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Art contemporain

Art is Magic

Publié à l'occasion de la première rétrospective en France de Jeremy Deller, lauréat du prestigieux Turner Prize en 2004 et représentant de son pays à la Biennale internationale d'art contemporain de Venise en 2013, Art is Magic dresse le panorama le plus complet de son travail des années 1990 à ce jour, à partir d'une quinzaine de projets et d'oeuvres majeures qui ont ponctué son parcours. Jeremy Deller s'intéresse aux cultures populaires et aux contre-cultures. Les questions sociales, l'histoire, mais aussi la musique, sont au centre des investigations de l'artiste. Teintées d'un discours socio-politique assumé, ses oeuvres font un lien entre la culture - vernaculaire ou de masse - et le monde du travail. Ses recherches l'ont mené à explorer l'histoire sociale de son pays et du monde à travers les conflits sociaux de l'ère thatchérienne, le groupe Depeche Mode, le monde du catch, les ferments du Brexit, ou encore l'Acid house et le mouvement rave, avec le souci constant d'impliquer d'autres personnes dans le processus créatif. Art is Magic constitue une tentative de relier les oeuvres clés de la carrière de Jeremy Deller avec l'art, la musique pop, le cinéma, la politique et l'histoire qui ont inspiré son travail. Deller a fait couler beaucoup d'encre au fil des décennies, mais c'est la première fois qu'il rassemble toutes ses sources culturelles. L'ouvrage est divisé en trois sections : un guide visuel de ses oeuvres préférées, des réflexions approfondies sur sa vie et sa pratique artistique et, enfin, un album d'images expliquant ce qui le motive (de Rod Stewart aux chauves-souris, du juke-box parfait aux têtes de hache néolithiques). Le livre présente des oeuvres qui ont jalonné la vie et la carrière de Deller, la plupart inédites. S'y entrecroisent ainsi son installation gonflable pour le festival international de Glasgow, la grève des mineurs (son film sur la bataille d'Orgreave), les chauves-souris (sujet d'au moins trois des oeuvres de Deller), Andy Warhol (qu'il a rencontré en 1986), les liens entre la révolution industrielle et le heavy metal, et les busards cendrés picorant les yeux d'un député conservateur (figurant dans sa fresque contre la chasse au gibier créée pour la Biennale de Venise). Publié à l'occasion de l'exposition Jeremy Deller : Art is Magic au Frac Bretagne, au Musée des beaux-arts et à La Criée, centre d'art contemporain, Rennes, en 2023.

05/2023

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Travail social

Dialogues en humanité. De la créativité citoyenne pour prendre soin de chaque humain

Il y a 20 ans, sous l'impulsion visionnaire de quelques pionniers naissaient une initiative ouverte à tous : les Dialogues en humanité. Espace de réflexion sur ce qui fait obstacle à la résolution des grands problèmes auxquels l'humanité est confrontée, les Dialogues cultive la cohésion sociale et sociétale, la créativité, l'écoute bienveillante et le dialogue. Cet événement annuel a trouvé un écho croissant aussi bien au sein d'institutions de l'ONU que dans des quartiers populaires et essaimé dans une dizaine de pays. D'une centaine de personnes lors de la première édition, ce "festival citoyen" accueille désormais des participants par milliers. A l'occasion de la célébration des 20 ans des Dialogues, nous avons voulu consigner les temps forts de cette aventure humaine singulière, les souvenirs et surtout les réflexions et expériences de celles et ceux qui l'ont nourrie. Mais pas seulement ! Il s'agit aussi de fournir de quoi polliniser la société avec l'ADN des Dialogues. Car nous sommes face à des défis encore plus grands qu'il y a 20 ans, mais aussi riches des leçons tirées du parcours accompli. A l'heure où le monde est chaque jour plus injuste et plus violent, il est plus que jamais essentiel de traquer les raisons d'espérer, de ne laisser personne être submergé par un sentiment d'impuissance, de développer une culture du dialogue aux plans local, national et international, de favoriser et penser l'émergence d'actions concrètes cherchant à prendre soin de chaque humain, donc du vivant. C'est la raison d'être des Dialogues en humanité. A partir des contributions de 70 familiers des Dialogues, nous avons construit ce livre sur une double base : un récit et une réflexion prospective. Dans la première partie, nous invitons le lecteur à suivre les déambulations de la jeune Capucine dans le parc de la Tête d'or où se tient l'édition lyonnaise des Dialogues. Au fil de la journée, elle découvre les diverses facettes de cette formidable aventure. Dans la deuxième partie, nous avons donné la parole à plusieurs personnalités afin qu'elles tracent les grandes lignes d'une réflexion sur ce que les Dialogues doivent devenir afin d'être toujours plus pertinents et un levier de transformations sociétales (Patrick Viveret, Catherine Dolto, Jean Fabre, Hervé Chaygneaud Dupuy, Isabelle Delannoy, Christian Delorme, Siddhartha, Cyril Kretzschmar, Hugues Sibille, Carminda Mac Lorin, Dorothée Browaeys). La dernière partie de ce livre est un "mode d' emploi" succinct à l'attention de tous ceux qui aimeraient organiser des Dialogues.

06/2023

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Sciences politiques

Le génocide imaginaire en République du Congo

La République du Congo est une terre où le vivre-ensemble était ancré dans les moeurs, les différentes couches sociales : une terre d'accueil, un lieu d'hospitalité composé de plusieurs ethnies, une mosaïque de peuples et de cultures symbolisant une fraternité forte, un haut lieu de spiritualité et de brassage de populations d'origines diverses. Ces liens fraternels qui tendent à disparaître, étaient fondés sur les valeurs de solidarité, de partage et d'équité. Ils se manifestaient à travers des gestes d'amitié et de respect. Les lois étaient reconnues par la majorité du peuple. Dans la société congolaise, la vie est sacrée. Un enfant est né pour grandir et servir la nation, voire l'humanité, mais un mal est né pour ne pas grandir et pour détruire l'unité née. Dans un tel environnement, comment un génocide peut-il naître ? En République du Congo, il n'y a pas de problème d'espace du territoire qui pourrait conduire les peuples à se confronter mutuellement, l'étendue est suffisamment vaste. Un tel contexte n'est pas censé favoriser l'émergence du sentiment d'extermination d'un peuple par un autre pour des raisons de survie. La gestion du pouvoir est dictée parla volonté du vivre-ensemble. La composition des gouvernements qui se sont succédé ainsi que celle d'autres institutions publiques ont toujours obéi aux exigences de représentativité de tous les départements. Dans l'histoire des conquêtes, des territoires, toute guerre n'a pas été un génocide. Les pratiques ancestrales en matière de règlement et de différends excluent toute discrimination. Le Congo est un Etat complet avec toutes les institutions établies. Il n'y a pas de conflit de terre. Le rêve d'un génocide en République du Congo est une utopie. Le fonctionnement des institutions politiques précoloniales telles que les cours royales, les chefferies de terre, les chefs de cantons, de villages, les conseils notables étaient conformes aux principes démocratiques. Le dialogue, la recherche de compromis, de concession mutuelle, sont des valeurs du vécu quotidien en République du Congo. Le conflit du Pool est une réaction du politique en vue d'éradiquer une action des bandes armées, assimilable au terrorisme. Aucun Etat au monde ne peut admettre qu'une partie de son territoire soit pris en otage par les hors-la-loi. Face a une action de génie, l'Etat emploie des méthodes qui sont celles utilisées par tous, connues et modernes. Les guerres sont des circonstances de parcours d'une société évoluée. Une guerre menée selon les techniques utilisées par les armées modernes ne peut pas justifier un génocide. Il y a des notions de droit, il y a aussi des notions d'éthique populaire. Le conflit armé du Pool n'est pas une action concertée du politique. C'est une volonté des bandes armées imposée à l'Etat. On ne peut négocier facilement avec quelqu'un qui a des armes, mais le Congo a eu l'amabilité de négocier et réussir. La condamnation existe quand il y a volonté de nuire. Ce n'est pas le cas du Congo.

08/2019

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Sports

Je ne suis pas un saint

Il est des personnages au destin atypique, dont la vie est une succession de chapitres aussi aventureux que dissemblables, portant avant tout la marque de la liberté. Max Guazzini est de ceux-ci. Dans son parcours, rien d'attendu, de stable, une réinvention permanente au contraire, la traversée d'univers singuliers, une quantité de rencontres exaltantes, et toujours l'audace, le goût du risque, une certaine vision, une certaine foi même qui ont apporté à tout ce qu'il a entrepris le bonheur de la réussite, le sens de la fête, un éclat particulier, une folie. S'il n'est pas un saint, Max Guazzini, qui a grandi à Marseille, dans une famille d'origine italienne, a été marqué dans son enfance par le catholicisme ; il s'en est même fallu de peu qu'il suive la vocation religieuse. Cet élan continuera de l'inspirer, donnant à toutes ses actions, même les plus décalées, la forme d'un engagement. « Monté » à Paris, étudiant en droit et en philosophie au début des années 1970, Max rêve de devenir chanteur et enregistre deux disques. Il rencontre surtout Dalida, dont il deviendra l'un des intimes, et l'attaché de presse après avoir renoncé à son espoir de percer dans le show business. Il se réinvente en avocat pénaliste et, plongé au cœur de grandes affaires, passe son temps en prison, avant de devenir l'un des fondateurs de NRJ dont il fera, dans la fièvre des radios libres naissantes, la fréquence la plus innovante, la plus excitante, la plus populaire de la bande FM et finalement la plus écoutée des radios, vivant à sa tête de passionnantes années de succès et de rencontres. La saga d'NRJ culminera dans la grande manifestation de 1984 rassemblant 300 000 personnes pour empêcher une fermeture décidée par le pouvoir. Cette passion, Max Guazzini la retrouvera dans ce qui sera la deuxième grande aventure de sa vie : le Stade français. Appliquant à la présidence d'un club de rugby le même esprit d'innovation et de fête, le même enthousiasme et la même spontanéité que ceux déployés à NRJ, il va transformer une équipe de quatrième division en plus grand club français, et changer la face du rugby sinon du sport par son goût de la grandeur et son sens du spectacle. Max Guazzini nous entraîne ici dans les coulisses du monde de la musique, dans les vestiaires, sur les terrains et dans les troisièmes mi-temps du rugby, dans les studios de radio, auprès des artistes, des sportifs, des hommes de médias, des politiques. Madonna, Alain Delon, Johnny Hallyday, David Bowie, Mick Jagger, Paul McCartney, François Mitterrand, Jacques Attali, Bertrand Delanoë, Nicolas Sarkozy, Bernard Laporte, Fabien Galthié, Christophe Dominici et encore Jacques Morali, ou la fameuse Denise, figure du club libertin le 41, sont ainsi quelques-uns des héros de son histoire, à côté de Dalida. Le récit de sa vie, sensible, passionné, drôle, mouvementé, offre un festival de portraits et une singulière traversée de notre temps, des années 1950 à nos jours, faisant vivre sous un nouveau jour des personnages et des événements familiers.

03/2017

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Photographie

Deauville photographié par Patrick Braoudé

La première impression lorsqu'on découvre le travail photographique de Patrick Braoudé est la surprise. Est-on vraiment en face d'une photographie ? Beaucoup l'interrogent sur ce qu'ils voient. Est ce une peinture qui est ensuite photographiée ? Est ce une photographie sur laquelle ont été déposées des couches de peinture ? Certains sont sûrs de voir des traces de pinceaux dans les vagues, dans l'écume. Pourtant il n'y a pas de travail de pinceaux. Seule la faible vitesse d'obturation choisie sur l'appareil photographique associée au flou provoqué par la tenue de l'appareil dans la main, sans trépied, construit cette vision particulière. Patrick Braoudé s'amuse à jouer de cette ambigüité. Il nous présente des photos floues avec un fort aspect pictural, sans retouche, aux couleurs saturées, qui s'amusent à donner l'illusion de tableaux, sur un mode "impressionniste" tout en conservant l'instantané de la photographie...des effets obtenus à la prise de vue, sans travail d'ordinateur... Ce flou leur donne une touche d'intemporalité. Un travail qui procure une certaine sensation de bien-être. Le littoral devient délicat, presque surpris dans son intimité. Chaque pixel est comme un coup de pinceau impressionniste. "De l'Impressionnisme Numérique" a dit avec amitié Claude Lelouch lors de la première exposition de Deauville... Ce sont des photographies simples du bonheur au quotidien. Comme un désir du photographe d'être le témoin de ces scènes de plages normandes. Comme un hommage à Eugène Boudin, peintre témoin de la naissance de la mode des bains de mer et de la création de Deauville, qui peignait les scènes de plage de Trouville et Deauville. Eugène Boudin a immortalisé les estivants de la bourgeoisie et de la noblesse parisienne en représentant les mondanités et les élégantes. Aujourd'hui, les plages normandes se remplissent, l'été mais aussi les beaux week-ends, d'une population avide des plaisirs de la plage, population bigarrée, multiple, à la fois bourgeoise et populaire, une représentation fidèle de la population de la France actuelle que Patrick Braoudé peint à son tour avec son appareil photo. Comme cinéaste qui aime regarder ses contemporains, il aime prendre du temps à observer la plage : groupes d'amis se retrouvant pour un moment d'amitié, familles en quête de détente, couples d'amoureux venus s'isoler, solitaires en réflexion... Ses photos sont des instantanés de ces vies "espionnées". Des personnages souvent de dos, parfois masqués, ou en contre-jour, des êtres flous, des ombres chinoises, des "fantômes", parfois même juste des tâches de couleurs... pour que chacun s'y reconnaisse. Avec cette lumière particulière de la Normandie qui donne à la mer ses teintes étonnantes, du gris vert au bleu de Prusse, au sable ce jaune d'une douceur rare, aux parasols et accessoires de plage colorés leur éclat ensoleillé... Ce n'est pas étonnant que les peintres impressionnistes se soient donnés rendez-vous sur les plages de Normandie. Patrick Braoudé nous présente ainsi quelques photos de son Trouville et de son Deauville... comme le story-board d'un de ses films.

07/2020

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Pléiades

Romans et récits. Tome 1, Education européenne ; Les Racines du ciel ; La Promesse de l'aube ; Lady L. ; La Danse de Gengis Khan

La réalité n'est jamais aussi belle que le rêve d'une mère. Gary a connu d'éclatants succès, mais il a vu son oeuvre se heurter à des réticences. La popularité de l'écrivain et sa reconnaissance n'ont pas marché du même pas. Ce n'est pas exceptionnel, et cela s'explique. Les obstacles à une consécration rapide étaient multiples. Le style de l'homme a pu en être un. La manière du romancier en fut un autre. Gary a été un extraordinaire raconteur d'histoires et un inventeur de personnages en un temps, l' "ère du soupçon" , où ces notions, l'histoire, le personnage, étaient réputées périmées. Or pour lui, le récit - l'histoire - n'est pas la part honteuse du roman. Mais c'est se tromper lourdement que de voir en lui, sous ce prétexte, un écrivain conventionnel. La mise en abyme dans Education européenne, la polyphonie des Racines du ciel, la voix narrative fantastique dans La Danse de Gengis Cohn, la dimension autofictionnelle de La Promesse de l'aube et de Chien Blanc, la temporalité dans Les Enchanteurs ou l'inventivité verbale et les dispositifs narratifs d'Emile Ajar ne sont pas précisément des signes de soumission au roman hérité du XIX ? siècle. Encore faut-il, pour s'en aviser, ne pas passer à côté d'une prose qui mélange les genres, avoue ce qu'elle doit à la poésie et s'autorise toutes les libertés, à commencer par un humour qui a pu déconcerter autant qu'il séduit, parce qu'il va de l'ironie la plus fine au grotesque le plus assumé. Cet humour n'est pas un ornement : il est fondamental. D'une part, il conjure la tentation de l'idéalisme ; de l'autre, il permet de "désamorcer le réel au moment même où il va vous tomber dessus" . Le réel, voilà l'ennemi. Gary l'appelait "la Puissance" . Il a plusieurs visages : guerre, bêtise, vieillissement, solitude... Gary est sensible au tragique de l'Histoire et au malheur des hommes. Ca l'agace : "J'ai tout le temps mal chez les autres". L'humour est donc une défense. L'imaginaire, un refuge. "Nourris de ce siècle, jusqu'à la rage" , les livres de Gary ne sont pas des romans historiques. Ancrés dans l'imaginaire autant que dans l'Histoire, ils relèvent de la "mystique" littéraire de l'aventure qu'ont illustrée, avant lui, Kessel, Cendrars, Saint-Exupéry, et Malraux bien sûr. Cette conception de l'aventure n'est pas de celles qui produisent une littérature populaire de grande diffusion : elle engage une réflexion sur la condition humaine. L'aventure et l'imaginaire luttent aussi contre une forme particulière de réalité, l'identité. Chez Gary, le je est une clôture, un piège. Ce qu'il y a de permanent dans son identité l'exaspère. Il lui faut s'évader, courir le monde, muer comme un python, se "séparer un peu de [s]oi-même" , changer d'identité et vivre d'une vie pseudonyme, au risque de s'y brûler. "L'aventure Ajar"

05/2019

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Photographie

Trouville photographié par Patrick Braoudé

La première impression lorsqu'on découvre le travail photographique de Patrick Braoudé est la surprise. Est-on vraiment en face d'une photographie ? Beaucoup l'interrogent sur ce qu'ils voient. Est ce une peinture qui est ensuite photographiée ? Est ce une photographie sur laquelle ont été déposées des couches de peinture ? Certains sont sûrs de voir des traces de pinceaux dans les vagues, dans l'écume. Pourtant il n'y a pas de travail de pinceaux. Seule la faible vitesse d'obturation choisie sur l'appareil photographique associée au flou provoqué par la tenue de l'appareil dans la main, sans trépied, construit cette vision particulière. Patrick Braoudé s'amuse à jouer de cette ambigüité. Il nous présente des photos floues avec un fort aspect pictural, sans retouche, aux couleurs saturées, qui s'amusent à donner l'illusion de tableaux, sur un mode "impressionniste " tout en conservant l'instantané de la photographie...des effets obtenus à la prise de vue, sans travail d'ordinateur... Ce flou leur donne une touche d'intemporalité. Un travail qui procure une certaine sensation de bien-être. Le littoral devient délicat, presque surpris dans son intimité. Chaque pixel est comme un coup de pinceau impressionniste. "De l'Impressionnisme Numérique" a dit avec amitié Claude Lelouch lors de la première exposition de Deauville... Ce sont des photographies simples du bonheur au quotidien. Comme un désir du photographe d'être le témoin de ces scènes de plages normandes. Comme un hommage à Eugène Boudin, peintre témoin de la naissance de la mode des bains de mer et de la création de Deauville, qui peignait les scènes de plage de Trouville et Deauville. Eugène Boudin a immortalisé les estivants de la bourgeoisie et de la noblesse parisienne en représentant les mondanités et les élégantes. Aujourd'hui, les plages normandes se remplissent, l'été mais aussi les beaux week-ends, d'une population avide des plaisirs de la plage, population bigarrée, multiple, à la fois bourgeoise et populaire, une représentation fidèle de la population de la France actuelle que Patrick Braoudé peint à son tour avec son appareil photo. Comme cinéaste qui aime regarder ses contemporains, il aime prendre du temps à observer la plage : groupes d'amis se retrouvant pour un moment d'amitié, familles en quête de détente, couples d'amoureux venus s'isoler, solitaires en réflexion... Ses photos sont des instantanés de ces vies " espionnées ". Des personnages souvent de dos, parfois masqués, ou en contre-jour, des êtres flous, des ombres chinoises, des "fantômes", parfois même juste des tâches de couleurs... pour que chacun s'y reconnaisse. Avec cette lumière particulière de la Normandie qui donne à la mer ses teintes étonnantes, du gris vert au bleu de Prusse, au sable ce jaune d'une douceur rare, aux parasols et accessoires de plage colorés leur éclat ensoleillé... Ce n'est pas étonnant que les peintres impressionnistes se soient donnés rendez-vous sur les plages de Normandie. Patrick Braoudé nous présente ainsi quelques photos de son Trouville et de son Deauville... comme le story-board d'un de ses films.

07/2020

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Littérature française

Carmina sacra. Poésie latine chrétienne du Moyen-Age

Wilamowitz, le plus fameux des philologues allemands, dit de la poésie latine en général qu'elle n'atteint son sommet que lorsqu'elle acquiert dans les nouvelles formes rythmiques chrétiennes une richesse que les Romains n'ont jamais possédée. Henry Spitzmuller le sait bien lorsqu'il publie en 1971 un livre magistral et monumental, une somme bilingue de poésie latine chrétienne couvrant la totalité du Moyen Age - un millénaire et quart. De ce livre de référence, même cinquante ans plus tard, il n'existe pour le lecteur français aucun équivalent. Aucune publication n'a, comme celle-ci, donné accès à la vastitude poétique et littéraire de ce premier millénaire. Ces 1200 ans de poésie, du IIIe siècle au XVe, commencent à Rome avec le christianisme, dans cette langue latine qui est le socle de la nôtre. L'ouvrage édité par Spitzmuller ne comble pas seulement une lacune, mais il efface un gouffre d'ignorance. Dès sa parution l'on ne cessa de s'y référer. De nombreux auteurs et de nombreuses oevres ne se trouvent en effet qu'ici. On peut lire ce volume aussi bien en esthète qu'en mystique, aussi bien en philosophe qu'en historien. Des figures centrales le composent qui, réduites à leurs travaux théoriques par un siècle partisan, ne purent donc apparaître comme étant aussi les grands écrivains et poètes de leur temps : saint Ambroise et saint Augustin, Lactance, Boèce, Commodien, Prudence, Arator et le pape saint Grégoire le Grand (qui donna son nom au chant "grégorien"), mais également Bède le Vénérable, saint Pierre Damien, saint Anselme, Abélard, saint Bernard, sainte Hildegarde, Adam de Saint-Victor, Alain de Lille, Thomas de Celano, saint Bonaventure, saint Thomas, Jacopone da Todi, Thomas a Kempis, Savonarole, Pic de la Mirandole... Au total ce sont cent-seize écrivains médiévaux dont on découvre l'oeuvre poétique : des auteurs célèbres que l'on n'a pas encore lus, aussi bien que des auteurs inconnus dont, sans le savoir, l'on a déjà entendu les pages car elles font partie du patrimoine de l'humanité. S'ajoute à cela un large ensemble de textes anonymes transmis par la tradition populaire ou liturgique, et qui, des Hymnes de Pâques du Ve siècle aux Cantiques de Noël du XVe en passant par la Lamentation de l'âme damnée ou le Rythme pour le jour du Sabbat éternel, sont autant de chefs-d'oeuvre dont l'existence imprègne l'histoire littéraire tout autant que la vie de la liturgie contemporaine. Une telle somme de poésie ne fût pas complète si elle n'était irréprochablement éditée par Spitzmuller : pédagogiquement annoté et commenté, le volume réserve deux-cents pages aux divers éclaircissements historiques ainsi qu'aux notices biographiques de chacun des auteurs. En dépit du trésor qu'il constitue à lui seul, ce livre magnifique demeurait parfaitement introuvable. A ceux qui vont découvrir ce grand-oeuvre comme à tous ceux qui l'attendaient depuis longtemps, cette nouvelle édition fera saisir, peut-être, la façon dont certains rares ouvrages peuvent devenir le livre d'une vie.

11/2018

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Pléiades

Romans et récits. Tome 2, Adieu Gary Cooper ; Chien blanc ; Les Enchanteurs ; Gros-câlin ; La Vie devant soi ; Pseudo ; Clair de femme ; Les Cerfs-volants ; Vie et mort d'Emile Ajar

La réalité n'est jamais aussi belle que le rêve d'une mère. Gary a connu d'éclatants succès, mais il a vu son oeuvre se heurter à des réticences. La popularité de l'écrivain et sa reconnaissance n'ont pas marché du même pas. Ce n'est pas exceptionnel, et cela s'explique. Les obstacles à une consécration rapide étaient multiples. Le style de l'homme a pu en être un. La manière du romancier en fut un autre. Gary a été un extraordinaire raconteur d'histoires et un inventeur de personnages en un temps, l' "ère du soupçon" , où ces notions, l'histoire, le personnage, étaient réputées périmées. Or pour lui, le récit - l'histoire - n'est pas la part honteuse du roman. Mais c'est se tromper lourdement que de voir en lui, sous ce prétexte, un écrivain conventionnel. La mise en abyme dans Education européenne, la polyphonie des Racines du ciel, la voix narrative fantastique dans La Danse de Gengis Cohn, la dimension autofictionnelle de La Promesse de l'aube et de Chien Blanc, la temporalité dans Les Enchanteurs ou l'inventivité verbale et les dispositifs narratifs d'Emile Ajar ne sont pas précisément des signes de soumission au roman hérité du XIX ? siècle. Encore faut-il, pour s'en aviser, ne pas passer à côté d'une prose qui mélange les genres, avoue ce qu'elle doit à la poésie et s'autorise toutes les libertés, à commencer par un humour qui a pu déconcerter autant qu'il séduit, parce qu'il va de l'ironie la plus fine au grotesque le plus assumé. Cet humour n'est pas un ornement : il est fondamental. D'une part, il conjure la tentation de l'idéalisme ; de l'autre, il permet de "désamorcer le réel au moment même où il va vous tomber dessus" . Le réel, voilà l'ennemi. Gary l'appelait "la Puissance" . Il a plusieurs visages : guerre, bêtise, vieillissement, solitude... Gary est sensible au tragique de l'Histoire et au malheur des hommes. Ca l'agace : "J'ai tout le temps mal chez les autres". L'humour est donc une défense. L'imaginaire, un refuge. "Nourris de ce siècle, jusqu'à la rage" , les livres de Gary ne sont pas des romans historiques. Ancrés dans l'imaginaire autant que dans l'Histoire, ils relèvent de la "mystique" littéraire de l'aventure qu'ont illustrée, avant lui, Kessel, Cendrars, Saint-Exupéry, et Malraux bien sûr. Cette conception de l'aventure n'est pas de celles qui produisent une littérature populaire de grande diffusion : elle engage une réflexion sur la condition humaine. L'aventure et l'imaginaire luttent aussi contre une forme particulière de réalité, l'identité. Chez Gary, le je est une clôture, un piège. Ce qu'il y a de permanent dans son identité l'exaspère. Il lui faut s'évader, courir le monde, muer comme un python, se "séparer un peu de [s]oi-même" , changer d'identité et vivre d'une vie pseudonyme, au risque de s'y brûler. "L'aventure Ajar"

05/2019

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Littérature étrangère

Rouge Paris

Paris, 1862. Victorine Louise, la narratrice âgée de 17 ans, partage avec son amie Denise (18 ans), une petite chambre près de la place Maubert. Elles vivent dans la plus grande misère et travaillent comme brunisseuses dans un atelier d'argenterie. Un jour, elles remarquent un jeune trentenaire qui les observe avec intérêt. Bientôt, celui qui dit s'appeler Eugène et habiter Gennevilliers les invite au restaurant, entreprenant de les séduire. Denise a déjà donné naissance à un enfant qui vit à la campagne. Mais Victorine Louise, plutôt taiseuse, est toute prête à céder aux charmes d'"Eugène". Un matin, elle décide d'aller retrouver ce mystérieux garçon, qui s'avère être peintre, dans son atelier de la plaine Monceau. Elle sait qu'elle met ainsi fin à sa vie avec Denise, mais elle trouve aussitôt sa place auprès de l'artiste dont elle devient l'amante et le modèle attitré. D'autant plus que le peintre constate avec satisfaction que Victorine Louise possède un oeil assez acéré, que ses remarques peuvent lui être utiles. Louise est heureuse de son travail, de sa chambre de la rue La Bruyère, mais elle sent bien que son statut de modèle est précaire. Elle sait que le peintre est plus attaché à Suzanne, une femme un peu plus âgée qui lui a donné un enfant. Lorsque "E" doit partir assister aux funérailles de son père, Louise se pense abandonnée. C'est pourtant le moment où Alfred Stevens, un ami de "E", lui confie une enveloppe contenant deux mois de salaire. Quelque temps après, "E" lui fait parvenir une lettre accompagnée d'un croquis érotique. A son retour, le peintre fait poser Louise pour un tableau dont l'achèvement, aux dires de l'artiste, est en partie dû au talent du modèle. C'est une révélation pour tous les deux. Derrière ce prénom déguisé, l'on reconnaît rapidement la vie et la trajectoire d'Edouard Manet. Si son nom n'est jamais cité dans le texte, Victorine Louise Meurent a bien été son modèle et la principale figure féminine des deux chefs-d'oeuvre qui firent scandale et installèrent le peintre comme chef de file d'une avant-garde : Olympia et Le Déjeuner sur l'herbe. Combinant habilement faits réels et évènements inventés, Maureen Gibbon fait ici le récit, par la voix de Victorine, des débuts de leur relation amoureuse et artistique, qui voit l'épanouissement à la fois de sa sensualité et de son propre tempérament d'artiste. Olympia, tandis que Victorine, elle-même future peintre, fait aux côtés de Manet l'apprentissage d'une ouverture du regard et d'une passion pour la couleur. A travers le récit très personnel de Victorine, c'est aussi toute une époque-charnière que Maureen Gibbon nous fait revivre au présent : l'essor de la photographie et l'apparition des premières cartes postales érotiques ; les réunions au café Guerbois du groupe de peintres des Batignolles, parfois rejoint par Baudelaire ; et surtout un Paris en pleine révolution haussmannienne, puisque les pérégrinations de Victorine nous emmènent volontiers du vieux Paris populaire (la place Maubert, les Halles, le boulevard du Crime...) aux nouveaux quartiers.

10/2014

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Littérature étrangère

Nashville chrome

Au début des années 1930, dans le sud de l'Arkansas, à Poplar Creek près de la frontière du Mississipi, Floyd Brown dirige une scierie. En plus des difficultés économiques qui touchent l'ensemble des États-Unis, les Brown sont confrontés à des problèmes domestiques : Floyd boit avec excès, travaille avec imprudence, et son fils cadet meurt accidentellement. Ses autres enfants, Maxine, Jim Ed et Bonnie, témoignent d'un talent musical exceptionnel. Plutôt que de jouer dans les bois, ils ont pris l'habitude de se produire dans les petits concerts et les " talent shows " du sud des États-Unis. Le frère et les deux soeurs se font bientôt connaître sous le nom de The Browns. Un impresario escroc, Fabor Robinson, leur fait signer un contrat auquel ils vont rester longtemps enchaînés. Ils connaissent un succès rapide. " Ils étaient aussi grands qu'Elvis ", à cause du son particulier de leurs voix, cet éclat soyeux et rauque forgé par la fumée provenant du travail des bucherons à proximité de chez eux, et un son qui prendrait le nom de " Nashville Chrome' ", ou de " son Brown " comme le dit Elvis Presley dans le livre. Les années 1955 et 1956 sont glorieuses : ils commencent à gagner de l'argent mais restent proches de leurs racines et de leurs amis d'enfance, parmi lesquels un certain Elvis Presley qui s'est épris de la jolie Bonnie. Le groupe demeure populaire dans les années 1960, mais leur étoile commence à pâlir. En 1962, ils enregistrent une dernière chanson avec leur célèbre producteur, Chet Atkins. Au début des années 1970, les Browns se séparent. Jim Ed se lance alors dans une brillante carrière en solo. Bonnie quitte le trio et Elvis pour épouser un médecin avec qui elle s'installe dans une ferme. Maxine, se marie quant à elle à un avocat, Tommy Russel, qui ne cesse de la tromper. Au fil des années, Maxine ne peut renoncer à l'idée de renouer avec le succès. Elle s'efforce de continuer, affrontant des hauts et des bas, tout en sombrant progressivement dans l'alcool. Rick Bass alterne le récit du parcours brillant du trio Brown, " le groupe américain préféré des Beatles ", avec " la vie aujourd'hui " de Maxine Brown dans les années 2000. Cette dernière est devenue une vieille dame impotente, ne s'est jamais remise du déclin de sa carrière fulgurante et a fini par renoncer à l'alcool " pour ne rien manquer des derniers mois de sa vie. " Habitée par la fureur plus que par la nostalgie, elle ne supporte pas d'être oubliée de tous. Aussi " l'ancienne reine de la country " dépose-t-elle une annonce dans l'épicerie de son quartier. Elle recherche un cinéaste disposé à filmer " une célèbre artiste ". Jefferson, un enfant surdoué âgé de douze ans, y répond. Il entreprend patiemment de la filmer " pour acquérir une connaissance artistique de sa vie ". Lorsqu'il projette le film dans son lycée, Maxine accède finalement à une nouvelle reconnaissance, applaudie par un public de jeunes élèves.

03/2012

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Empire colonial

L'Indigène et le citoyen. La Ligue des droits de l'homme dans les colonies 1898-1940

Avec ce nouvel ouvrage, l'auteur poursuit son exploration de la pensée coloniale dans la République impériale. Cette dernière, couvrant ce qui est convenu d'appeler la IIIe République et qui s'étend de 1870 à 1940, est celle où la France se dote d'un empire colonial aux quatre coins du globe ; le deuxième après celui du Royaume-Uni. Comme pour mes précédents travaux - consacrés à la pensée au Grand Orient de France dans la République impériale - il ne s'agit pas ici d'une réflexion globale sur la colonisation, mais simplement d'une étude précise de la Ligue des droits de l'homme et du citoyen ; de ce que furent ses idées et son action aux colonies. La Ligue naît de facto durant le procès d'Emile Zola. Ce rassemblement se mue ensuite en une " Ligue des droits de l'homme et du citoyen ", qui est officiellement enregistrée le 4 juin 1898, soit quatre années après la condamnation du capitaine Dreyfus. L'Institution se dote dès les débuts, d'un solide groupe d'avocats et de juristes. La Ligue ne veut pas " créer du droit, mais protéger le droit ". Elle regroupe dans ses rangs des politiciens de premier plan, radicaux et socialistes mais également un grand nombre d'intellectuels et d'écrivains comme Anatole France, Marcel Proust et d'autres. Après la Grande Guerre, la réflexion des ligueurs va essentiellement se porter vers le statut politique et social des colonies. Le premier élan, en compagnies des Maçons et des socialistes, va les pousser à importer la République dans les colonies ; mais surtout pour les Européens ! Quel statut alors pour les indigènes ? La Ligue va mener un combat incessant en faveur de la définition d'un statut clair et le plus libéral possible en leur faveur. Que ce soit concernant les droits fonciers, ceux en matière de justice et de défense dans les tribunaux indigènes, mais aussi de la presse et ceux de vote, essentiellement en Algérie pour ce dernier point ! L'idéal pour elle aurait été de pouvoir assimiler les masses autochtones, par l'éducation et l'amélioration de leurs conditions de vie et de les rapprocher des conditions des citoyens. La Ligue évoluera ainsi vers la recherche d'un statut du " citoyen indigène ", habitant d'un " pays en devenirs ", au sein d'une sphère mondiale française, comparable au Commonwealth. Les colonisés enfin, les indigènes, que pensaient-ils de tout cela ? Voulaient-ils devenir Français ? Voulaient-ils devenir prospères en appartenant à une superpuissance mondiale francophone, ou bien vivre plus chichement, mais librement, dans un pays qui leur appartenait ? En fait, ils ne se levèrent pas en masse contre les partis indépendantistes ou communistes pour imposer leur volonté de rester ou devenir Français. Il est d'ailleurs important de signaler que ce sont les mouvements patriotiques qui se trouveront à l'origine des grandes réflexions réformistes coloniales de la métropole, comme pour le cas du Riff et de la Syrie en 1925 et de l'Indochine en 1930. Après cette date, le pouvoir colonial perdra l'initiative et le Front populaire, malgré la vaste enquête sur les colonies de la Commission Guernut, fille de la Ligue, ne pourra rien y changer.

01/2023

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Littérature française

Michel buhler helvetiquement votre

Michel Bühler "Hélvètiquement vôtre" La chanson de Michel Bühler est à l'opposé du tout-venant, de ces insipides ritournelles que pissent en continu les robinets du showbiz et des médias asservis. De ce qu'ils n'osent même plus qualifier de "chanson" mais de "son" . De ce son dont on nourrit les ânes. Cet Helvète puise son art dans d'autres origines, entre Commune et Communale. Commune comme ces soixante-et-onze jours d'utopie qui imaginèrent une démocratie directe, hélas furtive, vite réprimée ; commune comme un chant commun, mutualisé. Communale pour l'instit' qu'il fut, pour encore cette idée de partage, de transmission... Le chant de Bühler est, sinon de combat, au moins d'engagement. A l'évidence d'utilité publique. Il n'existe pas pour franchement distraire, encore que, mais pour témoigner, instruire, à la manière d'une gazette. Pour bien le situer, il nous faut tirer de l'oubli ce terme si beau d'éducation populaire qui, en des temps pas si lointains, allait de pair avec la chanson. Avant que celle-ci, par abandon autant que par vouloir, ne devienne majoritairement outil d'abrutissement... Ca fait cinquante ans que, avec un succès fluctuant digne des montagnes suisses, il chante les gens, la marche de ce monde qui ne sait vraiment que reculer, les méfaits de la mondialisation, la lutte des peuples à disposer d'eux-mêmes. Un chant toujours remis sur le métier, tissé d'humanité, frappé au coin du bon sens. Qui plus que jamais, se heurte au silence, à l'indifférence, et vit dans le maquis où il partage le sort des siens, d'autres artistes de sa trempe, de son caractère, rebelles et insoumis au seul fait qu'ils osent chanter quand rien ne les invite à le faire encore. Ce qui frappe au premier abord chez Bühler, c'est l'évocation des gens, des petites gens. Ceux qui, justement, n'ont jamais voix au chapitre. En cela, Michel Bühler est parent des François Béranger, Anne Sylvestre, Gilles Vigneault, Michèle Bernard et autres encore, qui font large place dans leurs vers à ces vies anonymes, aux espoirs et aux souffrances des peuples, aux lieux où ils vivent. Bühler est empathie, dont le chant rend justice aux déclassés, leur rend la dignité dont on les a spolié. Dans ses vers, les gens existent. Au moins, là, ils ne sont pas invisibles. Le chant de Bühler n'est pas "moderne" au sens des canons, des dogmes du moment : programmateurs et journaleux le raillent pour ça. Mais lui comme nous s'en contrefoutent : il est sans âge et survivra aux modes dérisoires et futiles, aux chanteurs qu'on produit en batterie, hors sol, aux chansons à l'obsolescence programmée, à peine chantée déjà oubliées. Il est d'un chant puissant qui existe depuis toujours et existera longtemps encore, qui trouvera toujours les sillons, les sentiers, les maquis s'il le faut, pour exister, pour instiller une différence qui, à ben l'écouter, n'est jamais qu'une expression de bon sens. Michel Bühler est de cette tradition de colporteurs de nouvelles, de chansons, de presqu

11/2022

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Histoire internationale

La Révolution russe, une histoire française. Lectures et représentations depuis 1917

La Révolution russe aura bientôt cent ans, mais on peut douter que son anniversaire fasse l'objet de commémorations. En France particulièrement, on croit savoir depuis Le Passé d'une illusion de François Furet (1995) et Le Livre noir du communisme (1997) qu'elle est à l'origine d'un cauchemar totalitaire aussi dangereux que le nazisme mais plus durable et plus meurtrier. Et pourtant... En 1968, la Sorbonne était ornée de portraits de Lénine alors qu'on redécouvrait Nestor Makhno. le Parti communiste français, fort de dizaines de milliers de militants et de millions d'électeurs, avait été créé en 1920 justement pour suivre l'exemple des bolcheviks russes. Et, chaque année, le PCF célébrait la " Révolution socialiste d'Octobre ". D'ailleurs, parmi les premiers communistes français qui avaient côtoyé Lénine et Trotski au Kremlin aux temps héroïques on trouve Victor Serge et Boris Souvarine, les pionniers de l'histoire de la révolution et du bolchevisme en France. Comment un tel retournement, de l'engouement au dénigrement et à l'effacement, a-t-il été possible ? Pour le comprendre, l'auteur propose de suivre les lectures et les représentations données de l'événement en France depuis 1917 jusqu'aujourd'hui. Une large place est accordée aux représentations littéraires ou cinématographiques tant il est vrai, par exemple, que le cliché du " bolchevik en veste de cuir " doit plus à l'Année nue de Boris Pilniak ou au Docteur Jivago de David Lean qu'au travail des historiens. L'influence de telles oeuvres étrangères est d'autant plus déterminante que, du côté français, c'est d'emblée une vision négative et sensationnaliste qui est véhiculée, notamment par Joseph Kessel. Au fil des interprétations contradictoires des historiens concernant 1917 en Russie, c'est aussi une histoire intellectuelle et politique de la France qui se lit. Même à gauche, le pays de la " Grande révolution " s'y montre beaucoup plus rétif qu'on pourrait le croire vis-à-vis de la nouvelle venue. Le Parti communiste finit par imposer sa lecture et, dans la France des années 1950-1960, la reprise du discours déterministe des Soviétiques fait longtemps bon ménage avec la prédominance de l'école des Annales. Ainsi, les voix révolutionnaires dissidentes ont été mises sous le boisseau et le tranchant subversif d'Octobre a été bien émoussé. Mai 1968 n'y change rien, pas plus que la publication de travaux essayant de rendre la complexité d'une révolution populaire défaite dans sa propre victoire. La route était dégagée pour un retour des approches conservatrices que la disparition de l'URSS a ultérieurement galvanisées et médiatisées. Parcours historiographique à travers des auteurs de générations différentes et d'opinions opposées, le travail d'Eric Aunoble éclaire de multiples facettes de la Révolution russe et entend rendre aux " dix jours qui ébranlèrent le monde " une richesse que le statut de modèle ou de repoussoir avait éclipsée. Le livre se veut aussi un encouragement à reprendre l'étude des années 1917-1921, tant elles peuvent encore apprendre à ceux qui visent l'émancipation aujourd'hui.

01/2016

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Sciences politiques

Pour l’autogestion socialiste . Charles Piaget. Interventions, 1974

Dessin de couverture : Alain Frappier 1974, six ans après la grève générale de Mai 1968 et ses 10 millions de grévistes, le souffle révolutionnaire est toujours présent. Une longue grève, celle des ouvrières et des ouvriers de Lip à Besançon, vient de s'achever. Par ses atours autogestionnaires ("on fabrique, on vend, on se paie" clament les grévistes), elle a reçu un important soutien populaire tant elle a pu préfigurer une "nouvelle légalité ouvrière" , mettant directement en cause l'ordre capitaliste. Charles Piaget, syndicaliste CFDT de Lip, militant PSU de Besançon, en a été propulsé porte-parole. Il a le sens et le goût du collectif. En cette année 1974, au sein du "peuple de gauche" , les questions se posent concrètement, taraudant les organisations politiques comme les syndicats : Comment faire basculer la France dans le socialisme ? S'agit-il de passer par la voie des urnes ou celle des luttes ? Faire le choix des réformes ou de la révolution ? Quel chemin emprunter pour arriver à ce fameux "débouché politique" qui se cherche depuis Mai ? Quelle organisation, quel parti, quelles alliances sont nécessaires pour cela ? Ces questions ne sont pas neuves pour toutes celles et tous ceux qui ont l'émancipation et l'égalité au coeur, qu'anime la volonté de rompre avec un capitalisme mortifère, de changer le monde et la vie. Elles conservent encore aujourd'hui leur pertinence et méritent d'être remises sur le métier, encore et encore. En 1974, c'est en syndicaliste, en militant politique, que Charles Piaget propose dans les textes de ce recueil des pistes pour répondre aux enjeux qui se posent alors. Les retrouver aujourd'hui permet de remonter le fil du temps pour mieux appréhender l'avenir d'un "socialisme de tous les jours" . Ce cahier contient : â¢Une introduction politique et historique de Théo Roumier, "Le socialisme, tous les jours" â¢Deux textes de Charles Piaget : - "Il faut rejeter toute attitude de démission" , entretien donné à Politique Hebdo du 3 octobre 1974 - "Que signifie aujourd'hui militer pour le socialisme, être révolutionnaire" , texte de son intervention au meeting "Le PSU répond à vos question" du 24 octobre 1974 à la Mutualité â¢Un cahier iconographique en couleur â¢Une chronologie détaillée â¢Des notes biographiques â¢Une bibliographie Charles Piaget est une figure marquante de la grève des Lip à Besançon en 1973. Militant PSU et CFDT, il incarne nationalement cette lutte ouvrière parmi les plus importantes des "années 68" . Il est brièvement membre de la Direction politique nationale du PSU sans abandonner son militantisme syndical et de terrain. Dans les années 1990 il anime l'antenne bisontine de l'association Agir ensemble contre le chômage (AC ! ). Il est aujourd'hui retraité et continue de transmettre la mémoire des Lip. Théo Roumier a assuré la conception et la présentation de ce cahier de l'ITS. Syndicaliste SUD éducation en lycée professionnel, il est membre du Comité éditorial de la revue de l'Union syndicale Solidaires, Les Utopiques et auteur de plusieurs contributions sur l'histoire récente du syndicalisme et du mouvement libertaire et révolutionnaire.

10/2022

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Faits de société

Jeunesses & engagements citoyens. - au-dela des malentendus

" La question de l'engagement des jeunes est au coeur des discours politiques et médiatiques qui relayent l'idée d'une jeunesse désengagée, apolitique, individualiste et apathique " écrivaient les sociologues Valérie Becquet et Martin Goyette en 2014 . Presque dix années plus tard, les mêmes éléments de langage circulent toujours, alimentés notamment par la désaffection croissante des 18-24 ans pour les urnes. Mais s'y superpose dorénavant le diagnostic de la " fracture générationnelle ", établi à partir de sondages et d'événements qui semblent montrer que les jeunes remettent en question les valeurs et les choix des " boomers ". Les nouvelles générations auraient une appétence pour la radicalité, tant dans leurs répertoires de mobilisation que dans leurs idées. Les articles rassemblés dans ce dossier permettent de complexifier ce tableau. Ils tendent à dessiner le portrait de jeunes plus engagés que leurs prédécesseurs au même âge, notamment sur les questions environnementales. La dimension politique de l'engagement n'est pas absente, mais elle se fait sur le mode de la " conversion " individuelle (qui peut s'exprimer dans le champ professionnel ou dans les choix de consommation) ou à travers des réseaux souples constitués via l'espace numérique. Les partis et les syndicats sont assez largement ignorés, et la dimension institutionnelle de la politique (élections, décisions gouvernementales, initiatives parlementaires) semble souffrir d'un profond discrédit au sein des générations Y (nées entre 1980 et 1995) et Z (nées entre 1995 et 2010). Cette désintermédiation n'est pas sans conséquence : comme l'a analysé le politiste Vincent Tiberj " dans les urnes, les moins de 35 ans pèsent moins de 50 % de leur poids démographique réel ". Le différentiel d'abstention crée un effet de distorsion, qui contribue à mettre au centre de la scène politique des enjeux qui ne sont pas ceux qui comptent le plus pour les jeunes, ce qui alimente le cercle vicieux de la baisse de leur participation. Ce phénomène, qui n'est pas spécifiquement français, comme le montrent les comparaisons avec la Belgique et l'Italie, semble prendre ses racines dans les années 1960, marquées par l'affaiblissement des transmissions intergénérationnelles des pratiques religieuses mais aussi politiques, ainsi que par le délitement de la confiance dans les institutions. Loin de proposer un chimérique retour au statu quo ante, les contributions de la dernière partie du dossier esquissent des réponses créatives. Elles empruntent les chemins de l'école, de l'éducation populaire, mais aussi de dispositifs urbains comme les skate-parks. Plusieurs auteurs soulignent la fertilité d'initiatives de terrain qui offrent aux jeunes des espaces d'autonomie dans lesquels ils se voient confier des responsabilités et s'éveillent à l'exercice d'une citoyenneté active. Le Service Civique et le Service national universel sont deux exemples de politiques qui essayent d'amplifier ces effets vertueux. Il est réconfortant de découvrir que le Service Civique peut avoir un impact sur la décision de prendre part aux élections. Les malentendus intergénérationnels autour de la politique ne sont pas une fatalité, à condition que jeunes et moins jeunes redécouvrent, en échangeant les uns avec les autres, les différentes dimensions de l'engagement citoyen.

12/2023

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Beaux arts

Robert Doisneau

Un documentaire qui se lit comme un récit, des moments-clés de la vie du photographe Robert Doisneau illustrés par treize clichés incontournables et représentatifs du talent de ce photographe humaniste. Des photos de commande ou personnelles, toujours réalistes, prises en noir et blanc mais aussi en couleurs. Des photographies à la fois tendres, facétieuses et touchantes, toutes accessibles aux enfants, et qui leur parlent dès leur plus jeune âge. Un documentaire sur un photographe pour une première approche de la photographie Témoin de son temps, Robert Doisneau était aussi, et surtout, un grand photographe, toujours en quête de l'image parfaite. Il y a une grande esthétique dans son travail, notamment son art du cadrage et sa faculté à saisir ou à mettre en scène des instants "uniques". Toutes ces photos dégagent une grande force émotionnelle. A chaque fois, il nous raconte une histoire avec tendresse, une histoire qui parle à tout le monde. Pour découvrir et apprendre le vocabulaire de la photo : objectif, cliché, composition, cadrage, mise en scène, lumière, détail, décor, portrait, pose, commande, laboratoire, noir et blanc, couleur... Un des photographes français les plus connus au monde Robert Doisneau s'est toujours considéré comme un artisan et ne cherchait jamais à tomber dans le sensationnel, que ce soit en photographiant le Paris populaire qu'il aimait tant ou le milieu mondain où ses commandes de reportage l'envoyaient parfois. Ses très nombreux clichés en noir et blanc des rues de Paris de l'après-guerre et de sa banlieue, d'écoliers en classe ou en extérieur, de personnalités du XXe siècle ou d'anonymes touchants ont, entre autres, fait sa renommée. Les photos prises par Robert Doisneau reflètent bien l'homme qu'il était. Elles montrent, en toute occasion, ce qui retenait son attention, ce qu'il voulait dénoncer ou mettre en lumière. Que ce soient avec ses photographies de commande (pour les sociétés pour lesquelles il a travaillé, des journaux, des magazines...) ou ses photographies prises en tant que photographe indépendant, toutes ont cette "touche Doisneau" immédiatement reconnaissable ! Un ouvrage didactique mêlant photos et illustrations Les treize photos de l'ouvrage : "L'Agocholine Zizine" (une photo pharmaceutique), "Chez la marchande à la toilette, la robe "chic" " (extraite d'un reportage au marché aux puces), "La Pause" (ses années à l'usine Renault), "Dordogne" (sur les congés payés), "Le Cheval tombé" (prise durant l'Occupation), "Les Glaneurs de charbon" (photo de banlieue), "Christian Dior et ses catherinettes" (une de ses photos de mode), "Le Baiser de l'Hôtel de Ville" (des amoureux à Paris, l'une des images les plus célèbres de l'histoire de la photographie), "Les Pains de Picasso, à Vallauris" (portrait d'artiste), "Le Cadran scolaire" (photo d'écoliers en classe), "Les Bigoudis du peintre" (photo aux USA, en couleurs), "Pipi Pigeon" (un bel exemple de son humour"), "Quartier du Pavé Neuf" (photo en couleurs des nouvelles banlieues). Pour présenter ces clichés, une petite mascotte attachante guide le lecteur à travers les pages du livre, pointant du doigt les spécificités et détails de chacun, avec des mots simples qui rendent l'histoire des arts visuels accessible.

04/2024

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Histoire de France

Un voyage de Napoléon. 2 avril - 15 août 1808

Ce 2 avril 1808, Napoléon quitte Saint-Cloud et prend la route de Bayonne afin d'y rencontrer la famille royale d'Espagne et régler avec eux – au profit de l'Empire – les problèmes dynastiques de ce pays. La traversée de Saint-Cloud à Bayonne s'effectue à un rythme accéléré et Napoléon,après s'être arrêté quelques jours à Bordeaux,où il est rejoint par l'Impératrice Joséphine, arrive à Bayonne le 14 avril et loge au château de Marrac qu'il a fait acheter, jusqu'au 21 juillet suivant.Dans la nuit du 21 au 22 juillet, il reprend la route en direction de Pau, passe successivement à Tarbes et Auch avant de s'arrêter quelques jours à Toulouse. Et c'est de nouveau une course à travers les départements du Sud-ouest.Montauban, Agen sont visitées. A Bordeaux, il apprend la capitulation de Baylen. Sans attendre,il décide de rentrer à Paris mais ne voulant pas mécontenter les populations des départements de l'Ouest, il décide néanmoins d'en visiter certains. Il passe à Saintes, Rochefort, La Rochelle, Fontenay-le-Comte, Napoléon (Vendée) et s'arrête deux jours et demi à Nantes. Par Angers, Saumur, Tours, Blois et Vendôme, il rejoint Saint-Cloud et assiste le 15 août à Paris aux fêtes données pour la saint Napoléon. Le propos de l'ouvrage est de raconter cette équipée dans les départements de l'Empire. On suit Napoléon pas à pas, dans le quotidien de ce voyage, et presque heure par heure. C'est une reconstitution précise, uniquement basée sur les archives ou les témoignages des contemporains. C'est également l'occasion de percevoir l'état d'esprit des français à l'apogée de l'Empire au moment même où une première lézarde (la capitulation de Baylen) se dessine dans l'édifice impérial. Les réjouissances populaires, l'enthousiasme des villes et des campagnes, les gardes d'honneur, les discours des maires et des préfets forment l'armature de cette étude nouvelle. Dix chapitres composent ce travail suivis d'un appendice qui décrit le passage très rapide Napoléon sur la même route en octobre 1808 et janvier 1809, ainsi que le dernier voyage, triste,qui l'amène à l'île d'Aix d'où il partira pour Sainte-Hélène. Quatre annexes justifient l'étude : l'état des dépenses du service du grand écuyer pour ce voyage, les décrets pris par Napoléon en faveur des villes et des départements traversés ; les gardes d'honneur, formations urbaines paramilitaires qui l'accompagnèrent et enfin une annexe de notices biographiques des personnages rencontrés au long de ces pages. De très nombreuses notes éclairent certains points de la rédaction.

10/2019

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Critique littéraire

Europe N° 1079, mars 2019 : Christian Dotremont

Né en 1922 à Tervuren, dans la périphérie de Bruxelles, Christian Dotremont fut un adolescent révolté qui publia à dix-huit ans son premier livre de poèmes. L'ouvrage fut imprimé peu de temps avant l'invasion de la Belgique parles troupes allemandes. Séjournant à Paris sous l'Occupation, Dotremont participa aux activités du groupe surréaliste "La Main à plume ". C'est à cette époque qu'il rencontra Eluard, Picasso, Magritte et Bachelard Après une brève aventure "surréaliste-révolutionnaire ", il fut en 1948 l'initiateur de CoBrA, groupe international d'art expérimental L'effervescence créatrice, le goût de la spontanéité, ! Mer pour les arts premiers, les arts populaires et l'art brut caractérisèrent ce mouvement qui prit fin en 1951. Cette année-là, au Danemark Dotremont entama un long combat contre la tuberculose Au même moment, il rencontra Bente Wittenburg. Devenue Gloria dans son cure, elle prit place à jamais dans son " entreprise passionnelle de longue haleine ". Au cours de l'hiver 1956, Domont se rendit pour la premier fois en Laponie, s'enfonçant jusqu'au coeur dans la neige L'inspiration nordique illumina dés lors son oeuvre. Il renouvela au fil des années ses lointaines expéditions septentrionales. "Après avoir été un des acteurs principaux de la réflexion d'avant-garde, puis le fondateur d'une peinture nouvelle", a pu dire son ami Yves Bonnefoy " il devint dans ses années de voyage et de demi -solitude un des plus véridiques poètes qui aient alors écrit en français, ajoutant même à l'expression poétique une dimension graphique imprévue encore." Le geste profond de Dotremont avait toujours visé à accéder au réel véritable en brisant les entraves des conventions et des stéréotypes. Son aventure poétique trama au début des années soixante un nouvel élan fécond dans la pratique des logogrammes, dessins de mots et peintures de langage manifestant une unité d'inspiration verbale et graphique En Laponie, ce n'est pas au pinceau, à l'encre noire sur papier blanc. mais dans la neige et la glace que Dotremont traça ses poèmes : "Il m'arrive d'avoir le sentiment, quand je trace un logogramme, d'être un Lapon en traîneau sur la page blanche, et de saluer la nature comme au passage, par la forme même de mon cri ou de mon chant ou des deux tout ensemble ". Dotremont disait aussi : "Il faut voler le feu sans perdre les braises ni les cendres, ni le froid pour lequel on l'allume ni le froid vers lequel il disparaît ". C'est l'intensité bouleversante d'une oeuvre et d'une vie que l'on retrouve dans ce numéro Europe consacré à ce magnifique poète.

03/2019

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Littérature française

ELERELT : L'improbable coalition. Tome 1

Tout à l'heure, Kallimon a voté à distance par l'intermédiaire de son implant civique. Encore une fois, en zilz soucieux de l'intérêt de l'Arkokrasie et des siens, il a voulu reconduire le vieux et vénérable Anzdakremm Pileraz au poste d'Arkokrate, la magistrature suprême et morale de l'Arkokrasie. Mais au cours de cette joute électorale, Anzdakremm risque grandement de ne pas être reconduit. En effet, de manière inédite, inattendue, un volontaire aussi déterminé qu'ambitieux, un candidat protestataire humain s'est présenté, réunissant sur son seul nom, Lomir Dirffel, la quasi-totalité des aspirations humaines, du moins comme le laisse présager les sondages. Si une telle prévision s'avérait juste, Dirffel serait le premier humain titulaire de ce mandat. En effet, suite à la submersion d'Etal-Kontei, deux mouvements populaires antagonistes sont apparus : l'un exigeait le retour, au besoin par la force, des habitants de cette région malheureuse dans le giron de l'Arkokrasie afin de leur permettre de bénéficier au plus vite des bienfaits de la civilisation d'Atelaino. L'autre, recommandait, après les traumatismes de la submersion catastrophique d'Etal-Kontei, de leur en épargner de nouveaux et donc de respecter leurs indépendances, cultures et traditions quand bien même ces us et coutumes pouvaient revêtir quelques atours barbares et primitifs. Si ces deux mouvements idéologiques réunissaient à leurs naissances des citoyens des deux races à parts presque égales, l'inexorable écoulement du temps et la décision brutale de mettre un terme à cette situation inadmissible, fauteuse de guerres, de génocides et autres troubles locaux, les positions se sont lentement radicalisées et malencontreusement ethnicisées. Les humains ont eu une tendance de plus en plus nette à rendre leurs compatriotes zilzo co-responsables collectivement de cette erreur monstrueuse, pourtant objectivement partagée. Lentement, les zilzo solidaires des humains se virent évincés, chassés de ces associations militantes et renvoyés, réduits à leur seule origine raciale, forcément déterminante, coupable collectivement de tous les maux de l'humanité. Au soir de cette journée électorale, Kallimon ne se fait guère d'illusion sur le résultat des scrutins. Assurément, la chambre des députés va changer d'orientation. Quant au mandat d'Arkokrate, soumis au suffrage universel direct, il semble très probable qu'il basculera lui aussi. Comme il advient souvent, le transit de quelques pourcentages autour de la fatidique barre médiane suffira à former une majorité solide et à transformer complètement une ligne politique, un événement susceptible de modifier de fond en comble la vie d'une société pourtant pluriséculaire. Kallimon émerge lentement de ses pensées inquiètes, déprimantes. A quoi bon anticiper un avenir qui s'annonce de toute façon imprévisible et de toute manière compromis ? Que peut-il faire pour en changer le cours ? Est-ce seulement possible ? C'est ce que je me propose de v

07/2015

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Sciences politiques

Ce feu qui brûle encore. Itinéraire d'un enfant du Pays-Haut lorrain

Retour sur les mille vies de Marc Zamichiei, syndicaliste étudiant, dirigeant communiste, conseiller général, responsable mutualiste... Marc Zamichiei est un enfant du Pays-Haut lorrain, issu d'une famille de l'immigration italienne des années 1920 venue trouver du travail dans le bassin minier ferrifère de Briey (54). Il naît à Mont-Bonvilliers en 1948, trois ans après le retour de déportation de son père. Une histoire dans laquelle il n'entre que timidement, à travers des bribes de conversations d'adultes ou le numéro de matricule bleuté sur son avant-bras. Le lycéen de Longwy grandit dans ce territoire symbole de la sidérurgie lorraine où le vote PCF est largement implanté. Il s'éveille à la vie syndicale et politique, en particulier lors de la grève de 1966 contre la fermeture de la mine de Murville à Mont-Bonvillers où est employé son père. L'explosion de Mai 68, c'est à Nancy qu'il la vit, étudiant en Droit et président de l'association générale des étudiants nancéens (UNEF). Militant communiste, il devient secrétaire permanent du comité de ville de Nancy du PCF. En 1973, élu dans le canton minier d'Audun-le-Roman, il est l'un des plus jeunes conseillers généraux de France. En 1979, le nouveau plan acier laisse la Lorraine abasourdie : sa sidérurgie est démantelée, 14 000 emplois condamnés à disparaître. Marc Zamichiei porte, en concertation avec la CGT, les revendications de la corporation minière et les propositions de sauvegarde de cette richesse nationale. C'est à cette époque qu'il rejoint le comité central du PCF, devenant secrétaire de son secteur propagande et communication. Alors que se poursuit la liquidation du bassin minier et sidérurgique lorrain et qu'un sentiment d'abandon gagne les classes populaires, il est un de ceux qui critiquent la ligne politique de son parti et se retrouve exclu du comité central en 1985. Estimant le PCF imperméable au changement, il le quitte avant de s'engager dans une nouvelle aventure qui va durer plus de trente ans : celle de la mutualité, qui renouvelle profondément sa conception de la transformation sociale et de l'engagement militant. Il exerce de nombreuses responsabilités au sein des fédérations mutualistes, des institutions de Sécurité sociale et des organismes de santé et contribue à renouveler la réflexion sur les politiques de protection sociale et de santé. " J'ai plutôt tendance à croire que l'histoire se fait par le bas, écrit-il. (...). A ceux qui doutent qu'un autre monde se fabrique déjà dans ces utopies concrètes, réelles, il faut rappeler que l'homme ne se réalise pas dans le futur mais dans le présent. "

03/2019

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Histoire du sport

Perdants magnifiques. L'art de s'incliner avec panache en 10 portraits

Un hommage très littéraire à ces immenses champions qui, àperdre avec panache, ont conquis plus de gloire qu'en gagnant petitement. Ce qui reste quand on a tout perdu. " Seule la victoire est belle ". L'adage est corroboré par la ferveur des liesses populaires de Juillet 1998 et 2018 que n'aura refroidi en rien le jeu sans panache des Bleus champions du Monde. Perdre signifie tout le contraire. C'est une petite mort, une perte de sens, un effondrement. Mais de cette cruelle loi du sport qui brise des destins et des vies toutes entières, il ressort parfois un souffle qui parcourt le temps et laisse dans les mémoires la trace qui a été déniée dans les palmarès. Pour les vrais amoureux du ballon rond, France-Brésil 98 et France-Croatie 2018 auront forcément été de grands moments. Mais à vrai dire, il n'en reste pas forcément grand-chose. Un peu comme la fin paroxystique du I Will Survive de Hermes House Band, l'hymne enivrant du premier sacre des Bleus, c'était exaltant sur le moment, mais on s'est lassés depuis longtemps de cette ivresse vintage. A l'inverse, nous n'avons rien oublié de Séville 82. La marque est indélébile et à la moindre image, toutes les émotions ressurgissent, intactes : la prise d'antenne crépusculaire de Thierry Rolland, le sourire complice de Monsieur Corver au bourreau Schumacher, la main sans vie de Battiston serrée par Platini en guise de serment, la barre transversale sur la frappe d'Amoros, la volée de Trésor, la joie enfantine de Giresse, l'entrée de Rummenigge. Puis Bossis, héroïque pendant 120 minutes, un genou à terre, alors que Tigana et toute la France pleurent de rage. Par la grâce élégiaque d'une prolongation, d'un déluge, d'un cinquième set défiant la tombée de la nuit ou de larmes exhumées par l'épuisement et la détresse, un perdant peut sans toujours le savoir prendre sa part d'éternité. Raymond Poulidor a compris le premier l'intérêt d'emprunter ce raccourci méritocratique en adoptant un fatalisme débonnaire face à l'enchaînement irréel des coups du sort de juillet. Il y a bien eu des sanglots derrière son masque ensanglanté en 1968 après qu'une moto de presse l'ait renversé et qu'un peloton de charognards déchainés le dépouille de la victoire qu'il tenait enfin. Mais sa faculté à voir les verres cassés à moitié pleins le rendit vite à sa joie d'être Poulidor, fils de métayers devenu riche et adulé comme aucun autre sportif français. " Si j'avais gagné le Tour, on ne parlerait plus de moi " avait-il coutume de dire.

10/2023

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Sports

Les cahiers du football N° 3, juillet-décembre 2019 : Enfance

Voici le troisième opus de la grande revue des Cahiers du football, dont le dossier nous fait retomber en "enfance" : celle des supporters, celle des footballeurs, celles des enfants d'aujourd'hui. 172 pages grand format, 800 grammes de football et d'eau fraîche. Ce numéro va aussi à la rencontre de Stéphane Guivarc'h et Johan Micoud, part dans les années 80 voir un explosif Real-Bayern, survole les terrains populaires de Sao Paulo, revient à Bondy pour l'épilogue de notre feuilleton. Il joue avec des ballons à la mer et de vieux albums, avec les footballeuses pionnières des années folles et même avec des travestis de Cali... Toujours autant de divertissement au programme, avec le roman-photo, les footballégories, les strips de Bastien Vivès, une nouvelle inédite de Jérôme Fansten, des jeux, des chroniques et des surprises. L'aventure de la revue des Cahiers du football se poursuit avec un numéro 3 aussi singulier et audacieux que les précédents. Consacré à l'enfance, son grand dossier en revient au plaisir originel du jeu et du ballon, aux passions premières pour les joueurs et les équipes. 172 pages grand format, belles, riches et amoureuses. Portfolio : Renato Stockler, la terre du football vue du ciel. Le photographe brésilien a saisi les terrains de Sao Paulo à vol d'oiseau. Rencontre : Stéphane Guivarc'h évoque sa Coupe du monde 1998 et celle d'Olivier Giroud, vingt ans après. Enquête : Real-Bayern 1987, une demi-finale de Ligue des champions aussi mémorable que houleuse. Fiction : Pickles, une nouvelle inédite de Jérôme Fansten. Entretien : Johan Micoud nous parle de jeu, de titres, de son retour à Cannes et du football d'aujourd'hui. Galerie : la photographe et artiste militante Mandy collecte les ballons échoués sur les plages pour mettre en scène la pollution des océans. Récit : l'écrivain-journaliste colombien Alberto Salcedo raconte l'épopée d'une équipe de transsexuels. Jeu en triangle : nos trois invités débattent des relations compliquées entre journalisme et communication. Archive : les pionnières oubliées du football féminin des années 1920, saisies par les touchantes photos du fonds Rol. Document : conservés comme des trésors, nos albums Panini renferment des perles. Une sélection de doubles pages très spéciales. Feuilleton : dernier (et émouvant) épisode de notre feuilleton sur l'AS Bondy. Chroniques : L'Ecole du fan par Xavier de la Porte, Jean-Patrick Sacdefiel, Sémantique, L'Eloge funèbre, La Lettre ouverte, L'Objet, Le Foot expliqué à... , les Mots du foot, Le Test, etc. Interludes : roman-photo, footballégories, coloriages. DOSSIER : L'ENFANCE Illustrateur : Eric Giriat La part de l'enfance L'enfance sacrifiée des footballeurs Tactique : jouer comme des enfants Dans la cour, les filles regagnent du terrain Comment les enfants regardent le foot ? La transmission du supportérisme Olive et Tom, manga-football Typologie des enfants-footballeurs Panorama des terrains de jeu

06/2019

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Indépendants

Simenon. Le roman d'une vie

La Belgique, à l'aube du 20e siècle. Le jeune Simenon, ou Sim, est dès ses 15 ans un brillant journaliste à "La Gazette de Liège". Déjà, il nourrit deux passions : l'écriture et les femmes. Il monte à Paris où il côtoie vite artistes et écrivains du Montparnasse nocturne et tombe amoureux de Joséphine Baker. Il rêve d'aventure et de gloire, comme Rouletabille et Tintin. Mais son héros à lui n'aura rien à leur envier : un certain Jules Maigret... Georges Simenon naît en 1905. Il passe son enfance à Liège au sein d'une famille désunie, où sa mère règne en despote. Elle rêve d'un meilleur statut social alors que son père se trouve bien dans sa petite vie et son grand fauteuil. Il fait preuve très tôt de fortes capacités intellectuelles à l'école mais décide d'abandonner ses études à l'âge de quinze ans. C'est en passant devant l'imposant siège de la Gazette de Liège, qu'il tente sa chance. Il rencontre le directeur et lui annonce tout de go qu'il veut être reporter, épaté par son culot, il lui attribue un chronique local, dont font partie les faits divers. Georges n'a que 16 ans, et pas la moindre expérience ni le moindre diplôme mais il apprend rapidement et devient vite indispensable. Fasciné par les femmes, il fait très souvent appel aux services des professionnelles, puis il rencontre une fille drôle, maligne et cultivée, Tigy qui deviendra son épouse. Ambitieux, il se rend à Paris et côtoie le milieu littéraire, qui lui donne la passion de l'écriture. Dès lors, à partir de 1924, il se lance dans la rédaction d'une multitude de romans populaires paraissant sous divers pseudonymes. Le couple va rencontrer Henriette Liberge, rebaptisée Boule, qui les suivra des décennies à la fois amante, bonne à tout faire et conseillère. Octobre 1925, " la revue nègre " défraye la chronique, sa vedette ; Joséphine Baker. Ils vivront une passion dévorante, mais Simenon, bouffi d'orgueil ne supporte pas que Joséphine lui vole la vedette ! Fatigué de Paris, il propose bien des années plus tard de prendre le large et d'acheter un bateau. A bord de l'Ostrogoth, en compagnie de Tygy, Boule et d'Olaf le chien il vont naviguer sur les canaux. Sur un chemin de halage une silhouette vient vers lui en contre-jour : Coiffé d'un feutre, vêtu d'une gabardine, une bouffarde coincée entre les dents. L'inconnu se présente ; Jules Maigret, commissaire à la police judiciaire. " Mon personnage, Le personnage providentiel, je l'ai ... " Entre 1932 et 33, Simenon publie 17 Maigret, traduits et même pour certains adaptés au cinéma. Georges Simenon entre dans l'ère de la fortune et de la gloire.

10/2022

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Musicologie

Playlist. Musique et sexualité

L'ouvrage Playlist : musique et sexualité est constitué de seize essais autonomes, qui explorent tour à tour la musique dans les pratiques sexuelles, et le sexe dans les pratiques musicales. Il se déploie d'une thématique vers l'autre, comme un texte de sociologie de la musique qui virerait insensiblement au texte de musicologie. Quel est aujourd'hui le rôle de la musique dans la vie sexuelle des personnes, la réelle comme la fantasmée ? Quelles sont les représentations de la sexualité dans les oeuvres musicales, celles du répertoire classique comme celles des genres populaires ? Quelle a été, de l'Antiquité à nos jours, la trajectoire historique de ces imbrications ? Comment cette histoire dialogue-t-elle, dans la période contemporaine, avec le devenir marchand de la musique, et avec sa numérisation ? Comment la musique s'insère-t-elle dans l'histoire sonore de la sexualité, ce territoire méconnu des sound studies ? Quelles conséquences cette enquête peut-elle avoir pour repenser les pouvoirs de la musique ? Telles sont les questions que ce livre se propose d'explorer. Chaque chapitre aborde ce vaste domaine à partir d'une entrée singulière, comme une série de variations sur un thème musical, ou une playlist thématique. Ce choix formel fait écho à la diversité des oeuvres concernées : Don Giovanni de Mozart, Tristan et Isolde de Wagner, Lady Macbeth de Chostakovitch sont ainsi revisités, entre autres classiques, tout comme Je t'aime moi non plus de Gainsbourg, L'importante è finire de Mina, ou Erotica de Madonna, entre autres tubes. Plus récemment, la diffusion sur internet d'une music for sex et les dispositifs de recommandation des plateformes de streaming incitent à revisiter la critique adornienne de l'industrie culturelle, les idées de Guy Debord sur les femmes dans la société du spectacle, ou encore l'enquête sur la sexualité de Pasolini dans son film Comizi d'amore. Le livre se veut ainsi à la fois une enquête empirique et une proposition théorique, qui discute avec la musicologie féministe et les queer studies, avec les sciences cognitives de l'écoute et du plaisir, avec la sociologie de la culture et l'histoire culturelle. En envisageant la musique comme un dispositif technique aux usages diversifiés, de la présence anthropomorphe à la "musique d'ameublement" , il esquisse une écologie sonore capable de rendre compte à la fois des logiques du plaisir et de celles de la domination, à commencer par la domination des hommes sur les femmes. Si la musique n'a cessé, au cours de l'histoire, d'énoncer et de faire sentir par les sons l'amour et ses attachements, le désir et ses imaginaires, l'ambition ultime de Playlist est de contribuer à une conception renouvelée des formes temporelles de l'expérience humaine.

09/2022

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Poésie

Paradis perdu ; Paradis reconquis. Edition bilingue français-anglais

Aux côtés de Shakespeare, Milton (1608-1674) est le plus grand poète anglais. Dans les pays anglophones, et tout comme celle de Shakespeare, l'oeuvre de Milton n'a rien d'un simple objet de musée qu'on inspecte et qu'on oublie, mais elle est intégrée à l'existence et à l'éducation de chacun : on grandit avec elle, on vit et pense avec elle. Elle est citée aussi bien par les chercheurs les plus distingués que par les films les plus populaires. En France cette popularité, tôt acquise, fut scellée par la traduction que fit Chateaubriand du Paradis perdu, et dont on ne sortira plus : elle représente aujourd'hui la quasi-totalité des éditions courantes. Le temps des traductions semble s'être figé là. Mais il est difficile de présenter ce libre travail en regard du texte original, et il était donc important de pouvoir donner au public la grande épopée biblique de Milton dans une édition bilingue de référence, préfacée, introduite, annotée, et qui éclairât le sens et les symboles de son drame sacré. Il était également capital de donner à ce Paradis perdu la conclusion avec laquelle l'oeuvre a été conçue. Frappé de cécité, tel un Homère anglais, Milton dicte ses épopées au soir de sa vie : quelques mois avant sa mort le grand homme donne ainsi à l'oeuvre son issue dans le mystérieux et génial Paradis reconquis. Bien qu'il fût impensable de présenter les deux oeuvres l'une sans l'autre, qui n'en font qu'une, ce Paradise Regained, ici publié dans une édition bilingue, était introuvable en France depuis un demi-siècle. Notre édition de ces deux chefs-d'oeuvre bénéficie des traductions, introductions historiques et notes de Pierre Messiaen, l'un des grands anglicistes contemporains, et de Jacques Blondel, le plus grand spécialiste de Milton. L'inclassable pensée religieuse de Milton trouve la singularité de son chemin parmi les déchirures théologico-politiques que traverse l'Angleterre d'un siècle bouleversé. Cette pensée demande qu'on en restitue avec finesse l'axe et les nuances, tout en reliant son génie aux questions de notre temps. Ce dont s'acquitte avec hauteur la préface du père dominicain David Perrin, ancien élève de l'Ecole Normale Supérieure, agrégé et docteur ès Lettres. C'est en Milton que la littérature anglaise construit son classicisme oraculaire et tourmenté, qui nourrira les visions d'un Blake ou la révolution poétique d'un Byron. Tous deux ont vécu comme s'ils étaient quelque greffon du chef-d'oeuvre de l'aède aveugle de Londres. Puissants et terribles, les Paradis de Milton sont certes de ces livres qui marquent à jamais l'histoire, puis la dépassent.

04/2022

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Histoire du cinéma

Demandez le programme ! - Une histoire du cinéma (1894-1930) vue par les programmes des lieux de pro

Comment le cinéma muet était-il vu, en son temps ? Avec cet ouvrage, l'étude de l'expérience des spectateurs s'enrichit d'une analyse détaillée des programmes de cinéma, dans leur contenu et dans leur matérialité. Des feuilles imprimées les plus modestes aux merveilleux livrets du Gaumont-Palace, ces documents témoignent de la culture matérielle de l'époque (1894-1930). Comment le cinéma muet était-il vu, en son temps ? Avec cet ouvrage, l'étude de l'expérience des spectateurs s'enrichit d'une analyse détaillée des programmes de cinéma, dans leur contenu et dans leur matérialité. Des feuilles imprimées les plus modestes aux merveilleux livrets en couleurs du Gaumont-Palace, de l'affichette foraine à la brochure de style Art déco, ces documents témoignent de la culture matérielle de l'époque (1894-1930). Au croisement des arts visuels et des techniques publicitaires, ils reflètent l'extraordinaire variété du cinéma des premiers temps, tenu pour un spectacle vivant, une " attraction ". Les projections, avec leurs accompagnements musicaux, prenaient place en ville ou au dehors des centres urbains. Outre les salles des quartiers populaires ou bourgeois, les programmes évoquent d'autres intérieurs : baraque foraine, café-concert, music-hall, salle de théâtre. Ces sources d'une exceptionnelle qualité, jusqu'ici peu étudiées, font apparaître en creux le public de l'époque du muet, ses sensations et ses émotions, individuelles et collectives. SOMMAIRE Rencontre entre Jean-Jacques Meusy et Laurent Véray Retour aux sources Laurent Mannoni Essai de typologie des programmes de cinéma, 1896-1930 laurent guido - Du music-hall au cinéma, le programme comme modèle spectaculaire Jean-Marc Leveratto, Fabrice Montebello, Pierre Stotzky Le café et la mise en forme du loisir cinématographique dans la France de la Belle Epoque Francesca Bozzano Pierre Sarrus et les tournées du Ciné-Phono-Scène dans le Sud-Ouest de la France durant les années 1910-1920 Martin Barnier Les sons du cinéma muet à travers les programmes. Des séances de forains jusqu'aux salles spécialisées Laurent le Forestier Marchés et modes de consommation des films en France : considérations méthodologiques Laurent Véray Montrer des films en 1915-1918. Etudes de deux séries de programmes caractéristiques du spectacle cinématographique de la période Emmanuelle Champomier Les programmes des salles de cinéma dans la presse française des origines à la fin des années 1920 François de la Bretèque Loin de Paris : les programmes dans la presse quotidienne régionale et les hebdomadaires locaux de l'Hérault entre 1908 et 1920 Annie Fee L'évolution artistique du cinéma à travers les programmes et les cartons d'invitation des années 1920 Carole Aurouet La " revue-programme " du Studio 28 : une archive de salle et un manifeste surréaliste pyrogène Maurice Gianati Un ciné-club d'avant-garde dans les années 1930 : les Amis de l'Art cinématographique de Liège

01/2024

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Critique littéraire

Lope de Vega

Né à Madrid le 25 novembre 1562, Lope de Vega, fruit de turbulences conjugales, garda pour ce père repenti, maître brodeur talentueux, une vive admiration. Enfant précoce, élève doué, il suit des études intermittentes, interrompues d'abord pour les yeux d'une belle, puis pour une première expédition militaire au retour de laquelle, il côtoie les milieux littéraires madrilènes et rencontre Elena Osorio, issue d'une famille de théâtreux célèbres. Emprisonné et condamné au bannissement en raison de ses tapageuses amours, Lope les décrit assez fidèlement semble-t-il, dans son grand roman dramatique, La Dorotea. A peine sorti de prison, il s'éprend de la noble Isabel de Urbina, qu'il enlève, épouse et emmène en exil à Valence, non sans l'avoir abandonnée au lendemain de ses noces, pour s'engager dans la célèbre expédition militaire décidée contre l'Angleterre : l'Invincible Armada. Sous son influence, une ère poétique brillante se met en place à Valence. Lope de Vega y redécouvre les " romances ", ces compositions poétiques chantées qu'il remet au goût du jour. Il y jouit aussi de ses premiers grands succès au théâtre. Après un séjour à Tolède, il s'installe auprès du duc d'Albe où il écrit un roman pastoral L'Arcadie. Bientôt veuf et endeuillé par la mort de ses deux filles, il retourne à Madrid et, tel le phénix, recommence une nouvelle vie ; secrétaire du duc de Sarria, il poursuit son œuvre littéraire (romans, poésies, et théâtre) et se remarie, ce qui ne l'empêche pas de s'adonner à d'autres amours moins vertueuses avec une jeune et belle comédienne Micaela de Lujàn. Maître de la vie littéraire madrilène, Lope de Vega fréquente les Académies et multiplie les créations de toutes sortes. Mais, à cinquante-et-un ans, cet ardent sensuel traverse une crise mystique et se fait ordonner prêtre. Il cède alors à une nouvelle et ultime passion, une femme mariée : doña Marta de Nevares Santoyo, surnommée Amarilis, dont il aura une fille, Antonia Clara. En 1632, Amarilis meurt et sa fille est enlevée deux ans plus tard. Lope ne la reverra jamais et le nom du ravisseur ne sera jamais dévoilé. Vengeance d'une vie trop consacrée aux femmes ? Beaucoup épilogueront. Le 16 août 1635, ce grand poète et homme de théâtre s'éteindra après avoir achevé un copieux poème, Le siècle d'Or. Lope de Vega, devenu de son temps un véritable mythe vivant, reste actuellement avec Calderon l'un des dramaturges les plus populaires en Espagne. Il fut un temps oublié en dépit d'une œuvre considérable : plus de 1500 pièces de théâtre recensées, environ 500 textes retrouvés et d'une vie fort riche en aventures.

02/2002

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Thèmes picturaux

Le sport dans l'art

LE LIVRE De l'activité ludique à la compétition, le sport sous toutes ses variations est constitutif de nos sociétés occidentales. Aussi est-il peu surprenant que, dès l'époque antique, les artistes se soient saisis de ce motif. Posant au corps le défi de ses limites physiques, le sport est aussi, à sa manière une gageure plastique - ô combien stimulante et féconde. Comment figurer des gestes à la fois singuliers et multiples, restituer la dynamique des mouvements, représenter la tension de l'effort, l'élan du dépassement ... A la lumière d'une vaste approche chronologique, de l'Antiquité à nos jours, cette somme, richement illustrée, envisage autant une étude des esthétiques suscitées ou convoquées par le sport qu'une histoire culturelle de la pratique sportive à travers ses images les plus fameuses, mais aussi sous l'éclairage d'une iconographie moins connue. Des lutteurs athéniens aux sprinteuses contemporaines - en passant par les tournois de chevalerie, la chasse, les jeux de balles, l'escrime, l'équitation, le tir à l'arc, la boxe, le patinage, le tennis, le cyclisme, le football, sans oublier la natation, l'alpinisme, le cricket et les courses automobiles -, c'est une vision inédite du sport qui est proposée au lecteur. Démonstration de prestige, longtemps apanage des élites, l'activité sportive a gagné progressivement les milieux populaires jusqu'à devenir à l'époque moderne une voie d'émancipation, associée à un large mouvement de démocratisation, alors que se précisent les modalités compétitives (championnats, concours, jeux Olympiques) et la recherche toujours plus poussée de la performance. De la statuaire grecque au manga, les artistes témoignent avec une inventivité sans cesse renouvelée de plus de deux millénaires d'une épopée sportive passionnante. LES AUTEURS Yann Descamps est docteur en études nord-américaines de l'université Sorbonne Nouvelle - Paris 3, maître de conférences en histoire du sport de l'université Bourgogne Franche-Comté et membre du laboratoire C3S (Culture, Sport, Santé, Société). Georges Vigarello, diplômé de l'Ecole normale supérieure d'éducation physique, agrégé de philosophie, directeur d'études à l'Ecole des hautes études en sciences sociales, membre de l'Institut universitaire de France, ancien président du conseil scientifique de la Bibliothèque nationale de France (2000-2008), il est l'un des pionniers de l'histoire du corps et de celle des apparences auxquelles il a consacré de nombreux ouvrages. Aux côtés d'Alain Corbin et de Jean-Jacques Courtine, il a notamment dirigé au Seuil, Histoire de la virilité (2011), Histoire du corps (2005-2006) et Histoire des émotions (2016-2017). Avec les contributions de Véronique Dasen, Antonella Fenech, Julie Gaucher, Sébastien Nadot, Nicole Pellegrin, Jean-Paul Thuillier et Serge Vaucelle.

04/2024

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Histoire internationale

Les grands procès du XXe siècle

Il existe nombreux recueils réunissant les procès à sensation de telle ou telle grande période de l'histoire. Le propos de ce livre est tout différent. Son originalité est de montrer le lien et la continuité entre les différentes affaires judiciaires évoquées et de raconter à travers elles l'histoire du XXe siècle. Treize procès ont été sélectionnés dans le but d'apporter au lecteur un éclairage singulier sur la vie politique et sociale de cette époque, de la première à la seconde Guerre mondiale, puis de cette dernière à la guerre d'Algérie. De 1914, avec le procès Henriette Caillaux, lever de rideau spectaculaire sur le siècle, à 1960 avec le procès des barricades, qui saisit l'Algérie à un moment-clé de cette guerre, où les rapports entre les forces en présence se préparent à basculer et où la légitimité va changer de camp. Les procès sont autant de fenêtres sur l'histoire, mais aussi une plongée au coeur d'un drame intime, le drame de celui ou de celle dont le sort se joue dans le prétoire. C'est sa voix que l'auteur a d'abord cherché à entendre, étonnamment restituée grâce à la trace laissée par les sténographies des débats judiciaires. Celle de Pierre Mendès France était jusqu'à aujourd'hui inédite : pour la première fois, on entend l'ancien ministre du Front populaire clamer son innocence devant le tribunal militaire de Clermont-Ferrand face à l'accusation de désertion portée contre lui. D'autres par leur personnalité dérangeante impriment leur marque au procès, comme Laval ou même comme Petiot, qui ont marqué de leur fougue et de leur désordre le cours des débats. Des femmes criminelles, aux motivations parfois insondables, telles les soeurs Papin, figurent-elles aussi au banc des accusés. Des procès d'Henriette Caillaux et Violette Nozière, à ceux d'Alexandre Stavisky et Victor Kravchenko, on est ici au carrefour de l'individuel et du collectif, et par là au coeur des enjeux de l'époque. La violence non seulement verbale mais physique de la vie politique, la vigueur des extrémismes, traversent les affaires du début du siècle, dans lesquels l'Action Française pèse de tout son poids, portée par la figure emblématique de Léon Daudet. De cette violence, la France de Vichy sera en partie l'héritière, illustrée ici par quatre procès particulièrement révélateurs. Des années 1920 et 1930 aux heures de l'après-guerre, la forte présence de l'influence communiste, la gloire dont le parti est auréolé grâce à la Résistance, expliquent l'aveuglement des intellectuels les plus éminents qui, lors du procès Kravchenko, refusent d'ouvrir les yeux sur les atrocités du régime stalinien. La guerre d'Algérie, qui marque pour la France la fin tragique de la décolonisation, est illustrée par deux procès mettant en scène le rôle des différents protagonistes du conflit, des rebelles algériens aux porteurs de valises, et des activistes de l'Algérie française à une partie de l'armée. Suivre ces treize procès permet aussi au lecteur de porter un regard cru sur le fonctionnement de la Justice en temps de crise et d'observer les liens souvent équivoques que celle-ci entretient avec le pouvoir central. Présumée indépendante et impartiale, supérieure et équitable, elle se révèle perméable à l'air du temps comme aux pressions politiques, et ainsi conforme à une réalité qui garde une actualité immuable.

10/2016