#Essais

Manuel. Suivi des Entretiens rassemblés par Arrien

Epictète

Pour atteindre le bonheur, tout est question d'attitude. Sur l'avis des autres, la richesse, la chance ou la mort, nous n'avons pas de prise. C'est donc aux opérations de l'âme qu'il faut accorder tous nos soins et apprendre à jouir des choses matérielles sans nous y attacher. Désirer que les choses arrivent comme elles arrivent, voilà la clé pour Épictète. En illustrant cette voie de manière concrète, le philosophe expose avec simplicité et sagesse une manière différente de voir le monde qui affranchit l'homme des angoisses et des préoccupations de sa condition. Compilé par Arrien, le Manuel est suivi de morceaux choisis parmi les Entretiens avec ce même disciple  :   "À ceux qui craignent la pauvreté" , "Contre les gens querelleurs et méchants" ou encore "Pour ceux qui parlent trop aisément d'eux-mêmes" . . .

Par Epictète
Chez J'ai lu

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J'ai lu

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Manuel

 

 

I. DISTINCTION ENTRE CE QUI DÉPEND DE NOUS ET CE QUI NE DÉPEND PAS DE NOUS

 

1. Des choses les unes dépendent de nous, les autres ne dépendent pas de nous. Ce qui dépend de nous, ce sont nos jugements, nos tendances, nos désirs, nos aversions, en un mot tout ce qui est opération de notre âme ; ce qui ne dépend pas de nous, c’est le corps, la fortune, les témoignages de considération, les charges publiques, en un mot tout ce qui n’est pas opération de notre âme.

2. Ce qui dépend de nous est, de sa nature, libre, sans empêchement, sans contrariété ; ce qui ne dépend pas de nous est inconsistant, esclave, sujet à empêchement, étranger.

3. Souviens-toi donc que si tu regardes comme libre ce qui de sa nature est esclave, et comme étant à toi ce qui est à autrui, tu seras contrarié, tu seras dans le deuil, tu seras troublé, tu t’en prendras et aux dieux et aux hommes ; mais si tu ne regardes comme étant à toi que ce qui est à toi, et si tu regardes comme étant à autrui ce qui, en effet, est à autrui, personne ne te contraindra jamais, personne ne t’empêchera, tu ne t’en prendras à personne, tu n’accuseras personne, tu ne feras absolument rien contre ton gré, personne ne te nuira ; tu n’auras pas d’ennemi, car tu ne souffriras rien de nuisible.

4. Aspirant à de si grands biens, songe qu’il ne faut pas te porter mollement à les rechercher, qu’il faut renoncer entièrement à certaines choses et en ajourner d’autres quant à présent. Mais si outre ces biens tu veux encore le pouvoir et la richesse, peut-être n’obtiendras-tu même pas ces avantages parce que tu aspires en même temps aux autres biens, et, en tout cas, ce qu’il y a de certain, c’est que tu manqueras les biens qui peuvent seuls nous procurer la liberté et le bonheur.

5. Ainsi, à toute idée rude, exerce-toi à dire aussitôt : « Tu es une idée, et tu n’es pas tout à fait ce que tu représentes. » Puis examine-la, applique les règles que tu sais, et d’abord et avant toutes les autres celle qui fait reconnaître si quelque chose dépend ou ne dépend pas de nous ; et si l’idée est relative à quelque chose qui ne dépende pas de nous, sois prêt à dire : « Cela ne me regarde pas. »

 

 

II. APPLIQUER LA DISTINCTION AU DÉSIR ET À L’ACTION

 

1. Souviens-toi que ce que le désir déclare qu’il veut, c’est d’obtenir ce qu’il désire, que ce que l’aversion déclare qu’elle ne veut pas, c’est de tomber dans ce qu’elle a en aversion ; et quand on n’obtient pas ce qu’on désire, on n’est pas heureux, quand on tombe dans ce qu’on a en aversion, on est malheureux. Si donc tu n’as d’aversion que pour ce qui est contraire à la nature dans ce qui dépend de toi, tu ne tomberas dans rien de ce que tu as en aversion ; mais si tu as de l’aversion pour la maladie, la mort ou la pauvreté, tu seras malheureux.

2. Cesse donc de donner pour objet à ton aversion rien de ce qui ne dépend pas de nous, transporte-la sur ce qui est contraire à la nature dans ce qui dépend de nous. Quant au désir, supprime-le absolument pour le moment. En effet, si tu désires quelque chose qui ne dépende pas de nous, infailliblement, tu ne seras pas heureux ; et quant aux choses qui dépendent de nous, qu’il est beau de désirer, il n’en est aucune qui soit encore à ta portée. Borne-toi à tendre vers les choses et à t’en éloigner, mais légèrement, en faisant des réserves, et sans ardeur.

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trad. Courdaveaux Victor, Thurot Jean-françois, Courdaveaux Victor, Thurot Jean-françois, Victor Courdaveaux, Jean-François Thurot, Courdaveaux Victor, Thurot Jean-françois
15/06/2022 80 pages 2,00 €
Scannez le code barre 9782290376478
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