il priver le lecteur du bonheur de découvrir, détail après détail, le fin mot - s'il existe vraiment - de cette machination " à double fond ", comme les valises en apparence insoupçonnables et dissimulatrices d'inquiétants secrets ? Certainement pas. Et, pourtant, tout révéler d'emblée n'aurait pas une importance capitale, car on n'est pas, avec Insoupçonnable, dans l'une de ces intrigues policières où connaître à l'avance certaines clés, voire le dénouement, gâche le plaisir. Comme dans ses trois autres romans, Tanguy Viel, qui sait construire un suspense et ne s'en prive pas, s'intéresse plus profondément à autre chose qu'à ce schéma narratif. Aux atmosphères, qu'il sait remarquablement créer, aux lieux - la mer est souvent présente, est-ce parce qu'il est né à Brest ? -, aux objets, aux comportements effrayants, inimaginables, que peuvent avoir des gens au premier abord anodins, à leurs manies, à leurs secrets de famille, à leurs désirs inavouables. Un mariage chic au bord de la mer : joli début. Ne pas s'y fier. Le narrateur, Sam, vient d'être témoin au mariage de sa soeur Lise, avec un homme riche qui a 50 ans - le double de son âge. Henri Delamare, le marié, veuf depuis quelque temps, possède une fortune familiale, qu'il a su faire fructifier. II est commissaire-priseur. Lise travaillait dans un bar de nuit fréquenté, en toute discrétion, par des messieurs très bien. Elle refusait de faire l'amour, contrairement à d'autres. C'est toutefois avec elle seulement qu'Henri voulait passer ses soirées. Et, un beau jour, il l'a demandée en mariage. Pourquoi a-t-elle accepté, alors qu'elle vivait avec un homme ? C'est toute une partie de l'histoire. On comprend vite que Sam est un frère de pacotille et un véritable amant, celui de Lise, et que ce mariage cache un plan " insoupçonnable ". Encore une affaire de crime parfait, comme le hold-up de L'Absolue perfection du crime devait être parfait et sans une goutte de sang versé. Là non plus, en principe, il n'y aura nulle violence, juste une habile manière de récupérer de l'argent - de quoi rêve-t-on quand on manque d'argent ? - et de filer en Amérique ou plutôt " aux States ", comme dit Lise, tentant d'imiter l'accent des stars américaines. Bien sûr, ça va rater, mais on ne vous dira pas ici comment - et, finalement, Tanguy Viel lui aussi vous demande de le deviner plus encore qu'il ne vous le montre.

01/2009

ActuaLitté

Religion

Destins croisés. Vivre et militer à Limoges

Je le dis d'emblée et, qu'on me croie ou qu'on ne me croie pas, il suffira au lecteur de se plonger dans ce livre pour s'en convaincre : il s'agit là d'une pièce rare. Il existait autrefois un genre littéraire qui fut fécond et qui reste précieux Mémoires pour servir à l'histoire religieuse de notre temps. Pas d'histoire sans traces, sans documents. Les uns sont contemporains des événements, de ce qui se passe et arrive. D'autres relèvent du souvenir. [...] Ici, c'est une femme : une " jociste " de la première génération, celle qui inspira à Maxence Van der Meersch son célèbre Pêcheurs d'hommes (1940). Aujourd'hui octogénaire, Jeannette Dussartre, avant son mariage avec Henri Chartreux, a gravi tous les échelons de la jeunesse ouvrière chrétienne féminine - ce mouvement fondé en Belgique en 1925 par le futur cardinal Joseph Cardijn -, jusqu'à son secrétariat général. Elle lui doit sa formation, comme elle l'écrit elle-même, " dans un bouillonnement de culture et un partage de responsabilités écrasantes généreusement acceptées par toutes ". On dispose de plusieurs biographies de jocistes. Rares sont les autobiographies. Celle-ci est servie par une mémoire exceptionnelle, précise et documentée grâce à un fonds d'archives patiemment constituées, soigneusement conservées, utilisées à bon escient. À cela s'ajoute un trait unique dans cette classe de " mémoires " : Jeannette n'a pas suivi le parcours classique au sein de l'Action catholique ouvrière ; elle a fait le saut - difficile, ainsi qu'elle l'explique fort bien - dans ce qu'à l'époque on appela le " mouvement missionnaire " et la grande aventure des prêtres-ouvriers. À 40 %, ceux-ci vivaient dans la région parisienne. Jeannette et Henri faisaient partie des équipes de province et, singulièrement, à Limoges-la-Rouge, de l'équipe qui eut le plus grand souci d'une réflexion poussée sur cette histoire radicalement nouvelle qui s'imposait à elle au jour le jour. Je puis attester de la profondeur et de la permanence de ce souci. Une vie ne se résume pas : on la partage au vif du quotidien. Un récit de vie se résume encore moins : on y entre avec ce qu'on est, en trouvant en soi ce qui permettra la rencontre. Une vie n'est jamais solitaire. Un récit de vie ne doit pas rester isolé. L'autobiographie de Jeannette Chartreux a l'avantage de s'inscrire dans la collection " Signes des temps " attachée à rassembler la mémoire dispersée de ce qui fut une histoire commune autant d'itinéraires personnels qui s'éclairent les uns par les autres et donnent son sens à l'ensemble.

02/2004

ActuaLitté

Psychologie, psychanalyse

Oedipe aux îles Borromées. "Absalon, Absalon !" de William Faulkner

Serge Sabinus, avec Oedipe le Salon, poursuit son exploration psychanalytique des grands textes. Après "Don Quichotte", "La Divine Comédie" et "Moby-Dick", ce collectif de psychanalystes s'est approché de "Absalon, Absalon ! " de William Faulkner. Faulkner, maître d'oeuvre de la traversée des origines sudistes par la Civil War, trouve avec son héros, Thomas Sutpen, les accents terribles et destructeurs de l'Histoire. " Absalon, Absalon ! ", grand titre biblique, fait vibrer dans le texte analytique la violence, la haine, la passion qui dévorent jusqu'à la folie chacun des personnages : Thomas Sutpen qui bâtit son Sutpen' Hundred en un château de cartes flamboyant et écroulé, Rosa Coldfield, confite dans sa haine et ses regrets, et puis Henry, Quentin, Judith et Charles Bon, jusqu'au final dans les froides contrées du Nord qui ne trouve comme ressource que le cri du désespoir : "Non le Sud, je ne le hais point". Chacun des personnages, au grand ton faulknérien, est traversé de part en part par la négritude de Clytie, magique esclave silencieuse et puissante qui représente l'ultime reste. Reste sublime et infect, comme l'est l'enfant perdu – Jim Bond – qui hurle la fin du monde en un cri où chacun se reconnaîtra. Ainsi va le monde du Sud. Thomas Sutpen n'aura pas de filiation pure, blanche. Tout est perverti, faussé, jusqu'à l'infâme normalité qui envahit la fin du roman. A Baveno, des psychanalystes sont à l'oeuvre. Il faut lire leurs interventions brillantes et captivantes. Que disent-ils de ces pages tragiques ? Comment trouver avec Lacan, armé des noeuds borroméens, une lecture différente, d'une autre complexité ? C'est le pari lancé dans ces pages : Ca nous parle !

07/2019

ActuaLitté

Critique littéraire

Raskar Kapac : L'anthologie Tome 2

Les premières années furent celles des horizons lointains. Rappelez-vous : Raskar Kapac, gazette artistique et inflammable, était partie sillonner les espaces les plus inaccessibles. Entre 2016 et 2017, elle est allée s'exiler sur l'île engloutie de Mû aux côtés de Corto Maltese, elle est revenue d'entre les morts en suivant les pas sanglants de Guillaumet dans les Andes, elle a traqué avec Henry de Monfreid les peuplades perdues du Yémen et de l'Ethiopie... Les deux années qui suivirent - réunies intégralement dans cette seconde Anthologie -, furent pour Raskar celles des marges. Ce fut l'époque où la momie ne fréquenta que les damnés, les caraques et les inadaptés. De Fellini à Kazantzaki, de Blaise Cendrars à Tabarly, de Drieu à Antonin Artaud ; c'est un équipage hétérodoxe qui a composé avec maestria les dix derniers numéros de Raskar Kapac. Olivier de Kersauson, Titouan Lamazou, Patrick Tabarly, Benoît Heimermann, Christiane Rancé, Sylvain Tesson, Julien Hervier, Pierre Adrian, Charles Gonzalès, Stéphane Barsacq, Frédéric Beigbeder, Gabriel Matzneff et tant d'autres plumes ont aidé à la résurrection des grands artistes et des aventuriers, authentiques phares pour notre temps. Dans ce nouveau volume, se succèdent des textes variés, des entretiens exclusifs, des photographies ainsi que de nombreux dessins inédits. Alors en route pour un ultime voyage à bord du Transsibérien ! La momie attise la locomotive et, à sa suite, cahote le fabuleux wagon des artistes et des hors-la-loi ! Les trois fondateurs, Maxime Dalle, Yves Delafoy et Archibald Ney, sont de jeunes mousquetaires de vingt-cinq ans et plus, unis par des passions singulières : l'amour des livres "brûlants" et des chairs voluptueuses, l'amitié virile, et une sympathie inextinguible pour les causes perdues.

11/2020

ActuaLitté

Sciences historiques

La Corse et les Corses dans la diplomatie

Poursuivant leur louable engagement pour sa restauration, l'Association des Amis du château de La Punta, sur les hauteurs d'Ajaccio, et sa Présidente Elisabeth Sanguinetti : Noël Pinzuti, directeur (h.) des Archives départementales de Corse-du-Sud ; et Etienne Ferrandi, maire d'Alata, ont demandé au professeur Michel Vergé-Franceschi d'y réunir une quinzaine d'historiens, afin d'y tenir un deuxième colloque international autour de Pozzo di Borgo, né à Alata en 1764, ambassadeur de Russie à Paris de 1814 à 1834, puis à Londres de 1834 à 1839. Lucien Bély, professeur à la Sorbonne, spécialiste d'Histoire diplomatique, deux ambassadeurs de France, Henry Zipper de Fabiani et Jacques Huntzinger et Alain Blondy, professeur émérite à la Sorbonne, nous disent ici ce qu'est l'Art de la diplomatie en Méditerranée, à Malte et dans le monde. Michel Vergé-Franceschi, Lucette Poncin, spécialiste du patrimoine, Zelia Darnaut-Orsoni, professeur à l'école de Design de Nantes, Jean-Marc Olivesi, conservateur général du patrimoine, et Philippe Perfettini, responsable des collections napoléoniennes à Ajaccio ont axé leurs recherches sur les diplomates insulaires au coeur du patrimoine corse et ajaccien : château de La Punta, Maison Napoléon, Musée Fesch, les Milelli, le cap Corse (Morsiglia, Centuri). Le professeur Francis Beretti (université de Corte), Anna Vladimirovna Moretti, agrégée de l'université (Corte), Elena Linkova (Université de l'Amitié des peuples, Moscou), le professeur Nathalia Petrovna Tanchina (Université de Moscou et Académie du service d'Etat du président de la Fédération russe) et Tania Rakhmanova, réalisatrice russe du film Pozzo di Borgo (2017) montrent à leur tour les passerelles qui reliaient la Corse des XVIIIe-XIXe à la Russie de Catherine II, d'Alexandre Ier, de Nicolas Ier et à l'Angleterre de Georges III, terres d'élection de Pascal Paoli et de Pozzo di Borgo.

10/2019

ActuaLitté

Littérature étrangère

Nouvel éloge de la folie. Essais édits & inédits

"Lorsque les habitants de Macondo furent frappés un jour, pendant leurs cent ans de solitude, par un mal en forme d'amnésie, ils se rendirent compte que ce qu'ils connaissaient du monde était en train de se volatiliser et qu'ils risquaient d'oublier ce que c'est qu'une vache, ce que c'est qu'un arbre, ce que c'est qu'une maison. L'antidote, découvrirent-ils, se trouvait dans les mots. Afin de se souvenir de ce que leurs mots représentaient pour eux, ils rédigèrent des pancartes qu'ils suspendirent aux bêtes et aux objets : "Ceci est un arbre", "Ceci est une maison", "Ceci est une vache, et elle donne du lait qui, mélangé au café, donne le café con leche". Les mots nous disent ce que nous, en tant que société, nous croyons qu'est le monde. "Le motif dans le tapis", c'est la formule inventée par Henry James pour désigner le thème récurrent qui, telle une signature secrète, parcourt l'oeuvre d'un auteur. Dans beaucoup des textes que j'ai écrits (critiques, notices ou introductions), je pense pouvoir distinguer ce motif insaisissable. Il a quelque chose à voir avec la relation de cet art que j'aime tant, l'art de lire, avec le monde dans lequel je le pratique, le "beau monde" de Thomas. Je crois qu'il existe une éthique de la lecture, une responsabilité dans notre manière de lire, un engagement à la fois politique et privé dans le fait de tourner les pages et de suivre les lignes. Et je crois que parfois, au-delà des intentions de l'auteur et au-delà des espoirs du lecteur, un livre peut nous rendre meilleurs et plus sages."

11/2011

ActuaLitté

Histoire internationale

Marie Tudor. La souffrance du pouvoir

En Angleterre, ses ennemis ne transmirent que le souvenir des centaines de protestants suppliciés brûlés vifs pour leur foi. Ils déplorèrent que durant ces années 1550, l’Angleterre fut en pleine déconfiture politique, appauvrie spirituellement, archaïque en matière économique, et affaiblie intellectuellement. L’héritage de Marie Tudor fut tout autant écorné en France. Joachim du Bellay parle de cette « furie et cruelle mégère », Voltaire a dit d’elle qu’elle « laissa une mémoire odieuse dans l’esprit de quiconque n’a pas l’âme d’un persécuteur », quant à Victor Hugo, il la décrivait ainsi : « c’était une jalouse reine, une vraie fille d’Henry VIII, et dont l’alcôve, comme celle de son père, s’ouvrait de plain-pied sur l’échafaud ». Jules Michelet paracheva l’assassinat historique. Cette légende forgée par des contempteurs de tous ordres est tenace et Isabelle Fernandez admet qu’une partie du bilan de Marie Tudor ne peut jouer qu’en sa défaveur : la restauration de l’autorité papale, l’alliance avec l’Espagne, les bûchers qui tentèrent de ramener le pays par la force dans le giron catholique, une infécondité tragique et la prise de Calais par les Français en 1558 permirent de stigmatiser ce règne trop souvent opposé au faste et à l’éclat élisabéthains. Isabelle Fernandez se garde d’opposer les deux soeurs jadis ennemies et sans tomber dans l’excès inverse qui conduirait à la porter aux nues, elle prend le parti de rappeler les aspects qui, dans cette reine malaimée car méconnue, font d’elle une figure d’exception dans l’histoire anglaise à plus d’un titre. Car qu’on le veuille ou non, Marie Tudor est aussi Marie Ière, la première femme à ceindre la couronne d’Angleterre.

ActuaLitté

Histoire de France

Le souvenir de Solferino. Aube de l'ère humanitaire

Fin octobre 1862, le livre d'Henry Dunant Un souvenir de Solferino déclenche une véritable explosion dès sa parution. Réalisé par l'orfèvre des imprimeurs genevois, Jules-Guillaume Fick, édité à compte d'auteur, sur grand papier, paré d'une coûteuse carte du lieu de la bataille en trois couleurs, ce hurlement d'indignation émeut bientôt l'Europe philanthropique. Non seulement, les bibliophiles apprécient la prouesse typographique, mais aussi les personnes sensibles à la misère humaine applaudissent à l'appel lancé en faveur des militaires blessés et abandonnés sans soins après la bataille. Enfin et surtout, le président de la Société genevoise d'utilité publique, Gustave Moynier, s'empare du problème pour le mettre en orbite sur la planète des congrès internationaux philanthropiques. Le mouvement est lancé, il sera couronné par la signature de la Convention de Genève. Et il y avait de quoi ! A l'époque, aucun accord international permanent et universel ne limitait la marge de manoeuvre des armées en guerre, vis-à-vis des blessés ou des troupes sanitaires. Le métier d'infirmière laïque commençait ses balbutiements. Aucune société de secours indépendante des Eglises n'était constituée de façon permanente. La neutralité des blessés ou des services sanitaires des armées n'existait pas. En deux mots, Un souvenir de Solferino a posé une nouvelle problématique, autant vis-à-vis de la guerre que vis-à-vis d'une catégorie d'hommes vulnérables. Dix-huit mois après sa parution, le 22 août 1864, l'humanité entrait dans une nouvelle ère, l'ère humanitaire, avec la signature de la Convention de Genève. Pour la première fois, des historiens se sont réunis pour examiner ce livre sous tous ses angles : contexte historique, auteur au moment de l'écriture, impact en Europe, traductions, usage qu'en font aujourd'hui les institutions héritières. Voici le résultat de leurs recherches.

10/2018