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Reconnaissances. Antelme, Blanchot, Deleuze

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Pléiades

Oeuvres romanesques complètes. Coffret en 2 volumes

Cela commence bien pour Vian, l'écrivain. Queneau aime Vercoquin et le plancton. Gallimard accepte ce premier roman puis un deuxième, L'Ecume des jours. Sartre reçoit l'auteur aux Temps modernes, où paraîtront ses Chroniques du Menteur. J'irai cracher sur vos tombes fait scandale – un vrai scandale, du premier coup, celui que tant d'artistes attendent en vain toute leur vie... Et pourtant, cela ne prend pas. Les seuls romans de Vian qui connaissent le succès de son vivant sont ceux qu'il signe Sullivan. Les autres ne trouvent pas leur public. Le dernier, L'Arrache-coeur, sept ans à peine après Vercoquin, est un ultime échec. Vian en conclut que sa destinée ne sera pas littéraire. Il renonce au roman. Sa célébrité est alors à son comble, pour d'autres raisons. "Oh ! je fais dans pas mal de choses, n'adjudant ; ingénieur, auteur, traducteur, musicien, journaliste, interprète, jazzologue, et maintenant directeur artistique d'une maison de disques. — Ouais... je vois..." répond l'adjudant, "bon à tout, bon à rien..." Le personnage de Vian – trompinette, tourniquette et cor à gidouille – prend beaucoup de place, il est vrai, jusqu'à masquer en partie son oeuvre. Résultat : au lendemain de sa mort prématurée, la plupart de ses livres "littéraires" sont introuvables. Le succès viendra plus tard, au rythme des rééditions posthumes, et il sera accompagné d'une certaine reconnaissance. Mais prend-on vraiment l'écrivain au sérieux ? L'imaginaire de Vian déconcertait ses contemporains. On a parfois l'impression, aujourd'hui, que son humour embarrasse les nôtres. C'est ainsi ; Vian trouvait le sérieux risible et voyait dans le rire une chose sérieuse. Dans son arbre généalogique littéraire figurent les noms de Rabelais, Swift, Carroll, Jarry, Queneau. Cette édition réunit les romans, les nouvelles et les scénarios de Boris Vian, ainsi qu'un choix de textes brefs qui, bien que non fictionnels (encore que certaines chroniques soient fort "romancées"), éclairent son univers imaginaire. Précisément, à quoi ressemble-t-il, cet univers ? A un monde parallèle au nôtre et communiquant avec lui, doté de son langage propre, irréductible aux catégories convenues (fantastique, science-fiction), aussi contrasté que le désert à rayures de L'Automne à Pékin, mais concerté, cohérent, à la fois poétique et réel : "l'histoire est entièrement vraie, puisque je l'ai imaginée d'un bout à l'autre. Sa réalisation matérielle proprement dite consiste essentiellement en une projection de la réalité en atmosphère biaise et chauffée, sur un plan de référence irrégulièrement ondulé et présentant de la distorsion." Langage d'ingénieur, mais il cache une définition du récit poétique, au service de thèmes graves – la difficulté d'être, l'usure de toute chose, l'angoisse de la mort – qui chez Vian sont transfigurés par la magie du rêve.

01/2020

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Art contemporain

Pierrette Bloch. Une collection

Du 13 février au 6 juin 2021 le musée Fabre met à l'honneur trois artistes contemporains dont les oeuvres, toiles et dessins, ont récemment rejoint les collections du musée. Ils sont à découvrir dans trois espaces distincts du parcours permanent Issus de trois générations différentes, Pierrette Bloch, André-Pierre Arnal et Stéphane Bordarier se sont tous trois intéressés à la matérialité de la peinture, élaborant de nouvelles techniques picturales mises au coeur de leur pratique. Si Pierrette Bloch fait gouter la peinture, point après point, sur le papier ou sur la toile disposée à l'horizontal, noue consciencieusement le crin, inscrit de larges traces blanches au pastel, André-Pierre Arnal plie, froisse, ficèle la toile, colle et décolle le papier. Stéphane Bordarier développe quant à lui une technique picturale qui se rapproche de celle de la fresque, dans laquelle la couleur est prise dans la colle encore humide, induisant l'urgence du geste. Peintre et sculptrice française. Evoluant depuis les années 1950 vers une pratique abstraite, l'oeuvre de Pierrette Bloch, en dehors de toute catégorie esthétique, joue sur le rythme, l'ambivalence entre le plein et le vide, le contraste entre le noir et le blanc. Subtile, elle se décline par séries, avec une économie de moyens, à partir de la répétition de formes élémentaires – le point, les entrelacs, l'écriture – et de couleurs quasi absentes. Elle éprouve ses premières émotions artistiques en 1939, devant les chefs-d'oeuvre du musée du Prado exposés à Genève. C'est justement en Suisse que, fuyant la France occupée, elle se réfugie avec ses parents en 1940. Elle se plonge dans la lecture, source d'inspiration fondamentale, et assiste à des conférences d'histoire de l'art, notamment celle de René Huyghe sur la ligne, qui la conduit à s'interroger sur les relations qu'entretient le dessin avec le temps et l'écriture. A la fin de la guerre, de retour à Paris, elle suit les cours des peintres Jean Souverbie (1891-1981) et André Lhote (1885-1962) ; en 1949, elle est la première élève d'Henri Goetz (1909-1989), qui délaisse alors le surréalisme au profit de l'abstraction. Elle fait la connaissance de Colette et Pierre Soulages (1919), devenus des amis intimes. Influencées par celui-ci et Nicolas de Staël, ses premières peintures abstraites, à la texture épaisse, sont structurées par un système de grille, caractéristique des oeuvres picturales d'après-guerre. Les années 1950 correspondent au début de sa reconnaissance : elle participe au Salon des réalités nouvelles (1950), dédié à l'abstraction depuis l'après-guerre ; dès l'année suivante ont lieu ses premières expositions personnelles en France et aux Etats Unis, où elle séjourne régulièrement.

02/2021

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Littérature française

Monologue à ma psy

On m'a demandé un jour si ma psy était bonne.J'ai répondu avec un sourire narquois : Oui.Ai-je une révélation dans ma vie ?Oui, elle !C'est le genre de femme un peu MILV : Mother I Would Like to Love, d'une sensualité exacerbée qui se touche perpétuellement une partie du corps.Au début, tout allait à merveille, je faisais la tronche, elle me parlait, j'écoutais d'une oreille inattentive, elle me renvoyait mes bâillements en pleine face, une pure relation épanouissante ! Elle se nourrissait de la narration de ma dépression et, tentait de m'en relever.Puis, en 48h, j'ai retrouvé mon neurone qui s'était carapaté aux confins de mon esprit embué!J'ai recouvert mon sourire, mes mots, ma joie débordante, mon égo, j'ai redécouvert une autre Vanessa, version 2.0.Et, là ça a un peu dérivé, bien malgré moi, j'ai fait un transfert sur ma psy.Il a été comme un tsunami pour mon coeur et mon esprit, .J'ai commencé par me demander comment elle se comportait dans sa vraie vie, j'ai commencé à la voir comme un être humain et plus comme MA thérapeute.C'est à ce moment crucial que les choses ses ont légèrement corsées, car j'ai commencé à la harceler de messages puis de questions personnelles, intimes, intimistes. Elle a mis le haut là directement.Elle m'a purement et simplement abandonnée à moi-même avec la multitude de questions qui me martelaient l'esprit.Puis, ma reconnaissance vis à vis d'elle fut telle, que j'ai voulu la dessiner, elle a du s'imaginer que j'allais diffuser son portrait sur la toile avec marqué WANTED en grosses lettres rouges au-dessous.J'ai alors cru que j'étais vraiment éprise d'elle, tu commences à te faire des petits films, un subtil mélange du film Adèle sans les scènes osées et de 50 nuances de Grey, mais en plus léger et intellectualisé. Quoi ?je suis mère et penser ainsi ne se fait pas ?Ah parce que tu crois que j'ai décidé d'où allait se diriger mon esprit fantasque ? Enfin, grosse dégringolade, j'ai débuté mon Monologue à ma psy.Elle a purement et simplement bloqué mon numéro de téléphone.Trop d'interférences ! Je lui ai tellement écrit de messages qui restaient lettre morte, que j'ai décidé d'en faire une nouvelle.Comme quoi, consulter, peut devenir révélateur, cela m'a permis de devenir une pseudo néophyte écrivaine en maturation.Alors, je n'aurais qu'un mot : vas consulter il n peut en ressortir que le meilleur de toi-même, et ensuite tu n'es pas obligé(e) de tomber éperdument amoureux(se) de ta psy..ou peut-être que si..qui sait ?

03/2018

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Beaux arts

Geneviève Asse

Figure majeure de la peinture française après la Seconde Guerre mondiale, Geneviève Asse a bâti son oeuvre à l'écart des modes. Peintre de la lumière et de l'espace révélés par sa Bretagne natale, elle adopte le bleu, couleur emblématique de sa palette. Elle décline depuis plus de soixante ans le "bleu Asse" qui "prend tout ce qui passe", et joue d'une infinité de valeurs dans ses vues maritimes inspirées par la presqu'île familière de Rhuys et l'Ile aux Moines où elle achète une maison en 1987. L'auteur, qui connaît bien l'artiste née à Vannes en 1923, nous fait pénétrer dans son univers et nous la fait suivre tout au long d'un parcours de vie très riche. Geneviève Asse passe son enfance dans le golfe du Morbihan avec la mer pour ligne d'horizon, ancrage de sa peinture. A Paris, en pleine Occupation, elle suit les cours à l'école nationale des arts décoratifs et s'engage fin 1944 dans la 1re DB comme conductrice ambulancière. De Belfort à Berlin elle participe à la campagne d'Alsace et d'Allemagne et prend part à l'évacuation du camp de Terezin. Après la guerre, elle dessine pour les maisons de tissus Bianchini Ferrier, Paquin. Liée d'amitié avec l'industriel et collectionneur Jean Bouret, elle rencontre par son intermédiaire Nicolas de Staël et Beckett, qui deviendra un ami fidèle, tout comme Bram Van Velde. Elle côtoie Poliakoff, Lanskoy, Charchoune, Geer Van Velde. Aux peintures blanches inspirées par la lumière du midi à la suite d'un séjour en Catalogne, succèdent dans les années 1970 des compositions en hauteur structurées par des lignes verticales ou horizontales suggérant des portes ou des fenêtres, "un fil tendu en équilibre", qu'elle reprend dans ses gravures. A partir des années 1980, le bleu envahit la toile et absorbe le vide. Une ligne de démarcation, blanche, rouge à la fin des années 1990, divise la surface pour des symétries décalées. La série "Stèles" (hommage à Victor Ségalen) est donnée en 2012 par l'artiste au musée national d'art moderne venant compléter les achats de l'Etat commencés dès 1955 et enrichir les donations de l'artiste au Centre Pompidou. Geneviève Asse a réalisé plusieurs commandes de vitraux à la cathédrale de Saint-Dié (1988) et à la Collégiale de Lamballe (1996). Plusieurs rétrospectives lui ont été consacrées : au musée de Reims, au musée d'art moderne de la Ville de Paris et récemment au musée de Rouen en 2009-2010. De nombreuses expositions dans les galeries Claude Bernard, Jan Krugier, Ditesheim et Maffei, Marwan Hoss, contribuent à sa reconnaissance internationale. A l'occasion de son 90e anniversaire, les musées de Montpellier, Vannes et le Centre Pompidou lui ont rendu hommage.

05/2015

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Récits de voyage

Les croisières citroën. 2 volumes : La croisère blanche ; La première traversée du Sahara en autochenille

La première traversée du Sahara en autochenille Ariane Audouin-Dubreuil livre le récit passionnant de la première traversée du Sahara en automobile, depuis les premiers essais en 1921, les missions de reconnaissance et de ravitaillement de Kidal à Tin-Zaouaten au nord du Soudan, jusqu'à l'accomplissement réussi de l'expédition en 1923 lorsque les autochenilles Citroën franchissent le Tidikelt, le Mouydir, les gorges de l'Arak, le Hoggar, le Tanezrouft et le désert soudanais avant de rallier Tombouctou, vingt jours seulement après le départ de Touggourt. L'auteur restitue dans toute sa réalité cette épopée saharienne grâce aux archives inédites léguées par son père : carnets de route, photographies, illustrations, cartes, correspondances, objets divers. Elle évoque les conditions extrêmes de l'expédition, les passages rendus dangereux par la présence dans certains secteurs de rezzi marocains et libyens, ainsi que les buts précis de la mission : établir une liaison nord sud entre l'Algérie et l'Afrique occidentale en créant une piste automobile, étudier une route aérienne avec des postes d'escale et des terrains d'atterrissage, tracer une route pour un chemin de fer transsaharien, rendre compte des conditions de vie des peuples du désert. La Croisière blanche (juillet 1934-octobre 1934) fut le quatrième raid automobile Citroën organisé par Charles Bedaux au Canada. Compte tenu des résultats médiatiques obtenus grâce aux succès de la Croisière noire et de la Croisière jaune, André Citroën est tenté de renouveler un exploit comparable sur le continent américain. Cinq Citroën type P 17 sont lancées dans une traversée du nord-ouest du Canada à partir d'Edmonton, capitale de l'Alberta. L'expédition part le 6 juillet 1934. Se lançant à l'assaut des Montagnes Rocheuses, elle rencontre très rapidement des difficultés imprévues et insurmontables dues aux pluies diluviennes, aux glissements de terrain et à la boue qui s'ensuit. Le 17 juillet, la Bedaux Sub Arctic Expedition arrive à Fort Saint-John ; le 11 août, deux des autochenilles sombrent dans le passage de la Halfway river. Le 13 août, le radeau de l'expédition chargé d'une automobile part à la dérive ; les deux autres doivent être abandonnées, l'expédition continue alors à cheval. Début septembre, les zones non cartographiées de la Colombie britannique sont atteintes ; à la fin de ce même mois, Charles Bedaux est contraint d'abandonner l'objectif de Telegraph Creek (sur l'océan Pacifique), les tempêtes de neige et les chevaux malades empêchant toute progression. L'expédition fait alors demi-tour et sera de retour à Edmonton par la Canadian Pacific Railway le 23 octobre 1934. Même si elle ne connaîtra pas le succès escompté, la Croisière blanche reste une aventure exceptionnelle.

11/2010

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Esotérisme

Histoire de la Grande Loge Nationale Indépendante et Régulière pour la France. et Les Colonies Françaises 1899 - 1940 2021

Dans le tome I Francis Delon s'appuie essentiellement sur des sources inédites, et retrace l'histoire qui a conduit à la création de la Grande Loge Nationale Indépendante et Régulière pour la France et les Colonies Françaises (l'actuelle Grande Loge Nationale Française) et au rétablissement de la régularité maçonnique selon la maçonnerie anglo-saxonne. Il retrace ainsi les tentatives de créer, au sein d'une maçonnerie française quelque peu anticléricale et progressiste, des loges apolitiques et symboliques, d'abord à la Grande Loge de France en 1899 avec l'atelier anglophone Anglo-Saxon n° 343, puis, à partir de 1910, au Grand Orient de France avec le réveil du Régime Ecossais Rectifié grâce à l'appui du Grand Prieuré d'Helvétie qui en était l'unique dépositaire. Les difficultés rencontrées par ce rite, en raison de son message " évangélique ", et l'hostilité des dirigeants de l'obédience conduisirent alors Le Centre des Amis, à l'automne 1913, à s'ériger en une Grande Loge souveraine. Celle-ci fut aussitôt reconnue par la Grande Loge Unie d'Angleterre qui souhaitait le rétablissement d'une franc-maçonnerie régulière en France. Affaiblie par des divisions internes et la mobilisation d'une majorité de ses membres lors de la première guerre mondiale, elle échappa à une disparition prévisible en accueillant les loges militaires constituées par des francs-maçons anglophones servant dans les régiments de l'Empire britannique. Le tome II met d'abord l'accent sur l'échec du projet initial de grande loge francophone traditionnelle en raison de la marginalisation progressive des francs-maçons du Rite Rectifié consécutive : au désaveu du Grand Prieuré Indépendant d'Helvétie ; au départ de loges ; à l'impossibilité de rallier les courants spiritualistes de Memphis-Misraïm et du martinisme. L'incompréhension voire l'hostilité des membres britanniques les empêcha également de créer un second atelier rectifié parisien ainsi que d'accueillir Camille Savoire et son Grand Prieuré des Gaules et de participer ainsi la réunification de l'Ordre Rectifié en raison de la séparation existant dans la maçonnerie anglaise entre les ateliers symboliques et les hauts grades. La Grande Loge Nationale Indépendante et Régulière devient alors une obédience de type anglo-saxonne à la position originale au sein de la franc-maçonnerie française avec des travaux uniquement rituels, des loges d'instruction et de recherche pour une interprétation du fait maçonnique appréhendée sous l'angle de son histoire. Elle bénéficia alors d'une reconnaissance internationale auprès des grandes loges de l'Empire britannique grâce notamment à la promulgation, par la Grande Loge Unie d'Angleterre, des Basic Principles en 1929, complétés en 1938 par les Aims and Relationships of the Craft rédigés conjointement avec les grandes loges d'Irlande et d'Ecosse

09/2021

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Poésie

Louange du lieu et autres poèmes (1949-1970)

De Lorine Niedecker (1903-1970) William Carlos Williams disait qu'elle était « l'Emily Dickinson de notre époque ». Il y a en effet des raisons de rapprocher ces deux auteurs, même si les circonstances historiques et sociales les séparent et éloignent la teneur de leurs oeuvres. Mais la vie de Lorine, essentiellement cantonnée dans son Wisconsin natal qui va nourrir tout son travail, la discrétion de sa carrière littéraire et la singularité de sa poésie qui va être tardivement mais puissamment reconnue sont à l'image de ce qui est arrivé à l'oeuvre et à la personne d'Emily Dickinson. Elle fait désormais l'objet d'études et soutiens universitaires, elle est à son tour devenue une figure majeure du paysage poétique américain. Ce livre, le premier en français, a retenu, autour du titre emblématique Louange du Lieu (1968), l'intégralité de sa poésie des 15 dernières années de sa vie ; seule a été écartée une quinzaine de petits poèmes de circonstance dont l'intérêt nous a paru secondaire, ou qui faisaient doublon. Née en 1903, elle a 26 ans quand éclate la grande crise de 29 qui va détruire son premier mariage et emporter toute l'économie familiale. Elle devra souvent accomplir des tâches subalternes pour subvenir à ses besoins. Elle est et restera toujours sensible aux situations d'injustice sociale, en cela proche des luttes démocratiques traditionnellement bien ancrées dans le Wisconsin. Cela correspond également, dans ses premières années de poésie, à une certaine filiation au surréalisme, notamment dans sa veine militante. À cette même époque – les années 30 – elle noue une relation étroite puis longue, épistolaire et complexe avec Louis Zukofsky. Même si elle n'est pas une pure objectiviste, ce lien et cet échange continu jusqu'à la fin de sa vie vont orienter et colorer sa vision et le développement de sa poésie Enfin, et ce n'est pas la moindre marque de sa singularité, sa longue amitié et correspondance avec Cid Corman qui vit au Japon ainsi qu'un attrait stylistique pour les formes brèves vont inscrire au fil des ans son écriture sur une pente souvent « haïkisante ». Ces sources diverses, pas toujours confluentes (surréalisme et objectivisme, politique, histoire et haïku) font toute l'originalité d'une oeuvre par ailleurs dédiée au paysage, à son évolution, à ses effets sur la vie de tous les jours. Ainsi cette écriture noue-t-elle constamment des tensions antinomiques : à la fois lyrique, objective, économique, toujours localisée et souvent d'actualité, elle est une des rares à savoir faire tenir ensemble tant d'élans contraires. Ceux qui aujourd'hui travaillent à sa reconnaissance ont raison de la compter parmi les plus grandes.

11/2012

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Pléiades

Oeuvres romanesques complètes. Tome 2

Cela commence bien pour Vian, l'écrivain. Queneau aime Vercoquin et le plancton. Gallimard accepte ce premier roman puis un deuxième, L'Écume des jours. Sartre reçoit l'auteur aux Temps modernes, où paraîtront ses Chroniques du Menteur. J'irai cracher sur vos tombes fait scandale - un vrai scandale, du premier coup, celui que tant d'artistes attendent en vain toute leur vie. Et pourtant, cela ne prend pas. Les seuls romans de Vian qui connaissent le succès de son vivant sont ceux qu'il signe Sullivan. Les autres ne trouvent pas leur public. Le dernier, L'Arrache-cour, sept ans à peine après Vercoquin, est un ultime échec. Vian en conclut que sa destinée ne sera pas littéraire. Il renonce au roman. Sa célébrité est alors à son comble, pour d'autres raisons. « Oh ! je fais dans pas mal de choses, n'adjudant ; ingénieur, auteur, traducteur, musicien, journaliste, interprète, jazzologue, et maintenant directeur artistique d'une maison de disques. - Ouais. je vois » répond l'adjudant, « bon à tout, bon à rien ». Le personnage de Vian - trompinette, tourniquette et cor à gidouille - prend beaucoup de place, il est vrai, jusqu'à masquer en partie son ouvre. Résultat : au lendemain de sa mort prématurée, la plupart de ses livres « littéraires » sont introuvables. Le succès viendra plus tard, au rythme des rééditions posthumes, et il sera accompagné d'une certaine reconnaissance. Mais prend-on vraiment l'écrivain au sérieux ? L'imaginaire de Vian déconcertait ses contemporains. On a parfois l'impression, aujourd'hui, que son humour embarrasse les nôtres. C'est ainsi ; Vian trouvait le sérieux risible et voyait dans le rire une chose sérieuse. Dans son arbre généalogique littéraire figurent les noms de Rabelais, Swift, Carroll, Jarry, Queneau. Cette édition réunit les romans, les nouvelles et les scénarios de Boris Vian, ainsi qu'un choix de textes brefs qui, bien que non fictionnels (encore que certaines chroniques soient fort « romancées »), éclairent son univers imaginaire. Précisément, à quoi ressemble-t-il, cet univers ? À un monde parallèle au nôtre et communiquant avec lui, doté de son langage propre, irréductible aux catégories convenues (fantastique, science-fiction), aussi contrasté que le désert à rayures de L'Automne à Pékin, mais concerté, cohérent, à la fois poétique et réel : « l'histoire est entièrement vraie, puisque je l'ai imaginée d'un bout à l'autre. Sa réalisation matérielle proprement dite consiste essentiellement en une projection de la réalité en atmosphère biaise et chauffée, sur un plan de référence irrégulièrement ondulé et présentant de la distorsion ». Langage d'ingénieur, mais il cache une définition du récit poétique, au service de thèmes graves - la difficulté d'être, l'usure de toute chose, l'angoisse de la mort - qui chez Vian sont transfigurés par la magie du rêve.

10/2010

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Pléiades

Oeuvres romanesques complètes. Tome 1

Cela commence bien pour Vian, l'écrivain. Queneau aime Vercoquin et le plancton. Gallimard accepte ce premier roman puis un deuxième, L'Écume des jours. Sartre reçoit l'auteur aux Temps modernes, où paraîtront ses Chroniques du Menteur. J'irai cracher sur vos tombes fait scandale - un vrai scandale, du premier coup, celui que tant d'artistes attendent en vain toute leur vie. Et pourtant, cela ne prend pas. Les seuls romans de Vian qui connaissent le succès de son vivant sont ceux qu'il signe Sullivan. Les autres ne trouvent pas leur public. Le dernier, L'Arrache-cour, sept ans à peine après Vercoquin, est un ultime échec. Vian en conclut que sa destinée ne sera pas littéraire. Il renonce au roman. Sa célébrité est alors à son comble, pour d'autres raisons. «Oh ! je fais dans pas mal de choses, n'adjudant ; ingénieur, auteur, traducteur, musicien, journaliste, interprète, jazzologue, et maintenant directeur artistique d'une maison de disques. - Ouais. je vois.» répond l'adjudant, «bon à tout, bon à rien.» Le personnage de Vian - trompinette, tourniquette et cor à gidouille - prend beaucoup de place, il est vrai, jusqu'à masquer en partie son ouvre. Résultat : au lendemain de sa mort prématurée, la plupart de ses livres «littéraires» sont introuvables. Le succès viendra plus tard, au rythme des rééditions posthumes, et il sera accompagné d'une certaine reconnaissance. Mais prend-on vraiment l'écrivain au sérieux ? L'imaginaire de Vian déconcertait ses contemporains. On a parfois l'impression, aujourd'hui, que son humour embarrasse les nôtres. C'est ainsi ; Vian trouvait le sérieux risible et voyait dans le rire une chose sérieuse. Dans son arbre généalogique littéraire figurent les noms de Rabelais, Swift, Carroll, Jarry, Queneau. Cette édition réunit les romans, les nouvelles et les scénarios de Boris Vian, ainsi qu'un choix de textes brefs qui, bien que non fictionnels (encore que certaines chroniques soient fort «romancées»), éclairent son univers imaginaire. Précisément, à quoi ressemble-t-il, cet univers ? À un monde parallèle au nôtre et communiquant avec lui, doté de son langage propre, irréductible aux catégories convenues (fantastique, science-fiction), aussi contrasté que le désert à rayures de L'Automne à Pékin, mais concerté, cohérent, à la fois poétique et réel : «l'histoire est entièrement vraie, puisque je l'ai imaginée d'un bout à l'autre. Sa réalisation matérielle proprement dite consiste essentiellement en une projection de la réalité en atmosphère biaise et chauffée, sur un plan de référence irrégulièrement ondulé et présentant de la distorsion.» Langage d'ingénieur, mais il cache une définition du récit poétique, au service de thèmes graves - la difficulté d'être, l'usure de toute chose, l'angoisse de la mort - qui chez Vian sont transfigurés par la magie du rêve.

10/2010

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Sports

La fabuleuse histoire des lions indomptables. De Samuel Mbappé Léppé à Samuel Eto'o

Créée en 1960, l'équipe nationale de football du Cameroun, les Lions indomptables dès son premier match officiel, fît sensation en battant la Somalie par 9 buts à 0. Ce fut le début d'une longue histoire, riche en émotions diverses, qui apportera de la joie, du plaisir, de l'extase, du brio technique et de la plénitude, mais aussi de la tristesse, de la déception, et le sentiment d'impuissance et de gâchis. Ce qui fait des Lions indomptables du Cameroun, l'une des équipes nationales les plus connues dans le monde. Après plus de cinquante ans d'histoire, c'est aujourd'hui six participations à la Coupe du Monde avec un quart de finale en Italie en 1990, 16 participations à la phase finale de la Coupe d'Afrique des Nations dont quatre victoires sur six finales, une victoire en Coupe Afro-asiatique, une finale de Coupe des Confédérations FIFA et une médaille d'or aux Jeux Olympiques de Sydney en 2000. Pourtant, indomptable, le ministre Félix Tonye Mbock qui a entrepris de rebaptiser ainsi la sélection en 1973 ne s'imaginait certainement pas qu'elle le deviendrait un jour. Que ce soit la première génération, des Samuel Mbappé Léppé, Eugène Njo Léa suivi par la génération des années 1970 des Jean-Pierre Tokoto, Michel Kaham, Jean Manga Onguéné, que ce soit la génération des années 1980 des Roger Milla, Joseph Antoine Bell, Thomas Nkono, celle des années 1990, avec les Stephen Tataw, Thomas Libih, Kana Biyik, Omam Biyik, ou la génération des années 2000 des Rigobert Song, Gérémi Njitap, Marc-Vivien Foé, Patrick Mboma, Samuel Eto'o, ces cinq générations successives auront contribué à la reconnaissance mondiale du Cameroun comme grande nation de football et à la perpétuation du rituel de l'identité collective au Cameroun. Pour l'auteur, il était important de rendre hommage à tous les acteurs qui ont écrit cette histoire, mais aussi de reconstruire un parcours permettant aux plus jeunes et aux générations futures de comprendre pourquoi les Lions indomptables représentent tant pour l'identité collective du Cameroun. Il lui a fallu plusieurs années de fouille dans les archives et les documents épars sur l'histoire des Lions indomptables. Au final, c'est un ouvrage inédit qui retrace l'histoire des Lions indomptables, en un seul document, illustrée par près de 200 images, aussi rares les unes que les autres, ainsi que des annexes comportant les feuilles de matchs depuis 1960, les noms des joueurs ayant revêtu le maillot à la tête du lion, les résultats des matchs, même amicaux, les listes des entraîneurs, des présidents de la fédération camerounaise de football et des ministres des sports.

05/2014

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Histoire internationale

LA NOUVELLE HISTOIRE D'ISRAEL. Essai sur une identité nationale

Le temps est venu d'écrire la nouvelle histoire d'Israël. Une histoire nouvelle, car, depuis que les archives couvrant les années de fondation de l'Etat ont été ouvertes, le débat historiographique fait rage, avec une violence inégalée en tout autre pays. Des cénacles universitaires aux grands quotidiens, historiens et témoins disputent de questions essentielles pour l'identité nationale et l'avenir du pays : dans quelles conditions le foyer national juif - le Yichouv - s'établit-il en Palestine au XIXe siècle et au XXe siècle dans une terre déjà habitée ? Quelle fut l'attitude des dirigeants du Yichouv face au génocide des Juifs d'Europe, puis à l'égard des survivants ? Quelle fut la nature exacte de la proclamation de l'Indépendance le 15 mai 1948 : visait-elle la création d'un Etat spécifiquement juif, ou les Arabes de Palestine y avaient-ils une place ? Israël pouvait-il être juif et démocratique, laïque et moderne tout en refusant la séparation de la religion et de l'Etat ? Ce débat historiographique marque le délitement du récit national sioniste qui tenait lieu jusqu'à hier d'identité consensuelle. Han Greilsammer en restitue l'ampleur, les origines comme la portée (Première partie : Nouvelle histoire : la rupture). Mais la querelle des historiens ne s'explique pas seulement par l'ouverture des archives : celle-ci n'a fait qu'activer celle-là. Bien que les archives pour les périodes suivantes demeurent inaccessibles, les chercheurs remettent également en cause le récit des événements, de 1948 à l'assassinat de Rabin. Car ils ont tous, comme citoyens, participé à des conflits - glorieux et unanimistes comme la guerre des Six-jours, contestés et traumatisants telles la guerre au Liban ou la répression de l'Intifada. Témoins, ils posent, à partir des événements dont ils sont les contemporains et les acteurs, des questions qui reflètent les affrontements à propos de la reconnaissance de l'Autre palestinien et de l'avenir du pays. Des questions et des débats qu'Ilan Greilsammer noue dans une histoire nouvelle (Seconde Partie : les temps forts de l'Etat d'Israël : 1948-1996). En sorte que le lecteur découvre le fil qui court entre colloques d'historiens et réactions du grand public : Israël, au regard de son histoire, doit-il, peut-il être un Etat sans identité juive, un Etat comme les autres ? On l'aura compris : cet ouvrage pionnier, sans équivalent dans aucune autre langue, reconduit la crise d'identité nationale à la spécificité d'Israël : comment écrire l'histoire d'un Etat où histoire et mémoire collective se confondent, où les témoins se font historiens, où les historiens sont à la fois des chercheurs soucieux de rigueur scientifique et des citoyens en quête de la paix ?

05/1998

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Poésie

Khlebnikov pleure. Edition bilingue français-allemand

Ce premier livre d'Anne Seidel se déploie comme un regard à la fois scintillant et rétrospectif, fait de très lents déplacements qui soulèvent délicatement paysages, histoire obscurcie et souvenirs. Regard transsibérien, glissement en errance à travers la nuit, à la fragile vibration d'une bougie, mais "regard qui ne sait rien de lui-même" . Poésie d'éclats, de reflets électriques sur la neige, livre miroir où figures du passé et du présent se superposent à travers la brume. La main d'Anne Seidel efface la buée et fait surgir des panoramas entre absence et visage, oubli et blancheur plane. Connaissance, surgissement, reconnaissance : tout se passe "de l'intérieur de l'oeil" . Khlebnikov pleure est un jardin d'hiver où les échos des hommes et des territoires, aussi bien sensoriels que réels, imaginés ou traversés, se réverbèrent tout au long du poème et viennent se déposer sur la rétine, dans la mémoire, puis fondre à peine le sol touché, ou déposer au contraire une empreinte délicate, dans de nouveaux scintillements. C'est le livre des lumières perdues, muettes, en forme de "souvenir de neige" , sous lequel doucement s'efface l'Europe de l'est, loin d'ici, s'efface dans les regards oubliés qui glissent sur la Neva. On ne sait pas trop ce qu'on regarde au loin, ce qu'on retient et ce qui parvient jusqu'à nous ; si des hommes souffrent encore, s'il pleut ou pas. Difficile de percevoir l'écho clair des larmes, des voix perdues, presque éteintes, chuchotées. Dans les reflets - plats reflets de lacs gelés, de maigres reliefs, un chien, une usine, un poème - joue, fragile, en apparitions-disparitions, l'attente et peut-être un peu de peur, choses tirées, enfouies, très lointaines : noires. Noires de silences, traces tranchantes de rails luisants dans la nuit. Dans le coeur de pays où affleurent encore de manière sourde les signes de l'exil et de la déportation. Cet "espace de neige" , espace vu, tu, reste "impensé" , sa continuité nous échappe, fragmentée, ressassée. Nous sommes nous-même enfouis entre présent et histoire, qui essayons de remonter nos traces sous la clarté paradoxale de la neige. Nos empreintes, entre les arbres, à travers les rêves, sont diffuses. Un passage à peine assez grand pour nous laisser passer. Des tas de ruines de "temps dérobé" . La douleur en héritage d'une idée russe abandonnée au fond de la mémoire, et de générations enfermées dans leur propre terre. Ici, au milieu de la clarté plane de la lumière d'hiver, nous sommes incertains d'être au bon endroit, ni de comprendre le poids du silence dans chaque mot. Nous qui cherchions à combler quelque chose, nous qui "nous sentions abandonnés" dans cette blancheur qui tombe.

09/2020

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Littérature anglo-saxonne

Je voulais écrire un poème. Autobiographie des livres d'un poète

Quand Edith Heal propose à William Carlos Williams au milieu des années 1950 de se prêter à une série d'entretiens autour de son oeuvre le poète américain est alors âgé de 75 ans ; accompagné par son épouse Florence H. Wiliams (Flossie), il accepte de jeter un regard rétrospectif sur son parcours à travers ses livres. Au fil de ces conversations alertes, complices et fourmillantes de détails sur le monde littéraire américain du début du XXe siècle, William Carlos Williams évoque de façon chronologique son parcours poétique, de son premier livre publié en 1909 à compte d'auteur, Poems, jusqu'à ses derniers ouvrages de la fin des années 1950, et notamment la série des Paterson. De ses premières lectures poétiques, Keats et Whitman, à son amitié avec Ezra Pound en passant par sa carrière de médecin pédiatre, celui qu'Edith Heal appelle le Dr. Williams, et qui est venu à la poésie "seul dans son coin" , mêle avec une grande fluidité, détails biographiques, réflexions théoriques et commentaires de ses propres poèmes. On traverse une époque d'avant-gardes littéraires, les figures de Marianne Moore, de Mina Loy et de Hilda Doolittle, l'univers des petits éditeurs et des revues le plus souvent confidentielles qui ont accueilli les premières publication de Williams, qu'il soutiendra tout au long de son parcours avec reconnaissance, l'aventure des objectivistes avec Reznikoff, Stevens, Oppen, Rakosi et Zukovsky, l'influence européenne... au cours de cet ouvrage dans lequel on traverse de nombreux extraits d'une oeuvre composée de poèmes, de romans, de nouvelles, de pièces de théâtre, de traductions de Soupault et Quevedo, et qui est à la fois une autobiographie vivante, une bibliographie exhaustive, une porte d'entrée et un mode d'emploi de la démarche littéraire de l'un des plus grands poètes américains de son temps. Il ressort de ce portrait, de cette expérience qui n'est pas "très différente finalement de celle du nouveau poète de demain" , une présence charnelle, sexuée du poème, un rapport à la construction des images, une force du réel également, tant les sujets des livres de Williams sont puisés à même la vie quotidienne, sans jamais se détourner de la brutalité sociale dont sont victimes ses contemporaines dans les années de crise économique et de guerre. Et surtout son obsession de la simplicité, sa volonté de dégager une forme poétique "sans déformer la langue telle qu'on la parle" , sa conquête d'une forme propre dont ce qu'il appelle "l'idiome américain" est le vecteur : direct, oral, limpide. En somme, un parcours dominé par "le besoin d'en apprendre le plus possible sur la poésie et le besoin d'en apprendre le plus possible sur la vie, qui n'est pas plus poésie que prose" .

10/2022

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Littérature française

Le déséquilibre du monde

" Durant les sombres jours de Verdun où votre pénétrante sagacité et votre vaillance contribuèrent si puissamment à changer l'orientation du destin, je reçus de vous, mon cher général, une photographie, dont la dédicace rappelait que vous étiez mon disciple. Depuis lors, vous m'avez affirmé que ma doctrine vous avait guidé tandis que vous prépariez la victoire décisive du 18 juillet 1918 et pendant les opérations qui la suivirent. Le psychologue ayant la rare fortune de trouver un tel élève pour appliquer ses principes, lui doit une vive reconnaissance". Les civilisations modernes se présentent sous deux faces, tellement dissemblables, tellement contradictoires, que vues d'une planète lointaine, elles sembleraient appartenir à deux mondes entièrement différents. Un de ces mondes est celui de la science et de ses applications. Des édifices qui le composent rayonnent les éblouissantes clartés de l'harmonie et de la vérité pure. L'autre monde est le ténébreux domaine de la vie politique et sociale. Ses chancelantes constructions restent enveloppées d'illusions, d'erreurs et de haines. Des luttes furieuses le ravagent fréquemment. Cet éclatant contraste entre les divers domaines des grandes civilisations tient à ce que chacun d'eux est formé d'éléments n'obéissant pas aux mêmes lois et n'ayant pas de commune mesure. La vie sociale est régie par des besoins, des sentiments, des instincts légués par l'hérédité et qui pendant des entassements d'âges, représentèrent les seuls guides de la conduite. Dans cette région, l'évolution progressive demeure très faible. Les sentiments qui animaient nos premiers aïeux : l'ambition, la jalousie, la férocité et la haine, restent inchangés. Durant des périodes, dont la science révèle l'accablante longueur, l'homme se différencia peu du monde animal qu'il devait tant dépasser intellectuellement un jour. Dans cette région, l'évolution progressive demeure très faible. Les sentiments qui animaient nos premiers aïeux : l'ambition, la jalousie, la férocité et la haine, restent inchangés. Durant des périodes, dont la science révèle l'accablante longueur, l'homme se différencia peu du monde animal qu'il devait tant dépasser intellectuellement un jour. Restés les égaux des animaux dans le domaine de la vie organique, nous les dépassons à peine dans la sphère des sentiments. C'est seulement dans le cycle de l'intelligence que notre supériorité est devenue immense. Grâce à elle les continents ont été rapprochés, la pensée transmise d'un hémisphère à l'autre avec la vitesse de la lumière. Mais l'intelligence qui, du fond des laboratoires, réalise tant de découvertes n'a exercé jusqu'ici qu'un bien faible rôle dans la vie sociale. Elle reste dominée par des impulsions que la raison ne gouverne pas. Les sentiments et les fureurs des premiers Ages ont conservé leur empire sur l'âme des peuples et déterminent leurs actions.

03/2023

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Sciences historiques

Les noblesses du nom. Essai d’anthroponymie ottomane

" Les Turcs ont coutume de donner aux gens un nom qui illustre un de leurs défauts ou de leurs vertus, car ils ne disposent que de quatre noms propres, réservés aux descendants de la famille ottomane ". Ainsi Don Quichotte condense-t-il en peu de mots un lieu commun répandu : celui d'un Orient sans noms, celui d'un Empire sans noblesse. Don Quichotte est fou, mais il y a toujours une part de vérité dans ce qu'il dit. Les Ottomans changeaient de nom comme de chemise. Les surnoms – souvent les plus disgracieux – étaient à la source de bien des désignations. On ne trouvait pas une rue sans un Mehmed, pas un café sans un Ahmed. Le titre plus que la désignation comptait dans les usages sociaux comme dans les bureaux de l'Etat. L'administration déformait sans vergogne les noms des juifs et des chrétiens. Le sultan écorchait les désignations de souverains qu'il tutoyait. L'onomastique n'obéissait à aucune règle stricte. Elle n'accordait presque aucune place au nom de famille. Les Ottomans ne portaient ni armes ni blasons. Ils ne reconnaissent aucune aristocratie hors de la lignée d'Osman. Autant de réalités admises par des voyageurs orientalistes, des idéologues kémalistes ou des historiens de l'Empire ottoman. En un mot : l'égalité des conditions l'emportait sur la reconnaissance de noblesses, et il était plus important de gagner un titre que de se faire un nom.La lecture des sources révèle néanmoins un monde de noms plus riche et plus complexe. Don Quichotte est fou, mais s'il a beaucoup voyagé, il n'a jamais parcouru l'Empire. En réalité, les Ottomans se servaient de leurs noms de personne pour s'identifier et se distinguer, faire valoir leurs droits et transmettre leurs biens. A partir des nomenclatures turques, arabes et persanes, ils inventèrent leurs propres modes de désignation. Ils en nourrirent leurs lettres et leurs arts. Par les noms, ils dominèrent leurs sujets non musulmans, valorisèrent les héros et les saints, reconnurent des lignées pré-ottomanes et constituèrent de nouvelles noblesses. Le nom de famille tel que nous l'entendons était certes le grand absent de l'anthroponymie ottomane. Mais des noms de famille existaient, au-delà des seuls patronymes : noms d'ancêtres, de collatéraux et de femmes. Il est vrai, la Turquie kémaliste imposa une procédure radicalement nouvelle : tout citoyen devait porter un nom de famille. Mais ces noms, pour une partie d'entre eux, existaient déjà. Ils étaient inscrits dans les registres d'Etat. Ils figuraient dans les généalogies, sur les stèles funéraires. Au sein de franges sociales que le sultan ne reconnaissait toujours pas comme noblesses d'Empire, perçait l'imaginaire d'une noblesse des noms.

01/2013

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Code pénal

Le déni du viol. Essai de justice narrative

Un essai qui dit la puissance mobilisatrice du récit, source essentielle et nécessaire d'un Droit vivant. Depuis #MeToo, une nouvelle sensibilité centrée sur la femme, son histoire, son corps et ses droits s'est imposée. Les souffrances privées se sont invitées dans l'espace public et nous interpellent en toute légitimité, revendiquant une place dans une mémoire partagée qu'il revient au Droit d'instituer. Toutes ces femmes viennent dire haut et fort que cette violence intime ne peut plus être masquée par les mots du Droit. Mais comment une scène pénale pourra un jour réparer une commotion psychique aussi intime ? Une scène de procès est le miroir d'une société démocratique, au terme de laquelle la parole doit faire oeuvre de reconnaissance. Pour le juge, l'enjeu d'un débat contradictoire est d'établir les faits objectifs dans un temps et un espace délimité. Sa démarche relève d'une grammaire juridique en opposition avec " la grammaire de l'action militante ". Autrement dit, vu de près, un procès est une bataille du langage. Il ne s'agit pas de combattre une loi, mais une culture, un vocabulaire, une manière de penser. Son enjeu est de remettre sans cesse des mots justes sur des actes. Face à une justice hors d'atteinte et inadéquate, la plainte se constitue dans un récit porté devant son lectorat. La démarche de Vanessa Springora, par exemple, est comparable à celle des héroïnes de la tragédie grecque (Antigone ou Electre) interdites de parole sur l'agora et qui se placent sur la scène pour se faire entendre. Sources agissantes d'un droit vivant, ces récits de justice font partie de notre culture, au même titre que la littérature et la peinture. Fiction, témoignage ou expérience, ils donnent la mesure de la détresse extrême qui emporte ces figures féminines. C'est là, dans des arènes discursives parallèles, que sont nommées pour la première fois le viol conjugal, le harcèlement sexuel au travail ou les discriminations sexuelles à l'emploi - soit autant de situations vécues au quotidien par les femmes dans un espace privé qui jusque-là n'avaient pas de vocabulaire capable de les identifier, de les contester publiquement ou de les politiser, ni les moyens qu'ont aujourd'hui les réseaux numériques pour porter cette contestation dans un espace public élargi. Car ces voix singulières doivent se faire entendre dans l'espace public. C'est la condition pour qu'une société accède à une nouvelle conscience d'elle-même. Au terme d'un essai entre littérature et droit, entre la cause des femmes et leur plainte en justice, entre le cri de colère et le langage du droit, entre l'urgence d'une réponse et les pesanteurs institutionnelles, Denis Salas montre comment la chair émotionnelle du témoignage redonne un contenu aux mots du Droit.

06/2023

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Poésie

Le Soleil d'Alexandre. Le cercle de Pouchkine 1802-1841

En Russie, depuis deux cents ans, chaque écrivain, chaque courant, chaque époque peut se retrouver dans Pouchkine, car celui-ci est un miroir, le lieu de la reconnaissance de toute personne de langue maternelle russe. André Markowicz propose dans cet ouvrage de découvrir en quoi la conversation que Pouchkine a établie par textes interposés avec les poètes de sa génération a durablement marqué la littérature et la pensée russes jusqu’à nos jours. Cet ouvrage remarquable par son ambition vient rendre hommage à la génération brisée par le 14 décembre 1825, jour du coup d’Etat manqué contre le tsar Nicolas ier, coup d’Etat qui avait été organisé par de jeunes aristocrates, pour la plupart officiers des guerres napoléoniennes, indignés par le servage et l’absolutisme. La répression qui s’ensuivit fut d’une ampleur inégalée, et le règne de Nicolas ier devint celui de la censure, de la délation et des arrestations. Des poètes et écrivains qui faisaient partie de ce que l’on appellera les décembristes, la plupart mourront avant d’avoir passé la cinquantaine, victimes de la violence du régime. Mais ils n’ont cessé, tout au long de leur vie, de se fréquenter, d’échanger, de s’écrire et d’écrire en réponse les uns aux autres, entretenant une conversation destinée à devenir le fondement de la culture russe. C’est de cette conversation – qui n’a pas d’équivalent dans la littérature occidentale puisqu’elle s’est poursuivie, au-delà de la mort, à travers les textes et la mémoire, avec tous les écrivains russes qui ont suivi – que Le Soleil d’Alexandre voudrait donner un aperçu, en plaçant au centre celui qui n’a jamais quitté cette place depuis son apparition, à quinze-seize ans, dans les cercles littéraires : Alexandre Pouchkine. Depuis deux cents ans en effet, Pouchkine a toujours été au centre de tous les débats intellectuels, de toutes les interrogations et affirmations identitaires en Russie – de son vivant et, bien plus encore, après sa mort. Pas un seul écrivain (à part Tolstoï et Tchekhov) qui ne lui ait consacré un texte – de Gogol à Dostoïevski, de Blok à Maïakovski, des futuristes les plus radicaux à Anna Akhmatova, de Mikhaïl Boulgakov à Marina Tsvetaïéva, de Soljenitsyne à Siniavski… Quant à Tolstoï et Tchekhov : qui peut lire Anna Karénine sans penser aux lettres de Tolstoï affirmant qu’il s’est lancé dans la composition de ce roman après avoir relu toute la prose de Pouchkine ? Et qui peut lire Les Trois Sœurs sans voir le rôle qu’y joue le prologue de Rouslan et Lioudmila ? En décembre 1917, Mandelstam écrivait dans les strophes de “Cassandre”, avec d’autres poèmes de révolte et de combat, devant l’avènement de la dictature bolchévique et l’écroulement de l’ancien monde qu’elle portait en germe : Malade, silencieuse Cassandre, je n’en peux plus, pourquoi, Luisait le soleil d’Alexandre, Voici cent ans, luisait pour tous ? Le soleil d’Alexandre, c’est celui d’Alexandre Pouchkine.

09/2011

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Beaux arts

Hugo Capron. Corpus Painting

Issu d'une formation d'imprimeur, Hugo Capron décline en peinture le plaisir de reproduire une même image dans de longues séries qui cherchent à épuiser toutes les possibilités de variation. Ses tableaux sont généralement réalisés d'un seul jet et sans repentir, mais reposent néanmoins sur des équations techniques de précision. ? Les palettes d'Hugo Capron résultent de fines investigations chez des fournisseurs du monde entier à la recherche des nuances les plus justes. Sur la toile, elles se révèlent dans une gamme de matières, de jus et de surépaisseurs lumineuses qui font valoir la vitesse de l'exécution. Le geste est quasiment calligraphique, c'est une mêlée de virgules et de boucles. " J'ai toujours pensé qu'une oeuvre d'art en général, et un tableau en particulier, commençait par s'adresser à moi en m'indiquant la manière dont son auteur me considère. C'est la première chose que je perçois, peut-être même avant de prendre conscience du sujet du tableau, peut-être même en amont de la reconnaissance d'une peinture abstraite ou figurative. Comment ce tableau s'adresse à moi, sur quel ton il me parle, les stratégies qu'il déploie pour m'intéresser, exciter ma curiosité, flatter ou provoquer mon goût, bref comment le tableau me considère : gogo ou digne destinataire d'une conversation ? " Extrait du texte d'Eric Troncy Né en 1989, Hugo Capron s'est d'abord formé aux techniques de l'imprimerie, avant d'intégrer l'Ecole nationale supérieure d'art de Dijon, dont il a été diplômé en 2015. Sélectionné pour le premier programme de résidence et d'exposition Dijon/Dallas dès sa sortie de l'Ecole, il a par la suite exposé au Consortium de Dijon en 2015, au centre d'art contemporain MAT (Minatomachi Art Table) à Nagoya au Japon en 2016 et au FRAC Bourgogne en 2017. Il a été résident de la villa Kujoyama à Kyoto en 2019 et lauréat en 2021 de la huitième édition de la Bourse Révélations Emerige. Il vit et travaille à Dijon. Ses oeuvres ont été intégrées dans de nombreuses expositions collectives et individuelles - notamment à l'Hôtel des Arts de Toulon, au Centre régional d'art contemporain de Montbéliard, à la Collection Yvon Lambert en Avignon - et elles figurent dans diverses collections privées et institutionnelles françaises et internationales. Avec " Corpus Painting ", Semiose éditions lance une nouvelle collection éditoriale entièrement dédiée à la peinture. En 48 pages, relié façon beau livre, chacun des opus se concentre sur un ensemble précis de tableaux, complété d'un texte en français et en anglais signé d'une personnalité du monde de l'art. Une invitation à plonger dans la peinture, à comprendre les ressorts d'une série, à contempler une suite d'images, avec la même dévotion et passion que l'on porte aux retables ou aux icônes peintes.

02/2023

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Théâtre

Théâtre

Que l'oeuvre de Feydeau soit rattachée, non sans raison, mais un peu paresseusement, à un genre léger, populaire et aussi décrié qu'il est goûté n'a pas aidé à sa reconnaissance. Il reste que l'on ne dit pas grand-chose de l'oeuvre quand on se contente de mentionner ce genre - le vaudeville - ou de parler d'amants dans le placard et de portes qui claquent. Pas d'erreur pourtantoe : les portes claquent bel et bien. Mais elles claquent de telle façon que ce genre, le vaudeville donc, s'en trouve renouvelé, énergisé, accéléré (bien des scènes semblent des odes à la vitesse), poussé à son paroxysme et, en définitive, conduit à l'implosion. L'implacable mécanique souvent évoquée existe bien, et les rouages de la machinerie mise au service du comique sont admirablement huilés. Ce que l'on évoque moins souvent, c'est l'arrière-plan de l'univers de Feydeau. Or la manière dont ses pièces traduisent et véhiculent les engouements, préoccupations et inquiétudes d'une époque qui voit, ou ne voit pas, arriver la guerre mondiale et la fin d'un monde mérite d'être soulignée. La gaieté de Feydeau est indéniable, mais elle n'est pas séparable d'une sorte de folie, dont l'écriture, aussi bien que les situations, porte la marque. Car Feydeau n'est pas (seulement) un brillant entrepreneur de spectacles : c'est un écrivain. La qualité de son dialogue, tout en apparente spontanéité, résulte d'un travail opiniâtre. Les indications scéniques parfois fascinantes qui émaillent le texte de ses pièces et décrivent avec une précision horlogère, jusqu'au vertige, la disposition des lieux et l'attitude des personnages témoignent d'une passion de la description que l'on ne rencontrera plus avant le Nouveau Roman. Pourtant, même ainsi "programmés", les personnages ne sont ni des pantins ni des automates. Autant que des intrigues trop convenues, Feydeau se défie des "types" trop conventionnels mis en scène par les vaudevillistes de son temps. Ses personnages, il va les chercher, de son propre aveu, dans la réalité ; peu désireux de faire d'eux des fantoches, il leur conserve leur personnalité, leur vitalité - et tout soudain les plonge dans des situations burlesques. On a pu les comparer à des cobayes, et leur créateur à un expérimentateur non dénué d'une certaine cruauté. Mais c'est à l'égard du langage, des langages, qu'il met à la disposition de ses créatures ou dont, par moments, il les prive, que Feydeau se montre le plus audacieusement expérimentateur. A force de répétitions, de déformations, de mélanges babéliens, de lapsus, de mal-entendus, la langue perd tout ou partie de sa fonction de communication. Les liens logiques se desserrent, ils se dissolvent, on ne s'entend plus, l'absurde triomphe. Loin de prolonger un genre réputé poussiéreux, Feydeau ouvre la voie au théâtre qu'illustreront bientôt Ionesco ou Beckett.

11/2021

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Histoire internationale

Jacqueline Kennedy. Une icône américaine

Chancelante, Jacqueline Kennedy participe aux cérémonies d'investiture de son mari le 20 janvier 1961. En ce jour historique, Jack lui a été infidèle, comme toujours. Par vengeance, dès 1957, elle s'est jetée dans les bras de l'acteur William Holden. Passionnée par l'architecture, la Première Dame restitue la structure historique de la Maison-Blanche. Son sens artistique crée l'image de la présidence, sa personnalité fait d'elle l'icône de sa génération. Le 22 novembre 1963, sa vie bascule dans le drame. Elle ne pleure pas devant le cercueil. En organisant les funérailles de son mari, elle crée le mythe. L'éducation de ses enfants figure au premier plan de ses préoccupations. Beaucoup de questions restent en suspens. Quelle personnalité complexe se cache sous la silhouette de la dame en rose ? Ses attaches avec la France étaient-elles réelles ? Elle appréciait ou détestait de Gaulle selon les circonstances, idolâtrait André Malraux. Où puisait-elle ses opinions ? Le public lui a prêté des aventures, avec Marlon Brando, son beau-frère Bobby... En épousant Aristote Onassis, la veuve de l'Amérique est tombée de son piédestal. Puis son dernier compagnon Maurice Tempelsman lui a apporté tendresse et sérénité. Ce travail d'historienne, fruit de plusieurs années de recherches, s'attache au comportement d'une jeune femme toute simple qui a accédé au premier rang de la scène politique mondiale sans en connaître les rouages. Hillary Clinton questionnait Jacqueline sur l'organisation de la Maison-Blanche, sa "culture officielle" , les tenues vestimentaires de rigueur. Les deux femmes s'appréciaient, des points communs les rapprochaient. La mort a brisé leur amitié le 19 mai 1994. Chancelante, Jacqueline Kennedy participe aux cérémonies d'investiture de son mari le 20 janvier 1961. En ce jour historique, John lui a été infidèle, comme toujours. La personnalité de la Première Dame a construit l'image de la présidence et fait d'elle l'icône de sa génération. Le 22 novembre 1963, sa vie bascule dans le drame. En organisant les funérailles de son mari, elle crée Le mythe. Beaucoup de questions restent en suspens. Introvertie pendant son enfance et son adolescence, était-elle avide de reconnaissance ? Elle appréciait ou détestait de Gaulle et Nehru selon les circonstances, idolâtrait André Malraux, méprisait Indira Gandhi. Où puisait-elle ses opinions ? Le public lui a prêté des aventures avec Marlon Brando ou son beau-frère Bobby... En épousant Aristote Onassis, la veuve de l'Amérique est tombée de son piédestal. Fruit de plusieurs années de recherches, ce livre s'attache au comportement d'une jeune femme toute simple qui a accédé au premier rang de la scène politique mondiale sans en connaître les rouages. Biographie de l'auteur Régine Torrent est journaliste, productrice de télévision, historienne et spécialiste des Etats-Unis. Elle a notamment publié La France américaine, controverses de la Libération (Racine, 2004) et First Ladies (Racine, 2006).

02/2018

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Philosophie

Philosophie N° 144, janvier 2020 : Perspectives philosophiques sur Le Deuxième sexe de Simone de Beauvoir paru il y a 70 ans

En dépit des déclarations expresses de Simone de Beauvoir dans ses Mémoires, la philosophie se situe au coeur de son entreprise intellectuelle. Pourtant, hormis quelques notables exceptions (Le Doeuff, Kail, Garcia), la réception de l'oeuvre beauvoirienne en France a longtemps pris au mot la déclaration de La force de l'âge, estimant qu'elle se situait du côté des études littéraires ou féministes. A partir de 1980, Michèle Le Doeuff s'est efforcée la première de battre en brèche cette relégation du Deuxième Sexe hors du champ de la philosophie : mettant en question la représentation de Beauvoir en simple disciple de Sartre, elle a montré comment l'absence de Beauvoir dans les études philosophiques françaises prolongeait l'existence d'un véritable "complexe d'Héloïse" – le fait que dans l'histoire de la philosophie, les femmes ne sont guère dépeintes que comme admiratrices-amoureuses d'un philosophe-amant dont elles seconderaient le travail. L'étude intrinsèque du texte de Beauvoir et le mouvement vers sa reconnaissance comme philosophe se sont donc opérés par une mise en évidence de l'originalité de sa pensée par rapport à celle de Sartre. Or, si ce mouvement conduit à l'émergence d'une importante littérature secondaire en langue anglaise portant sur la philosophie beauvoirienne, la réception philosophique de son oeuvre en langue française demeure largement à venir. A l'occasion du soixante-dixième anniversaire de la publication de l'ouvrage, ce numéro propose un ensemble d'études centrées sur les apports philosophiques du Deuxième Sexe, sans cependant prétendre présenter dans toute sa complexité et sa richesse la pensée beauvoirienne. Le numéro s'ouvre sur la recension que publia Beauvoir sur la Phénoménologie de la perception de Merleau-Ponty dans le premier numéro des Temps modernes. En regard, Raphaël Ehrsam propose, dans "Liberté située et sens du monde : Merlau-Ponty et Beauvoir", une étude des liens entre les philosophies de Beauvoir et de Merleau-Ponty, indiquant l'influence de la pensée merleau-pontyenne sur l'élaboration du concept beauvoirien de situation, en même temps que leurss divergences profondes dans l'approche de la liberté et du corps. Mickaëlle Provost met ensuite en évidence, dans "L'expérience du doute chez Simone de Beauvoir", la double fonction du doute comme méthode et éthique dans l'existentialisme beauvoirien. Dans "De l'oppression à l'indépendance : la philosophie de l'amour dans Le Deuxième Sexe", Manon Garcia montre qu'une philosophie de l'amour structure la façon dont Beauvoir élucide l'oppression des femmes, ainsi que la possibilité de leur émancipation. Dans "La dialectique maître-esclave selon Simone de Beauvoir", Maria Montanaro et Matthieu Renault montrent comment Beauvoir s'approprie et transforme la dialectique hégélienne du maître et du serviteur. Enfin, dans "De la critique du matérialisme à son dépassement", Pierre Crétois met en évidence, en étudiant la notion de propriété, l'influence du marxisme sur la conception beauvoirienne de l'oppression féminine. Raphaël Ehrsam, Manon Garcia et D P.

01/2020

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Critique littéraire

Hommage à Jacques Rivière

Souvenirs : Anonymes, Note biographique André Waltz, Souvenirs d'un ami d'enfance André Lacaze, Souvenirs (1905-1908) Gabriel Frizeau, Souvenirs sur Jacques Rivière A. Lauriol, Septembre 1914 Jacques Copeau, Souvenirs d'un ami A. Mayrisch de Saint-Hubert, Souvenirs Marcel Jouhandeau, Jacques Rivière devant la mort L'homme : Paul Valéry, Hommage Saint-John Perse, Lettre sur Jacques Rivière André Maurois, Comment rattraper... François Mauriac, Anima naturaliter christiana Jacques de Lacretelle, Portrait Henri Ghéon, Souvenirs Jean Cocteau, Lettre Jean Schlumberger, La Sincérité de Jacques Rivière Georges Duhamel, Lettre Henriette Charasson, Les rendez-vous spirituels Benjamin Crémieux, Ce que n'était pas Rivière Le directeur de revue et l'écrivain : André Gide, Jacques Rivière Valery Larbaud, Témoignage Jules Romains, Jacques Rivière parmi nous Paul Morand, Adieu à Jacques Rivière Michel Arnauld, Jacques Rivière et la vocation de sincérité Emma Cabire, Deux rencontres Guy de Pourtalès, Jacques Rivière Henri Deberly, Reconnaissance Henri Pourrat, Jacques Rivière, écrivain pur Jean Prévost, Jacques Rivière et les jeunes Jean Cassou, Péguy et Rivière Jean Paulhan, Les espoirs et les projets Joseph Delteil, L'homme de barre Le romancier : René Boylesve, Hommage Jacques Boulenger, Note sur Aimée Edmond Jaloux, Jacques Rivière et Marcel Proust Robert Honnert, Le Romancier Henri Rambaud, De l'esprit d'analyse dans Aimée François de Roux, La méthode objective et réaliste de Jacques Rivière Gil Robin, Jacques Rivière et la psychiatrie Guy Velleroy, Jacques Rivière et la passion de vérité Ramon Fernandez, In Memoriam L'essayiste, le politique : Charles Du Bos, Jacques Rivière et la "Perfection abstraite" Louis Artus, Jacques Rivière et "La Foi" Marcel Arland, L'évolution de Jacques Rivière Gabriel Marcel, Constantes Bernard Groethuysen, Jacques Rivière interprète de Fénelon André Lhote, Jacques Rivière critique d'art et ami Boris de Schloezer, Jacques Rivière et la musique Paul Desjardins, Le bon sens de Jacques Rivière Albert Thibaudet, L'Européen Alfred Fabre-Luce, Jacques Rivière politique Pierre Drieu la Rochelle, Expériences Félix Bertaux, Jacques Rivière et l'Allemagne Victor Llona, Jacques Rivière et les littératures étrangères Témoignages étrangers : T. S. Eliot, Rencontre D. S. Bussy, Souvenir Harrison, Le Roman d'Aventure S. Hudson, Lettre W. Frank, L'artiste en Jacques Rivière E. Fitzgerald, Hommage H. von Hofmannsthal, Hommage L. Chestov, Dernier salut E. Cecchi, Esprit de finesse G. Ungaretti, Gratitude W. Schuermans, L'esprit clinique de Jacques Rivière F. Hellens, Impressions sur Jacques Rivière P. Fierens, Jacques Rivière et la Belgique O. -J. Périer, Jacques Rivière vivant J. Tielrooy, Témoignage d'un étranger J. Fransen, Hommage R. de Traz, Souvenir R. Grosjean, Hommage du lecteur inconnu C. Simon, Jacques Rivière à Zurich C. Clerc, Rivière et Genève A. François, Souvenir Inédits Alain-Fournier, J. Rivière, Correspondance J. Rivière, Lettres à André Gide - Extraits d'un Journal de captivité - Marcel Proust Divers H. Massis, "Nous tenons à détacher, du témoignage sur Jacques Rivière, qu'Henri Massis. ". . J. Rivière,

01/1992

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Histoire de France

Journal 1940-1944. "Que passent les heures, les jours, les nuits et que la France renaisse"

Dans le premier tome de son Journal 1918-1933, Hélène Hoppenot (1894-1990), femme de diplomate, nous entraînait de Paris à Rio de Janeiro, Téhéran, Santiago du Chili, Berlin, Beyrouth, Damas et Berne. Dans le deuxième tome (1936-1940), elle racontait avec verve les tractations secrètes et les décisions erratiques du gouvernement français. Son mari, Henri Hoppenot, est alors à la tête de la "Sous-Direction Europe" et tous deux sont proches d'Alexis Léger (soit Saint-John Perse), secrétaire général du Quai d'Orsay. Au début du troisième tome, en 1940, nous retrouvons les Hoppenot en Uruguay : "Nous tous, exilés diplomatiques, sommes devenus des épaves." Soumis au rythme des chassés-croisés incessants, des ordres et contre-ordres incohérents, ils subissent l'illisible politique de Vichy. Malgré tout, Hélène Hoppenot garde espoir : "Depuis deux ans - et quels qu'aient été les désastres subis - j'ai toujours cru à la victoire de l'Angleterre. Par instinct et non, hélas, par raison. Un univers nazi est inconcevable". Elle va rapidement convaincre son mari qu'il lui faut choisir le général de Gaulle contre le "terrible vieillard" et le gouvernement de Vichy - dont Henri Hoppenot est pourtant le représentant légal à Montevideo - et contre Alexis Léger, qui voir en de Gaulle un futur dictateur. La tension et la complexité de ces années difficiles affectent le moral de Hélène Hoppenot, mais pas son sens critique qui ponctue, en temps réel, les échos, les fausses nouvelles et les rumeurs qu'elle consigne... Heureusement, elle retrouve de vrais amis sur le continent américain : Gisèle Freund, Darius Milhaud, Jules Supervielle, Henri Seyrig, la famille de Paul Claudel... Et le tumultueux séjour à Montevido de Louis Jouvet et de sa troupe de comédiens en 1941 est une distraction bienvenue dans le désert culturel uruguayen. Après la démission de Henri Hoppenot, le 25 octobre 1942, ils partent sans regret pour les Etats-Unis, où ils retrouvent Alexis Léger et des intellectuels européens exilés. Traversée du désert... Mais c'est Henri Hoppenot, nommé à la tête de la délégation française à Washington, qui organise en juillet 1944 - soit entre le Débarquement et la Libération de Paris - le séjour à Washington et New York du général de Gaulle. Soutenu par Hélène Hoppenot, il fait alors partie de ceux qui contribuent à arracher aux autorités américaines la reconnaissance officielle du chef de la Résistance française. Hélène Hoppenot était très consciente de l'importance de noter les propos entendus, les choses vues dans la coulisse, avant de les retrouver déformés ou censurés par les journalistes, comme Geneviève Tabouis ou "Pertinaz", selon leur orientation... Ce Journal 1940-1944 livre donc quantité d'informations pour les historiens, tout en constituant un témoignage d'une grande honnêteté intellectuelle. Edition établie et annotée par Marie France Mousli, qui a déjà proposé le Journal 1918-1933 de Hélène Hoppenot paru en 2012, puis le Journal 1936-1940, paru en 2015.

03/2019

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Histoire de France

Mesurer et analyser l'économie sociale. L'apport de l'ADDES depuis 1980

La période de l'entre-deux-guerres, plus que d'autres, est tout à la fois marquée par une combativité et une solidarité ouvrières intenses, dont le Front populaire constitue le point culminant, et une poussée nationaliste et xénophobe dont les travailleurs immigrés sont en grande partie la cible sur fond de crise économique. Dans ce livre, Maria Grazia Meriggi s'efforce de montrer comment cette double réalité trouve à s'articuler sur le lieu du travail, le terrain d'observation qu'elle a fait le choix –qui se révèle judicieux – de privilégier. S'appuyant sur un impressionnant travail de dépouillement d'archives (des archives syndicales aux archives de police), le résultat étonne par sa richesse. L'analyse des grèves en région parisienne (mais aussi dans le Nord) au cours des années 1920 et 1930, dans des secteurs parfois peu étudiés jusqu'alors, l'énergie déployée par certaines organisations syndicales en faveur d'une égalité de traitement entre ouvriers français et étrangers, l'action des sections "ethniques" de la MOI (Main-d'oeuvre immigrée), la propagande xénophobe et antisémite des "jaunes" et des ligues nationalistes sont autant de thèmes que l'auteure aborde ici avec une grande justesse. Surtout, cette analyse "par en bas" ne se fait jamais au détriment du contexte national et international qui est toujours parfaitement restitué dans ce livre auquel la montée des populismes donne hélas une actualité certaine. Peu de temps après la résurgence du concept d'économie sociale en France à la fin des années 1970, ses promoteurs – acteurs et chercheurs – constatent l'absence d'outils statistiques adaptés, rendant impossible toute mesure du poids réel de ce secteur économique. Convaincus que "tout ce qui ne se compte pas ne compte pas", ils fondent l'Association pour le développement des données sur l'économie sociale (ADDES) en 1983, avec pour mission première de peser en faveur de la création d'un compte satellite de l'économie sociale. L'organisation d'un colloque annuel contribue de manière décisive à la mise en réseau des principaux spécialistes de cette économie sociale devenue un objet d'études à part entière. Si, depuis cette date, l'ADDES a connu des évolutions – l'accentuation de son caractère interdisciplinaire (sociologues, gestionnaires et historiens se sont ajoutés aux économistes et statisticiens qui composaient ses premières instances), la création de deux prix de thèse et de mémoire en économie sociale, l'organisation de séminaires –, elle est restée fidèle à ses ambitions initiales et n'a jamais cessé d'être un lieu d'échanges au service de la reconnaissance de l'économie sociale, notamment au plan statistique. Dans cet ouvrage, Patricia Toucas-Truyen nous propose une histoire intellectuelle de ce laboratoire d'idées qu'est l'ADDES. En analysant les débats qui l'ont traversée, elle s'attache à retracer les problématiques et identifier les enjeux à l'oeuvre depuis trente-cinq ans dans ce champ aux frontières mouvantes renouvelé par l'économie solidaire et l'entrepreneuriat social.

10/2018

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Sciences politiques

Oeuvres. Volume 1, Les prisonniers de guerre devant la politique ; Aux frontières de l'Union française ; Présence française et abandon ; La Chine au défi

Enfant du premier vingtième siècle, leader politique du second, François Mitterrand (1916-1996) fut un homme de culture. La littérature fut pour lui une passion, et il fera de l'écriture une activité de chaque instant. Arme politique tout autant que reflet d'une plume au style singulier, les textes mitterrandiens témoignent d'un homme et d'une époque. Il fallait les contextualiser pour offrir au lecteur d'aujourd'hui une analyse historique, ce à quoi cette édition des oeuvres, fruit d'un travail de plusieurs années mené par une large équipe de spécialistes, s'attache. Dans ce premier volume, se trouvent réunis Les Prisonniers de guerre devant la politique (1945). François Mitterrand, 29 ans à peine, retrace, au sortir de la guerre, l'histoire des prisonniers dans la captivité puis dans la Résistance. Dans cette histoire, il raconte la sienne, son expérience de la captivité, son rôle dans la genèse et le développement de la résistance "P.G." jusqu'à la Libération. C'est aussi un livre programmatique. La guerre terminée, se pose le problème du retour et de la réinsertion professionnelle et sociale des prisonniers rapatriés. L'enjeu est grand, cette force de près de deux millions d'hommes est en passe de devenir l'une des plus importantes du pays. Mitterrand veut avec ses amis en rester à la tête. Il doit alors séduire et convaincre pour rassembler, C'est, entre les lignes, l'ambition de son livre. Un livre politique donc. Le premier. Aux frontières de l'Union française (1953). La guerre d'Indochine dure depuis sept ans, le différend tunisien depuis deux ans, le Maroc réclame une réforme du statut de Protectorat. La France se doit de concilier la reconnaissance d'une évolution inévitable et le maintien de sa présence. Partout où s'élabore un monde nouveau, notre pays doit agir en sorte de garder sa place. A ces vastes problèmes, Mitterrand apporte des solutions. Celles qu'il préconise pour la Tunisie et l'Indochine ne manqueront pas de provoquer des réactions, bien que l'auteur se soit gardé de toute polémique. Comme Clemenceau, qu'il cite en épigraphe, il s'est proposé de servir à la fois son pays et la vérité. Présence française et abandon (1957). Hanoï, Saigon, Rabat, Tunis, capitales d'Etats indépendants, symbolisent le terme de la tragique aventure vécue par la France en ces années cinquante. Les gouvernements successifs, pour avoir voulu tout ignorer afin de tout maintenir, ont d'abord tout compromis pour tout perdre enfin. Mitterrand fut intimement lié au déroulement des événements dont il fait l'analyse. La Chine au défi (1961). Reprise de cinq articles publiés dans L'Express entre février et avril 1961, La Chine au défi est l'unique récit de voyage du corpus mitterrandien et l'une des pièces les plus méconnues : un tableau de la Chine Populaire en pleine mutation révolutionnaire.

01/2016

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Poésie

Les anges bucoliques

Un grand philosophe a dit un jour que nous pouvons nous parer des plumes de quelqu'un d'autre, mais nous ne pouvons pas voler avec eux. En réalité, c'est une certitude mais, dans le monde de la poésie spirituelle, nous pouvons nous parer de la lumière qui nous inspire, ou des ailes des anges qui nous chuchotent les prières. Même avec des ailes d'ombre, si nous survolons le transcendant ou comprenons les processus antithétiques. La poétesse Marine Rose, brillante et mystique par essence, prouve sa capacité à voler avec les ailes des mots, par son désir de "respirer l'effluve mystique, une rose bougie qui brûle toujours". Sa foi est le fondement de tout ce qu'elle construit, de tout ce qu'elle envoie au ciel. La prière qui jaillit de son coeur est "une prière douce aux élans de taureaux". Elle "prie avec son coeur ouvert comme un livre". Voilà donc la sensibilité et la puissance de cette sublime invocation qui aide à révéler les mots. Une sorte de "prophétie pure", ce qui nous rappelle le merveilleux Gibrain ou le brillant Ai Qing. Cette fois, dans une version féminine, jeune et angélique. Une voix fraîche et chaleureuse dans la cathédrale renaissante de la poésie française. L'initiation est à la fois humaine et cosmique. La souffrance, les larmes, aident à purifier. Même les rêves ont le don du salut, de la guérison ; et l'amour, fruit de la révélation suprême, est sage, édifiant, exaltant. On sait que l'ange est un sujet sur-utilisé dans la poésie universelle, mais cette poétesse sait le réinventer en cascades de métaphores surprenantes. La poésie bucolique d'il y a quelques siècles se réinvente à son tour. Ainsi que le classicisme se réinvente d'une génération à l'autre, devenant néo et rétro. Cela démontre un retour aux origines, aux anciennes valeurs, à travers un langage moderne et actuel. Tradition, respect et réinvention. Changement, évolution, sans trahir les principes humains les plus élevés, les fondations. Art sans caractère de fronde. Reconnaissance. On pourrait reprocher à Marine de ne pas avoir exploré des dimensions plus sombres pour nous montrer comment elle est arrivée à cette illumination poétique. Trop de lumière peut aveugler l'oeil non initié, cependant elle nous présente brièvement la bête noire, pour nous montrer qu'elle connaît le danger, les tentations, l'obscurité. C'est juste qu'elle ne veut pas les rendre plus importants. Ils ne méritent pas la gloire. Elle préfère la volupté des éléments. L'origine des anges bucoliques. Marine Rose s'est réinventée dans ce recueil de poèmes, mais elle est restée fidèle à sa vocation, à son chemin mystique, au vol qui l'élève aux dimensions astrales. Nous lui sommes reconnaissants pour son voyage angélique et nous sommes curieux de savoir ce qui va se passer ensuite.

04/2021

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Arménie

Les Justes et gens de bien du génocide des Arméniens

Parmi les Justes et gens de bien qui prirent des risques majeurs pour sauver les Arméniens pendant le génocide de 1915, il y eut aussi bien des Occidentaux chrétiens ou juifs, que des Orientaux musulmans de diverses confessions. Malgré l'absence d'ordre de son ministère de tutelle le vice-amiral Louis Dartige du Fou net osa prendre les mesures nécessaires pour recueillir les Arméniens qui, retranchés dans la "Montagne de Moïse", avaient résisté pendant plus de quarante jours à une armée turque. Sauvetage des combattants arméniens du Musa Dagh. Témoignage du Pasteur Andreassian (2 sept. 1915) : C'était le Guichen, vaisseau français Pendant qu'on abaissait ne chaloupe, plusieurs de nos jeunes s'étaient élancés vers la mer, et bientôt ils nageaient dans la direction du beau navire qui semblait nous venir de Dieu. Avec des coeurs qui battaient fort, nous descendîmes sur la plage et le capitaine nous invita à lui envoyer une délégation pour rendre compte de notre situation. Il lança un télégramme sans fil à l'amiral et, peu après, le vaisseau Jeanne d'Arc apparaissait à l'horizon, suivi par d'autres navires de guerre français. L'amiral nous dit des paroles d'encouragement et ordonna que chaque membre de notre communauté Rit accueilli à bord des vaisseaux. Raymond H. Kévorkian, Yves T non, Mémorial du génocide des Arméniens, p 447-448. La région montagneuse du Dersim, à l'est de l'Anatolie, était peuplée de Kurdes, en grande partie de confession dévie - marquée par le mysticisme et le respect de la personne humaine - qui ne participèrent pas au génocide des Arméniens, protégèrent ceux-ci, mettant en péril leur propre sécurité, voire leur vie. La politique de turquification mise en oeuvre par Mustafa Kemal entraîna une révolte massive des Kurdes du Dersim (1936-1938), qui se termina par une répression qui fit des milliers de morts. Sauvetage d'Arméniens par des Kurdes du Dersim (un chef de village rassure une déportée sur le sort de sa soeur) : Vallahi, billahi [Jurer Dieu], elle est en sécurité et son honneur autant. J'ai emmené en même temps que les Simonian une centaine de familles dans le seul but de les sauver. Lorsque j'ai vu ta soeur, ta belle-soeur, Mme Anub, des dames si bien élevées. si raffinées. je les ai prises en pitié. Je .savais qu'elles étaient condamnées à périr dans des conditions horribles. Dès lors, j'ai formé le projet de les sauver, mais je n'arrivais pas à les convaincre de la pureté de mes intentions. Elles refusaient obstinément de me suivre. Elles ne cessaient de crier : ,, Nous mourrons s'il le Faux ; ; nais nous n'irons pas avec vous ". Alors, je leur ai envoyé mes Kurdes armés et une charrette pour les emmener de force. Maintenant elles ne savent comment me témoigner leur reconnaissance. Elles voient en moi leur sauveur. Raymond H. Kévorkian. Yves Ternon. Mémorial du génocide des Arméniens, p. 450.

05/2021

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Histoire de la photographie

Like N° 15, hiver 2024 : Dolores Marat

Comme toujours, nous célébrons les photographes. Ils nous racontent leurs parcours, leurs aventures, leurs attentes et leurs réflexions sur le monde en mouvement. Sans oublier de publier leurs images. LIKE la revue est avant tout un moment de lecture et de découverte. L'équipe de LIKE la revue vous souhaite une bonne et heureuse année 2024. Au sommaire Soixante ans après ses débuts, malgré les vicissitudes d'une vie personnelle chaotique, Dolores Marat trouve enfin la reconnaissance méritée. Une visite à Avignon s'imposait. Olga Sviblova est celle qui a voulu populariser la photo en Russie en créant de toutes pièces, dès 1996, au centre de Moscou, le premier musée consacré à ce médium dans son pays. Retour sur cette incroyable saga. Franck Courtès est romancier après six livres publiés. Dans A pied d'oeuvre, il raconte son déclassement social, lui, le photographe reconnu qui gagnait si bien sa vie. Tout au long de 192 pages qu'on ne lâche pas, il se met en scène, dans un effet miroir qui parle de sa vie d'avant et de sa foi dans celle d'aujourd'hui. Isabeau de Rouffignac parcourt l'Inde depuis plus de vingt ans, entre approche documentaire, démarche artistique et enquêtes digne du meilleur journalisme. Hôtel dignité en Inde nous parle de ceux que le pays ne veut pas voir. Youry Bilak est un artiste et photographe d'origine ukrainienne. Il agit pour son pays plongé dans la guerre et a recueillit la parole des enfants. Autant de témoignages qui mêlent dans un même élan innocence et horreur. Il n'aura fallu qu'une minute pour que Théo Le Foll nous ouvre, généreux, les portes de son univers : celui d'un jeune photographe parisien récemment surgi avec brio sur le devant de la scène. Il bouscule la photo de mode et vit à 100 à l'heure ses multiples passions. Muriel Dovic a réalisée ce que personne n'est autorisé à faire ? : prendre des photos dans une cour d'assises. Voici pour vous le déroulement en images d'un procès, avec tous ses acteurs. Un reportage unique. Parmi les multiples aides à la création offertes aux photographes par différentes institutions, il en existe une de plus en plus prisée, la résidence. Carline Bourdelas, raconte l'expérience qui fut la sienne à Planches contact de Deauville. André Travert. Diplomate et plus encore. Dès les années 1850, le Quai d'Orsay décide d'équiper ses ambassadeurs d'appareils photographiques, avec pour mission de documenter les pays encore peu ou pas connus en Occident. L'immense Chine est l'une de ces parties du monde qui suscite curiosité et convoitise. En rencontrant Antoine de Galbert, on ne sait plus très bien si la photo est une photo ou une oeuvre, si elle contient un simple témoignage ou à vocation à être admirée comme une icône incontournable, ou les deux. Ce collectionneur passionné est insaisissable. Discussion en toute liberté.

02/2024

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Revues Ethnologie

Barvalo. Roms, Sinti, Gitans, Manouches, Voyageurs... Edition bilingue français-romani

Si les populations romani constituent la plus grande minorité ethnique d'Europe (12 millions de personnes), elles font l'objet, hier comme aujourd'hui, de nombreuses discriminations. Tout en mettant l'accent sur l'antitsiganisme contre lequel toutes luttent, il s'agit cependant ici de faire connaître, d'affirmer et de revendiquer la richesse et la diversité des cultures romani. " Barvalo ", le mot qui donne son titre à cet ouvrage et à l'exposition au Mucem (Marseille) qu'il accompagne, signifie en romani " riche " et par extension " fier ". Il est programmatique et défend, en s'intéressant à l'histoire et à la diversité des populations romani d'Europe, neuf siècles de présence européenne et d'affirmation culturelle. L'exposition comme le livre, entièrement bilingue français-romani, ont été conçus de manière collaborative avec un comité composé de cinq commissaires et quatorze experts d'origine romani (Roms, Sinti, Manouches, Gitans, Gens du voyage/Voyageurs) et non romani, de nationalités et de profils différents. Tous et toutes oeuvrent à ce projet depuis 2018 et ont contribué au livre. Ce catalogue, richement illustré, est découpé en trois grandes parties. La première présente l'ambition du projet : une minorité discriminée, voire persécutée (ce sont 500 000 personnes romani qui ont péri dans les camps nazis), est invitée à prendre la parole. Les directrices et directeur d'ouvrage y présentent la méthodologie de ce travail collaboratif ainsi que les enquêtes de terrain commandées dans ce cadre. La seconde partie s'attache à renverser le regard, par la reconnaissance notamment du rôle des représentations stéréotypées dans la culture et le folklore. Il s'agit également d'affirmer que le temps est venu de valoriser en tant que tel l'héritage et le patrimoine romani. La troisième partie, intitulée " Nous sommes le peuple romani " (Ian Hancock), propose une réflexion contrastée sur les notions d'appartenance et d'identité, au fil de la longue histoire des populations romani en Europe. La présentation de l'installation de l'artiste Gabi Jimenez, le " Musée du gadjo ", est centrale et prend le parti d'inverser la perception du lecteur/visiteur. La " gadjologie ", une science imaginaire et parodique de l'Autre selon la perception romani, que l'artiste met en scène vient ainsi révéler ainsi l'absurdité de l'essentialisation de l'Autre quand elle est poussée à son extrême. Se trouve aussi questionné par ce biais le rôle du musée d'ethnographie comme diffuseur d'une " vérité ". Au fil de l'ouvrage, on trouvera aussi des espaces sensibles et incarnés, avec la parole de quatre personnes vivant en France et appartenant chacune à un groupe romani distinct ; leurs récits personnels et familiaux entrent en résonnance avec une histoire européenne plus large et partagée. Enfin, le livre se clôt par une galerie de portraits de personnalités célèbres et moins connues, témoignant de la richesse des cultures romani et de la fierté des différentes communautés à contribuer à la diversité culturelle des sociétés européennes, afin d'affirmer haut et fort : " Barvalo ".

05/2023

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Pléiades

Romans et récits. Tome 1, Education européenne ; Les Racines du ciel ; La Promesse de l'aube ; Lady L. ; La Danse de Gengis Khan

La réalité n'est jamais aussi belle que le rêve d'une mère. Gary a connu d'éclatants succès, mais il a vu son oeuvre se heurter à des réticences. La popularité de l'écrivain et sa reconnaissance n'ont pas marché du même pas. Ce n'est pas exceptionnel, et cela s'explique. Les obstacles à une consécration rapide étaient multiples. Le style de l'homme a pu en être un. La manière du romancier en fut un autre. Gary a été un extraordinaire raconteur d'histoires et un inventeur de personnages en un temps, l' "ère du soupçon" , où ces notions, l'histoire, le personnage, étaient réputées périmées. Or pour lui, le récit - l'histoire - n'est pas la part honteuse du roman. Mais c'est se tromper lourdement que de voir en lui, sous ce prétexte, un écrivain conventionnel. La mise en abyme dans Education européenne, la polyphonie des Racines du ciel, la voix narrative fantastique dans La Danse de Gengis Cohn, la dimension autofictionnelle de La Promesse de l'aube et de Chien Blanc, la temporalité dans Les Enchanteurs ou l'inventivité verbale et les dispositifs narratifs d'Emile Ajar ne sont pas précisément des signes de soumission au roman hérité du XIX ? siècle. Encore faut-il, pour s'en aviser, ne pas passer à côté d'une prose qui mélange les genres, avoue ce qu'elle doit à la poésie et s'autorise toutes les libertés, à commencer par un humour qui a pu déconcerter autant qu'il séduit, parce qu'il va de l'ironie la plus fine au grotesque le plus assumé. Cet humour n'est pas un ornement : il est fondamental. D'une part, il conjure la tentation de l'idéalisme ; de l'autre, il permet de "désamorcer le réel au moment même où il va vous tomber dessus" . Le réel, voilà l'ennemi. Gary l'appelait "la Puissance" . Il a plusieurs visages : guerre, bêtise, vieillissement, solitude... Gary est sensible au tragique de l'Histoire et au malheur des hommes. Ca l'agace : "J'ai tout le temps mal chez les autres". L'humour est donc une défense. L'imaginaire, un refuge. "Nourris de ce siècle, jusqu'à la rage" , les livres de Gary ne sont pas des romans historiques. Ancrés dans l'imaginaire autant que dans l'Histoire, ils relèvent de la "mystique" littéraire de l'aventure qu'ont illustrée, avant lui, Kessel, Cendrars, Saint-Exupéry, et Malraux bien sûr. Cette conception de l'aventure n'est pas de celles qui produisent une littérature populaire de grande diffusion : elle engage une réflexion sur la condition humaine. L'aventure et l'imaginaire luttent aussi contre une forme particulière de réalité, l'identité. Chez Gary, le je est une clôture, un piège. Ce qu'il y a de permanent dans son identité l'exaspère. Il lui faut s'évader, courir le monde, muer comme un python, se "séparer un peu de [s]oi-même" , changer d'identité et vivre d'une vie pseudonyme, au risque de s'y brûler. "L'aventure Ajar"

05/2019