#Roman francophone

Dans les boyaux. & autres petites histoires de la Grande Guerre

Xavier Lhomme

A l'arrière comme sur la ligne de front, la guerre agit sur les existences comme une grande lessiveuse, et les destins qui a priori devaient continuer à s'ignorer, s'entrecroisent dans une sorte de chorégraphie macabre. Au fil des histoires, Xavier Lhomme nous fait pénétrer de plain-pied dans la boue des tranchées. Grâce à un vocabulaire précis et des recherches poussées sur le sujet, l'auteur nous fait vivre la "Grande Guerre" comme si nous devions rejoindre notre régiment dès demain, et partager le pain et l'espoir de ces hommes et de ces femmes, dont les vies mutilées hantent notre Histoire.

Par Xavier Lhomme
Chez A PRECISER

0 Réactions | 1 Partages

Editeur

A PRECISER

Genre

Contes et nouvelles

1

Partages

– Je m’appelle pas Imbécile et je m’appelle pas Gros lard.

Dans la grange rafistolée, un grand et gros jeune soldat aux joues rouges se tient debout devant une table formée d’une porte en bois posée sur deux tréteaux. Il est crotté jusqu’aux genoux et sa capote ruisselle. Assis de l’autre côté, le lieutenant lève à peine le nez du cahier dans lequel il continue à écrire.

– Le gros lard imbécile, il va commencer par m’appeler mon lieutenant, et il va me dire son nom.

– Soldat Ponthier Eugène, mon lieutenant. On m’a dit de venir ici, mon lieutenant. Faites excuses, mon lieutenant, je m’appelle pas Imbécile et je m’appelle pas Gros lard, mon lieutenant.

– Il répète ça encore une fois, le gros lard, et je le mets aux arrêts. Qu’est-ce qu’il sait faire ?

– Je sais faire la cuisine, je sais conduire un tracteur, je sais tirer au fusil, mon lieutenant. Je sais lire et je sais écrire, mais pas très vite, mon lieutenant.

– Ici, il est à l’ambulance médicale, le gros lard, il sera brancardier. Il va aller voir le caporal Briqué. Rompez.

Pas fâché d’en avoir fini avec le lieutenant, Eugène Ponthier sort de la grange et remonte la coulée de boue qui serpenteentre les bâtiments en ruine de ce village de l’Argonne. Un soldat lui montre où trouver le caporal, dans l’un des nombreux trous qui ont été creusés à flanc de colline et aménagés en cellules individuelles. Dans son terrier chichement meublé, le caporal est en train de fumer la pipe. Le jeune soldat s’avance, mais reste sur le seuil, pour ne pas mouiller le sol.

– Je m’appelle pas Imbécile et je m’appelle pas Gros lard.

Commenter ce livre

 

30/10/2022 136 pages 15,00 €
Scannez le code barre 9782494255029
9782494255029
© Notice établie par ORB
plus d'informations