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Sociologie

L’Etat social à distance. Dématérialisation et accès aux droits des classes populaires rurales

Cet ouvrage présente les résultats d'une enquête empirique portant sur le rapport aux administrations des classes populaires rurales. Il s'adresse toute personne intéressée par l'analyse des effets de la dématérialisation sur l'accès aux droits sociaux. L'utilisation des outils numériques est de plus en plus répandue dans les administrations de l'Etat social. Alors qu'ils sont censés simplifier les démarches d'accès aux droits et lutter contre le non-recours, ils produisent, en pratique, des effets inverses à ceux escomptés. Ceci est d'autant plus problématique en milieu rural, où la dématérialisation s'accompagne de mouvements de retrait de l'Etat. Or, loin des centres urbains, les classes populaires sont confrontées, plus qu'ailleurs, aux effets des crises économiques et sociales, précarisant leurs conditions de vie et accroissant leurs dépendances vis-à-vis des droits sociaux. Cet ouvrage donne à voir en quoi les réformes de dématérialisation entravent l'accès aux droits sociaux des classes populaires rurales. Reposant sur une monographie, l'enquête menée retrace leurs parcours d'accès au minimum social (le RSA, Revenu de solidarité active). Observant ce qui se joue en amont des guichets, elle met en évidence qui parvient à accéder à une prise en charge administrative et qui n'y parvient pas. L'un des principaux résultats est de montrer que, à rebours des discours politico-médiatiques portant sur l'assistanat et la fraude sociale, avant de devenir bénéficiaire du RSA, les demandeurs font l'objet de mécanismes de tris et de sélection. Ces mécanismes sont le résultat des normes imposées par les fonctionnements administratifsA : normes de déplacements urbains, qui impliquent le franchissement de distances spatiales et sociales ; normes administratives, liées à la division du travail de l'accès aux droits et à la délégation d'une part des tâches aux demandeurs ; ou encore normes de comportement, liées aux représentations de ce qu'est un " bonA " ou un " mauvaisA " pauvre. Dès lors, pour accéder au RSA, il faut suivre des chemins du droit au cours desquels on apprend à devenir un bénéficiaire de l'Etat social. Ce sont alors les plus précaires qui parviennent le plus difficilement à faire valoir leurs droits. Ainsi, cet ouvrage éclaire la manière dont l'action publique peut se transformer en un mécanisme de renforcement des inégalités sociales.

06/2023

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Littérature française

Ça pour une nouvelle

Une humanité commune. Des milliards de solitudes. Entrez dans leurs paysages intérieurs, suivez leur évolution et cheminez avec eux vers une issue inattendue : inacceptable ou inévitable... Résumé des 17 nouvelles : 1. Lorsque le rêve dépasse la réalité ou ne sert qu'à nous y préparer. 2. Entre amour et résignation, un seul geste de l'autre suffit à nous rendre heureux. 3. Une vieille dame. Un enfant. Tous deux liés par la même étincelle de vie. 4. Une adolescente, loin du cliché futile et naïf de ses congénères, hésite entre vengeance et humanité. 5. Un médecin légiste, ne sachant plus à quelle voix obéir, va devoir faire un ultime choix. 6. Une jeune femme doit faire face au regard des autres. Ceux-là même qui feront bouleverseront sa vie. 7. Toutes les dépendances ne sont pas nocives. Celle-ci comme toutes les autres prend malgré tout beaucoup de place. 8. Quelle douleur plus intense que celle d'une mère complice par ignorance... 9. Lorsque la maladie sonne à la porte de cette jeune femme, cette dernière la laissera entrer et prendre le pouvoir. 10. Les hommes sont capables du meilleur comme du pire, mais quel sera le choix du personnage de cette nouvelle ? 11. Rubis, aveugle de naissance, aura le pouvoir de tout changer. Mais osera-t-elle ? 12. Lorsque Dali peint le tableau "La persistance de la mémoire", il tente lui aussi d'annuler les effets du Temps. 13. Est-il préférable de vivre en oubliant ou de mourir en le décidant ? 14. Grâce à son métier de comédien, un homme va découvrir une facette de lui qu'il ne soupçonnait pas. 15. Jusqu'à quel point peut-on supporter la violence de l'autre ? Cela ne dépendrait-il pas de la personne qui nous violente ? 16. Une petite fille s'apprête à vivre le jour le plus important de sa vie. Mais en a-t-elle conscience ? 17. Une conclusion légère et amusante à un recueil de nouvelles qui ne le sont pas toujours. Bien que les thèmes principaux dont s'est inspirée l'auteur soient basés sur la violence de la mort, il s'en dégage une tendresse et un réalisme qui en font un livre absolument pas lugubre. La construction des dix-sept nouvelles, parfois intrigante, fait qu'il faut attendre la dernière phrase pour deviner qui est le narrateur... et relire pour savourer !

08/2015

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Critique littéraire

Discours sur l'universalité de la langue française. Précédé de La Langue humaine

Antoine Rivarol (1753-1801), dit le comte de Rivarol, est surtout connu aujourd'hui pour son opposition farouche à la Révolution qui le contraignit à l'exil, et pour son esprit léger, caustique, brillant qui fit de lui une gloire des salons européens. Burke l'appela le "Tacite de la révolution" et Voltaire affirma qu'il était "le Français par excellence". Ses bons mots ont fait florès dans tous les dictionnaires de citations. Mais il est une autre facette de son personnage qui mérite davantage attention : son goût passionné pour les langues (il traduisit L'Enfer du Dante) et singulièrement la langue française dont il forma le projet de rédiger un grand dictionnaire dont il publia à Hambourg, en 1797, le Discours préliminaire. Il avait écrit également un brillant essai, le Discours sur l'universalité de la langue française, couronné quatorze ans plus tôt, en 1783, par le prix de l'Académie royale des Sciences et Belles Lettres de Berlin et qui lui valu une immense notoriété. C'est ce texte qui est ici reproduit dans son édition de 1784 ou 97 ?. Rivarol, après avoir examiné les différentes langues européennes (l'allemand "trop guttural et encombré de dialectes", l'espagnol dont "la simplicité de la pensée se perd dans la longueur des mots", l'italien qui "se traîne avec trop de lenteur", l'anglais qui "se sent trop de l'isolement du peuple et de l'écrivain") conclut à une supériorité de la langue française de par sa proximité avec la structure même de la pensée rationnelle qui lui permet ainsi de prétendre à l'universalité : "Ce qui distingue notre langue des langues anciennes et modernes, c'est l'ordre et la construction de la phrase. Cet ordre doit toujours être direct et nécessairement clair. Le français nomme d'abord le sujet du discours, ensuite le verbe qui est l'action, et enfin l'objet de cette action : voilà la logique naturelle à tous les hommes ; - voilà ce qui constitue le sens commun. Or cet ordre, si favorable, si nécessaire au raisonnement, est presque toujours contraire aux sensations, qui nomment le premier l'objet qui frappe le premier. C'est pourquoi tous les peuples, abandonnant l'ordre direct, ont eu recours aux tournures plus ou moins hardies, selon que leurs sensations ou l'harmonie des mots l'exigeaient ; et l'inversion a prévalu sur la terre, parce que l'homme est plus impérieusement gouverné par les passions que par la raison...". Dans une certaine mesure, et pour le dire d'une façon moderne, Rivarol aurait posé les prémisses des avancées récentes de la réflexion sur le rapport entre le langage et la pensée, à savoir l'étroite dépendance entre structure de la langue et structure de la pensée, loin de la théorie instrumentaliste du langage qui prévalaient à l'époque où Rivarol écrivit son essai.

02/2013

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Santé, diététique, beauté

Les plantes pour prévenir et soigner les affections du système nerveux central. Insomnie, anxiété, déprime, stress, Alzheimer, Parkinson...

Stress, dépression, anxiété, burn-out : la France est devenue depuis peu l'un des pays où l'on consomme le plus de somnifères au monde et les anxiolytiques  suivent de près. Le recours à ces médicaments de synthèse est presque devenu une habitude. Ils apportent certes un soulagement souvent rapide, mais transitoire, et aussi des effets secondaires considérables : perte de mémoire et d'équilibre, dépendance, risques de chutes chez les personnes âgées, etc. Depuis la nuit des temps, l'Homme a pourtant trouvé dans la Nature un grand nombre de médicaments....qu'il a tendance à oublier maintenant!  Pourtant les Assyriens et les Grecs connaissaient déjà les vertus narcotiques du pavot somnifère et les Indiens de la côte Ouest des Etats-Unis utilisaient le pavot de Californie pour calmer leurs enfants et les faire dormir avant l'arrivée des premiers Européens. Cette plante est maintenant accessible sur le marché comme sédatif naturel avec la valériane, le houblon et bien d'autres encore. L'effet de ces plantes est moins rapide, mais elles n'engendrent que très peu d'effets indésirables. Pour l'anxiété, on fera appel à la passiflore, qui est même recommandée pour vaincre la peur des examens ! Contre la déprime, le millepertuis peut apporter un soulagement. Pour vaincre le stress et le burn-out, il y a maintenant une solution: la rhodiole ou orpin rose, plante donnée aux troupes soviétiques lors de l'occupation pour mieux supporter le stress et la  fatigue de la guerre. Cette plante très efficace est maintenant cultivée en Suisse et est déjà accessible sous forme de médicaments. Avec l'augmentation de l'espérance de vie, le nombre de personne souffrant de la maladie d'Alzheimer augmente. Il n'y a pas encore de médicaments pour guérir cette maladie neurodégénérative, mais des plantes peuvent nettement en ralentir la progression. Il s'agit du ginkgo, du romarin et aussi du curcuma. Pour cette épice, des études récentes ont montré des résultats assez spectaculaires. La vitamine C, la vitamine E et les acides gras du type oméga 3 représentent une nouvelle piste pour le traitement de cette maladie. Quant à la maladie de Parkinson, une autre affection dégénérative du système nerveux central, elle est avant tout due à une déficience en dopamine, un neurotransmetteur. Des travaux récents ont montré qu'il existe des plantes très riches en L-dopa, un précurseur, qui se transforme dans l'organisme en dopamine.   Le présent livre recense les plantes pouvant agir sur les principales affections du système nerveux central. Il traite des aspects historiques (de l'utilisation de la plante en médecine traditionnelle jusqu'au développement d'un médicament moderne), des constituants chimiques, du mode d'action et des effets secondaires éventuels. Des indications pratiques sont données pour utiliser au mieux ces plantes qui peuvent apporter un soulagement réel et substituer dans certains cas des médicaments de synthèse aux nombreux effets secondaires. Un guide pratique illustré pour bénéficier des puissantes vertus préventives et curatives des plantes pour notre système nerveux central.

11/2014

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Industrie et techniques

La betterave à sucre : essor agricole et industrialisation rurale. Réalités françaises et perspectives internationales : de Marggraf à Berlin (1747) à la conférence de Londres (1937)

Depuis l'Antiquité, la canne est connue pour le sucre qu'elle contient. Introduite à la fin du XVe siècle en Amérique, cette plante croit en particulier dans les plantations des Antilles. Elle fournit en sucre le marché européen. A la fin du XVIIIe siècle, les aléas de la vie politique handicapent ces zones de production et entrainent la raréfaction des arrivages de sucre en Europe. De leur côté, après les travaux d'Olivier de Serres publiés en 1600 qui évoquent la betterave et son sucre, Andreas Marggraf, en 1747 à Berlin, puis son disciple Franz Karl Achard, à la fin du XVIIIe siècle, s'emploient à extraire du sucre de la betterave et reçoivent les encouragements des rois de Prusse. La mémoire collective française retient davantage les incitations en faveur de la betterave de Napoléon Ier en 1811-1812, qu'accompagnent des injonctions de l'administration impériale. Il s'agit là, pourtant, d'un cinglant échec. Fait souvent méconnu, le véritable décollage de la betterave s'amorce vers 1828 et devient d'une telle ampleur que, à la fin du XIXe siècle, la betterave détrône la canne pour la production saccharifère. Au cours de cette montée en puissance, les améliorations successives dans la sélection des semences imposent l'expression de betterave à sucre. Par ses emblavements, cette plante révolutionne les campagnes septentrionales. En effet, outre le sucre qu'elle recèle, elle favorise la suppression de la jachère, améliore les productions agricoles qui lui succèdent dans les assolements et offre un fourrage apprécié pour le bétail. Dans le Nord, le Pas-de-Calais, la Somme, l'Aisne et l'Oise, les espaces ruraux betteraviers se couvrent de fabriques de sucre qui, au fil du temps, deviennent de véritables usines avec des ramifications par la construction de distilleries et de râperies. L'essor de ces entreprises, favorisé par le recours au charbon ainsi que le développement de canaux et de voies ferrées, atteste une réelle révolution industrielle au coeur des campagnes qui repose sur la betterave à sucre, véritable pierre angulaire de ces mutations. La Grande Guerre dont les combats dans la partie occidentale du continent européen se déroulent dans des terres betteravières neutralise largement la production sucrière mais, surtout, souligne la dépendance à l'égard des approvisionnements en graines allemandes. Le sucre de canne tire profit de cette conjoncture qui débouche, au milieu des années 1920, sur une surproduction lorsque les nouvelles usines édifiées après les destructions du conflit, modernes et compétitives notamment sur le plan énergétique, fonctionnent à plein régime. Les productions pléthoriques de sucre entrainent la constitution d'importants stocks. Cette situation conduit finalement à conclure des accords internationaux, les premiers du genre, afin de réguler le marché sucrier au plan mondial dans le cadre d'un traité signé, lors d'une conférence tenue à Londres en 1937, par la majeure partie des pays acteurs de la filière saccharifère.

09/2021

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Sciences politiques

La nouvelle phase stratégique

Qu'entendons-nous par " nouvelle phase stratégique " ? En 2003, la décision américaine d'intervenir en Irak fut une " guerre par choix ", dans le but d'influer sur la balance de puissance régionale et mondiale. Nul doute que cette " guerre politique " confirmait le cadre stratégique pluri-décennal de la " doctrine Carter " – empêcher tout contrôle hégémonique sur la région – mais en poursuivant deux objectifs distincts. L'objectif immédiat était le changement de régime en Irak. L'objectif stratégique était la Chine. De manière presque explicite, pour la " doctrine Bush ", la réaffirmation du contrôle sur le golfe Persique visait à conditionner la Chine ainsi qu'à prévenir l'influence de Pékin dans la région, une influence destinée à se renforcer du fait de la combinaison de l'ascension industrielle de la Chine et de sa dépendance énergétique croissante à l'égard du Moyen-Orient. Si la balance mondiale entre les puissances réclamait une intervention militaire directe des Etats-Unis, cela signifiait que ces relations entraient dans une phase de définition ; les tensions et les contradictions de la confrontation globale avaient donc franchi un seuil. C'est l'année suivante, en 2004, que nous avons utilisé pour la première fois l'expression nouvelle phase stratégique. La prévision à long terme du développement capitaliste, en particulier en Asie, avait fourni pendant un demi-siècle le cadre scientifique permettant de définir les tâches du parti révolutionnaire, ainsi que les temps et les possibilités d'enracinement dans une métropole avancée. Désormais, précisément en Asie, de nouvelles puissances impérialistes surgissaient, comme la Chine justement, et l'impérialisme européen avait franchi le seuil crucial de la fédération de l'euro ; ce cycle identifié un demi-siècle auparavant arrivait ainsi à son terme. Une "nouvelle phase stratégiquee", justement, commençait. Son caractère inédit était la lutte entre des puissances de dimensions continentales. Les Etats-nations, les dimensions de la puissance souveraine que l'histoire avait sédimentées en Europe, étaient désormais insuffisants à ce niveau de confrontation. La Chine et l'Europe étaient les questions cruciales de la nouvelle phase. Quant aux tâches du parti dans la nouvelle phase stratégique, les crises confirment le cadre général déjà analysé au sujet de la localisation mondiale des forces de classe ; mais elles montrent aussi pour la première fois, de façon pratique, les potentialités de ces forces. Un milliard d'hommes ébranlés par la transformation sociale au cours des dix prochaines années, impliqués dans des processus tumultueux, représenteront une possibilité objective pour la stratégie révolutionnaire. La traduction de cette potentialité en forces subjectives pour le communisme internationaliste représente l'inconnue et le défi inédit de la nouvelle phase. Le chemin qui attend les nouveaux contingents du prolétariat mondial, en Chine, au Brésil, au Moyen- Orient ou en Turquie, est à peine entamé : le déploiement des énergies de classe est une certitude, mais il n'est pas possible d'en prévoir le parcours et les formes. Pour cette raison aussi, l'enracinement bolchevique dans l'impérialisme européen est un point capital pour la stratégie internationaliste de la classe mondiale.

07/2014

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Beaux arts

Sigalit Landau. Edition bilingue français-anglais

Quatre mois par an, pendant l'été, les résidents de la cellule d'habitation 516 de la Cité Radieuse Le Corbusier (Marseille) invitaient un artiste de renommée internationale à prendre position avec ses oeuvres dans ce lieu mythique de l'architecture du xxe siècle. En 2015, c'est l artiste israëlienne Sigalit Landau qui a séjourné quelques jours dans la cellule. Libre d'interagir avec l'architecture, la charge intime et la fonction domestique de la cellule, l'artiste a pu s'approprier l'ensemble des espaces, modifier la disposition des meubles et des objets, les faire disparaître, les remplacer par d'autres, changer l'attribution des pièces, faire le vide par endroits, le plein par ailleurs, mais a eu pour contrainte de maintenir valides les fonctionnalités vitales des lieux qui demeurent habités pendant les 3 mois d'ouverture de ce centre d'art particulier. Elle a ensuite donné ses instructions quant au mode d'habitation / cohabitation avec les oeuvres installées. Son intervention dans la cellule516, Sigalit Landau l'a intitulée "Better Place" . La référence à l'entreprise éponyme de véhicules électriques est immédiate : la compagnie israélienne Better Place voulait créer un monde meilleur, un monde libéré de sa dépendance aux produits pétroliers et à leur géopolitique. Plus largement, c'est la pertinence, la naïveté et le danger de penser le changement et le progrès à travers de grandes utopies, comme celles qui ont marqué les XXe et XXIe siècles, que met ici en cause Sigalit Landau. Parmi ces utopies, l'Unité d'Habitation Le Corbusier, en tant que projet d'habitat collectif conçu pour "adapter" l'homme moderne aux conditions de vie économiques et "machinistes" de l'après seconde guerre mondiale, fait figure de parangon. Aux solutions et idéologies totalisantes, Landau oppose des voies singulières et des voix de femmes : après le temps des utopies et de leur démesure, vient le temps d'un retour au récit, à la transmission et à l'intime... temps d'une refonte des mythes civilisateurs au coeur même du foyer. Dans la cellule516, Sigalit Landau prend ainsi position à travers un vaste ensemble d'oeuvres (sculptures, installations, vidéos, dessins...), certaines inédites, d'autres réactivées et ré-agencées spécifiquement pour le lieu et le contexte. Audrey Koulinsky, commissaire de l'exposition La collection "Les actes de la cellule516" rend compte après chaque saison de ce qui s'est joué pour ses résidents permanents et temporaires : comment l'oeuvre d'art impacte - c'est-à-dire fait varier - les déplacements et les habitudes corporelles quotidiennes au sein du logis, les pensées et le vécu subjectifs de ses résidents (permanents et temporaires), autrement dit, comment se (re)définit, dans ce contexte, la fonction "d'habiter" , et simultanément la notion d'oeuvre d'art. Ce troisième opus permet également de dresser le bilan des 3 années d'activité de ce centre d'art si particulier.

03/2018

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Réincarnation

Amor'ES. Roman poétique et paroles de chansons

Je rends un hommage à mes ancêtres, leur âme m'accompagne dans ce récit, une énergie sacrée me guide. J'en profite pour rendre également un grand hommage à tous les Espagnols oubliés de la Seconde Guerre mondiale. Je vénère la mémoire de ma mère et de mon grand-père comme ils méritaient de l'être, et ce n'est pas manquer de respect à leur souvenir que de reconnaître qu'ils avaient l'âme tricolore. Mon grand-père et mon oncle sont morts fusillés dans les cent quatre-vingt-six marches de l'escalier du camp de concentration de Mauthausen en Autriche. C'est l'histoire d'une âme, celle de mon grand-père, qui a pris possession de mon corps pour s'incarner sur terre pour apprendre à aimer, à trouver sa lumière. Elle choisit de s'étendre, pour vivre une incarnation dans la matière. Je suis la matière. Il n'y a pas de mot qui puisse expliquer quelque chose de surnaturel, dans les circonstances d'un effacement humain aussi complet, mon grand-père Evaristo et moi, nous sommes étroitement reliés depuis ma naissance, après sa mort. Ma mère a survécu à la guerre civile d'Espagne puis à la Seconde Guerre mondiale, dont quatre années d'internement dans les camps de concentration en France. Malgré ces guerres désastreuses, elle est morte stupidement devant chez elle, dans un accident de voiture. L'accident a été pour moi un élément déclencheur pour l'écriture de ce manuscrit. L'argent dans tous les domaines, les profiteurs se battent pour le contrôle des points stratégiques. Il n'y a pas de petits profits, que de grands, avec de grands intérêts. Même pendant ou après une catastrophe, un accident, une immense guerre, les affaires continuent en famille. La vie est comme une étoile filant dans le ciel, et l'existence est une sorte de pendule de joies, de souffrances, de moments de vide absolu et d'expériences qui les remplissent. Nous sommes tous reliés les uns aux autres par une mémoire secrète : voilà le sens de mon récit. Même si les années passent, certaines choses sont difficiles à effacer, en quelque sorte une endurance du traumatisme qui revient des ancêtres, des traces transmises d'un lointain passé. Le symbole de l'éléphante, ma couverture, est une belle métaphore de l'état d'esprit absolu d'aller de l'avant. Les éléphants ne marchent pas autour des obstacles et ne s'arrêtent pas non plus dessus. Son énorme tête incarne les sagesses d'une âme. Il n'est d'aucune relation avec les droits humains, il n'existe que par lui-même, sans dépendance et n'a besoin de personne dans l'absolu. Ses petits yeux sont le symbole de la concentration. Sa petite bouche et ses grandes oreilles représentent la nécessité de moins parler et d'écouter davantage. Il n'entend que les bonnes paroles, rejette les mauvaises. Un symbole de richesse terrestre. J'aime cette idée-là pour mon âme.

02/2023

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Revues de psychologie

Enfances & psy N° 96/2023 : Silences

De nombreuses expressions incluant le mot silence jalonnent la langue française. Celles-ci résonnent dans des domaines divers tels que la musique, la loi, la religion, le scolaire, ou tout simplement au coeur de notre quotidien. "Silence, on tourne" , "la loi du silence" , "silence, s'il vous plaît" , "rompre le silence" . "Le silence est d'or" ou encore "un silence de mort" ... , ces deux expressions marquent les extrêmes des deux valences du silence : son côté positif, structurant et son côté néfaste, mortifère. Le silence n'est pas le vide, il est "une forme particulière de langage qui permet d'exprimer des choses inexprimables par les mots" (Lewis, 1977). Il y a des silences pleins, ceux qui vont donner tout leur sens aux propos qui les précèdent ou les suivent, des silences qui en disent long et des silences qui signent une fermeture. On distingue le silence imposé, le silence consenti et le silence voulu. Sauf circonstances particulières où le silence est requis, en démocratie l'adulte est libre de parler ou de se taire. L'enfant, lui, est sous la dépendance de ses parents ou des adultes qui s'occupent de lui, qui régulent plus ou moins sa parole et son silence. L'enfant apprend à les maîtriser : ne pas tout dire, savoir garder des choses pour soi, savoir taire ce qui peut blesser l'autre, savoir se taire pour écouter. Dans ce siècle de l'hyper-communication souvent futile, de la stimulation et du bruit permanent, quelle place pour le silence, la respiration ? Quels effets sur la construction psychique des enfants et des adolescents. On associe davantage le bruit à l'adolescence mais le tapage de celle-ci s'accompagne souvent d'un silence symétrique aux désirs de communiquer des parents... Comment considérer le silence de l'enfant ou de l'adolescent sommé de parler : à l'école, au collège, ou autre occurrence, au tribunal pour enfant ? Et le silence des adultes face aux questions de l'enfant ? Qu'en est-il du silence lorsqu'il fait partie de la symptomatologie, de la clinique ? Qu'en est-il également du silence dans le groupe thérapeutique ? Rester silencieux dans un groupe de parole... et pourquoi pas ? Dans les synthèses cliniques ou institutionnelles, quelquefois un ange ou un convoi d'anges passent, que signifie ce silence qui s'installe ? Quels conflits sous-jacents ? Comment dépasser ce symptôme institutionnel ? "Accueillir, accepter, consentir ; écouter le silence et scruter l'invisible - tels sont les plus hauts actes de l'attention et de la conscience que doivent accomplir les vivants" (Sylvie Germain). Les vivants sont soignants, parents, enseignants, magistrats, éducateurs, intervenants du monde de l'enfance. Ce silence, nous ne le percevons pas tous avec le même filtre auditif. C'est pourquoi, dans ce numéro d'enfance&psy, nous nous interrogeons sur les différentes formes de silence qui jalonnent la vie des enfants.

06/2023

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Beaux arts

Versailles. 400 ans d'histoire

Du pavillon intime au château de fêtes, du palais du Soleil au château de la France, de la résidence royale au musée actuel. 1-La création de Versailles jusqu'aux années 1660. Le terrain de chasse d'Henri IV est adopté par son fils Louis XIII, qui y fait construire un petit château. Louis XIV l'adopte à son tour et, dès 1661, y entreprend des travaux qui en font le cadre idéal de fêtes mémorables. 2-Le palais du Soleil, les années 1670. Louis XIV décide d'en faire une résidence moderne et confie les travaux d'agrandissement à Louis Le Vau. Ayant choisi le soleil pour emblème, il en fait le thème des appartements royaux, où, sous la direction de Charles Le Brun, se déploie un décor fastueux de marbre, d'or et d'argent. 3-Le Versailles de Mansart, les années 1680-1690. Louis XIV choisit de faire de Versailles la résidence principale de la cour et le siège du gouvernement. Jules Hardouin-Mansart agrandit à nouveau le château par deux grandes ailes et bâtit toutes les dépendances nécessaires à cette nouvelle fonction. Versailles devient une "nouvelle Rome". 4-La création des jardins. Dans les années 1660, André Le Nôtre entre en scène et dessine des jardins modernes au prix de travaux gigantesques. Mansart, qui lui succède, parachève l'ensemble et le porte à la perfection. 5-Versailles au XVIIIe siècle, continuité et rupture. Louis XV s'attache à terminer l'oeuvre de son aïeul. Soucieux de mener une vie plus intime, il crée aussi des petits appartements, décorés et meublés avec raffinement. 6-Le parc et ses annexes, la Ménagerie et les Trianon. Le grand parc, au départ dédié à la chasse, voir naître au fil du temps des pavillons d'agrément qui servent de décor de fêtes ou de lieux de retraite à l'écart de la cour. La Ménagerie, le Grand puis le Petit Trianon offrent des séjours intimes et des jardins privés à l'aménagement plus pittoresque. 7-Les galeries historiques de Versailles. Soucieux de donner à Versailles une vocation digne de son histoire et de sa renommée, Louis-Philippe décide de transformer le palais royal désaffecté en un musée de peinture qui racontera l'histoire de France et sera un vecteur de réconciliation nationale. 8-Versailles et la République, la renaissance d'une résidence royale. Désormais, Versailles est à la fois musée et résidence royale restaurée dans toute sa splendeur. Les aménagements se poursuivent pour lui redonner un éclat qui rayonne à travers le monde.

03/2012

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Littérature française

White Rabbit. Voyage jusqu’au bout de l’enfer

Dans les années 2009, à l'âge d'onze ans Maud débarque au collège, mal traitée par les uns, insultée par les autres, de nature rebelle elle devient solitaire, renfermée sur elle-même, triste et malheureuse. Elle n'est que trop heureuse lorsqu'elle rentre au lycée, mais elle reste une enfant fragilisée et influençable. Délaissée par ses amis et trop protégée par sa famille ? elle ne dispose pas d'une très grande autonomie. Guidée par de mauvaises fréquentations elle fume son premier joint à l'âge de 15 ans. Et à l'âge de 17 ans, Maud, de nature rebelle, commence à se gaver de LSD, de cannabis, de cocaïne, de Kétamine, d'héroïne, et de psychotropes en tout genre. Elle a commencé à se droguer suite à une dépression et un chagrin d'amour. Pour elle c'est un peu dans la continuité de sa vie. Vie qu'elle n'aime pas. Mais elle aime ses amis. Il y a un ras-le-bol général causé par des années de souffrance. Pourtant elle vit dans une famille soudée, à la campagne où l'amour est présent au quotidien. Elle vit dans une famille où la pauvreté n'est pas un problème et où le conflit n'existe presque pas. Les rapports entre Maud et sa famille se détériorent lorsqu'elle commence la drogue. A 18 ans elle se fait son premier fix de Cocaïne et d'héroïne. C'est le début de sa descente aux enfers. Complètement dépendante, elle est obligée de voler, faire la manche et tombe dans la petite délinquance, comme toutes ses mauvaises fréquentations, pour subvenir à ses besoins de drogue et pour éviter la crise de manque. Peu à peu elle voit certains mourir d'overdose, les uns après les autres. Après plusieurs tentatives de suicide, pensant qu'elle n'arrivait même pas à mettre fin à ses jours, elle s'obstine à se droguer. Elle devient alors plus que l'ombre d'elle-même, elle est plus morte que vivante, c'est alors qu'elle survit dans ce monde qu'elle n'aime pas, qui ne lui appartient pas et dans lequel elle a l'impression de ne pas avoir sa place. Elle fait alors la rencontre d'un garçon de 32 ans en free-party, c'est alors qu'une histoire d'amour débute entre deux toxicomanes. Comment vont-ils se sortir de cet enfer, de cet engrenage qui est la drogue, dans lequel ils sont tombés ?

05/2019

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Toxicomanie

Au Fait : Addicts - sept - oct 2022. De la société de consommation à la société d'addiction

La société d'addiction... Les célèbres Trente glorieuses, parenthèse enchantée où la consommation était innocente, du moins se l'imaginait-on, ont d'abord été remplacées par les Trente piteuses, décennies de crise permanente, puis désormais par les Vingt calamiteuses et plus, une ère mortelle pour la planète. Pourtant, durant cette dégringolade soutenue, la consommation a suivi une hausse exponentielle. Elle est devenue folle, hors de contrôle, et ne se conçoit plus autrement que dans l'excès. Le "gavage", dit l'un de nos intervenants. La société de consommation dénoncée par les soixante-huitards est donc devenue la société de surconsommation, encouragée par les mêmes dans la seconde partie de leur vie. Et cette surconsommation a viré à l'addiction. Rappelons la définitionA : dépendre d'un ou plusieurs produits au point d'en faire dépendre sa vie. L'économie de marché a compris au tournant du millénaire que consommer ne suffisait plus. Il fallait attirer le consommateur sur un autre terrain, le rendre accro à tout ce que lui promettaient la publicité, le marketing et internet. Voilà le secretA : proposer des besoins que le consommateur ne connaissait pas. C'est ainsi que nous sommes devenus addicts à l'image, au sucre, aux algorithmes, aux médicaments, aux nouvelles drogues de synthèse, aux alcools déguisés, aux cigarettes électroniques, à la mode instantanée, aux burgers, aux sodas... La liste est interminable. Deux groupes ont partie liée dans cette affaire : les mafias sur le marché illicite, Darknet ou économie souterraine, les lobbies sur le marché légal. Les unes et les autres veillent à leurs profits. Mais le citoyen-usager-addict n'est guère plus innocent. Il laisse faire quand il pourrait refuser sa dépendance, se révolter contre le gavage et décréter qu'est venu le temps du sevrage. Avec les témoignages de : Amine Benyamina, qui dirige le département de Psychiatrie et d'Addictologie de l'Hôpital Universitaire Paul Brousse à Villejuif. Il est président de la Fédération Française d'Addictologie (FFA). Marcel Rufo, pédopsychiatre et professeur émérite, auteur de dizaines d'ouvrages consacrés à la prime enfance. Il a exercé dans différents hôpitaux de Marseille ainsi qu'à l'hôpital Cochin à Paris. Ketty Deleris, qui a exercé pendant 10 ans le métier de diététicienne. Tabacologue spécialisée dans le sevrage du tabac et du cannabis, elle exerce en parallèle depuis 2020 une activité de prévention des addictions sur les réseaux sociaux. Jean Pouly, qui explore les usages des technologies de l'information depuis 25 ans. Pionnier de la médiation numérique à la fin des années 1990, il enseigne l'économie numérique à l'Université de Lyon et intervient à l'Ecole Centrale de Lyon. François Delorme, maître de conférences en sciences de gestion. Il a soutenu sa thèse de doctorat à l'université de Grenoble où il est chercheur associé. Serge Ahmed, psychopharmacologue et neurobiologiste. Il dirige depuis 2009 une équipe du CNRS à l'Université de Bordeaux qui mène de nombreuses recherches sur les addictions, notamment à la cocaïne, l'héroïne et la nicotine. Thomas Amadieu, normalien titulaire d'un doctorat en sociologie, professeur associé à l'ESSCA Ecole de Management et chercheur associé au Gemass (CNRS/ Sorbonne Université). Catherine Grangeard, psychanalyste et psychosociologue. Elle est engagée depuis l'an 2000 dans la dénonciation de la fabrique de l'obésité par les diktats visant la minceur.

09/2022

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Actualité médiatique internati

Public

"Après trois décennies où l'on avait cru pouvoir s'en passer, tout indique que nous avons plus que jamais besoin des mots du public. Face aux risques de dévoiement d'un Etat qui se détourne de son cadre public, ils sont les mots-clés de mobilisations sociales et politiques (...) et le meilleur thermomètre de notre vie collective et de nos démocraties". A. Vauchez Au risque d'une crise de confiance sans précédent des citoyens dans l'Etat dont ils interrogent désormais la légitimité " publique ", c'est-à-dire la capacité, voire la volonté, de se faire le relai des intérêts collectifs, et de protéger les citoyens. L'état général d'impréparation dans lequel s'est trouvé l'Etat au commencement de la pandémie aura servi ici de révélateur ; jetant une lumière crue sur l'action des gouvernements précédents qui avaient suivi une politique de réduction des coûts et d'efficacité gestionnaire au risque de priver les services hospitaliers des masques et des lits d'hôpital nécessaires. Dès lors que le gouvernement ne paraît plus agir en " pouvoir public ", plus rien ne semble justifier l'exception étatique qui confère à cette organisation politique un statut dérogatoire et des pouvoirs exorbitants. C'est du reste cette tension qu'a révélé le mouvement des Gilets jaunes, marqué tout à la fois par des attentes fortes à l'égard de l'Etat des services publics (en termes de qualité et d'égalité d'accès aux hôpitaux, aux transports publics, etc.), et une défiance inédite à l'égard de gouvernants tenus pour responsables de l'échec de l'Etat à tenir ses promesses " publiques ". Cette crise de confiance ne pouvait pas tomber plus mal alors que nous avons collectivement besoin d'un Etat et d'une Union européenne capables de conduire, au nom de tous, la conversion écologique de nos sociétés et de nos économies, et alors que nous devons faire face aux conséquences sanitaires, mais aussi économiques et sociales profondes de la pandémie Covid. Manière de dire, en somme, que la réflexion sur le " public " et les liens qu'il entretient avec l'Etat forme aujourd'hui un préalable à toutes nos discussions sur le changement d'orientations des politiques publiques. Les nouvelles théories démocratiques l'oublient parfois, toutes occupées qu'elles sont à faire apparaître de nouveaux horizons mobilisateurs - qu'il s'agisse de la transition écologique ou des nouvelles formes de démocratie participative. Mais, sans réfléchir à ce que l'Etat est devenu au fil des trois dernières décennies, ni aux chaînes de dépendance dans lesquelles il inscrit aujourd'hui son action, elles s'exposent au décalage en faisant comme si l'Etat était ce simple " levier " disponible et mobilisable pourvu qu'on veuille bien lui donner le sens politique voulu. Or il y a précisément lieu d'en douter. C'est pourquoi il faut reprendre le fil du " public " et remettre sur le métier une notion qu'on avait paresseusement abandonnée comme une vieille relique. Il faut faire l'inventaire des glissements de terrain qui se sont produits depuis trente ans et ont fragilisé les soubassements publics de l'Etat, décrire leurs effets politiques et démocratiques, et explorer les voies possibles d'un nouvel esprit public du gouvernement.

03/2022

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Architecture régionale

La Cité des Electriciens

La Cité des Electriciens est la plus ancienne cité minière préservée du Nord de la France. Ce " Regards... " revient sur la réhabilitation de ce coron, laissé à l'abandon plusieurs années et devenu aujourd'hui un véritable lieu culturel dynamique, marqué par une directive sociale, architecturale, économique et touristique. Présentation du site La Cité des Electriciens est la plus ancienne cité minière préservée du Nord de la France. Inscrite aux Monuments historiques depuis 2009, elle est située à Bruay-la-Buissière. La cité devient en 2012 l'un des cinq grands sites miniers dans le cadre de l'inscription du Bassin Minier sur la liste du Patrimoine mondial de l'UNESCO au titre de Paysage culturel, évolutif et vivant. Construite entre 1856 et 1861, elle a pour vocation de loger les familles de mineurs. De grands scientifiques, notamment dans le domaine de l'électricité ont donné leurs noms aux rues (Ampère, Marconi, Volta, Edison, Coulomb, Franklin, Laplace, Faraday, Branly et Gramme) d'où le nom, la Cité des Electriciens. En 2008, les habitants abandonnent peu à peu le coron, laissé à l'abandon depuis l'arrêt de l'activité minière en 1979. Il accueille alors une première intervention de la compagnie artistique Les Pas Perdus qui donna l'élan pour les travaux de réhabilitation qui commencèrent en 2013. La Communauté d'agglomération a fait le choix de proposer un nouvel usage d'équipement culturel et touristique. La cité a ouvert ses portes au public en mai 2019. La configuration du quartier a été conservée : sur une superficie totale de trois hectares, six des neufs " barreaux " ont été réhabilités (trois ont conservé leur usage d'habitation), de même que les " carins ", petites dépendances annexées aux logements et qui servaient de poulailler, de latrines ou de buanderie. Les jardins ont également fait l'objet d'une rénovation paysagère. La cité révèle la progressive évolution de l'habitat ouvrier au XIXe siècle et de l'architecture des premiers corons. Conçu par l'agence d'architecture Philippe Prost, avec l'agence Du&Ma pour la muséographie et la scénographie, un centre d'interprétation du paysage, de l'urbanisme et de l'habitat miniers accueille le public dans deux bâtiments : le premier, contemporain, repérable à sa magnifique carapace de tuiles rouges émaillées, présente le bassin minier à travers les terrils, fosses et cités, des origines de la révolution industrielle à la fermeture de la dernière fosse. Le second est un " barreau " qui offre un habitat minier réhabilité. Aujourd'hui la cité accueille des expositions, propose des résidences d'artistes, des ateliers nature, arts plastiques, des visites guidées, des espaces de restauration, des gîtes... L'ouvrage En première partie, l'ouvrage présente, par le biais d'un entretien avec Philippe Prost et Isabelle Mauchin, le projet de réhabilitation de la Cité. La deuxième partie de l'ouvrage, le " portolio ", expose le projet en images. On pourra suivre le processus de réhabilitation grâce à des photographies avant restauration, des images du chantier et des documents graphiques tels que plans, coupes... , et de nombreuses photographies du projet achevé. La troisième partie évoque la vie dans la Cité des Electriciens lorsqu'elle était encore habitée par les mineurs et leurs familles, ainsi que l'importance des jardins ouvriers et le projet qui a permis leur réhabilitation.

10/2021

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Littérature comparée

Revue de littérature comparée N° 375, juillet-septembre 2020

Neus ROTGER : Le roman comme théorie de l'histoire : théories de l'écriture historique en France au XVIIe siècle (en anglais) Cet article traite de la relation entre l'historiographie et le roman dans la France moderne. Il remet en cause la vision établie qui minore le rôle du roman dans le débat historiographique du dix-septième siècle et avance au contraire que la fiction en prose a joué un rôle important dans la configuration des paramètres théoriques de l'histoire (de la même manière que nous savons comment l'écriture de l'histoire détermine les origines du roman). L'examen d'une série de traités d'épistémologie de l'histoire, allant de Sorel à La Mothe Le Vayer, à Le Moyne, Saint-Réal, Saint-Evremond et Rapin permet de montrer comment le roman participe au processus de réhabilitation d'une discipline en crise. François GENTON : Gellert en France : une bibliographie et quelques réflexions Que reste-t-il de l'oeuvre de Christian Fürchtegott Gellert en France et en français ? Aucun des livres de cet auteur n'est disponible sur le marché du livre en France. Aucune traduction n'a été publiée en France depuis la moitié du XIXe siècle. Ce texte tente de faire le bilan des traductions françaises d'oeuvres intégrales de Gellert ou d'extraits tirés de ses oeuvres et esquisse une description de l'importance en français et en France de cet auteur et de son oeuvre. Ignacio RAMOS-GAY : "An Ingrained Antipathy" : Traduire et adapter le théâtre français en Angleterre, du pillage à la suprématie culturelle (1843-1886) L'objectif de cet article est d'analyser la pratique de la traduction et de l'adaptation d'oeuvres françaises pour la scène londonienne pendant près d'un demi-siècle de la période victorienne (1843-1886). A partir des témoignages de dramaturges, de critiques, d'acteurs et de chroniques journalistiques, il est possible d'observer comment le recours au matériel étranger est conçu, dans un premier temps, comme un exemple de pillage intellectuel qui affaiblit la construction de l'identité nationale autour de l'art dramatique. Dans un deuxième temps, au fil du siècle, ce "vol" ou "pillage" sera conçu en termes positifs, laissant place à une "renaissance" de l'art dramatique britannique. Dans les deux cas, le fondement de l'activité créatrice dans les oeuvres créées en France confirmera ce que certains critiques ont appelé la suprématie culturelle française au XIXe siècle. Aurore TURBIAU : Traversées québécoises en littérature féministe : influences états-uniennes et françaises. Cet article propose d'étudier la manière dont la littérature féministe québécoise s'est constituée, dans les années 1970, en relation avec les productions théoriques et littéraires françaises et américaines. Les Québécoises voyagent aux Etats-Unis et se nourrissent de ce qu'elles y apprennent ; les essais militants les intéressent, ceux de K. Millett, S. Firestone, B. Friedan ; mais le rapport d'influence avec les Etats-uniennes est unilatéral, les Etats-uniennes se souciant assez peu de ce qui se passe au Québec. En revanche, on peut parler de vrais échanges entre féministes françaises et québécoises ; elles partagent essais historiques et féministes, textes psychanalytiques ou littéraires ; elles participent aux mêmes revues et se retrouvent dans des congrès internationaux. Ainsi, au moment des années 1970, on peut parler de "traversées québécoises" : même si la littérature féministe québécoise ne s'est jamais placée en situation de dépendance par rapport aux créations états-uniennes et françaises, elle les a visitées pour en tirer de quoi se construire elle-même, avec ou sans leur participation active. Victor TOUBERT : La bibliothèque inquiète : représentation des bibliothèques chez W. G. Sebald et Pierre Michon Cet article propose de revenir sur la notion de "fantastique de bibliothèque" avancée par Michel Foucault pour étudier les rapports entre savoirs et littérature. Les représentations des bibliothèques chez W. G. Sebald et Pierre Michon semblent en effet ne pas pleinement correspondre au rapport fantastique avec le savoir dont Flaubert était, pour Foucault, le principal représentant. L'étude de ces représentations permet alors de comprendre certaines évolutions des rapports entre les écrivains et les savoirs : construits sur des usages originaux de l'intertextualité, ces représentations comportent une charge ironique et critique, et illustrent un rapport inquiet au savoir.

02/2021

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Psychologie, psychanalyse

ANAE N° 158, février 2019 : Anxiété, troubles neurodéveloppentaux et des apprentissages

L'anxiété est l'une des manifestations cliniques présentes dans de nombreux syndromes neurodéveloppementaux chez les enfants, les adolescents et les jeunes adultes. Associée à la détresse, à l'isolement, voire à l'exclusion sociale et aux troubles cognitifs, ses effets sont délétères autant sur la santé que sur les relations sociales, l'apprentissage et l'estime de soi. Les répercussions à long terme des problèmes d'anxiété sont largement documentées (victimisation, décrochage, radicalisation, dépendance, chômage...). La nature secrète de l'anxiété et la pluralité de ses expressions (inquiétudes multiples, peur de la nouveauté, perte de contrôle, troubles d'attention, de concentration, pensées alarmistes, doutes, obsessions, évitement, rituels, compulsions, crises, agressivité, insomnies, sudations, fatigue...) la rendent difficile à identifier. De plus, la contribution de l'environnement au maintien des symptômes physiques, émotifs, comportementaux et cognitifs est souvent subtile ou difficile à enrayer. Elle pose à ce titre aussi de sérieux défis à tous les intervenants. Ceux-ci ont besoin d'évaluer, de comprendre et d'intervenir auprès des personnes qui souffrent d'anxiété. L'apport de plusieurs disciplines relatives à la santé mentale (médecins, psychologues et neuropsychologues, psychoéducateurs, intervenants sociaux, en santé et en milieu scolaire) est nécessaire et permet une plus grande diversité dans le traitement de l'anxiété. Les enfants à tout âge sont susceptibles de présenter des symptômes d'anxiété. Nos contacts fréquents avec les professionnels scolaires nous incitent à penser que les problèmes d'anxiété sont généralisés à toute population estudiantine, tant au primaire, qu'au secondaire (collège), qu'au CEGEP (lycée). Aussi avons-nous accordé cette année la parole à des chercheurs et des professionnels qui s'intéressent à l'anxiété dès la petite enfance, mais aussi, bien évidemment, à l'enfance, à l'adolescence et même aux jeunes adultes. Parfois, à la suite d'une recommandation scolaire, les parents consultent en psychologie parce que leur enfant ne fonctionne pas très bien à l'école et on se questionne sur les causes possibles de cet écueil scolaire. Il arrive qu'aucun déficit neuropsychologique ne puisse expliquer l'échec de l'enfant, mais que la présence de symptômes anxieux se révèle au cours de l'entretien du psychologue clinicien. Il est donc souhaitable de connaître les chemins possibles qui s'offrent à ces enfants anxieux dont les manifestations sont plus discrètes. L'anxiété est, par ailleurs, l'un des symptômes associés le plus souvent rapporté par les parents d'enfants porteurs d'un syndrome neurologique : entre autres, le trouble déficitaire de l'attention avec ou sans hyperactivité (TDA/H) M. -C. Guay, le trouble du spectre de l'autisme (TSA) G. Bernier, le syndrome Gilles de la Tourette (SGT) I. Gascon. Les enfants en difficulté ou en trouble d'apprentissage sont également susceptibles de connaître de l'anxiété (tout particulièrement celle suscitée par les mathématiques) M. Fayol. Les jeunes à haut potentiel (HP) souffrent-ils davantage d'affects anxieux ou de troubles émotionnels que les autres enfants ? E. Chevrier. L'anxiété chez les enfants d'âge préscolaire est une réalité de plus en plus présente. Intervenir adéquatement durant cette période devient impératif afin d'offrir à ces jeunes des compétences liées à l'expression des émotions qui constitueront des facteurs de protection et qui les aideront à se prémunir contre les effets délétères de l'anxiété et des troubles comorbides une fois adultes M. M. Brossard. En proposant ce symposium, nous souhaitions explorer de nouvelles stratégies d'intervention telles l'hypnose, la pleine conscience et l'application de la réalité virtuelle au traitement de syndromes anxieux, L. Cané, L. Turgeon, M. Rebattel. Le choix d'éditer un numéro sur l'anxiété a été retenu parce que de nombreux professionnels s'inquiètent d'une recrudescence de ses manifestations chez les jeunes, son but est la mise en commun, entre chercheurs et intervenants, de leurs hypothèses de travail et de leurs expériences pour mieux intervenir auprès d'une patientèle d'enfants, d'adolescents et de jeunes adultes souffrant de ces problèmes de santé mentale.

02/2019

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Religion

Communio N° 179 : L'Europe unie et le christianisme

Editorial : Olivier Chaline : L'Eglise et l'Europe en voie d'union : quelles présences de l'une à l'autre ? Thème : L'Europe unie face au christianisme Aldino Cazzago : Jean-Paul II : l'Europe dont je rêve Dans un parcours historique des interventions pontificales, l'article montre que Jean-Paul II s'est attaché sans relâche à défendre la vocation spirituelle de l'Europe enracinée dans le christianisme qui, seule, peut faire d'elle une communauté pleinement humaine. Ysabel de Andia : Ecclesia in Europa Expert au Synode des évêques pour l'Europe, l'auteur tire les conclusions de l'exhortation Ecclesia in Europa qui, devant "l'apostasie silencieuse" d'une Europe rejetant ses racines chrétiennes, l'invite à revenir au Christ, source de toute Espérance : c'est dans la fidélité à sa vocation spirituelle qu'elle peut réussir à intégrer de nouveaux pays et à promouvoir une mondialisation solidaire ; de Benoît à Edith Stein, ses saints patrons lui montrent la voie à suivre. Rémi Brague : Le christianisme comme forme de la culture européenne On ne peut faire du christianisme un des contenus de la culture européenne : ill offre ce caractère unique d'être une religion et rien d'autre qui, dans sa dépendance du judaïsme qui l'a précédé et du cadre culturel gréco-latin où il s'est établi, a instauré avec eux une relation spécifique : il n'en a pas seulement hérité, il les a acceptés dans un rapport de reconnaissance fait de gratitude et de respect. Olivier Chaline : Ni maîtresse ni servante : l'Eglise et l'Europe en voie d'union Le christianisme peut aider l'Europe en voie d'union politique en l'empêchant de se refermer sur ses habitants, en lui rappelant qu'elle n'est pas sa propre fin et en lui opposant des limitations, voire des forces de résistance le cas échéant. Piotr M. A. Cywkinski et Marcin Przeciszewski : L'Eglise en Pologne après 1989 face aux nouveaux défis de la démocratie Comme son titre l'indique, l'article donne une analyse détaillée de l'évolution du catholicisme polonais depuis que la Pologne est libérée du régime communiste, jusqu'à son intégration à l'union européenne, fortement appuyée par le pape Jean-Paul II et l'épiscopat polonais. De Jean-Paul II à Benoît XVI Serge Landes : Action de grâces Il serait aujourd'hui prématuré de comprendre dans son intégralité le pontificat qui vient de s'achever, il est encore bon de méditer de quelle façon, dans son agonie et sa mort, Jean-Paul II est resté jusqu'au terme de sa vie configuré au Christ. Jean-Robert Armogathe : La Méditation sur l'Eglise de Benoît XVI Avant de devenir pape, le cardinal Joseph Ratzinger avait, de longue date, élaboré une oeuvre théologique personnelle, centrée sur la présence de l'Eglise dans l'histoire des hommes. Dans cette perspective ecclésiologique, il est possible de formuler un oecuménisme de communion. Signets Xavier Tilliette : Claudel bibliste Durant les vingt dernières années de sa vie, Claudel, le poète qui "aimait la Bible" , s'est "agenouillé à l'Ecriture Sainte... . , avec un entrain, une alacrité, une allégresse qui ont constamment accru son bonheur et régénéré son écriture" . Christophe Dufour : La religion populaire : Pastorale diocésaine et "Ostensions" dans le Limousin Comment un évêque peut-il réagir en découvrant dans son diocèse une tradition religieuse qui, depuis le Moyen Age, mobilise l'ensemble d'une population dite déchristianisée ? Serviteur de son peuple, le pasteur reconnaît là une manifestation de sa foi et voit un lien entre l'évangélisation et cette forme de religion populaire, veillant à la purifier de toute superstition et à s'appuyer sur le sens mystique et la prière qui habitent le coeur de ses ouailles. Didier Laroque : My Architect. A son's journey Le film de Nathaniel Kahn, en reconstituant la vie de son père, un des plus grands architectes américains, permet de réfléchir sur la relation entre volonté d'art et vie morale, exigence de cohérence démentie par l'opinion qui fait de l'artiste un être voué au dérèglement. Le film, tout en montrant la souffrance filiale qui est le prix du génie paternel, est à l'unisson de l'oeuvre du Bâtisseur par la qualité des images et la profondeur de vue de l'Ecriture du Fils. Jean Clapier : Thérèse de Lisieux et la souffrance humaine Thérèse de Lisieux a trouvé dans l'expérience de da souffrance, vécue dans l'amour de Jésus, le sens de sa vocation : participer, en union avec le Crucifié, à son oeuvre de rédemption. C'est ce dont témoignent les textes réunis dans cet article.

06/2005

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Beaux arts

La Sauvegarde de l'art français. Aide aux églises rurales, Edition 2019

Les Cahiers de la Sauvegarde de l'Art français ont derrière eux une histoire déjà longue. Le premier volume a paru en 1979, sept ans après la mort de la marquise de Maillé. On sait que celle-ci avait institué pour légataire universelle la Sauvegarde de l'Art français, à charge de consacrer les fonds ainsi dévolus à poursuivre son oeuvre au service du patrimoine1. Le général de Cossé-Brissac, son successeur à la présidence de l'association, et Jean Hubert, qu'elle avait désigné pour le choix des édifices à aider, se préoccupèrent d'une publication régulière destinée à rendre compte de l'activité de la Sauvegarde et à faire connaître ses réalisations auprès d'un public plus large que celui des assemblées générales annuelles. Aidés par Jacques Thirion, ils rédigèrent eux-mêmes les premières notices se rapportant aux églises restaurées et, pour l'illustration, ils s'adjoignirent Françoise Bercé. S'il s'inscrit dans cette ligne originelle, le vingt-septième Cahier n'en témoigne pas moins des transformations qui, au cours des dernières années, ont marqué l'histoire d'une Sauvegarde de l'Art français promue au rang de fondation. La politique menée par le président en quête de ressources nouvelles a, en effet, permis d'élargir le champ d'action à des entreprises jusque-là exclues par les dispositions testamentaires de la marquise de Maillé et de les mener en toute indépendance financière. Dans leur grande majorité, les notices qui vont suivre concernent des églises répondant aux critères d'éligibilité précisés dans le texte du legs, et des travaux alimentés par les fonds propres à ce dernier. Mais on rencontrera aussi des interventions sur des édifices classés monuments historiques ou postérieurs au xviiie siècle, ainsi que sur des objets mobiliers : ces chantiers ont bénéficié d'apports extérieurs (grands donateurs, dons spécifiques, mécénat, programmes du "Plus grand musée de France" ...) et de l'expertise de la Sauvegarde. Deux monographies ouvrent ce Cahier. Elles serviront d'exemple pour montrer comment, par les observations et les réflexions qu'elles suscitent, des opérations de sauvegarde ou de sauvetage contribuent aux avancées des méthodes et des recherches tant historiques qu'archéologiques. "Une promenade dans toute la France - et un peu aussi dans le passé" , c'était ce que le général de Cossé-Brissac proposait aux lecteurs du premier Cahier. Depuis, la "promenade" s'est poursuivie et s'est largement étoffée. Cette année, toutefois, son déroulement connaît une modification : le regroupement des communes par département va remplacer leur présentation dans l'ordre alphabétique. Toute option de classement est certes arbitraire, mais on peut espérer que la nouvelle disposition facilitera la consultation, aidera à mieux situer les édifices dans leur environnement - géographique, historique, artistique... -, permettra d'éva- luer plus clairement récurrences et spécificités, voire de renouveler certaines perspectives. Les lieux de culte représentent l'objet essentiel des notices de ce Cahier. Sur la longue durée, leur vie s'est trouvée tributaire de facteurs divers et de leurs variantes locales. L'on pourra donc, d'un département à l'autre et à l'échelle de l'échantillon fourni, apprécier la part des éléments qui la nourrissent : héritages d'un passé lointain ou légendaire (sites gallo-romains, traditions locales) ; ressources du sol (matériau utilisé dans la construction) ; mise en place du réseau paroissial (apport du bâti pour sa connaissance) ; rôle des détenteurs de pouvoir, ecclésiastiques ou laïques (dépendances d'abbayes ou de chapitres, initiatives ou influences seigneuriales, générosité privée) ; pratiques de dévotion (chapelles) ; périodes de réfection ou de reconstruction architecturales (lien avec les événements de l'histoire, guerres en particulier, mais aussi avec l'évolution des conditions économiques, démographiques, sociales, ou tout simplement du goût) et, bien entendu, voisinages et échanges artistiques, sans oublier la place du mobilier. C'est ainsi que, par chaque opération de sauvetage ou de rénovation, la Sauvegarde de l'Art français participe, à sa manière, à la survie d'un peu de l'histoire du pays. Puisse ce vingt-septième Cahier en apporter une fois de plus le témoignage.

09/2019

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Critique littéraire

Études anglaises - N°2/2015. The British Contemporary Novel: 2008-2015

Catherine BERNARD Writing Capital, or, John Lanchester's Debt to Realism John Lanchester's fourth novel Capital (2012) offers a scathing, satirical denun- ciation of the excesses of capitalism, commodity fetishism and globalisation. The choral structure of the novel also allows the text to function as a world-novel, embracing as it does the criss-crossing lives of protagonists, each embodying a facet of a ramifed present. Reworking the basic principles of realistic representation, it appropriates the language of materialism to bring it to work paradoxically against the reifcation of affects and identity. With Capital, the "credit crunch" novel claims a different form of accountability that emerges through the very "stuff" of fiction. Le quatrième roman de John Lanchester, Capital (2012), offre un portrait satirique des excès du capitalisme, du fétichisme de la marchandise et de la globalisation. La structure chorale du roman transforme aussi le texte en roman-monde. Il embrasse les vies interdépendantes de protagonistes qui, chacun, incarnent une facette d'un présent densément ramifé. Retravaillant les principes de base du réalisme, le roman s'approprie le langage du matérialisme pour l'amener à oeuvrer contre la réifcation des affects et de l'identité. Avec Capital, le roman "de la crise" ("credit crunch fiction") revendique une forme de responsabilité qui s'incarne dans la matière même de la fiction. Vanessa GUIGNERY The Way We Live Now : Jonathan Coe's Re-evaluation of Political Satire This paper examines Jonathan Coe's oeuvre to discuss the evolution of his modes of portraying contemporary Britain. While Coe is well known for his satirical state-of- the-nation novels and for his commitment to political fiction, his recent essays reveal his misgivings about the effectiveness of political satire and Condition-of- England novels in the new millennium. This paper will navigate between Coe's fiction and non-fiction to examine the forms political engagement may take in the contemporary British novel. Cet article parcourt l'oeuvre de Jonathan Coe afin d'analyser l'évolution de ses modes de représentation de la Grande-Bretagne contemporaine. Coe est connu pour ses romans satiriques qui offrent un "état de la nation" et pour son attache- ment à la fiction politique, mais ses essais récents révèlent ses doutes quant à l'efficacité de la satire politique et de romans qui décrivent la condition de l'Angleterre à l'heure du nouveau millénaire. Cet article naviguera entre les écrits fictionnels et non-fictionnels de Coe pour envisager les formes que peut prendre l'engagement politique dans le roman britannique contemporain. Jean-Michel GANTEAU Vistas of the Humble : Jon McGregor's Fiction Jon McGregor's novels are characterised by a constant attention to detail and to the ordinary. They address the realities of individual, social and anthropological vul- nerability through narratives whose frail form countermands any attempt at abstraction and totalisation. In this article, I evoke the forms and modalities of vulnerability through the prism of the characters' and narratives' dependence on trauma, of systematic relationality and of attention to singularities. By throwing light on invisibilities and by giving voice to the inarticulate, McGregor writes ethical and political novels and uses the position of the precarious witness to contribute to the creation of some narrative democracy whose purpose, in Guillaume Le Blanc's terms, is to enlarge our sense of the common. Les romans de Jon McGregor se donnent pour tâche une attention permanente aux détails et à l'ordinaire. Ils s'ordonnent ainsi à l'évocation de la vulnérabilité indivi- duelle, sociale et anthropologique à travers des récits dont la forme vulnérable refuse toute totalisation. Les modalités et visages de la vulnérabilité sont ici évoqués à travers les motifs de la dépendance au trauma, de la mise en relation systématique, et de l'attention aux singularités. En mettant en lumière l'invisible et les invisibles, et en redonnant voix aux inaudibles, Jon McGregor fait oeuvre éthique et politique : il se pose en témoin précaire et contribue à l'élaboration d'une démocratie narrative dont le but est, selon les termes de Guillaume Le Blanc, de "créer du commun" . Peter CHILDS Food Chain : Predatory Links in the Novels of David Mitchell Humans are for David Mitchell predatory animals, whatever their civilized com- plexity. His novels contain numerous examples of individuals and groups who would oppress others in the name of logic, desire, morality, technology, survival or sheer force of will. That people prey on animals, resources and other human beings is only one dimension to Mitchell's fictional world but it is consistent and stark, from the cannibals that appear in Cloud Atlas and The Thousand Autumns of Jacob de Zoet through the warring factions in number9dream to the more fantasti- cal parasitic predators of Ghostwritten and The Bone Clocks. In this essay, I review aspects to this theme while analysing Mitchell's fictional world, which increasingly seems to be governed by interlinkages not only within narratives but metaleptically across them. David Mitchell considère les êtres humains comme des prédateurs, quel que soit leur degré de civilisation. Ses romans comportent de nombreux exemples d'individus et de groupes qui oppriment autrui en invoquant pour cela la logique, le désir, la morale, la technologie, l'instinct de survie ou leur volonté de puissance. Le fait que des hommes s'en prennent à des animaux, à des ressources naturelles ou à d'autres êtres humains n'est qu'un des aspects de l'univers fictionnel de Mitchell, mais il s'agit là d'une dimension structurante, à l'origine de la noirceur de l'oeuvre dans son ensemble - des cannibales de Cloud Atlas et The Thousand Autumns of Jacob de Zoet aux prédateurs parasites de type plus fantastique dans Ghostwritten et The Bone Clocks en passant par les factions en guerre dans number9dream. Cet article recense plusieurs composantes de ce motif récurrent dans la fiction de Mitchell, laquelle paraît de plus en plus fortement régie par des liens se tissant non seulement de manière interne aux différents récits, mais aussi de manière externe entre les récits eux-mêmes, sur un mode métaleptique. Marc POREE "What if ?" : The Speculative Turn of Will Self's Fiction "Et si ?" Révélant de lui-même les extravagantes hypothèses de travail dont il aime à procéder, Will Self est friand de spéculation. Une spéculation de type "métaphysique" , rejoignant celle des poètes de la première moitié du dix-septième siècle (cloués au pilori par Johnson avant que d'être réhabilités par T. S. Eliot). Une spéculation, dont le caractère cérébral s'accommode pourtant d'une volonté de faire que le roman s'incorpore et digère ce qui ne relève a priori pas de lui (les sciences, la pensée). Une spéculation, enfin, qui procède à rebours de l'évolution du lectorat et de la technologie, en oeuvrant à renouer avec un mécanisme de "sensibilité unifiée" que Self sait être anachronique, mais qui pose, à nouveaux frais, la question de la nécessaire difficulté en art. "What if ?" Never wary of unveiling the fantastical conceits which he is wont to proceed from, Will Self is (over)fond of speculation. A speculation that is meta- physical in kind, related to that implemented by the poets of the first half of the seventeeenth century (vilified by Johnson before being rehabilitated by T. S. Eliot). A speculation, the cerebral nature of which is found to be more than compatible with the processes of incorporation and digestion, at the hands of the novel, of all that is allegedly foreign to it (the sciences, thought). A speculation, lastly, bent on restoring a mechanism of "unified sensibility" which Self knows to be anachronis- tic, given the average reader's pursuits, but which offers a fresh take on the neces- sary difficulty of art. Camille MANFREDI Tales from the Pigeon-Hole : James Kelman's Migrant Voices This article offers to dwell on James Kelman's concerns with liminality and cultural identity by outlining the dynamics of displacement, dislocation and relocation in his recent novels You Have to be Careful in the Land of the Free (2004), Kieron Smith, Boy (2008) and Mo Said She Was Quirky (2012). While paying attention to Kelman's interest in the potential for subversion of the in-between, the article anal- yses the narrators' strategies of self-preservation and self-transformation with a view to better understand Kelman's own perception of the predicament of the contemporary Scottish writer in the postcolonial and global contexts. Cet article se propose d'éclairer le traitement des motifs de la liminalité et de l'identité culturelle à travers les dynamiques de décentrement, dislocation et délocalisa- tion dans les récents romans de James Kelman, You Have to be Careful in the Land of the Free (2004), Kieron Smith, Boy (2008) et Mo Said She Was Quirky (2012). En gardant à l'esprit l'intérêt de Kelman pour le potentiel subversif de l'entre-deux, cet article analyse les stratégies de préservation et de transformation de soi développées par les narrateurs. Elles permettront d'éclairer la tâche qui, selon Kelman, revient à l'auteur écossais contemporain dans le contexte à la fois du postcolonial et de nos sociétés mondialisées. Christian GUTLEBEN Whither Postmodernism ? Four Tentative Neo-Victorian Answers This paper sets out to examine in what ways recent neo-Victorian fiction illustrates twenty-first-century fiction's quest for new novelistic possibilities. On the basis of David Mitchell's Cloud Atlas (2004), Andrea Levy's The Long Song (2010), Michel Faber's The Crimson Petal and the White (2002) and Rosie Garland's The Palace of Curiosities (2013), it will be argued that neo-Victorianism broadens the scope of postmodernism by conceiving a cosmopoetics in which a referential and an aesthetic globalisation are combined, by imagining alternative forms of fictional historiography, by challenging various forms of orthodoxy and by questioning the limits of the human. Although it suggests evolutions and variations in relation to late twentieth-century historiographic metafiction, the novel of the new millennium nevertheless cannot be said to forsake postmodernism. Cet article se propose d'examiner dans quelle mesure la fiction néo-victorienne récente illustre la tentative de la fiction du vingt-et-unième siècle d'explorer de nouvelles possibilités romanesques. En prenant comme exemples Cloud Atlas de David Mitchell (2004), The Long Song d'Andrea Levy (2010), The Crimson Petal and the White de Michel Faber (2002) et The Palace of Curiosities de Rosie Garland (2013), nous soutiendrons que le néo-victorianisme élargit le spectre du postmodernisme en concevant une cosmopoétique où se mêlent référentialité et esthétique mondialisées, en imaginant d'autres formes d'historiographie fictionnelle, en remettant en cause diverses formes d'orthodoxie et en s'interrogeant sur les limites de l'humain. Bien que le roman du nouveau millénaire suggère des variations et des évolutions par rapport à la métafiction historiographique de la fin du vingtième siècle, on ne peut cependant pas considérer qu'il renonce au postmodernisme.

08/2015

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Sociologie

Pierre Bourdieu. Points de vue

Si la collection "Champ social" des éditions du Croquant réédite le n°47-48 de février -mars 2015 consacré à Pierre Bourdieu de la revue Regards sociologiques, c'est à la fois parce que ce numéro est devenu introuvable, mais surtout parce qu'il rassemble un dossier d'une grande diversité et d'une exceptionnelle densité. La revue Regards sociologiques avait consacré un numéro à Pierre Bourdieu pour honorer une dette symbolique à un chercheur dans lequel elle se reconnaissait et qui l'avait soutenue dès ses débuts, mais surtout parce qu'elle voyait, comme beaucoup d'autres, dans le travail de Bourdieu une contribution majeure au développement de la sociologie. Les contributions rassemblées dans cet ouvrage, agrémentées de l'oeuvre d'artistes qui se sont intéressés à Bourdieu, multiplient les perspectives sur son oeuvre : étude des conditions de production des enquêtes, des concepts et des modèles, développement des concepts-clés, construction d'un modèle cohérent de l'Etat, retour sur tel aspect de la domination masculine, explicitation de ce qu'implique un engagement politique réflexif, restitution de la vivacité de ses cours et de la cérémonie de remise de la médaille d'or du CNRS, exploration des rapports de Bourdieu avec l'oeuvre de Mauss, de Wittgenstein et de Marx, etc. Un premier ensemble d'articles montre dans quelles conditions Bourdieu réalise ses premiers travaux en Algérie où il est confronté aux effets du colonialisme, du racisme et de la guerre. La contribution d'Andrea Rapini retrace les déplacements de Bourdieu et de Sayad au cours de leur enquête sur Le Déracinement. Elle est complétée par un entretien de Tassadit Yacine avec Jacques Budin (un étudiant enquêteur de l'équipe de Bourdieu et de Sayad). Christian de Montlibert met en évidence un triple combat dans les travaux "algériens" de Bourdieu : contre la méconnaissance des cultures qui coexistent alors en Algérie, contre le mépris raciste et contre des conceptions politiques dont il pensait qu'elles risquaient d'obérer l'avenir. Dans le contexte des années 1980, Remi Lenoir s'interroge ensuite sur "le dit et l'écrit" dans l'oeuvre de Bourdieu : quel statut accorder aux transcriptions de ses cours et séminaires ? Comment restituer par écrit la vivacité verbale qui caractérisait Bourdieu enseignant ? A propos du discours qu'il prononce à l'occasion de la cérémonie de la remise de la médaille d'or du CNRS, Loïc Wacquant souligne l'accent qu'il met sur les tensions entre science, autorité et pouvoir, la puissance symbolique de l'Etat et les raisons qui conduisent le sociologue à s'engager dans le débat civique. Rémi Lenoir développe les différents niveaux impliqués dans le concept de capital social et montre l'importance qu'a eue pour Bourdieu l'oeuvre de Mauss. A propos du concept d'habitus Gaspard Fontbonne met en évidence les effets épistémologiques de la lecture de Wittgenstein. Quant à la domination masculine, Rose-Marie Lagrave éclaire les contradictions, paradoxes et malentendus engendrés par ce livre : il faut tenir compte, selon elle, du contexte scientifique et du rapport de Bourdieu aux recherches féministes. Un autre ensemble de travaux présente son modèle d'analyse de l'Etat et s'interroge sur l'engagement politique de Bourdieu. Patrick Champagne analyse le cheminement de Bourdieu pour penser la construction de l'Etat au fil d'un double processus de concentration des différentes espèces de capital dans un petit nombre de mains. En grande partie par le système scolaire, l'Etat unifie, homogénéise, standardise les manières de faire et de penser. A propos d'une intervention de Bourdieu sur la crise de l'Etat, Rémi Lenoir souligne l'importance qu'il attribuait aux transformations des représentations des agents dominants. Lucien Braun, alors directeur des Presses Universitaires de Strasbourg, questionne Bourdieu sur l'avenir de l'autonomie universitaire dans un contexte où l'édition universitaire est de plus en plus dépendante de groupes financiers. Cet ouvrage se clôture par des analyses de la dimension critique de la sociologie de Pierre Bourdieu qui n'a pas cessé d'insister sur la nécessité d'une démarche réflexive. Après avoir rappelé les prises de position "messianiques" de Marx sur l'avènement d'une société sans classes, Gérard Mauger souligne l'importance accordée par Bourdieu au "travail de représentation" dans toutes mobilisations collectives, à commencer par celle du "peuple" , objet de prédilection pour des intellectuels. Après avoir rappelé les confusions autour de l'appellation "sociologie critique" , Louis Pinto montre qu'elle n'est ni un accessoire, ni un abus de pouvoir, mais une sorte de nécessité qui conduit à s'interroger premièrement sur les pouvoirs, les limites et les prétentions de la connaissance, deuxièmement sur les capacités à dire le vrai des connaissances "indigènes" , troisièmement sur les effets de dévoilement de l'ordre social. Enfin ce livre est ponctué par le travail de deux artistes, Joëlle Labiche et Yves Carreau, qui offrent leurs interprétations des "regards" de Pierre Bourdieu : de ceux de prédécesseurs, de contemporains et de membres de ses équipes de travail.

10/2022

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Histoire des idées politiques

Un Nouveau Paradigme Politique

POURQUOI AVOIR ECRIT CE LIVRE ? Après un moment de sidération et après que les premières révélations ont vu le jour, j'ai constaté que beaucoup se posait la question : que faire ? Comment sortir de ce marasme, de ce piège ? J'ai fait le constat que cette crise est révélatrice d'une situation préexistante depuis déjà fort longtemps et que cette situation est juste arrivée à son paroxysme. Donc, la première partie de mon livre fait le constat et l'historique du : comment en est-on arrivé là ? PARTICRATIE D'une part, je retrace l'histoire de l'émergence des partis politiques en Belgique et comment ces organisations, au départ, représentatives d'intérêts socio-économiques se sont affranchies de ces groupes et sont devenues des entités autonomes, qui vivent dans une sorte d'écosystème fermé, opaque et qui intègrent des individus par cooptation. Ces organisations politiques ne poursuivent qu'un but, occuper le pouvoir, asseoir leurs cadres dans toutes les sphères de l'Etat et détourner l'argent public, l'argent du contribuable du domaine régalien de l'Etat vers le superflu. Depuis 50 ans, nous assistons à une expansion sans précédent de nouvelles structures, organismes soi-disant d'intérêt public, asbl qui transforment notre Etat en usine à gaz gaspilleuse et inefficace. L'existence de ses structures nouvelles permet cependant aux partis à placer leurs affidés et à occuper le terrain. Nombre de compétences ont glissées des ministères vers des structures externalisées peu ou pas du tout contrôlées. En outre, le mode de représentation politique est totalement faussé. Tous les cinq ans (six pour le communal et le provincial), nous sommes appelés à voter pour élire nos députés fédéraux et régionaux. Mais les listes qui se proposent à nos suffrages n'ont pas été sélectionnées par l'électeur et les personnes et leur ordre sur les listes ont été choisis par les instances des partis politiques. Les députés élus sont donc des personnes sous dépendances, ils ne décident de rien. Toutes les décisions se prennent au sein des organisations où le citoyen n'a aucun regard. Tout le pouvoir décisionnel est détenu par ces partis qui s'arrangent en coalition et qui se partagent les postes à pourvoir. Le jeu démocratique est totalement faussé. LA MONDIALISATION Parallèlement, depuis la fin de la seconde guerre mondiale, on constate l'importance croissante prise par des institutions internationales qui imposent aux états des réglementations et un modèle économique qui bénéficient unilatéralement aux multinationales et à la finance internationale. L'Union européenne représente en ce sens un premier avatar de gouvernance mondiale. L'orientation voulue par les élites et la finance internationale est de soustraire aux états-nations le pouvoir de décision et de les transférer à des instances internationales non élues évidemment, qui leurs servent de paravents. Puisque ces puissances privées privilégient l'anonymat. La crise du Covid est l'aboutissement de ce processus, démarré depuis plus de deux siècles. Aujourd'hui, cet événement a accéléré et dévoilé au monde entier ce panorama et a dévoilé que nos mandataires politiques sont des marionnettes de ce système. La démocratie actuelle est un leurre complet et le citoyen n'a aucun appui de levier dans ce mode de gouvernance. Pourtant, malgré les apparences, ce colosse est un géant aux pieds d'argile. Car, pour nous imposer leurs diktats, pour le moment, les élites globalisées doivent encore passer par la courroie de transmission représentée par les organisations politiques nationales. C'est comme une multinationale qui doit passer par des franchisés locaux pour nous vendre sa marchandise. Et c'est là le maillon faible du système. C'est à cet endroit là que les citoyens d'un pays peuvent encore, pour le moment, renverser la table et imposer un autre mode de fonctionnement de la société. UN AUTRE PARADIGME C'est l'objet de la deuxième partie de ce livre, qui propose, d'une part, un nouveau schéma du vivre ensemble et d'organisation juridique et institutionnelle, en particulier de notre pays et d'autre part, un mode de fonctionnement, une feuille de route pour y arriver. Le livre s'intitule bien "un nouveau paradigme politique" , c'est-à-dire que nous partons sur de nouvelles bases en renversant la pyramide institutionnelle, cette fois, du bas vers le haut. D'abord, on simplifie le système institutionnel belge en conservant trois niveaux de pouvoirs : le communal, le régional et le fédéral. Exit donc les communautés et les provinces. Pour être plus conforme à la réalité sociologique du pays, nous aurons quatre régions au lieu des trois actuelles : la région flamande, wallonne, bruxelloise et une nouvelle région germanique. Mais les grands changements fondamentaux proviennent des trois pouvoirs constitutifs : l'exécutif, le législatif et le judiciaire. Votation En ce qui concerne le pouvoir législatif, nous partons du principe qu'il sera désormais constitué par le peuple lui-même, qui vote les lois. Nous connaissons déjà le système de votations en Suisse. Mais ici, nous allons lui donner une ampleur jamais vue dans aucun pays du monde et utiliser les technologies modernes, notamment la "blockchain" pour en sécuriser le fonctionnement. Ce système de démocratie directe remplacera donc les assemblées législatives aussi bien sur le plan fédéral que régional. RIP Les lois, en général, émanent des projets établis par les pouvoirs exécutifs (fédéral et régional). Dans le nouveau dispositif démocratique, les citoyens pourront également présenter un " Référendum d'initiative populaire" (RIP). Celui-ci émane donc de la population. Pour être organisé, il doit au préalable recueillir 100. 000 signatures de citoyens en âge de voter pour une matière relevant du niveau fédéral ou 50. 000 signatures, pour une matière régionale. Un RIP peut également être élaboré dans le cadre communal (10. 000 signatures à disposer au préalable). Si le quorum est atteint, le pouvoir exécutif compétent est obligé de procéder à l'organisation du RIP. Les comités de secteurs Le pouvoir exécutif tant sur le plan fédéral que sur le plan régional sera également complètement transformé. Au lieu d'avoir un gouvernement central composé de ministres ayant chacun en charge des compétences particulières, comme actuellement, nous aurons des "comités de secteurs" , constitués de professionnels, qui maîtrisent parfaitement les matières et des représentants du peuple. Ces derniers seraient élus pour une durée maximale de 2 ans et choisis par tirage au sort au sein de la population de plus de dix-huit ans révolus. Tant pour le fédéral que pour le régional, il existe aussi des comités de coordination chargés notamment des procédures de votations et référendaires. Instances de de contrôle La Cour des comptes et le Comité Supérieur de Contrôle sont les instruments juridiques et administratifs visant à contrôler le bon usage des fonds publics. Ils devront en référer au nouveau Sénat, qui est l'instance qui contrôle les travaux des exécutifs fédéraux, c'est-à-dire, les comités de secteurs fédéraux et le comité de coordination fédéral. Le Sénat est composé de 30 sénateurs, tirés au sort parmi les citoyens belges âgés de dix-huit ans et plus. Le mandat est d'une durée de 2 ans. Chaque région disposera également d'un organe de contrôle analogue. Le Pouvoir judiciaire Aussi, puisque la démocratie émane du peuple, il faut partir du principe que seul ce dernier est en mesure de nommer ceux qui sont censés dire le droit et rendre la justice. A l'instar des mandataires politiques, les juges doivent être élus par les citoyens, au moyen du système mis en place pour le pouvoir exécutif, la votation publique. En pratique La dernière partie du livre est une sorte de "vade mecum" pratique que pourrait suivre les citoyens qui le souhaite pour organiser des groupes de réflexions locaux, qui déboucherait sur la création de comités régionaux élargis, qui ensuite passeraient à l'adoption de résolutions en vue de présenter un projet de constitution adopté par un grand nombre de nos compatriotes. Nous appellerons ces comités, des Comités de Salut Public (CSP). Je n'entrerai pas ici dans les modalités pratiques d'organisations de ces réunions. Le livre se termine par une mise en scénario des possibilités futures : 1)Un scénario "électoral" où les comités de salut public se transforment en liste électorales ; 2) Un scénario plus "insurrectionnel" où les citoyens émanant des forces de police et de l'armée jouent un rôle primordial à l'instar de la Révolution des Oillets, en 1974 au Portugal. 3) Enfin, un scénario que je ne souhaite pas, de guerre civile, au cas où le pouvoir actuel passe à une tyrannie violente et dure.

03/2023

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Gestion des ressources humaine

Un compromis salarial en crise. Que reste-t-il à négocier dans les entreprises ?

Présentation des auteurs François Alfandari est docteur en science politique, membre du laboratoire Triangle, ses travaux portent sur l'étude du syndicalisme et des relations professionnelles, ainsi que sur l'engagement et les mobilisations collectives. Il a récemment publié " Transmettre un syndicalisme politique. La CGT dans un hôpital psychiatrique publicA ", La nouvelle revue du travail, 22, 2023 et a participé avec le Collectif Mosaïc à la direction d'un ouvrage méthodologique, Enquêter sur les relations professionnelles, ENS Editions, 2023. Sophie Béroud est professeure de science politique à l'Université Lyon 2, membre de Triangle. Ses travaux de recherche portent sur les transformations contemporaines du syndicalisme, les conflits du travail et les formes de mobilisation des travailleurs précaires. Parmi ses publications récentesA : A En luttesA ! Les possibles d'un syndicalisme de contestation, Paris, Raisons d'agir, 2021 (avec Martin Thibault)A ; A Sur le terrain avec les Gilets jaunesA : approche interdisciplinaire du mouvement en France et en Belgique, Presses Universitaires de Lyon, Lyon, 2022 (co-direction avec Anne Dufresne, Corinne Gobin et Marc Zune). Chloé Biaggi, docteure en sociologie (ENS de Paris), est actuellement chercheuse postdoctorante au LABERS (Université de Bretagne Occidentale). Ses travaux s'inscrivent dans le domaine de la sociologie du travail et des relations professionnelles. Sa thèse porte sur la gestion du fait syndical et des conflits au travail par les directions d'entreprises. Elle a récemment publié " Une négociation sans contrepartie ? Ethnographie d'un usage patronal de la négociation collective dans une filiale industrielle " (Socio-économie du travail, 2021) et " "J'en peux plus... j'arrête". Les ressorts de la (dé)mobilisation professionnelle d'un DRH" (La Nouvelle Revue du Travail, 2021). Charles Chamarre (ex-Berthonneau) est docteur en sociologie rattaché au Laboratoire d'Economie et de Sociologie du Travail (LEST). Il a réalisé sa thèse sur les formes d'engagement syndical dans des secteurs précaires et a publié plusieurs articles issus de cette recherche, dont " Un syndicalisme bridé. Expériences ordinaires de délégué·es dans des mondes du travail précairesA ", paru dans la revue Sociologie du Travail en décembre 2022. Il travaille aujourd'hui comme consultant en santé, sécurité et conditions de travail pour les CSE au sein du cabinet 3E Acante. Baptiste Giraud est maître de conférences en science politique à l'Université d'Aix-Marseille et chercheur au Laboratoire d'Economie et de Sociologie du Travail (LEST). Ses recherches portent sur les recompositions des conflits du travail, du syndicalisme et des relations professionnelles. Il est notamment le co-auteur du manuel Sociologie politique du syndicalisme (Armand Colin, 2018), avec Sophie Béroud et Karel Yon. Il a récemment aussi co-dirigé l'ouvrage collectif Le travail syndical en actes. Faire adhérer, mobiliser, représenter (Editions du Septentrion, 2020) avec Yolaine Gassier. Tristan Haute est maître de conférences en science politique à l'Université de Lille et chercheur au CERAPS. Ses recherches portent sur le vote, dans le champ politique et dans le champ professionnel, ainsi que sur la participation des salariés en entreprise (syndicalisation, recours à la grève...) ou encore sur les attitudes des salariés à l'égard des syndicats. Parmi ses publications récentesA : " Diversité et évolutions des attitudes des salariés à l'égard des syndicats en France ", Travail et Emploi, 2021/1, n°164-165, p. A 137-160A ; avec Pierre Blavier et Etienne Penissat, " Du vote professionnel à la grève : les inégalités de participation en entreprise ", Revue française de science politique, 2020/3-4, n°70, p. A 443-467. David Sanson Après un doctorat en sociologie, David Sanson est actuellement professeur adjoint (eq. MCF) à l'Université du Québec à Montréal. Prenant appui sur une ethnographie longitudinale réalisée au sein de collectifs ouvriers et militants d'une grande entreprise française, sa thèse explore les effets politiques du néo-management, en étudiant tout particulièrement les dynamiques inégalitaires et les mécanismes d'aliénation que l'appareillage gestionnaire contemporain produit auprès des classes populaires. Ses travaux actuels développent une approche critique des pratiques managériales hégémoniques, attentive aux multiples rapports de domination, aux dynamiques de relations professionnelles (coopérations, conflits, négociations) et aux pratiques de résistances des salarié. e. s en organisation. Camille Signoretto est maîtresse de conférences en sciences économique à l'Université Paris Cité, chercheuse au laboratoire Dynamiques sociales et recomposition des espaces (Ladyss), et également membre affiliée au CEET-Cnam et associée au LEST. Economiste du travail, ses travaux de recherche portent sur les relations de travail et d'emploi, et plus particulièrement leurs évolutions dans un contexte de changements socio-productifs et de réformes législatives qui ont marqué le monde du travail ces dernières décennies. Elle a récemment dirigé un numéro spécial de la revue Socio-économie du travail s'intitulant " Le "dialogue social" en pratiques et en contextesA " (n°10, 2021-2)A ; ou encore publié avec Aurélie Peyrin et Philippe Méhaut " Flexibilité et transformation des relations d'emploiA : une segmentation des pratiques de gestion de la main-d'oeuvre ", dans Relations industrielles / Industrial Relations, 77(4), 2022. Argumentaire de présentation de l'ouvrage Au terme d'une trentaine d'années de réformes ininterrompues des règles du dialogue social, parachevées par les ordonnances Travail de 2017, la négociation collective d'entreprise s'est imposée comme le nouveau pilier du système des relations professionnelles. En lien avec les politiques de flexibilisation du marché du travail, le dialogue social en entreprise est légitimé comme le moyen de concilier de façon plus équilibrée et efficace les impératifs de compétitivité des entreprises avec la défense des intérêts des salariés. L'institutionnalisation accrue du dialogue social en entreprise comme son éloge politique apparaissent pourtant en fort décalage avec la fragilisation importante de la capacité effective des salariés et de leurs représentants à peser sur la répartition de la valeur et les règles du rapport salarial. Les syndicats ont en effet beaucoup perdu de leur ancrage militant dans un système productif profondément bouleversé, marqué par la précarisation de la condition salariale et le " despotisme du marchéA " qu'impose la financiarisation de l'économie. Le tissu productif français n'en reste pas moins composé de modèles socio-productifs distincts, tant du point de vue des types de marché des entreprises, du profil de leur main d'oeuvre, des modalités de leur encadrement que de la présence syndicale. Combinant analyse statistique et enquêtes de terrain, cet ouvrage collectif montre comment s'articulent dans ces différents contextes socio-productifs les formes de la domination patronale, de conflictualité au travail et de pratiques du dialogue social. Ce faisant, il donne à voir selon quelles modalités différentes se reconfigurent, sous l'effet des transformations du capitalisme et des réformes néo-libérales, les usages des dispositifs du dialogue social en entreprise, les logiques de construction du compromis salarial et la capacité des salariés et de leurs représentants à le négocier. Points forts de l'ouvrage : Revisiter les transformations du dialogue social par le croisement de plusieurs traditions d'étude et l'articulation de plusieurs méthodes de recherche Cet ouvrage réconcilie en effet deux traditions de recherche qui ont jusqu'alors eu tenance à se tourner le dosA : l'analyse socio-économique des modèles productifs d'un côté, la sociologie des relations professionnelles de l'autre. Le croisement de ces approches ouvre une perspective originale pour apporter à l'analyse des modèles productifs une plus grande attention aux dimensions politiques des rapports de domination et des logiques du compromis salarial qui les caractérisent. Il permet en retour d'apporter un regard renouvelé sur les dynamiques de recompositions des relations professionnelles et des pratiques du dialogue social en lien avec la transformation du capitalisme. L'ouvrage s'appuie en outre sur une pluralité de méthode, en articulant l'exploitation des données statistiques de l'enquête REPONSE avec des enquêtes de terrain en entreprise. 2 - Penser ensemble les transformations les logiques de domination du capitalisme et les recompositions des pratiques de dialogue social Alors que la sociologie des relations professionnelles a eu tendance à étudier les logiques de fonctionnement des dispositifs institutionnels de la négociation collective comme s'ils fonctionnaient de manière autonome, le décloisonnement théorique opéré dans cette recherche vise au contraire à montrer qu'une approche par les contextes socio-productifs, attentive à la manière différente dont se configurent les rapports de domination et de résistance au travail, permet de mieux rendre compte de la dynamique différente des conflits et des négociations qui se jouent dans les espaces de la représentation du personnel. Cette perspective donne en particulier la possibilité de mieux cerner comment s'articuler la variété des formes de capitalisme (capitalisme familial, capitalisme administré, capitalisme financier) qui composent le modèle productif français, la dynamique des conflits et des usages des dispositifs du dialogue social en entreprise, et les logiques des compromis salariaux qu'ils servent à construire. Cet ouvrage est ainsi tout à la fois une contribution à l'analyse des transformations du modèle productif capitaliste français et des recompositions des rapports de domination et de compromis qu'ils rendent possible. 3 - Un regard original sur les métamorphoses du syndicalisme En raison de l'érosion de ses effectifs, le syndicalisme français est souvent associé à l'image d'un monde en crise et son utilité régulièrement questionnée. L'ouvrage s'attache à cet égard à éviter un double écueilA : celui d'une vision enchantée du dialogue social d'un côté, celui d'une vision trop unilatérale du déclin de l'influence syndicale. Si l'enquête montre effectivement combien le syndicalisme est mis à l'épreuve par les transformations du capitalisme dans sa capacité à organiser les salariés et défendre leurs intérêts, elle montre cependant aussi d'abord que, loin d'être uniformément affaiblie, leur capacité d'agir reste très dépendante et variable en fonction des contextes socio-productifs de leur ancrage. Elle montre aussi les organisations syndicales restent pourvoyeuses de ressources qui expliquent leur capacité beaucoup plus grande que les élus du personnel non syndiqués à tenir leur rôle de façon autonome des directions et à prendre en charge la défense des intérêts des salariés. 4 - Une enquête élargie aux représentants du personnel non syndiqués La comparaison entre élus du personnel non syndiqués et syndiqués constitue une autre grande originalité du dispositif d'enquête. Alors que les premiers constituent un angle mort de la sociologie des relations professionnelles, ils sont en effet au contraire partie intégrante de notre recherche. Cela permet de mieux mettre en lumière la variété des conditions de formation des instances représentatives du personnel et des modalités d'engagement possibles dans des mandats de représentants des salariés. Ce détour apparaît d'autant plus nécessaire que les nouvelles règles de la négociation collective ont ouvert la possibilité aux directions d'entreprise d'engager des négociations avec des représentants du personnel non syndiqués, majoritairement présents dans les petites entreprises. Notre enquête permet ainsi d'apporter un éclairage sur les contraintes singulières qui déterminent les modalités d'appropriation des dispositifs de la négociation collective et du dialogue social dans les petites entreprises familiales notamment. 5 - Eclairer les modalités d'intégration du dialogue social dans les politiques de domination patronale Attentif à la structure organisationnelle et sociale des usages des dispositifs de la représentation du personnel, cet ouvrage est enfin une contribution à l'analyse de la variété des significations et des pratiques que recouvre le concept flou de " dialogue socialA " dans les stratégies des directions des entreprises. Si elles s'articulent dans certains contextes à la recherche de compromis avec les représentants syndicaux, elle s'arrime au contraire dans d'autres au maintien de stratégies de répression anti-syndicale. Cette enquête documente de ce point de vue la manière dont les recompositions des modalités d'organisation du travail, des politiques managériales de gestion du personnel et les modalités d'appropriation des dispositifs du dialogue social par les directions d'entreprise varient ensemble. Elle apporte ainsi un éclairage sur la façon dont les formes de la domination patronale se différencient et se reconfigurent en s'articulant autour de trois types d'usages des dispositifs de la représentation du personnel, selon qu'ils sont réinvesties dans une simple logique de légalisation des relations professionnelles, comme un instrument de management des relations avec les syndicats ou bien utilisés de manière plus offensive pour refonder le rapport salarial.

10/2023

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Généralités

La Méditerranée occidentale : Histoire, enjeux et perspectives

Cet ouvrage consacré au Maghreb et au partenariat avec les pays de l'arc latin de la Méditerranée est publié au plus fort d'une actualité marquée, d'une part, par l'existence d'une crise aiguë du couple algéro-marocain qui était envisagé comme le moteur d'une construction maghrébine, et d'autre part, d'une marginalisation de la Méditerranée occidentale dans la géopolitique mondiale que traduit ce conflit majeur opposant l'Europe et les Etats-Unis à la Russie. Ce paradoxe qui incite au désenchantement, n'est-il pas aussi le moment privilégié pour repenser et agir afin de réaliser un regroupement régional et promouvoir des formes de partenariat et de coopération entre les pays méditerranéens. Autrement dit, la crise géopolitique ne donnerait-elle pas l'opportunité aux pays du Maghreb de repenser leurs alliances, de mieux défendre leurs intérêts communs, et contribuer ainsi à mettre en oeuvre un nouvel ordre politique et économique plus propice au progrès et au développement de leurs peuples. Il s'agira pour eux de se hisser à la hauteur des nouveaux enjeux provoqués par les recompositions géopolitiques en cours et de dépasser des situations jugées aujourd'hui indépassables. Ce livre posthume de Noureddine ABDI qui est l'aboutissement de longues années de travail offre des matériaux précieux dans l'édification de ce projet maghrébin " sans cesse recommencéA " et/ou contrarié, car soumis aux aléas politique, à des conjonctures économiques internes et à des alliances économiques ou politiques contraires à la vocation unitaire du Maghreb. Avant d'entrer dans le coeur d'un sujet -le Maghreb et subsidiairement ses rapports avec la Méditerranée occidentale- qui fut dès les années 1980 au centre de sa réflexion et de ses recherches, un mot pour évoquer une dette personnelle qui nous avons contractée auprès de N. Abdi. Engageant au milieu des années 1970, une carrière de chercheur en économie agricole et rurale, parmi mes premières lectures figuraient en bonne place les articles que N. Abdi avait publié dans des revues (la Revue Algérienne ou d'autres revue étrangères). Il fut pour moi, l'un des premiers chercheur algérien (aux côtés de nos aînés que furent Tami Tidafi, Hamid Aït-Amara ou Claudine Chaulet) qui ont contribué à nourrir nos connaissances, et à nous initier aux questions agraires et paysannes. Celles-ci avaient occupé son activité intellectuelle tout au long de la période qui va du milieu des années 1950 à la fin des années 1970. L'autobiographie qui figure à la fin de l'ouvrage apporte des éclairages intéressants et nouveaux sur les contextes politiques et économiques de cette époque. Elle nous livre un témoignage inédit sur les conditions concrètes d'émergence de l'autogestion agricole en Algérie, les obstacles rencontrés et les luttes d'influence exercées au sein de l'appareil d'Etat, les motifs de son engagement auprès des ouvriers de l'autogestion ou les attributaires d'une réforme agraire qu'il avait appelé de tous ses voeux. Si le récit autobiographique, rédigé avec une modestie qui impressionnait les personnes qui l'ont côtoyé, évoque assez clairement l'engagement politique et syndical de l'auteur dans la lutte de libération nationale, elle témoigne aussi de son attachement émouvant à sa terre - et de ses lieux- d'origine, décrit les premiers pas de l'Etat algérien dès l'indépendance en mettant l'accent sur difficultés dans la construction de ses institutions nationales. Au cours de la période qui va suivre, celle qui commence dans les années 1980, N. Abdi va élargir la perspective en traitant essentiellement de la construction maghrébine, et focalise sa pensée sur " les perspectives d'un avenir régional communA ". Appartenant dorénavant aux deux rives de la Méditerranée (un entre-deux dont il faisait l'expérience), il fonde son engagement personnel à penser également le rapprochement des pays du Maghreb avec les pays méditerranéens de l'arc latin. Les processus de renforcement des unions régionales face à une mondialisation en marche, l'essor d'une coopération adaptée à leur échelle font aussi l'objet de ses préoccupations intellectuelles. Ces formes de coopération et de regroupement régional sont pensées comme " le meilleur moyen de peser dans les relations internationalesA ". Ces nouvelles recherches que l'auteur engage baliseront un parcours personnel et professionnel au sein d'institutions tels l'Institut d'Etudes du Développement Economique et Social (IEDES), le CNRS français, la Maison des Sciences de l'Homme ou de laboratoires de recherche de l'Université Paris VII. Abdi se dépensera avec énergie pour animer des forums, des débats ou des rencontres scientifiques réunissant des dizaines de chercheurs appartenant aux deux rives. Tous les travaux et toutes les contributions que N. Abdi signale dans cet ouvrage, sont les produits intellectuels de ces multiples activités ; elles ont fait l'objet de publications thématiques dans des revues, des compte-rendu de séminaires ou des ouvrages collectifs. Les sources d'inspiration les plus marquantes de ce parcours professionnel sont évoquées. Il y a en premier lieu l'auteur maghrébin par excellence que fut Ibn Khaldoun dont il est fait souvent référence dans ses travaux, mais aussi d'autres auteursA ; le marocain A. Khatibi, et le tunisien A. Meddeb- passeurs et penseurs comme lui de l'altérité- qui partageaient avec lui, une confiance dans la construction de ce " lieu de symbiose " qu'est selon lui le Maghreb. Il n'a cessé d'entretenir un dialogue ininterrompu, et jusqu'à leur disparition prématurée, avec ces deux auteurs qui cultivaient, selon son expression, une " maghrébinité commune ". Cet " entre-deuxA ", position qu'il assumait pleinement, et les liens socioculturels qui le rattachait aux deux rives de la Méditerranée, l'ont naturellement conduit à plaider pour un rapprochementA ; celui-ci qui se nourrissait d'échanges intellectuels avec d'autres auteurs (J. Berque ou P. Vieille) à la sensibilité méditerranéenne tout aussi affirmée que la sienne. Ce n'est, écrit-il " qu'en restituant parmi les autres dimensions du Maghreb, celle qu'il partage avec l'Europe latine, qu'on parviendra à saisir les réalités maghrébines telles qu'elles sont perçues par les Maghrébins eux-mêmes et plus particulièrement la société civile, de façon à que ce Maghreb réel puisse constituer notre véritable horizon de pensée ". Cette vision généreuse d'ouverture vers la méditerranée occidentale l'empêchera d'examiner les distances prises avec la rive sud, l'Europe méridionale préférant de fait coopérer avec les nouveaux pays (ex PECO) admis dans l'Union européenne. Elle est également silencieuse sur les approches nationales que chacun des pays du Maghreb engage avec les pays de l'Union européenne Aucune coordination n'est réalisée dans la mise en oeuvre des rapports politiques et économiques et politiques. A titre d'exemple, les accords d'association sont signés séparément et leurs évaluations -qui font ressortir des tendances à l'accentuation des asymétries économiques défavorables aux 3 pays du Maghreb- n'ont pas permis les rapprochements concertations pourtant nécessaires. L'engagement politique de l'auteur pour " féconder un Maghreb des citoyensA " est un engagement actif résolument orienté vers des processus de création et de production de richesses " au plan intérieurA ", et impulsé " au plan extérieurA " par " un esprit d'ouverture et de partenariatA ". Il s'agit, nous dit-il, " de dégager les perspectives d'un avenir régional commun pour qu'il soit davantage maîtrisé que subi, c'est-à-dire qu'il prenne la forme d'un essor autonome plutôt que celle d'un moindre développement et d'une dépendance accrue ". Empruntant à l'auteur des " AndalousiesA ", la formule de J. Berque, N. Abdi appelle lui également à des " Andalousies toujours recommencées, dont nous portons en nous les décombres amoncelés et l'inlassable espérance ". L'approche généreuse et profondément universaliste que N. Abdi adopte, reprend une idée empreinte d'humanisme, de cet autre penseur de la Méditerranée, Paul Valéry, qui concevait la Méditerranée comme un " dispositif à faire de la civilisationA ". La méditerranéïté, écrit-il, est ainsi intimement liée au processus de construction maghrébine, elle en est l'un des principes fondateurs, tout comme à l'inverse, " la maghrébinité en est tributaire ". Ces affirmations s'appuient sur une réflexion critique qui intègre l'analyse de la longue durée, et où N. Abdi expose avec lucidité le cheminement du projet politique de construction d'un Maghreb " lequel est en permanence fait et défait par les pouvoirs en place ", ce qui témoigne d'un clivage -qu'il subissait lui-même sur le plan politique nous dit-il-, et " qui se creusait entre le Maroc et l'Algérie proches l'un de l'autre ". Sa réflexion sur la vocation unitaire dans le Maghreb s'appuie sur l'examen minutieux desA critères à la fois socio-historiques et politiques, et en particulier la dimension ethno-culturelle de la région. Le Maghreb écrit-il " constitue un sujet historique ", en particulier dans les phases conflictuelles et de résistances. Il rappelle que l'Etoile Nord-Africaine qui fut créée à Paris en 1927, et qui traduira les premiers pas du nationalisme algérien, " vise à construire l'unité du MaghrebA ", " à ressusciter une unité ancienne que l'histoire a enregistrée et dont elle a témoignéA ". Il s'attache avec obstination à retracer le cheminement de l'idée maghrébine dans un passé plus proche de nous, en examinant les faits qui participent au développement de ce " sujet historique " dans les phases conflictuellesA ; ceux des années 1930 (de la création de l'Etoile Nord-Africaine à l'Association des Etudiants Musulmans Nord-Africains (AEMNA), ceux de la deuxième guerre mondiale, avec le mouvement syndical animé par le tunisien F. Hachad). Il traque enfin cette solidarité maghrébine partagée par les mouvements de libération nationale dans les années 1950. Il remarque bien que la proclamation de la construction du Maghreb à Tanger, en août 1959, et sa relance le 17 février 1989, n'empêche pas cet ensemble d'être toujours aussi divisé, notamment par une frontière algéro-marocaine fermée. Ce constat établi, l'incite naturellement à analyser, au-delà de la question du Sahara occidental, les raisons socio-politiques et économiques qui font ce Maghreb " écarteléA ". Ces discordes sont à rechercher, nous dit-il, dans la nature de régimes peu disposés à " concéder la moindre parcelle de leurA pouvoir dansA le cadre d'une unification du MaghrebA ", mais aussi dans l'état de sociétés politiques ou de sociétés civiles peu mobilisées par l'idée maghrébine. Ces questionnements de l'auteur ne le détournent pas de l'exercice de recension des éléments qui peuvent constituer les moyens de dépassement de ces situations de fait. Cette dernière posture illustre assez parfaitement l'optimisme raisonné de N. Abdi dans l'affirmation d'une maghrébinité possible et souhaitable pour l'avenir des peuples de la région. Elle le conduit à analyse avec rigueur les facteurs favorables à une intégration maghrébine, ou de ce que les prospectivistes appelleraient " les signaux faiblesA " favorables à une construction maghrébine. Les facteurs religieux et culturels d'abord, où N. Abdi qui, tout en attirant l'attention sur le recours vain à une " retraditionnalisationA " du fonds culturel et religieux de la région, invite, à mobiliser et/ou revivifier un fonds religieux et culturel maghrébin " avec ses institutions et ses références ancestrales propresA ". Il y a ensuite des facteurs sociaux avec " les passerellesA " que représentent les diasporas du Maghreb. C'est, nous dit-il, au sein de l'immigration que l'on rencontre " cette maghrébinité radicale ". Cette dernière ressource, facteur puissant d'intégration, est représentée par les populations originaires du Maghreb. Ces dernières font la découverte dans les sociétés d'accueil " de leur sentiment d'une appartenance commune ", de cette " identité partagée " et qui prennent " conscience de ce qui les unitA ". Après tout, s'interroge-t-il, " si nous considérons le fait que l'affirmation de l'indépendance du Maghreb a commencé à l'extérieur pendant l'entre-deux-guerres, pourquoi n'en serait-il pas de même du mouvement de reconstruction du MaghrebA "A ? Et Abdi d'explorer enfin les conditions économiques propices à l'intégration. L'existence d'un large marché fort de millions de consommateurs " qui aurait pour effet d'augmenter de 2 points le taux de croissance de la régionA ", le développement des infrastructures de transport (autoroute Trans maghrébine dont l'essentiel des tronçons sont déjà réalisés à l'intérieur de chacun des pays), l'énergie (électricité et gaz), de même que l'irruption dans l'espace économique, souvent appuyée par le développement des technologies de l'information et de la communication (TIC), de " nouveaux acteurs de l'intégration socio-économique du MaghrebA ", que sont les entrepreneurs et chefs de PME. Les facteurs d'intégration sont à cultiver au sein des communautés universitaires où " l'intelligentsia maghrébine devrait, où qu'elle se trouve, jouer un rôle moteur dans le cadre d'échanges et de collaborationsA "A ; dans les milieux d'affaires ensuite où la promotion d'une intégration peut être entreprise par des agents qui se situent au sommet de l'économie maghrébine. Le futur du Maghreb ne peut être toutefois pensé sans ce couple algéro-marocain qui est appelé à jouer un rôle décisif dans une construction maghrébine fondée sur " une réelle émancipation et un vrai progrès pour toutes ses populationsA ". " Ce qui importe le plus, nous dit-il, c'est avant tout de cultiver et de développer la maghrébinité au travers de relations maghrébines les plus favorables à l'épanouissement de l'homme ". Reprenant l'une desA premières propositions de KHATIBI formulé sur les relations de voisinage, il nous invite " à se regarder en face ", A à " construire un espace vie qui soit communA ", et à " aller vers le risque partagé avec l'autre, les autresA ". Une pensée généreusement humaine, anti bureaucratique par nature, s'appuyant sur une mobilisation citoyenne constitue le fil conducteur de ses analyses du Maghreb. C'est la même pensée que l'on retrouve dans ses travaux de jeunesse portant sur la construction du Maghreb conduites par le syndicaliste tunisien F. Hached, où dans le rôle joué par l'UGTA et la Fédération des travailleurs de la terre dans l'autogestion agricole algérienne. Les " constructions bureaucratiquesA " et les " approches technocratiquesA " seront en permanence vigoureusement dénoncées par N. Abdi. Ces approches dessaisissent, affirme-t-il, les acteurs sociaux, les producteurs ou les créateurs de richesses de leurs pouvoirs et freinent, nous dit-il le mouvement d'émancipation sociale, soit de la paysannerie du temps de l'autogestion agricole, soit les sociétés civiles et politiques dans la construction du Maghreb. Nous le répétons, la vision du Maghreb que propose N. Abdi est inséparable de son itinéraire de vie et de la fidélité à ses engagements politiques et syndicaux qu'il évoque. L'exil qu'il a choisi dès 1973, va le conforter dans un statut de chercheur qu'il n'aura jamais abandonnéA ; ce statut l'autorisait à exercer ses activités avec une liberté d'esprit à laquelle il était profondément attaché. S'il a inauguré un champs d'étude dans les années 1960-70 passionnant pour ma génération (celui des questions agraire et paysannes), il nous offre avec cet ouvrage posthume, un chantier de travail que l'on découvre avec un réel plaisir intellectuel et où l'érudition de l'auteur laisse aussi place à l'émotion suscitée par cette quête absolu d'un idéal de progrès et d'émancipation pour les peuples du Maghreb, cette quête de méditerranéïté faite de paix et de coopération à laquelle il rêvait. La lecture de ce livre nous laisse toutefois un grand regret. Celui de n'avoir pas croisé l'homme, celui de n'avoir pas échangé sur son expérience dans un domaine qui nous est cher à tous les deux, celui de la paysannerie qui fut son premier domaine de recherche ; mais au-delà, de cet intérêt tout personnel, la frustration de n'avoir pas eu l'occasion de dialoguer sur cette passion qu'il entretenait et cette cause qu'il défendait avec déterminationA A : celle du "Maghreb des peuples et des citoyensA ", dont il portait l'idée avec une conviction admirable. Omar Bessaoud, économiste agricole, professeur associé au CIHEAM-Montpellier. Montpellier, le 2 juin 2022.

10/2022

ActuaLitté

Sociologie du travail

Revue Salariat n° 1. Droit à l'emploi, droit au salaire ?

Pourquoi la revue SalariatA ? Nicolas Castel Mathieu Grégoire Jean-Pascal Higelé Maud Simonet Le salariat a longtemps eu mauvaise presse. Au milieu des années 1860, dans un chapitre inédit du Capital, Karl Marx écritA : " Dès que les individus se font face comme des personnes libres, sans salariat pas de production de survaleur, sans production de survaleur pas de production capitaliste, donc pas de capital et pas de capitaliste ! Capital et travail salarié (c'est ainsi que nous appelons le travail du travailleur qui vend sa propre capacité de travail) n'expriment que les deux facteurs d'un seul et même rapportA ". Qui dit salariat dit capitalisme et inversement. Marx invite ainsi les travailleurs et les travailleuses réuni·es dans la Première internationale, à substituer au slogan " un salaire équitable pour une journée de travail équitable ", le mot d'ordre : " Abolition du salariatA ! A ". Près d'un siècle et demi plus tard non seulement le salariat n'a pas été aboli, mais il est devenu désirable pour nombre d'individus et d'organisations syndicales. Cela ne fait guère mystère : le salariat observé par Marx et ses contemporains n'est plus celui que nous observons aujourd'hui. En tant que rapport social, le salariat a été un champ de bataille. Il a donné lieu à des stratégies d'émancipation qui se sont parfois - souventA ! - traduites en victoires et en conquêtes. Les institutions du salariat que nous connaissons aujourd'hui sont les buttes témoins de ces batailles passées. La revue Salariat nait d'un questionnementA : les sciences sociales ont-elles pris la mesure d'une telle transformationA ? Certes, l'idée d'une bascule dans l'appréciation du salariat - de condition honnie à statut désiré - est largement partagée : l'inscription puis le retrait de la revendication " d'abolition du salariatA " dans les statuts de la Confédération générale du travail sont souvent mobilisés comme manifestation de ce mouvement historique. Mais on peut se demander si la façon dont les sciences sociales conçoivent le salariat a, parallèlement, évolué en prenant toute la mesure de ses transformations historiques qui, précisément, expliquent ce basculement radical d'appréciation. C'est en partant de l'explicitation de ce paradoxe que nous souhaitons introduire le projet intellectuel de la revue Salariat. Pourquoi questionner le " salariatA "A ? Le salariat du xixe siècle n'est pas le salariat du xxe siècle et ne sera pas, on peut en faire l'hypothèse, celui du xxie siècle. Si au premier abord, il s'agit d'un rapport social consubstantiel au capitalisme, on aurait tort d'arrêter là l'analyse : le salariat s'est transformé en devenant, par certains aspects, plus complexe et, par d'autres, plus simple. Le salariat est d'abord devenu plus complexe car le rapport social salariés/employeurs ne s'exprime plus à la seule échelle de la fabrique ou de l'entreprise, ni à celle d'un face à face entre un ou des travailleurs et un capitaliste. Ce rapport se joue à plusieurs échelles comme par exemple la branche et l'échelon interprofessionnel. Il s'est par ailleurs cristallisé dans des institutions et dans le droit. Mais le salariat est aussi devenu plus simple car dans la première partie du xxe siècle, il est encore possible d'associer le rapport salarial à une classe sociale parmi d'autres, la classe ouvrière, dont les luttes, les représentations syndicales, les institutions et le droit, n'engagent pas nécessairement ou pas directement les autres classes sociales. Les paysans, les employés, les professions intellectuelles par exemple peuvent ainsi encore s'imaginer un futur dans lequel - à l'instar des ouvriers mais à côté d'eux - ils pourront construire un droit spécifique, des protections sociales spécifiques et ce, grâce à des organisations syndicales spécifiques. Près d'un siècle plus tard, le salariat s'est généralisé numériquement et la catégorie de salariat a solidarisé des segments de travailleurs et de travailleusesA : au groupe social " ouvrierA " sont venus s'ajouter le groupe social " employéA " ainsi que les " cadresA " dont il faut noter que leur intégration au salariat fut un retournement de l'histoire particulièrement significatif. Qui plus est, ces segments de travailleurs et de travailleuses ont été solidarisés dans un même rapport social qui les oppose à des employeurs de façon plus universelle, plus simple et plus claire que par le passé. Ironie de l'histoire ou diversion, c'est précisément au moment où cette confrontation entre deux classes prend sa forme la plus évidente que la lutte des classes est déclarée obsolète. Il nous semble donc qu'au lieu de prendre toute la mesure de ces profondes transformations sociohistoriques du salariat, l'usage de cette notion par les sciences sociales s'est singulièrement appauvri. Pour Marx et ses contemporains - quelle que soit par ailleurs leur sensibilité -, le salariat est d'abord une notion forgée pour identifier, décrire et expliquer une relation économique, un rapport social très androcentré qui apparaît central dans la société du xixe siècle. Pour le dire dans un vocabulaire anachronique, c'est donc avant tout un concept des sciences sociales qui donne lieu à des controverses, des interrogations. Philosophes, économistes, sociologues s'en saisissent comme d'un outil pour décrire le réel qu'ils ont sous les yeux. Un siècle et demi plus tard, force est de constater que le terme salariat n'est plus questionné. Il est très souvent, pour les sciences sociales, une simple réalité juridico-administrative, une " donnée " ne posant pas question et au mieux une catégorie mais rarement un concept. Chacun ou chacune est ou n'est pas juridiquement " salariéA " tandis que, statistiquement, l'Insee comptabilise un nombre de " salariésA " et un nombre d'" indépendantsA " puis mesure l'évolution de leur part respective. Que les sciences sociales prennent en considération le fait d'être ou non juridiquement " salariéA ", par exemple lorsqu'on étudie la condition des travailleurs et des travailleuses des plateformes, est certes important et utile. Mais, à l'instar de ce que pratiquent paradoxalement de nombreux juristes, c'est à un usage plus réflexif de la notion de salariat - qui ne se réduit pas à une catégorie molle - que nous appelons. Cette approche réductrice du salariat comme " donnée " non interrogée s'explique certainement par un mécanisme assez paradoxalA : cette forme juridique, salariale donc, est le fruit d'une histoire qui a vu un concept et des théories s'incarner dans le droit9. En effet, ce concept analytique a infusé le droit jusqu'à structurer une grande part des réalités du travail et de ses " régulationsA " dans une bonne partie de l'Europe continentale, au Japon, aux Etats-Unis et ailleurs. Cependant, cette cristallisation dans le droit s'est accompagnée d'une baisse du pouvoir analytique du concept, voire d'une neutralisation scientifique d'un concept qui n'est qu'à de rares exceptions10 interrogé. La cristallisation dans le droit s'est ainsi accompagnée d'une vitrification conceptuelle. Dans quels termes a-t-on arrêté de penser la question salariale ? Dans une définition-essentialisationA : le salariat c'est la subordination. Et cette définition-essentialisation est sous-tendue par une théorie implicite : celle de l'échange d'une subordination contre une protection. Ce " compromisA " - fordien ou autre -, est devenu un cela va de soi ou un implicite théorique, presque un récit mythique des sciences sociales. Les analyses de Robert Castel dans Les métamorphoses de la question sociale sont à ce titre souvent mobilisées pour opposer diamétralement deux périodes historiques. Dans la première, le salariat de la révolution industrielle serait profondément asymétrique, l'égalité formelle des parties donnant lieu à une inégalité de fait et au paupérisme. Dans la seconde, un droit du travail et des droits sociaux octroyés par l'Etat seraient venus compenser cette asymétrie initiale et rééquilibrer l'échange salarial11A : subordination contre protection, " compromis fordiste ", " Trente glorieusesA " et " plein-emploiA " comme nouvelle étape d'un rapport salarial enfin rééquilibré. L'état de " compromisA " peut alors plus ou moins implicitement être conçu comme un climax, un optimum indépassable. Dans un tel cadre d'analyse, on sera tendantiellement conduit à ne penser que des reculs - l'" effritement de la A société salariale " - et ce, dans la nostalgie d'un passé glorieux mais malheureusement révolu. Droits octroyés et équilibre de l'échange retrouvéA : dans une telle perspective théorique, on le voit, l'univers des possibles du salariat est relativement bien borné par cet état d'harmonie sociale et d'intégration de la classe ouvrière que l'on prête à la période d'après-guerre. Or, pleine de conflits, de conquêtes, d'émancipations, la réalité sociohistorique sur plus d'un siècle dépasse les termes de l'échange et du compromis. Penser ainsi non pas en termes de compromis mais en termes de luttes et d'émancipation, évite de présumer des définitions et limites du salariat. La réalité du salariat a changé parce que des batailles relatives au travail et/ou à la citoyenneté économique et politique ont été gagnées. Oui, le salariat est consubstantiel au capitalisme mais il est traversé en permanence, par des formes de subversion de la logique capitaliste. Le rapport salarial, en ses contradictions et ses puissances, est le point nodal de la lutte des classes et, en la matière, la messe n'est pas dite tant au point de vue des structures objectives que des structures subjectivesA : rien ne permet de conclure que ce rapport social n'est qu'enrôlement au désir-maître capitaliste12. Si le régime de désir est bien celui de désirer selon l'ordre des choses capitalistes (i. A e. une épithumè capitaliste13), il n'en demeure pas moins que depuis la théorisation produite par Marx, tout un maillage institutionnel de droits salariaux subversifs du capitalisme a pris forme au coeur du rapport salarial (sécurité sociale, cotisations sociales, conventions collectives, minima salariaux, droit du travail, statuts de la fonction publique et des entreprises publiques, etc.). En matière de salariat, on ne peut donc en rester à la théorie implicite du xixe siècle et son acquis d'une protection contre une subordination. Ce n'est pas une simple donnée juridique incontestable (être ou ne pas être " salariéA ") mais un concept qui doit être discuté, débattu, interrogé, mis en question, caractérisé et caractérisé à nouveau, au fil du temps et des luttes sociales qui s'y rattachent. Si domination, exploitation, aliénation, invisibilisation il y a, il s'agit aussi de comprendre ce qui se joue dans le salariat en termes d'émancipation des femmes et des hommes. Certes, le salariat n'est pas qu'émancipation. Et on peut songer à d'autres possibles pour les travailleurs et les travailleuses que ceux qui s'organisent à l'échelle du salariat. Mais cette dimension émancipatrice ne doit pas faire l'objet d'une occultation. Il nous parait donc nécessaire de saisir le salariat dans son épaisseur sociohistorique, dans les contradictions qui le traversent, les luttes qui le définissent et le redéfinissent, pour éclairer la question du travail aussi bien dans sa dimension abstraite que concrète. On l'aura compris, il s'agit donc ici d'interroger le salariat en lui redonnant toute sa force historique, heuristique et polémique. Le salariat, nous l'avons dit, est devenu un rapport social qui s'exprime à de multiples échelles et qui dépassent de beaucoup le simple face à face évoqué dans la deuxième section du Capital dans laquelle un employeur, " l'homme aux écusA ", se tient devant un salarié ne pouvant s'attendre " qu'à être tannéA "14. Chacune de ces échelles constitue un champ de bataille, avec ses contraintes et ses stratégies d'émancipation spécifiques. A chacune de ces échelles, le rapport social salarial s'exprime dans des collectifs, dans des solidarités et des conflictualités articulées les unes aux autres. A l'échelle de l'entreprise se jouent par exemple de nombreuses luttes pour l'emploi. A celui de la branche, par le biais des conventions collectives, se joue notamment le contrôle de la concurrence sur les salaires entre entreprises d'un même secteur. A l'échelon interprofessionnel et national se jouent l'essentiel du droit du travail et des mécanismes de socialisation du salaire propres à la sécurité sociale ou à l'assurance chômage. Le salariat est donc bien loin de la rémunération marchande de la force de travail du xixe siècle. Les champs de bataille se sont démultipliés tout en s'articulant les uns aux autres. Qu'on pense à l'importance des conventions collectives en termes de salaire et de conditions de travail pour articuler les combats dans l'entreprise et dans la branche. Qu'on pense au rôle d'activation ou au contraire d'éradication des logiques d'armée de réserve que peut jouer un mécanisme d'assurance chômage sur le marché du travail. Qu'on pense également aux mécanismes de sécurité sociale en matière de santé et de retraites en France. Ces derniers se sont constitués en salaire socialisé engageant dans une relation l'ensemble des employeurs et l'ensemble des salarié·es à l'échelle interprofessionnelle là où, dans un pays comme les Etats-Unis, la protection contre ces " risquesA " est demeurée liée à la politique salariale d'un employeur à travers des benefits par un salaire indirect mais non socialisé15. Qu'on pense également au salaire à la qualification personnelle qui émancipe largement les fonctionnaires des logiques de marché du travail. Comprendre ce que vit individuellement un salarié ou une salariée hic et nunc, suppose de prendre en considération l'ensemble de ces dimensions collectives articulées, les dynamiques historiques, les luttes, les stratégies et la façon dont l'état des rapports de force sur chacun de ces champs de bataille s'est cristallisé dans des institutions. S'il est un objet qui nous rappelle tous les mois que ce rapport social se joue à plusieurs échelles, c'est bien la fiche de paye. Elle est une symbolisation d'un salaire dit " individuelA " ou " directA " en même temps que le lieu d'un " salaire collectifA " et ce, à plusieurs égards. En effet, quant à sa détermination, le salaire est particulièrement redevable au collectif. Les forfaits salariaux négociés dans les grilles de classification des conventions collectives de branches et au niveau de l'entreprise ou encore les grades et échelons de la fonction publique sont des éléments structurants du salaire. A cet " individuelA " s'ajoute une autre dimension collective dont la fiche de paye fait état, c'est la part directement socialisée du salaire à une échelle nationale et interprofessionnelle via des cotisations ou des impôts. Ces échelles et institutions plurielles ne sont pas réductibles à une fonction de protection légitimée par une subordination mais sont beaucoup plus largement le produit des dimensions collectives et conflictuelles du salaire. Et l'on voit là, pour le dire en passant, ce qu'a d'inepte la lecture marchande et purement calculatoire du salaire, économicisme malheureusement dominant. Derrière la plus ou moins grande socialisation des salaires, c'est la question des modes de valorisation du travail qui se pose : à travers la qualification et la cotisation, le salaire n'a plus grand-chose à voir avec la fiction du prix du travail (cf. infra). Enfin, derrière la maîtrise ou non de cette socialisation, c'est aussi la bataille pour la maîtrise du travail concret qui se joue : c'est-à-dire maîtriser ses finalités, maîtriser la définition de ce qui doit être produit ou pas, maîtriser les moyens et les conditions de la production. Voilà tout ce qu'une lecture en termes de conflictualité et d'émancipation, et non seulement de protection/subordination, s'autorise à penser. Pourquoi une revue ? La revue Salariat est la poursuite du projet intellectuel et éditorial que l'Institut Européen du Salariat (IES) porte depuis sa création en 2008. La revue vise donc à accueillir des contributions qui prendront au sérieux les enjeux du salariat de façon ouverte et contradictoire. Il s'agit de promouvoir des analyses du salariat issues des sciences sociales au sens large (sociologie, science politique, histoire, économie, droit...) mais aussi des débats ou des controverses qui ne s'interdisent pas de tirer des conclusions politiques de ces analyses scientifiques16. La revue est ainsi largement ouverte à diverses disciplines et à une pluralité de registres de scientificité. Les travaux empiriques pourront ainsi côtoyer des réflexions théoriques. Des textes fondés sur un registre très descriptif pourront dialoguer avec des approches plus politiques défendant telle ou telle stratégie d'émancipation. Grâce à ce dialogue qu'on espère fécond, nous entendons mettre la production intellectuelle de la recherche au service du débat public et des luttes politiques et sociales qui se déploient dans les domaines du travail concret et de sa valorisation. Notre revue souhaite ainsi faire vivre le débat intellectuel, le dialogue interdisciplinaire et constituer un espace de liberté scientifique en autorisant des approches diverses et non formatées, ce qui suppose en particulier que le débat puisse s'épanouir le plus possible à l'abri - voire même en dehors - des enjeux relatifs au " marché du travailA " académique. Si la revue entend publier des articles d'auteurs et d'autrices dont on apprécie les qualités de chercheurs et de chercheuses, elle dénonce avec d'autres17 la fonction d'évaluation et in fine de classement des recherches et des chercheurs et chercheuses que les politiques de l'enseignement supérieur et de la recherche tendent de plus en plus à assigner aux revues. Nous souhaiterions - autant que possible - ne pas constituer un outil de légitimation supplémentaire d'un " marché du travailA " académique dans lequel de jeunes chercheurs et chercheuses - de moins en moins jeunes en réalité... - font face à une pénurie extrême de postes et sont soumis à la loi du " publish or perishA " ainsi qu'à l'inflation bibliométrique qui, paradoxalement, nuit à la qualité de la production scientifique. Cela signifie en pratique et entre autres, que nous voudrions rester en dehors de cette logique de " classementA " des revues et donc ne pas figurer dans les listes officielles des revues dans lesquelles il conviendrait pour les candidats et les candidates à la carrière académique de publier, les critères bibliométriques permettant aux évaluateurs et aux évaluatrices de se passer d'un travail de discussion sur le fond. Cela signifie également que la composition du comité de rédaction de la revue n'est pas dépendante du statut sous lequel les membres exercent leur qualité de chercheur·se : doctorant·e, titulaire ou non titulaire, chercheur·se dans ou hors des institutions de l'enseignement supérieur et de la recherche. Nous nous concevons ainsi comme un groupe ouvert à toutes celles et tous ceux qui souhaitent travailler à un projet intellectuel et proposer aux lecteurs et aux lectrices un contenu de qualité, intéressant à la fois d'un point de vue scientifique et d'un point de vue politique. En ce sens, nous proposons plusieurs rubriques pour apporter divers éclairages ou points d'entrée d'un même questionnement puisque nous avons l'objectif de structurer chaque numéro annuel autour d'une problématique commune. La rubrique Arrêt sur image invite à décrypter les enjeux derrière une image choisie, la rubrique Lectures et débats ouvre à la discussion avec des publications académiques ou littéraires et la rubrique Brut est un espace de mise en valeur de données empiriques diverses. Ces manières d'aborder la problématique générale du numéro sont complétées par des articles dans une rubrique plus généraliste, Notes et analyses. Mais ces rubriques, plus largement présentées sur le site web de la revue18, ne doivent pas constituer des carcans et elles sont elles-mêmes susceptibles d'évoluer. Droit à l'emploi ou droit au salaire ? Ce premier numéro est ainsi l'occasion de tester l'intérêt ou la validité de notre parti-pris analytique consistant à penser le salariat comme un concept de sciences sociales à vocation heuristique en dévoilant ses contradictions et ce faisant, des chemins possibles d'émancipation. La question générale que nous posons dans ce numéro est la suivante : qu'est-il préférable de garantir, un droit à l'emploi ou un droit au salaire ? Pour celles et ceux qui restent indifférent·es à une réflexion de fond sur les institutions salariales, cette question n'a pas lieu d'être car " qui dit emploi dit salaire et qui dit salaire dit emploi, garantir l'un, revient donc à garantir l'autre ". Une telle remarque passerait pourtant à côté d'un enjeu essentiel car il y a là - en première analyse et pour la période qui nous occupe, à savoir fin du xxe siècle et début du xxie siècle - deux voies d'émancipation salariale structurées autour de deux grandes familles de stratégies possiblesA : celles qui concourent à promouvoir l'emploi et notamment le plein-emploi et celles qui s'en départissent et promeuvent un droit au salaire ou font du droit au salaire un préalable. Ce débat, s'il est contemporain, n'est pas totalement nouveau et deux grandes organisations syndicales, la CGT et la CFDT s'en sont emparé avec leurs projets respectifs de sécurité sociale professionnelle ou de sécurisation des parcours professionnels. Il s'agit bien de projets différents dans lesquels l'emploi et le salaire ne recouvrent pas une même réalité. " EmploiA ", voire même " plein-emploiA " peuvent prendre des sens différents et leur éventuelle garantie ne dit rien de la nécessité du salaire ou de ressources au-delà de l'emploi précisément. La question posée dans le présent numéro est donc loin d'être anodine et c'est pourquoi nous y réfléchissons depuis une dizaine d'années19 et la remettons aujourd'hui sur le métier. Et de ce point de vue, l'expérience du confinement a été particulièrement révélatrice de ce que les différentes formes d'institutions du travail produisent en termes de droits salariaux, comme le met en lumière Jean-Pascal Higelé dans une note - révisée - de l'IES que nous publions ici.

10/2022