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Cesare Capitani

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Religion

Chrétiens de droite et de gauche

Nous avons décidé de consacrer notre second cahier à l'engagement politique du chrétien en raison du trouble que cet engagement développe dans certaines consciences. Il n'est pas rare que les prises de position d'un chrétien suscitent la surprise et parfois le scandale chez un autre chrétien. Les positions politiques des catholiques sont en effet des plus diverses et cette diversité prend aux yeux de beaucoup l'apparence d'une division. Dans une Eglise qui se proclame Une, comment des opinions diamétralement opposées peuvent-elles apparaître ? Où se situe l'Unité entre des hommes qui s'opposent à peu près constamment et à peu près sur tout ? Notre but, en organisant ce dialogue, est justement de faire apparaître sur quels points précis portent les divergences et sur quel point précis l'unité demeure. Notre but est aussi de montrer que, si la division est une plaie mortelle, la diversité est nécessaire au sein d'un organisme vivant. L'opposition ne saurait disparaître dans un domaine où les jugements restent relatifs et soumis à des révisions constantes. Il n'y a pas de vérité absolue en politique et on ne saurait chercher l'absolu dans ce domaine relatif. Mais le chrétien de droite comme de gauche se réclament d'un autre absolu. Ils prétendent l'un et l'autre rendre à Dieu ce qui est à Dieu - ils s'opposent seulement quand il s'agit de rendre à César ce qui lui appartient. Nous avons demandé à deux hommes connus pour leurs positions publiques divergentes de représenter ce qu'il est convenu d'appeler la "droite" et la "gauche" catholique. L'un et l'autre se sont engagés avec sincérité dans ce débat et nous estimons que leur rencontre a répondu à notre attente. Jean de Fabrègues. Né à Paris le 8 janvier 1906. Etudes de philosophie à la Sorbonne. Professeur au Lycée de Laon. Quitte l'enseignement pour l'édition et le journalisme. Anime les cahiers Civilisation avec Duhamel, Jaspers, Gilson, Ramuz, Cendrars, Giraudoux, Gabriel Marcel et toute l'élite intellectuelle européenne opposée au marxisme. Dirige avec Thierry Maulnier et René Vincent la revue d'avant-garde Combat. Prisonnier, puis rapatrié, il fonde en zone libre l'hebdomadaire catholique Demain où il publie notamment les oeuvres de ses amis encore prisonniers. A partir de 1945 consacre l'essentiel de son temps à La France catholique dont il devient directeur en 1956. Son journal qui ne représente pas tant la droite catholique que la tradition catholique le situe parmi l'un des hommes qui dirigent l'opinion en France. Jean de Fabrègues a aussi une oeuvre personnelle assez considérable parmi laquelle il faut signaler : La Révolution ou La Foi, Le Mariage chrétien, Edith Stein, Bernanos tel qu'il était, Christianisme et Civilisations, Charles Maurras et son Action française. Jacques Madaule. Né à Castelnaudary (Aude) le II octobre r898. Fait dans cette ville toutes ses études secondaires. Etudes supérieures (Licence, puis Agrégation d'Histoire et de Géographie) à l'Université d

01/1966

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Régionalisme

Le Chevalier Bayard héros national suivi d'un Petit dictionnaire des personnages les plus importants de son époque (1476-1524)

Français de fraîche date, ce livre sur Bayard ne veut pas vous porter ombrage. Il retrace la vie d'un homme courageux aussi bien à la guerre qu'en temps de paix. Or, le courage n'a pas de frontières. Notre époque manque cruellement de chevaliers. Un peuple qui ne cultive pas la mémoire de ses héros perd peu à peu son identité. De ce fait il devient la proie des instincts les plus bas et... des envahisseurs. Ce livre écrit par un sophrologue, c'est-à-dire quelqu'un qui cherche à développer le phare de la conscience sans se couper de ses racines, s'adresse à ceux qui s'intéressent à l'histoire vraie et aux exploits des Chevaliers. On y suit pas à pas la progression de Pierre Terrail, issu d'une famille pauvre, jusqu'à ce qu'il devienne le célèbre Bayard, l'héroïque défenseur du pont du Garigliano et de Mézières. Des précisions importantes sont apportées sur la fin du Chevalier. L'histoire moderne démontre que Bayard n'est pas mort lors de la " Camisade " de Robecq, comme on le crut longtemps, mais à Rosavanda. Un chapitre est consacré à l'après-Bayard, pour que l'esprit de Bayard continue à vivre. Effectivement les leçons qu'il convient de tirer de sa vie sont riches en enseignements et constituent une source de profits pour tous, surtout à un siècle comme le nôtre qui a vu sévir d'innombrables massacres et des génocides. Un petit dictionnaire des personnages les plus importants de l'époque où vivait le Chevalier des Chevaliers aide le lecteur à s'y retrouver. Il y est question des trois rois que servit Bayard (Charles VIII, Louis XII et François 1er) mais aussi de personnages pittoresques tels que le barbu raccourcisseur de femmes, Henri VIII Roi d'Angleterre, les Borgia (le pape Alexandre et ses enfants César et Lucrèce), le pape guerrier Jules II et bien d'autres dont la cupide Louise de Savoie... À travers ce petit dictionnaire c'est tout une époque qui revit à nos yeux. Ce livre traite des prodiges de Bayard, bien sûr, mais aussi de ses contemporains, tant il est vrai qu'on ne peut pas séparer un homme de son environnement et de son époque. Il est un document nouveau en ce sens que bien des points restaient obscurs jusque-là dans la vie du Chevalier sans peur et sans reproche, en dépit des efforts de chercheurs comme Camille Monnet et Paul Ballaguy. Un seul exemple : Bayard était célibataire et pourtant il a eu une fille. Là était son secret. Le nom de la mère de sa fille c'est ce que tente de préciser ce livre, documents et astrologie chinoise à l'appui. Pour la première fois au monde un sophrologue soucieux du problème de l'Identité Nationale ose se faire historien...

07/1990

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Littérature française

Hâtez-vous les oiseaux

Atalante, Cassandre, Gaspard, ThéodoreAtalante - Les mains expertes et agiles de Clotho courent sur le fuseau, se hâtant de créer cette nouvelle vie avant qu'Althée ne mette au monde son enfant. De ses doigts aériens comme des papillons, elle peigne les brins avec habileté, car le fil du destin du garçon qui va naître se doit d'être solide, satiné et brillant. Cassandre - Une lumière vive coule à flots des flambeaux, des torches et des chandelles de cire couronnant les lustres circulaires. Ruisselant des plafonds à caissons, jaillissant des parois surchargées de la salle de bal, elle joue avec les matières et les couleurs. Les brocarts, les satins, les soies et les damas resplendissent dans un chatoiement explosif de violets, d'orangés, de verts, de bleus, de jaunes. Gaspard - En ce 25 octobre de l'an de grâce 1781, avant que je ne meure, ils m'ont dit : « Repens-toi ! Tu sauveras ton âme ! » Je leur ai ri au nez. Moi qui riais déjà, à ma venue au monde, de ma première farce - celle de ma naissance - il était naturel que mon dernier soupir s'exhalât dans un rire !... Théodore - La nouvelle explosa comme un coup de canon : « Le Roi Soleil est mort ! » Je me trouvais alors à la cour de Bavière, grâce à ma protectrice, l'épouse de Monsieur, duchesse d'Orléans et belle-sour du Roi. J'y étais capitaine du régiment d'infanterie de l'Électeur Maximilien-Emmanuel, que le traité de Bade venait de remettre sur le trône.Découvrez un recueil de nouvelles historiques qui vous feront voyager dans des histoires et des univers bien différents !EXTRAITLe jour tombait déjà. Alors que je lançais mon cheval au galop, j'aperçus des lueurs s'élevant du château de Julhans, juché à flanc de coteau sur la colline de Font-Blanche. Julhans était en fête ! Et l'on avait omis d'y convier Gaspard !Je ne pus résister à mon esprit frondeur et, saisissant au vol l'occasion qui m'était donnée de me gausser aux dépens des noceurs, je fis signe à mes hommes de rentrer au bercail tandis que je fonçai vers la propriété des dames de Garnier.À l'époque où le comte de Provence Guillaume II, vassal de Conrad le Pacifique, roi de Bourgogne et Provence, chassa les Sarrazins, les terres de Julhans furent concédées au Vicomte de Marseille. Le château qu'il bâtit dès le Xe siècle échut à Roncelin, un moine défroqué qui, pour payer ses dettes, le céda aux évêques d'Antibes et de Riez, moines de Saint-Victor. Passé sous la houlette de Hugues Geoffroy Sarde puis de Hugues de Baux, Baron d'Aubagne, le domaine fut vendu à Jacques de Condolle, avant de devenir propriété de la famille de Garnier par l'union des deux frères Garnier avec deux demoiselles de Condolle.À PROPOS DE L'AUTEURLiliane Cesari est née à Marseille en 1954. Après des études littéraires, elle suit les cours du CPAG à l'IEP d'Aix-en-Provence et passe le concours d'Inspecteur à la Poste. Depuis 2010, elle se consacre enièrement à l'écriture, et à sa passion pour l'Histoire et l'Antiquité.

07/2017

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Critique littéraire

Histoire romaine. Tome 5, Livre IX, Le livre illyrien ; Fragments du livre macédonien, Edition bilingue français-grec ancien

Ce livre, le neuvième de l'Histoire romaine, marquait une étape importante dans la série des guerres étrangères puisqu'il racontait comment les Romains, intervenant pour la première fois dans le bassin oriental de la Méditerranée, avaient vaincu et soumis Philippe V puis anéanti la monarchie macédonienne après la défaite de Persée à Pydna. Appien lui avait donc donné le titre de "Livre macédonien" et avait ajouté une sorte d'appendice, le "Livre illyrien", où il exposait les circonstances de la conquête, achevée par Auguste, des régions qui formeront l'Illyricum. Fâcheusement, le Livre macédonien fut perdu, peut-être dès le IXe siècle de notre ère et le Livre illyrien aurait sans doute connu le même sort si les éditeurs byzantins ne l'avaient pas inséré à la suite du livre V des Guerres civiles. Paradoxalement, nous avons donc perdu ce qu'Appien considérait à juste titre comme le plus important et conservé un appendice moins travaillé. Heureusement, les Extraits constantiniens nous ont conservé les passages du Livre macédonien relatifs aux négociations entre Romains et Macédoniens à l'occasion des trois guerres qui les opposèrent. On constate qu'Appien suivait une tradition différant sensiblement de celle qui prévaut depuis Polybe et, en particulier, qu'il n'était pas dupe des accusations portées contre Persée par des adversaires décidés à l'anéantir, quoi qu'il fît. Il était donc utile de rééditer et de traduire ces pages où il apparaît qu'Appien jugeait justifiée la rancune de Philippe V, ulcéré de l'ingratitude des Romains qu'il avait loyalement soutenus contre Antiochos III, et portait sur Persée un jugement favorable en montrant que ses qualités l'avaient rendu suspect aux Romains. Le Livre illyrien, malgré sa brièveté, reste une source historique de première importance. Dans la première partie du livre, consacrée aux guerres menées par les Romains dans la région de l'Adriatique contre des populations pratiquant la piraterie, Appien suit une tradition originale fort éloignée de Polybe, en particulier pour tout ce qui concerne Démétrios de Pharos. Dans la seconde partie, la plus détaillée, Appien relate, d'après les Mémoires d'Auguste, les opérations menées par celui-ci dans les Balkans après sa victoire sur Sextus Pompée et l'élimination de Lépide. Même s'il ne s'agit que d'un résumé, d'ailleurs plus complet que celui que Dion Cassius donne des mêmes événements d'après la même source, nous remontons à travers Appien au témoignage d'Auguste, qui, dirigeant les opérations et participant aux combats, donna de ces guerres engagées contre des populations mal connues une relation qui s'apparentait, semble-t-il, aux fameux "Commentaires" de César. Bref, en dépit des accidents de la tradition manuscrite qui ont entraîné la perte d'une partie de sa substance, et plus particulièrement le récit des fameuses batailles de Cynoscéphales et de Pydna, ce livre IX de l'Histoire romaine reste une source documentaire de première importance dont la réédition sur des bases scientifiques solides et la traduction en langue française paraissent entièrement justifiées. Le commentaire a bénéficié d'un concours de premier ordre, celui du professeur Pierre Cabanes, le meilleur connaisseur français des questions illyriennes.

11/2011

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Critique littéraire

Lettres familières : Rerum familiarium. Tome 6, Livres XX à XXIV, Edition bilingue français-latin

Ce volume, dernier des Lettres familières de Pétrarque, clôture, après la publication des cinq volumes des Lettres de la vieillesse, advenue en décembre 2013, l'immense correspondance de Pétrarque dont la publication a été entreprise en l'année 2002 sous la direction de Pierre Laurens. Le texte est celui de Vittorio Rossi comme dans tous les autres volumes de la série, André Longpré a donné la traduction, révisée par Pierre Laurens, Ugo Dotti, auteur de la Vita di Petrarca, traduite en français et récemment rééditée et augmentée, et à l'heure actuelle le meilleur connaisseur de la biographie du poète, est, comme dans les précédents volumes, responsable des Notices et des Notes, mises en français par Frank La Brasca. Ecrites entre 1358-59 (Pétrarque est alors à Milan) et 1366 (il est depuis 1362 installé à Venise), ces lettres, comme celles des périodes précédentes se partagent entre les deux registres, public et privé. Au premier appartiennent notamment les lettres du vingtième livre où l'auteur, qui lance au même moment les sévères Sine nomine, dénonce la corruption galopante de l'Eglise, représentée à cette date par Innocent VI ; ou les lettres du même livre et du suivant, adressées à l'empereur, à l'impératrice, aux dignitaires laïques et ecclésiastiques, où le poète, qui s'est acquis une remarquable faveur auprès de la très prestigieuse cour de Prague, se réjouit de voir l'humanisme franchir les Alpes, mais ne cache pas sa désillusion, causée par la fuite de Charles IV après son couronnement à Rome qui avait suscité tant d'espérances et, avec force et autorité, exerçant la mission du nouvel intellectuel, rappelle inlassablement à César à ses devoirs. Même si elles ne sont pas politiques au sens strict du terme, ces missives tendent, dans l'économie particulière du recueil, à promouvoir l'auteur - l'intellectuel nouveau de l'humanisme - à une position plus élevée au regard des cercles politiques eux-mêmes, sinon toujours comme un conseiller entendu, du moins comme un maître écouté. - En contrepoint et relevant du registre privé les lettres qui traduisent très librement les dispositions du poète vieillissant, telle la lettre adressée à Jean Boccace au début de l'été 1359, dans laquelle Pétrarque, que son ami soupçonne de nourrir de la jalousie à l'endroit de Dante, se défend contre ce reproche tout en défendant sa conviction que seul le latin et non la langue vernaculaire est la langue par excellence qui convient à toute oeuvre de grande volée. Mais le trait qui distingue ce dernier volume des précédents et met le sceau ultime sur ce monumental recueil, est ; le caractère du vingt-quatrième livre, adressé Antiquis illustribus. Dans ce livre, préfacé par la lettre à l'ami de jeunesse, Philippe de Cabassolles, Pétrarque dialogue, message suprême délivré par l'humaniste à l'antiquité reconquise, avec les plus illustres des Anciens : Varron, Cicéron, Quintilien, Tite Live, Asinius Pollion, Horace, Virgile, Socrate. Particulièrement remarquables sont les deux lettres à Cicéron, la première, écrite après sa découverte des Lettres à Atticus, dans laquelle, ira dictante, il reproche sévèrement à son auteur préféré d'avoir été infidèle à son message philosophique, et la deuxième, où il lui dit sa dévotion et lui restitue son estime et les deux lettres, à Horace et à Virgile, l'une en mètre lyrique, l'autre en hexamètres, double hommage poétique et déclaration d'amour à ses deux poètes de prédilection.

07/2015

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Musées français

L' oeil vérité. Le musée au second degré

L'oeil vérité Le musée au second degré Parcours de la collection du MAC VAL 256 pages 190 reproductions Format : 21 x 17 cm Broché, sous jaquette toilée Textes : Marie Castaing, Florence Cosson, Béatrice Joyeux-Prunel, Céline Latil, Anaïs Linares, Ilan Michel, Margaut Segui, Nicolas Surlapierre Graphisme : Lisa Sturacci Editions du MAC VAL ISBN : 978-2-900450-17-8 Office : 18 août 2023 15 euros Sous le signe de Gérard Genette et de son ouvrage Palimpsestes. La littérature au second degré (1982), cette nouvelle présentation de la collection du MAC VAL a souhaité répondre à une demande : l'envie de retrouver des oeuvres qui, pour la plupart, n'avaient pas été montrées depuis l'ouverture du musée en 2005. Il est rapidement apparu qu'il était possible d'écrire à partir d'elles, selon une unité de temps et de lieu, une histoire de l'art contemporain en France. Tous les artistes qui ont participé de cette histoire ne sont pas forcément conservés au musée, toutefois les principaux s'y retrouvent. Entre la première oeuvre de ce parcours et la dernière, il est également possible de voir que la distinction entre art moderne et contemporain ne s'est pas faite immédiatement, contrairement à ce que les historiennes et les historiens de l'art ont pu dire en avançant la date un peu trop commode de 1945. Cette nouvelle présentation est aussi le récit d'une distinction et d'une construction critique et historienne. Il s'avère qu'en suivant les mouvements, cet accrochage relate les différents débats qui ont servi pour établir des signes distinctifs entre moderne et contemporain. Ce nouvel opus offre une réflexion sur le passage entre un art moderne, traditionnellement défini en rupture, et un art contemporain qui ne se satisfait pas simplement de ce prérequis. Ce n'est donc plus simplement des notions historiques ou chronologiques, mais une nouvelle relation aux problématiques. Dans le sillage de l'exposition mythique Responsive Eye (1965) ou plus proche de celle L'oeil moteur (2005), plutôt que de structurer l'accrochage de la collection en donnant le nom des mouvements, l'oeil a été choisi comme dénominateur commun : l'oeil retors, l'oeil abusé, l'oeil imprévisible, l'oeil attendri, l'oeil pilote... Chaque partie de l'exposition sera ponctuée de contrepoints qui, parallèlement au profil historique, affirmeront que ce ne sont pas les oeuvres qui sont post-modernes mais l'accrochage qui assume son caractère presque citationnel. Il essaye de reconstituer ce que pourrait être désormais un musée d'art contemporain modèle, une sorte de "musée témoin" , vestige d'une histoire de l'art clé en main. Commissariat général : Nicolas Surlapierre. Exposition au MAC VAL à partir du 8 juin 2023. Avec les oeuvres de Gilles Aillaud, Arman, Geneviève Asse, Martin Barré, Robert Breer, Anne Brégeaut, Joël Brisse, Camille Bryen, Marie-Claude Bugeaud, Pierre Buraglio, Daniel Buren, Pol Bury, César, Jacques Charlier, Roman Cieslewicz, Delphine Coindet, Emile Compard, Olivier Debré, Jean Degottex, Despatin et Gobeli, Daniel Dezeuze, Erik Dietman, Robert Doisneau, Jean Dubuffet, François Dufrêne, Erro, Sylvie Fanchon, Jacques Faujour, Philippe Gronon, Raymond Hains, Jean Hélion, Christian Jaccard, Alain Jacquet, Asger Jorn, Raymond Hains, Hans Hartung, Ladislas Kijno, Jacqueline Lamba, Alberto Magnelli, Robert Malaval, Alfred Manessier, Bernard Moninot, Jacques Monory, Bernard Pagès, Gina Pane, Pavlos, Bruno Peinado, Daniel Pommereulle, André Raffray, Bernard Rancillac, Martial Raysse, Judit Reigl, Germaine Richier, Willy Ronis, François Rouan, Sarkis, Peter Saul, Jean-Claude Silbermann, Jesus Rafael Soto, Daniel Spoerri, Peter Stämpfli, Takis, Marino di Teana, Hervé Télémaque, Luis Tomasello, Geer van Velde, Claude Viallat, Jacques Villeglé, Sabine Weiss...

07/2023

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Littérature française

Idées de la nuit. Suivi de L'Homme-Balai

Idées de la nuit poursuit, dans sa forme quasi nietzschéenne, faite de courts chapitres qui sont autant de poèmes en prose, le chemin ouvert par Traité des sirènes, paru il y a deux ans au Bruit du temps. Mais, si la musique n'est pas absente du présent livre, avec des chapitres comme "Le chant dehors" , ou "La cigale" , la réflexion porte ici, de manière plus générale, sur la poésie, le fait poétique de la lumière : comment cette "autre clarté" qui, chez Hölderlin est donnée au poète mais qui, pour Philippe Beck semble dans le tunnel de l'époque sans cesse rejetée, et devant donc être tout aussi inlassablement cherchée, gagnée sur l'obscurité. Tout le livre peut apparaître comme une suite de variations sur ce thème des relations du clair et de l'obscur, de la poésie et de la nuit ; en même temps qu'il propose une sorte de panorama de ce thème poético-philosophique, de Platon ("La fin de la caverne") aux romantiques ("Le goût pour la nuit, une bizarrerie") et jusqu'à Mandelstam ("Projet de suppression de la lune"). Mais il y a surtout, dans ces pages, une tentative de créer une sorte de nouvelle cosmogonie, une "phénoménologie spéculative frottée de réel" , pour reprendre les mots que lui-même utilise pour définir l'oeuvre de Merleau-Ponty. Et cela afin de décrire de manière absolument inédite le monde, l'homme, l'origine de la pensée, en n'hésitant pas à convoquer les "tournoiements intuitifs" de l'étonnant Jean-Pierre Brisset (dont on doit la redécouverte à l'Anthologie de l'humour noir d'André Breton). Philippe Beck affirme ici une fois de plus son refus de la nuit pure de l'idéalisme platonicien, sa volonté de décrire notre condition d'hommes reliés par les paroles et les pensées, et plaide pour le poète chercheur qui fait danser les idées ou joue le rôle de l'éclaireur, sachant que ce monde-ci détient tous les secrets qu'il exprime. L'homme-balai, le deuxième livre de ce recueil est comme une mise en application pratique de cette ambition proclamée. Dans ce Journal de "non confinement" (parce qu'il ne s'agit en rien d'un journal intime mais de paroles non-cloisonnées, toujours adressées à un autre que soi) tenu quotidiennement en 2020, Philippe Beck tente de comprendre le sens de l'expérience que fut ce "moment de césure évidente" et de contrainte sédentaire. Il analyse en philosophe et en poète les éléments qui ont été le propre de ces journées - les applaudissements aux soignants ("La parole des mains"), le masque ("La rareté masquée"), etc. Un tel regard, sans cesse nourri de citations merveilleusement appropriées, se révèle particulièrement réjouissant et éclairant lorsque, au coeur du livre, Beck pousse à son terme l'idée de Swift voyant dans ses contemporains affublés de perruque des hommes-balais et montre que l'homme pollueur d'aujourd'hui, soulevant lui-même une poussière qu'il peine à effacer, est en réalité à l'inverse du sympathique balai "rendant propre en étant sale lui-même et aidant à nourrir le feu" . Ou lorsque, moderne La Fontaine, il convoque pour décrire le monde dans lequel nous vivons "des animaux respectés et réels (non idéalisés), exactement comme aux fables" . Philippe Beck, tout au long de ces pages, ne cesse de mobiliser une armée de métaphores, seules armes selon lui capables de former "une santé, une force de découpe dans les douleurs, pour aider à montrer les yeux différents qui regardent des choses prochaines" . En réponse aux "extrêmophiles" , il ose opposer la bonté profonde du poète qui "crée de nouvelles images actives" .

03/2023

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Mélanges

Mélanges en l'honneur de Pierre-Yves Verkindt

Ces Mélanges en l'honneur de Pierre-Yves Verkindt se veulent à l'image des enseignements et des écrits de l'homme et de l'universitaire, inclassable et inlassablement curieux. Il serait réducteur de leur donner un intitulé. Certes, Pierre-Yves Verkindt est surtout connu dans le champ du droit social. Et nombre de ses travaux sont consacrés aux questions relatives à la santé et à la sécurité. Mais il n'en a pas fait un domaine de spécialité. C'est la dimension pluridisciplinaire de ces questions qui l'a conduit à s'y intéresser et à livrer des analyses et des pensées qui ne sont pas que d'ordre juridique. Pierre-Yves Verkindt a aussi aimé enseigner et écrire en droit civil, notamment en droit des obligations. Le numérique et l'intelligence artificielle ont également attiré son regard et suscité ses réflexions sous l'angle du droit du travail. Cette curiosité, Pierre-Yves Verkindt l'a partagée avec enthousiasme avec ses étudiants, dont quelques-uns sont devenus ses doctorants. Après avoir beaucoup donné et partagé, c'est au tour de ses collègues de le fêter en composant ces Mélanges dédiés à l'universitaire et à l'homme dont chacun a à coeur de louer l'humanité. Liste des contributions I. Santé et sécurité au travail Patrice Adam Intelligence artificielle et santé au travail - Marche de nuit Nathalie Dedessus-Le-Moustier La santé au travail à la recherche d'un nouvel équilibre Marion Del Sol Prévoyance collective et prévention en santé-travail : des synergies qui restent à construire ? Sophie Fantoni Quinton Les pouvoirs du médecin du travail, quels enjeux en santé au travail ? Franck Héas La jeunesse au prisme du droit de la santé au travail Morane Keim-Bagot Distinguer dommage et préjudice moral en droit social ? Les exemples du préjudice d'anxiété et des circonstances vexatoires entourant le licenciement Laurence Pécaut-Rivolier Vie et mort du CHSCT, retour sur une histoire à rebondissements. A propos du rapport Verkindt Gérard Vachet Naissance, mort et résurrection d'une notion : l'obligation de sécurité Marc Vericel La protection de la santé des travailleurs demeure en question II. Variations Paul-Henri Antonmattei A propos du télétravail imposé Gilles Auzero Le mécénat de compétences saisi par le droit du travail Florence Bergeron-Canut et Michel Morand Accord collectif et contrat de travail Michel Borgetto Brèves réflexions sur les antécédents doctrinaux de l'idée de "dette sociale" Mathilde Caron De quelques aspects du partage du savoir en droit social Lise Casaux-Labrunée Prévention de la violence au travail et médiation Jean-François Cesaro Droit civil, droit social et justice : un Odipe normatif ? Olivier Debat De l'absence de principe d'unicité de l'allocataire pour les enfants en résidence alternée François Dumont Réflexions sur la négociation collective dans l'axe OIT/France François Duquesne La représentation du comité social et économique Alexandre Fabre Le code du travail numérique, une autre codification ? Françoise Favennec-Héry Le lieu de travail Frédéric Géa Pour une théorie des acteurs (du droit) du travail Anne-Sophie Ginon Le travailleur pauvre : figure d'une recomposition instrumentale des protections sociales ? Emmanuel Jeuland et Camille Porodou La sérénité de la justice, une notion paradoxale ? Jean-Pierre Laborde Droit international privé du travail, droit international du travail, droit européen du travail, droit comparé du travail, droit générique du travail. Quelques observations en variations libres Jean-Pierre Le Crom L'influence de la conférence de Brazzaville (1944) sur l'amélioration de la réglementation du travail dans les colonies : légende ou réalité ? Farid Lekéal Du bon usage des conseils et consultations juridiques à l'attention des ouvriers sous le Second Empire Grégoire Loiseau La norme en droit du travail Pascal Lokiec Les contours récents du pouvoir de direction Arnaud Martinon Les zones grises du motif de licenciement - A la recherche d'une nouvelle architecture Nicolas Moizard Les référents harcèlement sexuel et agissements sexistes, un premier regard Christine Neau-Leduc Brève réflexion sur la gouvernance, la participation et le dialogue social Etienne Pataut Les limites de l'accord collectif européen : A propos de l'affaire EPSU Elsa Peskine Trouble dans le fonctionnement de l'entreprise - Propos sur la redéfinition des motifs de licenciement Geneviève Pignarre Des noms et des mots... Christophe Radé L'égal et le juste : retour sur la justification des différences de traitement Jean-Emmanuel Ray Subordination vraiment permanente, et déconnexion choisie (Sortir de la Toile, au sens arachnéen) Judith Rochfeld Les émotions du salarié - Traitements et décisions : quelles limites ? Juliette Sénéchal Les services numériques et systèmes d'intelligence artificielle sont-ils porteurs d'un risque de rupture anthropologique ? Dorothée Simonneau Ravage du travail - Essai sur une lecture de Barjavel Bernard Teyssié La morale, l'éthique et le décalogue Cyril Wolmark Cartographie de la représentation syndicale dans l'entreprise

10/2022

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Photographes

Paolo Roversi par Christian Caujolle

Si on le connaît surtout pour ses photographies dans le domaine de la mode, Paolo Roversi n'est surtout pas photographe "de" mode. Ce grand connaisseur de la photographie - qu'il collectionne avec un goût très sûr -, cet amateur, au plus beau sens du terme, de livres qui, dès sa jeunesse l'ont familiarisé avec les classiques comme avec les auteurs de sa génération, est photographe, tout simplement. Il considère chaque photo comme un "portrait", qu'il s'agisse d'un visage, d'une robe, d'un paysage ou d'une cafetière, et affirme sa passion pour August Sander, Diane Arbus ou Richard Avedon. Et évidemment Robert Frank dont il fut proche. Simplement parce qu'il cherche à "placer au centre du monde" ce qu'il photographie, qu'il s'efface pour pouvoir éliminer et épurer au maximum. Avec une grande élégance. Au début, cela n'a pas été facile. Le COVID 19 nous a empêchés de nous voir en face à face et nous avons dialogué par écrans interposés, ce que ni l'un ni l'autre n'aimons et qui ne se prête guère au type d'échange qui est la règle, la base et le fondement de ces discussions. Dès la première rencontre physique sur la terrasse du Studio Luce et malgré l'intempestif passage d'un hélicoptère, la parole est devenue plus fluide. D'autant que le lieu est accueillant, que le studio, dans un immeuble des années trente au sud de Paris fait cohabiter espaces de vie et de travail. Comme une évidence. Retrouvailles complices, échanges, partage. Et toujours cette bonne humeur élégante, ce sourire qui plisse au coin des yeux, ce rire fréquent et jamais haut, cet humour léger, une façon de ne pas se prendre au sérieux, une forme de prédestination au bonheur comme une décision de vie. On sent à chaque instant une exigence, par nécessité et, tout aussi forte, l'indispensable liberté qui ouvre les portes. Le rythme est souple, musical, à la fois ferme dans ses convictions et jamais arrogant. Français parfait et précis pour le plus italien des parisiens, ou, peut-être, le plus parisien des italiens. Peu importe, d'ailleurs. Oui, une évidente élégance. Comme, plus tard, dans son appartement lumineux au dernier étage d'un bel immeuble. Un univers habité, ni en désordre ni vraiment rangé, surtout pas arrangé. Un monde de livres, dès l'entrée et dans presque toutes les pièces. Des livres de tous types, poésie, roman, philosophie, littérature, photo évidemment, livres d'art et de remarquables exemplaires reliés de belles éditions anciennes - vu une originale de Paul et Virginie, un ouvrage de 1776 sur l'Italie avec des aquarelles magnifiques ou un exemplaire des Œuvres complètes de Jules César - qui viennent de son épouse, Laetitia, ancienne top model descendante des imprimeurs typographes Firmin Didot. Un monde de photographies, partout, dans toutes les pièces, au mur ou sur des rangements en bois à croisillons. Peu de photographies du maître des lieux, finalement, mais beaucoup de pépites, de Robert Franck - beaucoup - à Diane Arbus - dont le si rare autoportrait enceinte - à Kertész - un petit tirage inédit d'une vue de Paris –, plusieurs Shoji Ueda ou Louis Faurer. Et tant d'autres, mêlés à quelques photos de famille. Face à un mur entièrement couvert de photographies, bouleversant, un Lucio Fontana blanc, d'un format inhabituellement grand, très pur d'une seule entaille verticale. On aperçoit, dans une bibliothèque dont les portes vitrées protègent des livres particulièrement précieux, un petit paquet carré, emballage mystérieux des tout débuts de Christo. D'autres peintures au mur, dont une d'un ami. Ici, rien n'est décoration, on vit dans un environnement où l'art trouve tout naturellement sa place pour que l'on vive avec lui. On le respire. Mais il ne s'agit ni d'un musée, ni d'une monstration, encore moins d'une démonstration. Pas de logique, pas de hiérarchie, une manière plutôt d'autoportrait fait de bribes de souvenirs, de moments d'une vie, d'émotions préservées. Nous n'avons, finalement, pas tellement parlé de mode. Sans doute parce que ce n'est pas vraiment le propos, même si celui qui dit avoir été fortement influencé par August Sander est catalogué comme photographe "de mode" et que c'est son activité professionnelle principale. Mais il est évident que pour celui pour qui " tout est portrait " l'enjeu, le seul, est la photographie. Donc la lumière. Et une indispensable liberté que l'on retrouve dans la façon d'évoquer et sa pratique et des souvenirs, de se dire sans toujours se dévoiler, avec une pudeur qui n'est pas un calcul ou une cachotterie. La parole est fluide, les émotions et les souvenirs reviennent, les convictions, les commentaires, sans affectation. On se parle. Juste entre nous.

11/2022

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Linguistique

Revue de philologie, de littérature et d'histoire anciennes volume 95-1. Fascicule 1

Amandine CHLAD : Les noms propres dans l'Iliade latine Cet article examine les emplois de noms propres dans l'Iliade latine, afin de dégager certaines spécificités de ce texte. L'examen repose sur l'analyse détaillée d'un passage essentiel de l'oeuvre, le catalogue des vaisseaux grecs et des troupes troyennes, menée en comparaison avec celui de l'Iliade, l'oeuvre source. Cet examen permet de relever l'importante fidélité de l'Iliade latine pour ce qui est de l'énonciation des anthroponymes qui composent le catalogue, malgré quelques rares différences que nous analysons dans le détail, mais également la liberté prise par le poète dans la composition de ce catalogue. En revanche, l'Iliade latine ne présente presque aucun toponyme, contrairement à son modèle. Ces différents constats peuvent nous conduire à de nouvelles conclusions sur les caractéristiques du poème latin. Carole HOFSTETTER : D'Ammonius à Qalonymos : la transmission d'un enseignement néoplatonicien sur Nicomaque Cet article s'intéresse à la question du contenu de l'enseignement alexandrin d'Ammonius (Ve s. apr. J. -C.) sur l'Introduction arithmétique de Nicomaque de Gerasa. On propose l'identification d'éléments issus de cet enseignement en confrontant le témoignage de textes composés en contexte néoplatonicien, les commentaires d'Asclépius et de Philopon à l'Introduction arithmétique et l'Institution arithmétique de Boèce. La question de l'existence d'une transmission de l'enseignement d'Ammonius en dehors de la sphère néoplatonicienne a été envisagée conjointement. Une traduction hébraïque de Nicomaque par Qalonymos (XIVe s.) a été placée en regard des textes d'Asclépius, de Philopon et de Boèce, faisant apparaître les mêmes éléments liés à l'enseignement d'Ammonius chez Qalonymos. Or ce dernier travaillait pour sa part sur le texte d'une traduction arabe (perdue) du IXe siècle jusqu'à présent identifiée comme une traduction de l'Introduction arithmétique. L'étude montre, par conséquent, que la transmission de cet enseignement s'est faite sous le nom de Nicomaque. Elle apporte de nouvelles informations sur la présence à Bagdad au IXe siècle de textes néoplatoniciens dont les sources n'ont pas gardé le souvenir, mais que la transmission de leur contenu permet d'identifier. Claire LE FEUVRE : Du vin, des écervelés et un fantôme. ??? ? ??? ? ?? (Archiloque, fr. 124b W.), ??? ? ??? ? ?? (Nicandre, Alex. 29), ??? ? ? (Hipponax, fr. 67 W.) et les composés en ??? ? -, ??? ? ? - Le mot ??? ? ? attesté chez Hipponax (fr. 67) au sens de "vin pur" , loin d'être un terme rare et dialectal, est en fait un néologisme issu d'une décomposition du composé ??? ? ??? ? ?? (Archiloque, fr. 124b). La décomposition est du même type que dans ??? ? ? "frère" issu de ??? ? ??? ? ?? , et dans les deux cas il doit s'agir d'un hypocoristique. C'est un jeu de mots d'Hipponax, que des poètes postérieurs ont repris et que les lexicographes grecs ont pris pour argent comptant. ??? ? ??? ? ?? n'est pas un composé de ??? ? ? "vin pur" mais la source de ce dernier, et c'est lui qui permet de comprendre l'évolution. C'est un composé savant et poétique formé par un jeu sur le formulaire homérique, d'après le rapport ??? ? ? "insensé" : ??? ? ??? ? "irréfléchi" : ??? ? ??? "pur" : x = ??? ? ??? ? ?? "pur" ou "peu coupé" , ??? ? - étant en distribution métrique complémentaire avec ? -. Nicandre se livre à une variation savante sur ce composé poétique avec les néologismes ??? ? ??? ? ?? et ??? ? ??? ? ??? ? . En conséquence, il faut séparer de ce ??? ? ? qui n'est qu'un fantôme le nom de fonction ??? ? ??? ? ??? ? attesté à l'époque impériale à Messène, qui n'est pas un "porteur de vin pur" ni un "porteur de coupe" : le premier élément de ce composé pourrait être une variante de (? )? ??? ? , -? ??? "bâton" , attesté chez Xénophon comme nom de piquets sur lesquels on fixe les filets de chasse, et le ??? ? ??? ? ??? ? serait un "porteur de bâton / baguette" , équivalent d'un ??? ? ??? ? ?? et exerçant la fonction de héraut. Il faut aussi séparer la glose d'Hésychius ??? ? ??? ? ??? ? ? . ??? ? ??? . Alexis MESZÁROS : Tite-Live et César Auguste Généralement considéré comme un auteur d'époque augustéenne, Tite-Live avait cependant composé les deux premières décades pendant la période triumvirale. L'article envisage en premier lieu les théories traditionnelles concernant les dates de vie et les occupations extra-historiographiques de Tite-Live, afin de démontrer la fragilité des arguments avancés et permet de situer la date de naissance de Tite-Live entre 65 et 55 av. J. -C. sans pouvoir être plus précis. Les liens de Tite-Live avec les cercles littéraires et politiques de son temps sont ensuite analysés afin de démontrer un relatif isolement de l'historien padouan et une absence de liens directs avec César Auguste et Claude. Enfin, une nouvelle datation de la composition de la première décade est proposée à partir de l'introduction par Tite-Live du concept de princeps senatus dans les Ab Vrbe condita libri, oeuvre que l'on peut considérer comme d'époque triumvirale et non augustéenne. L'ANNEE PHILOLOGIQUE : UN SIECLE DE MUTATIONS BIBLIOGRAPHIQUES Ilse HILBOLD : Le savoir en partage : dynamiques internationales de la bibliographie d'études classiques (1911-1945) L'histoire de la bibliographie est un champ de recherche encore peu investi par les historiens, alors même qu'elle permet d'interroger pratiques savantes et modalités de la circulation des savoirs dans le cadre d'une réflexion transnationale. La bibliographie est ainsi un objet qu'on peut aborder de façon historique en interrogeant ses ambitions, les buts qu'elle se donne et qui constituent une réponse aux besoins qui sont exprimés par un public d'utilisateurs. Il faut d'ailleurs souligner que les revendications de la communauté savante sont largement soutenues par de grandes institutions de l'après première guerre mondiale, telles que la Société des Nations ou l'Institut international de coopération intellectuelle qui ambitionnent d'internationaliser les pratiques scientifiques. L'Année Philologique s'inscrit dès sa fondation dans ce grand mouvement de rénovation de la bibliographie au XXe siècle et son étude permet de faire porter le regard sur cette période où l'international prend des couleurs, des significations et des formes variées. Franco MONTANARI : Un secolo di bibliografia : tappe, linee e orizzonti dell'internazionalizzazione L'histoire de la Société Internationale de Bibliographie Classique (SIBC) et de L'Année Philologique (APh) est ici envisagée sous un double angle, celui de la pluridisciplinarité et celui de l'internationalisation, et on peut la considérer comme un processus de réalisation du projet initial de Jules Marouzeau notamment sous ces deux angles. L'ouverture des différentes rédactions de L'APh a élargi le panorama international qui, ces derniers temps, s'est étendu non seulement à la Grèce mais aussi à l'Extrême-Orient (Japon, Chine), en gardant toujours à l'esprit la nécessité d'assurer la cohérence unitaire de la bibliographie. Par l'intermédiaire de la SIBC, membre de la FIEC, qui elle-même est membre du CIPSH, L'APh est incluse dans un cadre institutionnel international de grande importance pour la présence des études classiques. Enfin, on examine la migration progressive de L'APh vers un travail et un produit bibliographique entièrement électroniques, de la collecte des données à la gestion de la base de données et enfin à la consultation en ligne. Dee L. CLAYMAN : The Digitization of the Année Philologique Cet essai relate la transformation de L'Année Philologique en une base de données en ligne grâce à un effort conjoint de la Société Internationale de Bibliographie Classique (SIBC) et de la Society for Classical Studies (SCS), fondée sous le nom d'American Philological Association (APA). Le concept a été abordé par l'APA en 1980, mais le processus n'a été officiellement lancé qu'en 1988, date à laquelle il a reçu la bénédiction de Juliette Ernst. Les premiers résultats tangibles sont apparus en 1989 grâce aux travaux de la Base de Données de Bibliographie Classique (DCB) à New York. Au cours de ses dix-neuf années d'activité, la DCB a converti 63 volumes de l'APh, 1924-1992, à partir de la page imprimée pour aboutir à 765 700 données enregistrées. Les données rétrospectives ont été fusionnées avec les données nouvellement recueillies par la SIBC en 2002 et mises à disposition pour la première fois en ligne. La base de données commune a transformé la recherche en études classiques et préservera la valeur de L'APh pour les générations futures. Pedro Pablo FUENTES GONZÁLEZ : L'Année Philologique, une interlocutrice et un guide quasi centenaires de la communauté scientifique sur l'Antiquité gréco-latine L'Année Philologique invite à s'interroger sur les clés susceptibles d'expliquer pourquoi, depuis sa conception par J. Marouzeau dans les années 1920, elle bénéficie d'un si grand prestige auprès de la communauté scientifique qui travaille sur l'Antiquité gréco-latine et d'un si fort ascendant sur les chercheurs. Les efforts pour justifier l'entreprise s'avèrent de toute première importance, ainsi que ceux pour la doter d'un appui institutionnel, d'un fondement normatif et d'une structure de contrôle, dans un contexte devenu progressivement, surtout grâce à J. Ernst, de plus en plus international. Un autre aspect décisif de L'Année Philologique est son caractère encyclopédique, impliquant une organisation intégrale de l'information produite dans toutes les disciplines relatives à l'Antiquité et mettant en relief leur interdépendance. L'Année Philologique a vocation ainsi d'animer et de féconder les nouvelles recherches. Loin d'être un simple ouvrage de consultation, elle se veut un ouvrage de lecture et elle offre un modèle à suivre pour le chercheur : interdisciplinarité, refus de toute précipitation, clarté et souci de précision. Face aux défis de l'avenir, il est très important qu'elle soit capable de rester fidèle à ce rôle paradoxal d'ancilla scientiae dont l'autorité est reconnue par l'ensemble de la communauté scientifique des antiquisants. Antoine VIREDAZ : Rédiger une bibliographie critique et analytique de l'antiquité gréco-latine : objectifs de L'Année Philologique et méthodes de rédaction des notices bibliographiques Le présent article vise à illustrer les méthodes de travail employées par les équipes de L'Année Philologique (APh) pour atteindre les ambitieux objectifs de qualité poursuivis par cette bibliographie. Il est en outre montré quelles informations y sont collectées et comment elles le sont, afin d'aider le lectorat de L'APh à tirer le meilleur parti de cet outil. Chris VANDENBORRE : Bibliographies aujourd'hui : vestige du passé ou instrument de recherche pour l'avenir ? Se fondant sur des exemples concrets, cet article illustre les différences de résultats entre Google Scholar et L'Année Philologique. La question posée est de savoir si les bibliographies peuvent encore jouer un rôle pertinent dans un monde numérique qui contient des traces de presque toutes les publications. La deuxième partie met en relief une valeur ajoutée moins connue des bibliographies : les possibilités qu'elles ouvrent de recherches bibliométriques.

11/2022

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Littérature étrangère

Histoire de la colonne infâme

L'oeuvre d'essayiste de Manzoni est un peu moins connue, mais sa Storia della colonna infame (Histoire de la colonne infâme), qui fait l'objet de ce projet de nouvelle traduction, est cependant elle aussi couramment (quoique moins systématiquement) étudiée à l'école, à l'instar de L'affaire Calas de Voltaire, texte avec lequel celui-ci a quelque parenté. La "colonne infâme" du titre désigne un monument qui fut édifié, par la volonté des juges, pour commémorer le procès (mené à grand renfort de terrifiants supplices), la condamnation et l'exécution, en 1630 à Milan, de plusieurs hommes accusés d'avoir propagé délibérément la peste par des "onctions pestifères" , c'est-à-dire en barbouillant les murs d'un certain quartier d'une substance empoisonnée, supposément mortifère. Cet atroce fait divers avait déjà inspiré à Pietro Verri, un représentant milanais de la philosophie des Lumières versant italien, un texte mémorable, Observations sur la torture, paru en 1769 (retraduit en français en 1992 et publié par les Editions Viviane Hamy), où l'auteur dresse un réquisitoire inflexible contre cette pratique intolérable. En 1764, un autre philosophe, Cesare Beccaria , avait publié Dei delitti e delle pene (dont il existe, sous le titre Des délits et des peines, plusieurs éditions françaises récentes), un magnifique petit essai, très en avance sur son temps, contre la torture et la peine de mort. C'est dans ce contexte intellectuel que se situe l'Histoire de la colonne infâme. Mais, tandis que Verri et Beccaria publient leurs essais à une époque où la torture est encore en vigueur dans nombre de pays et régions d'Europe, et notamment à Milan , quand le texte de Manzoni paraît, en 1840, elle a été abolie - du moins officiellement - à peu près partout. L'intention de Manzoni n'est donc pas tout à fait la même que celle qui animait ses devanciers, lesquels visaient avant tout à démontrer le caractère exécrable et inutile de la torture et à la voir disparaître des codes de procédure. Pour Manzoni, cependant, il s'agit d'abord, sans doute, de consolider dans les esprits l'usage récent de ne plus mettre à la question les prévenus. On sait combien les progrès de ce genre sont fragiles et peuvent être abandonnés au détour de l'histoire ; quant à la torture, notamment, il serait naïf ou de mauvaise foi de prétendre qu'elle n'appartient qu'au passé lointain et aux civilisations archaïques. Sous des formes diverses, qui disent rarement leur nom, la torture demeure une réalité contemporaine, y compris dans nos démocraties avancées. On peut, d'autre part, supposer que Manzoni entend oeuvrer à son tour à l'amélioration, toujours possible, de la justice humaine : même sous une législation imparfaite, sinon coupable, les juges gardent la faculté de juger honnêtement. Mais, plus encore, il s'agit pour Manzoni de soulever une question générale, à la fois philosophique et politique : celle de la liberté de choix des individus, mise en regard de ce qu'on pourrait appeler, dans un anachronisme calculé, les conditionnements socio-historiques. Pour Verri, tous les juristes et criminalistes du passé sont coupables d'avoir toléré, cautionné et même encouragé la torture. Dès lors, les juges qui condamnèrent les supposés propagateurs de peste commirent, certes, une affreuse erreur judiciaire, mais dont la responsabilité incombe à la science juridique dans son ensemble, au système pénal en tant que tel - et même à l'état général de la connaissance et de la culture propres à leur temps. La faute des juges en tant qu'individus se dissout ou en tout cas s'estompe dans la mauvaiseté des lois et dans la cruauté à quoi conduirait invinciblement l'ignorance. La faute des juges n'est pas tant personnelle que collective, et indissociable d'une époque dont Verri - et avec lui tous les philosophes des Lumières italiennes - appelle le dépassement. Verri, en d'autres termes, travaille à éclairer son temps, pour le réformer dans le sens de la raison et de ce qu'on appellerait aujourd'hui les droits de l'homme . C'est sur cette question de la responsabilité des juges que Manzoni croise le fer avec son illustre prédécesseur. Dans l'Histoire de la colonne infâme, il s'attache à montrer que, même en des temps d'ignorance et dans un système pénal qui prévoit qu'on puisse infliger à un accusé - y compris en amont de la certitude de sa culpabilité - des sévices atroces, les juges conservaient la possibilité, la liberté morale de ne pas le faire. Aussi, reprenant en main les textes des juristes que Verri cite pour les accabler, Manzoni s'efforce-t-il de montrer que tous, bien que n'étant pas opposés par principe à la torture, recommandaient cependant de n'en user qu'avec discernement et modération, et jamais pour obtenir des aveux. Manzoni entend ainsi rendre justice aux criminalistes du passé, que Verri blâme selon lui injustement, au prix d'incompréhensions voire de distorsions des textes qu'il produit pour preuves de sa thèse. Mais il veut surtout convaincre que les juges qui, en 1630, firent torturer et exécuter ces malheureux, puis firent construire un monument en leur éternel déshonneur, disposaient, dans les traités juridiques de référence de leur époque, d'éléments qui leur auraient permis, qui auraient dû leur permettre de juger dignement. Selon Manzoni, si la torture était régulièrement en vigueur dans les affaires criminelles, et couramment pratiquée dès la phase d'instruction du procès, cela n'imposait pourtant pas à des esprits éclairés et probes d'y recourir. Les juges sont donc comptables à titre personnel de leur jugement, qui s'apparente à un crime. Manzoni défend ainsi l'idée que, de tout temps, jusque dans le pire des systèmes politico-juridiques, les individus conservent une part d'autonomie, la faculté de s'affranchir des préjugés de leur époque, et de se comporter selon ce qui est juste et bon. Ce qui est en jeu, implicitement, c'est donc aussi la question, ancienne et débattue depuis des siècles dans la théologie chrétienne, du libre arbitre. Mais tout autant, si l'on veut, avant l'heure, sa version plus moderne, celle du déterminisme - social, historique, politique, culturel. Sommes-nous libres de nos actions, de nos décisions, de nos pensées ? Ou sommes-nous si profondément (et inconsciemment) modelés par notre temps, par notre culture, par nos institutions, que nos "choix" ne sont, au vrai, que les conséquences inéluctables de ces divers conditionnements ? Pour l'écrivain italien, récuser l'idée que, malgré les aberrations de leur temps, malgré les vices de la forma mentis du monde auquel ils appartenaient, les juges de 1630 auraient pu juger justement reviendrait à admettre, ni plus ni moins, l'impossibilité générale et affreuse d'espérer que des hommes qui commettent un crime abominable puissent jamais agir différemment ; cela obligerait, en somme, à reconnaître que les pires scélérats ne peuvent aucunement, par principe, être tenus pour responsables de leurs forfaits : "Si, dans un ensemble de faits atroces commis par l'homme contre l'homme, nous croyons voir un effet des temps et des circonstances, nous éprouvons, en même temps que de l'horreur et de la compassion, un découragement, une sorte de désespérance. Il nous semble voir la nature humaine poussée invinciblement au mal par des facteurs indépendants de sa volonté, et comme enchaînée dans un rêve pervers et fébrile, dont elle n'a nul moyen de se déprendre, dont elle ne peut pas même se rendre compte". La question demeure d'une parfaite actualité. Il n'est que de songer aux polémiques qui ont entouré telles tentatives d'explication d'attentats terroristes récents en France. En réponse aux sociologues qui tentaient de comprendre ces actes dans un tableau causal complexe, des personnages politiques de premier plan objectèrent qu'expliquer, c'était déjà justifier. Plus que jamais, il nous semble au contraire requis, pour inconfortable que cela puisse être, d'enquêter inlassablement sur les raisons de la violence. L'Histoire de la colonne infâme nous est une invitation à ne pas refermer trop vite le questionnement sur les racines du mal.

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Littérature Italienne

Histoire de la colonne infâme

L'oeuvre d'essayiste de Manzoni est un peu moins connue, mais sa Storia della colonna infame (Histoire de la colonne infâme), qui fait l'objet de ce projet de nouvelle traduction, est cependant elle aussi couramment (quoique moins systématiquement) étudiée à l'école, à l'instar de L'affaire Calas de Voltaire, texte avec lequel celui-ci a quelque parenté. La "colonne infâme" du titre désigne un monument qui fut édifié, par la volonté des juges, pour commémorer le procès (mené à grand renfort de terrifiants supplices), la condamnation et l'exécution, en 1630 à Milan, de plusieurs hommes accusés d'avoir propagé délibérément la peste par des "onctions pestifères" , c'est-à-dire en barbouillant les murs d'un certain quartier d'une substance empoisonnée, supposément mortifère. Cet atroce fait divers avait déjà inspiré à Pietro Verri, un représentant milanais de la philosophie des Lumières versant italien, un texte mémorable, Observations sur la torture, paru en 1769 (retraduit en français en 1992 et publié par les Editions Viviane Hamy), où l'auteur dresse un réquisitoire inflexible contre cette pratique intolérable. En 1764, un autre philosophe, Cesare Beccaria , avait publié Dei delitti e delle pene (dont il existe, sous le titre Des délits et des peines, plusieurs éditions françaises récentes), un magnifique petit essai, très en avance sur son temps, contre la torture et la peine de mort. C'est dans ce contexte intellectuel que se situe l'Histoire de la colonne infâme. Mais, tandis que Verri et Beccaria publient leurs essais à une époque où la torture est encore en vigueur dans nombre de pays et régions d'Europe, et notamment à Milan , quand le texte de Manzoni paraît, en 1840, elle a été abolie - du moins officiellement - à peu près partout. L'intention de Manzoni n'est donc pas tout à fait la même que celle qui animait ses devanciers, lesquels visaient avant tout à démontrer le caractère exécrable et inutile de la torture et à la voir disparaître des codes de procédure. Pour Manzoni, cependant, il s'agit d'abord, sans doute, de consolider dans les esprits l'usage récent de ne plus mettre à la question les prévenus. On sait combien les progrès de ce genre sont fragiles et peuvent être abandonnés au détour de l'histoire ; quant à la torture, notamment, il serait naïf ou de mauvaise foi de prétendre qu'elle n'appartient qu'au passé lointain et aux civilisations archaïques. Sous des formes diverses, qui disent rarement leur nom, la torture demeure une réalité contemporaine, y compris dans nos démocraties avancées. On peut, d'autre part, supposer que Manzoni entend oeuvrer à son tour à l'amélioration, toujours possible, de la justice humaine : même sous une législation imparfaite, sinon coupable, les juges gardent la faculté de juger honnêtement. Mais, plus encore, il s'agit pour Manzoni de soulever une question générale, à la fois philosophique et politique : celle de la liberté de choix des individus, mise en regard de ce qu'on pourrait appeler, dans un anachronisme calculé, les conditionnements socio-historiques. Pour Verri, tous les juristes et criminalistes du passé sont coupables d'avoir toléré, cautionné et même encouragé la torture. Dès lors, les juges qui condamnèrent les supposés propagateurs de peste commirent, certes, une affreuse erreur judiciaire, mais dont la responsabilité incombe à la science juridique dans son ensemble, au système pénal en tant que tel - et même à l'état général de la connaissance et de la culture propres à leur temps. La faute des juges en tant qu'individus se dissout ou en tout cas s'estompe dans la mauvaiseté des lois et dans la cruauté à quoi conduirait invinciblement l'ignorance. La faute des juges n'est pas tant personnelle que collective, et indissociable d'une époque dont Verri - et avec lui tous les philosophes des Lumières italiennes - appelle le dépassement. Verri, en d'autres termes, travaille à éclairer son temps, pour le réformer dans le sens de la raison et de ce qu'on appellerait aujourd'hui les droits de l'homme . C'est sur cette question de la responsabilité des juges que Manzoni croise le fer avec son illustre prédécesseur. Dans l'Histoire de la colonne infâme, il s'attache à montrer que, même en des temps d'ignorance et dans un système pénal qui prévoit qu'on puisse infliger à un accusé - y compris en amont de la certitude de sa culpabilité - des sévices atroces, les juges conservaient la possibilité, la liberté morale de ne pas le faire. Aussi, reprenant en main les textes des juristes que Verri cite pour les accabler, Manzoni s'efforce-t-il de montrer que tous, bien que n'étant pas opposés par principe à la torture, recommandaient cependant de n'en user qu'avec discernement et modération, et jamais pour obtenir des aveux. Manzoni entend ainsi rendre justice aux criminalistes du passé, que Verri blâme selon lui injustement, au prix d'incompréhensions voire de distorsions des textes qu'il produit pour preuves de sa thèse. Mais il veut surtout convaincre que les juges qui, en 1630, firent torturer et exécuter ces malheureux, puis firent construire un monument en leur éternel déshonneur, disposaient, dans les traités juridiques de référence de leur époque, d'éléments qui leur auraient permis, qui auraient dû leur permettre de juger dignement. Selon Manzoni, si la torture était régulièrement en vigueur dans les affaires criminelles, et couramment pratiquée dès la phase d'instruction du procès, cela n'imposait pourtant pas à des esprits éclairés et probes d'y recourir. Les juges sont donc comptables à titre personnel de leur jugement, qui s'apparente à un crime. Manzoni défend ainsi l'idée que, de tout temps, jusque dans le pire des systèmes politico-juridiques, les individus conservent une part d'autonomie, la faculté de s'affranchir des préjugés de leur époque, et de se comporter selon ce qui est juste et bon. Ce qui est en jeu, implicitement, c'est donc aussi la question, ancienne et débattue depuis des siècles dans la théologie chrétienne, du libre arbitre. Mais tout autant, si l'on veut, avant l'heure, sa version plus moderne, celle du déterminisme - social, historique, politique, culturel. Sommes-nous libres de nos actions, de nos décisions, de nos pensées ? Ou sommes-nous si profondément (et inconsciemment) modelés par notre temps, par notre culture, par nos institutions, que nos "choix" ne sont, au vrai, que les conséquences inéluctables de ces divers conditionnements ? Pour l'écrivain italien, récuser l'idée que, malgré les aberrations de leur temps, malgré les vices de la forma mentis du monde auquel ils appartenaient, les juges de 1630 auraient pu juger justement reviendrait à admettre, ni plus ni moins, l'impossibilité générale et affreuse d'espérer que des hommes qui commettent un crime abominable puissent jamais agir différemment ; cela obligerait, en somme, à reconnaître que les pires scélérats ne peuvent aucunement, par principe, être tenus pour responsables de leurs forfaits : "Si, dans un ensemble de faits atroces commis par l'homme contre l'homme, nous croyons voir un effet des temps et des circonstances, nous éprouvons, en même temps que de l'horreur et de la compassion, un découragement, une sorte de désespérance. Il nous semble voir la nature humaine poussée invinciblement au mal par des facteurs indépendants de sa volonté, et comme enchaînée dans un rêve pervers et fébrile, dont elle n'a nul moyen de se déprendre, dont elle ne peut pas même se rendre compte". La question demeure d'une parfaite actualité. Il n'est que de songer aux polémiques qui ont entouré telles tentatives d'explication d'attentats terroristes récents en France. En réponse aux sociologues qui tentaient de comprendre ces actes dans un tableau causal complexe, des personnages politiques de premier plan objectèrent qu'expliquer, c'était déjà justifier. Plus que jamais, il nous semble au contraire requis, pour inconfortable que cela puisse être, d'enquêter inlassablement sur les raisons de la violence. L'Histoire de la colonne infâme nous est une invitation à ne pas refermer trop vite le questionnement sur les racines du mal.

03/2024