Revivre à Butternut Tome 2 : Un merveilleux été

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En entendant le couinement perçant du moteur du pick-up de sa mère, Daisy Keegan fit ce que cette dernière lui avait appris à faire en de telles situations. Elle monta le son de la radio. Là ! Problème résolu. Si le bruit gênant était noyé, il n’existait pas. C’était aussi simple que cela.

Sauf que ça ne l’était pas. Au contraire. Daisy augmenta le volume au maximum. Peine perdue.

— Non mais je rêve, marmonna-t-elle.

Pitié, pas aujourd’hui ! Elle consulta l’horloge du tableau de bord. Elle disposait de trente minutes exactement pour arriver à la maison, décharger la camionnette remplie des provisions achetées ce matin pour le restaurant et enfiler une tenue à peu près présentable pour déjeuner avec ses parents.

« Déjeuner avec mes parents », songea-t-elle en s’efforçant sans grand succès d’ignorer le vacarme de la radio. Étrange concept. Pas pour tout le monde, bien sûr, mais pour elle, oui. À sa connaissance, Daisy n’avait jamais, au cours des vingt et un ans de son existence, partagé un repas avec à la fois son père et sa mère. « Et peut-être, lui chuchotait son subconscient, avec raison. »

Un événement alarmant vint interrompre le fil de ses réflexions. Le véhicule perdait de sa puissance. Rapidement. Daisy pompa l’accélérateur, en vain. Elle jeta un coup d’œil dans le rétroviseur. Par bonheur, il n’y avait personne derrière elle. Sur cette petite route de campagne qu’elle avait empruntée en guise de raccourci, la circulation était réduite. N’empêche qu’elle ne pouvait pas y rester. Pas si le pick-up devait tomber en panne.

« Réfléchis, Daisy, réfléchis. » Il y avait une station-service à deux kilomètres environ, à la sortie de Winton. Avec un peu de chance, et Dieu savait qu’elle en méritait un peu, elle pourrait l’atteindre. Ensuite, avec encore un peu plus de chance, elle parviendrait à convaincre quelqu’un d’effectuer la réparation ou, si le temps manquait, de lui bricoler le moteur de manière à ce qu’elle puisse poursuivre son trajet jusqu’à la maison. Elle serait sans doute trop en retard pour décharger ses marchandises et se changer mais tant pis. Elle se rendrait directement dans la rue principale de Butternut, foncerait chez Pearl, se glisserait sur la banquette, leur adresserait un joli sourire et lancerait une phrase du genre : « On devrait faire ça plus souvent ! »

« Non », décida-t-elle en bifurquant vers Winton. Le sarcasme, ce n’était pas son style. Elle dirait plutôt : « On aurait dû faire ça plus tôt », ou « Je sais qu’on n’a jamais fait ça auparavant mais désormais, on pourrait instaurer une sorte de tradition… »

Daisy cherchait toujours divers préambules à la conversation quand elle s’arrêta à la station-service. Le pick-up n’avançait presque plus et le hululement du moteur était si aigu qu’un homme se rua hors du bureau pour voir ce qui se passait. Daisy baissa le son de la radio et descendit sa vitre. Un souffle d’air torride réduisit à néant le système, déjà inefficace, de climatisation.