Manga Pika

Lors de notre visite de l'escale BD manga du Salon du livre nous avons pu rencontrer deux des fers de lance du manga à la française, Miya l'auteure de Vis-à-Vis et Reno Lemaire l'auteur de Dreamland. Les deux auteurs, ainsi qu'un troisième comparse, Vald, que nous n'avons pas pu rencontrer, avaient aussi prêté deux de leurs planches pour le concours SFR Jeunes talents en partenariat avec Pika. Les planches avec les dialogues et le scénario des lauréats étaient exposées à l'escale BD manga du Salon du livre.

Miya et Reno bonjour, alors tout d'abord comment se passe le Salon pour vous ?

Miya et Reno : Bonjour

Miya : Pour moi cela se passe vraiment bien, je rencontre mon public des gens de 18 à 20 ans. Et comme le tome deux de Vis-à-Vis vient de sortir, ils connaissent déjà un peu la série et savent quel personnage ils veulent que je leur dessine? C'est vraiment très plaisant.

Reno : Ben moi... j'aime bien la moquette (rires). Non c'est vrai sur Japan Expo, par exemple, tout est gris. Ici, il y a des couleurs partout c'est bien. Plus sérieusement, pour moi ça se passe toujours bien la rencontre avec le public.

ActuaLitté.com : Comment en êtes-vous venus à dessiner des manga ou peut-être devrait-on dire plutôt des manfra ?

Miya : On fait partie d'une génération dessins animés. Personnellement je n'ai pas accroché à la BD classique franco-belge. J'ai lu mon premier manga à 12 ans. Et je me suis mise à dessiner. J'avais besoin de raconter quelque chose. Comme j'avais une culture essentiellement manga, c'est dans cette forme que j'ai commencé à dessiner.

Reno : manga, manfra moi je suis dessinateur un point c'est tout. Je fais ce que j'aime. Après je comprends que l'on ait besoin de catégoriser mais bon. Sinon, pour répondre à la question, comme le disait Miya, on est de la génération Club Dorothé, donc a forcément été influencés. Et c'est normal de voir émerger des auteurs de manga en France. Je pense que la génération montante, qui va arriver, sera les vrais mangaka français. Nous, on sert d'éprouvette.

ActuaLitté.com : Et quels sont les manga (et ou BD) qui vous ont influencés ?

Reno : Contrairement à Miya, j'aime un peu de tout. Il y a autant du franco-belge que du manga. Il y a donc du Petit Spirou, du Walt Disney tout comme du Dragon Ball ou plus récemment One Piece, Berserk ou encore Le nouvel Angyo Onshi que je viens de terminer.

Miya : J'ai pas vraiment de titres spécifiques. À 16/17 ans je lisais beaucoup de Clamp. Je trouve qu'elles ont un graphisme élégant au service de l'efficacité. Sinon, aujourd'hui j'aime bien Paradise Kiss. Je lis principalement du shôjo et c'est aussi le style dans lequel je travaille. Par contre, je sais quand même reconnaître les qualités graphiques d'un bon shônen. Enfin, au niveau de l'animation, j'ai bien aimé Princess Mononoke et Porco Rosso.

ActuaLitté.com : On sent bien que les manhwa et manhua (les manga coréens et chinois) ont un style qui diffère quelque peu des manga. Pensez-vous qu'un style purement français émergera dans les manfra ?

Reno : On vient d'un pays avec une culture BD propre. Il y aura donc évidemment un style différent du manga. Par contre, en France on est plutôt individualiste et donc je ne pense pas qu'il y aura un style proprement français. Comme je le disais tout à l'heure, le manga fait par des auteurs français est un tout jeune marché qui se teste. Nous, on prépare le terreau pour la prochaine génération.

Miya : Pas mieux (rires). Oui, je pense effectivement aussi, qu'il y aura dans le manga à la française un mélange d'influences japonaises et européennes.

ActuaLitté.com : Miya une question juste pour vous. Ceux qui ont lu les bonus du premier tome de Vis-à-Vis comprendront. Avez-vous, enfin un chat ?

Miya : (rires) euh... non. En fait, j'aime pas trop les chats. Je préfère les chiens. Mais c'est étonnant de voir combien de mangaka possèdent un chat et parlent de lui dans leurs bonus.
ActuaLitté.com : Enfin, en parlant de la génération montante. Qu'avez-vous pensé des lauréats du prix SFR jeunes talents organisé en partenariat avec Pika ?

Miya : La rencontre avec les lauréats a été super sympa. Ce sont des gens passionnés et ils avaient bien trois styles différents. Un peu comme nous.

Reno : C'est bien ce qu'ils ont fait parce que c'est un exercice difficile. Sur le Salon du Livre, le stand est sympa, il est bien mis en valeur. Pour en revenir aux lauréats, ce sont tous des écrivains et c'est pas un hasard.

ActuaLitté.com : Reno Lemaire, Miya merci. Et bon courage pour la suite

Miya et Reno : Merci aussi, et bon courage pour le Salon...

Bon ce n'est plus une surprise quand on parle du classement des meilleures ventes de manga, on retrouve le dernier Naruto en tête. Et généralement, les deux tomes précédents sont aussi dans les 15 premiers du classement.

Pour ce premier classement de l'année, concernant les mois de janvier et février, selon Ipsos et Livres Hebdo, les bonnes habitudes sont conservées et Naruto est encore très largement représenté. Avec les tomes 40, 39 et 38 (dont c'est le 7e mois de présence dans le classement) Naruto est encore une fois incontestablement le maître du classement. Selon Ipsos, Kana qui détient les droits de Naruto a représenté 30 % des ventes de manga en France sur l'année 2008, avec une grande part due à Naruto justement.

Au niveau des éditeurs, 3 sont très fortement représentés dans le classement Glénat avec 5 titres classés, Kana avec 4 titres classés, et Pika avec 3 titres classés. Trois autres éditeurs se partagent le reste du classement Ankama, Ki-Oon et Panini avec chacun 1 titre classé.

Sans plus attendre voici le classement des 15 meilleures ventes de manga pour janvier et février 2009 selon Ipsos et Livres hebdo :

Naruto t.40 de Masashi Kishimoto chez Kana
2 -Fairy Tail t.4 de Hiro Mashima chez Pika
3-Hunter x Hunter t.25 de Yoshihiro Togashi chez Kana
4-One Piece t.47 d'Eiichiro Oda chez Glénat
5-Naruto t.39 de Masashi Kishimoto chez Kana
6-Berserk t.29 de Kentaro Miura chez Glénat
7-Dofus t.10 de Crounchann, Tot et Ancestral Z chez Ankama
8-Negima ! t.17 de Ken Akamatsu chez Pika
9-Übel Blatt t.8 d'Etorouji Shiono chez Ki-Oon
10- Bleach t.30 de Taito Kubo chez Glénat
11-Air Gear t.13 d'Oh ! Great chez Pika
12-Naruto t.38 de Masashi Kishimoto chez kana
13-Saint Seiya Épisode G t.14 de Masami Kurumada et Megumu Okada chez Panini
14- Eye Shield 21 t.23 de Yusuke Murata et Riichiro Inagaki chez Glénat
15-D. Gray-Man t.14 de Katsura Hoshino chez Glénat

Le prix MANGAwa est décerné par un jury de lecteurs aux mangas, manwha ou manhua dont le premier tome est paru dans l'année. C'est la plus ancienne récompense de ce genre.

Depuis quatre ans c'est la librairie l'Ange bleu située à Vendôme (dans le Loir et Cher) qui l'organise, mais cette année elle a été épaulée par une librairie spécialisée, mangawa qui elle est implantée à Cognac (en Charente). Plusieurs maisons d'édition sont partenaires de ce prix, elles fournissent notamment des exemplaires des titres en lice au jury. On compte dans celles-ci Asuka, Taifu Comics, Tonkam, Glénat, Paquet, Doki-Doki, Delcourt, Casterman et Kurokawa.

Ce sont pas moins de 124 collégiens et lycéens de ces régions, représentant leurs établissements scolaires et leurs camarades, qui ont voté pour leurs mangas préférés. Les lauréats du prix MANGAwa 2008 (concernant les titres sortis en 2007, hein) sont :

Dans la collection Seinen : de Hideaki Hataji et Jinpachi Môri édité par Delcourt avec 38 voix. Viennent ensuite et dans l'ordre : Candidate for Goddess (chez Ki-oon), Mushishi (chez Kana), Le bandit généreux (chez Paquet) et enfin La montagne magique (chez Casterman).

Dans la collection Shojo : Loveless de Kouga Yun édité par Soleil manga à égalité avec Princess Princess de Mikiyo Tsuda édité par Kami. Ils totalisent 30 voix chacun. Viennent ensuite et dans l'ordre : L’Académie Alice (chez Génat), Chocola et Vanilla (chez Kurokawa) et enfin Le passage (chez Taifu Comics).

Dans la collection Shonen : Mx zero, de Yasuhiro Kano édité par Tonkam avec 51 voix. Il est suivi par (toujours dans l'ordre) : Full ahead coco (chez Doki-Doki), Toto (chez Panini manga), School rumble (chez Pika) et pour finir Midnight du maître Osamu Tezuka (Chez Asuka).

La logique des âmes de Koênji Masahiko, pour le scénario et de Mori Yukinatsu pour les dessins est un manga fantastique sur fond de thriller psychologique alimenté par des légendes urbaines et des faits divers.

La brigade de recherches et d'investigations spéciales se retrouve avec une affaire brûlante et assez étrange. Une snuff vidéo* plonge les gens qui la voient dans un coma inexplicable. Afin de résoudre cette énigme le commandant de la brigade Higa Tetsuo ordonne à son lieutenant Kimizuka Akihiko d'aller chercher l'agent Amamiku Matsuri qui est pour l'heure internée dans un hôpital psychiatrique.

Un agent très spécial

Elle est accusée d'avoir poussé un suspect au suicide. En fait Matsuri est une Yuta (une sorte de Chaman dans les croyances d'Okinawa) et son rôle est de chasser les mauvaises mabui (l'équivalent de l'âme, sauf que dans les croyances d'Okinawa, chaque personne en possède sept, et elles contrôlent les sept sentiments humains) qui ont envahi le corps de certaines personnes.

Un manga inspiré de faits divers et de légendes urbaines

Une ambiance sombre un peu gothique et gore soutient un scénario fin et basé sur des faits divers ou des légendes urbaines. D'ailleurs à la fin de chaque affaire, vous aurez droit à une fiche qui recadre le fait divers qui a inspiré l'histoire à nos deux mangaka. Et ça fait froid dans le dos. Chaque affaire à laquelle est confrontée la brigade de recherches et d'investigations spéciales est servie par une bonne intrigue très bien ficelée. On tourne les pages avec avidité et il est quasiment impossible de décrocher de ce manga avant la dernière page.

Un thriller psychologique

Les personnages sont bien travaillés tous avec un caractère différent qui s'esquisse petit à petit au fil des pages. L'aspect psychologique est très important dans ce manga, il participe à l'ambiance comme à l'intrigue. Il est très finement distillé. On est presque à la frontière d'un MPD Psycho (un des titres les plus aboutis dans ce domaine, édité par Pika), avec une touche de fantastique en plus.

Esquisser l'âme, un travail épuré

Les traits des personnages sont épurés, et pourtant ils laissent parfaitement deviner la psychologie des personnages sans exagération. Ils nous sont étrangers mais étonnamment on arrive quand même à les comprendre un peu. Particulièrement en ce qui concerne Matsuri, le personnage le plus insaisissable, autant graphiquement que dans le scénario. Après tout c'est quand même une chaman qui a vécu et qui voit des choses que nous ne sommes pas à même de comprendre.

Une série en 2 tomes, hélas !

Avec son ambiance gothique et gore, un scénario efficace, des intrigues bien ficelées à faire froid dans le dos, une psychologie travaillée en finesse et distillée avec mesure et un dessin épuré qui sert et transcende le tout à merveille, ce titre à tout ce qu'il faut pour devenir un incontournable du genre. À ne rater sous aucun prétexte. Attention la série est finie au Japon et elle ne compte que deux volumes. Ce qui représente à nos yeux le plus grand reproche que l'on pourrait lui faire. Cela dit le deuxième volume devrait vraiment être excellent. Nous vous en reparlerons.

La logique des âmes de Koênji Masahiko et de Mori Yukinatsu est édité par Doki-Doki. Vous ne manquerez pas de frissonner tout au long des 192 pages noir et blanc. Et vous pourrez vous le procurer pour 6,95€. Le volume 2 est prévu pour le mois de juin.

*Snuff movie : vidéo mettant en scène des sévices réellement infligées aux acteurs dont certaines vont jusqu'à la mort de ceux-ci.