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Littérature française

Les Voix intérieures

La plupart des poèmes des "Nuits blanches" ou de "Bagatelles" dans Destinée arbitraire, les Chantefables et chantefleurs "pour enfants sages à chanter sur n'importe quel air" , les couplets d'Etat de veille qui proposent aux musiciens "des textes dont ils puissent user avec la plus grande liberté, en coupant, en répétant des phrases, en ajoutant même ce qu'ils voudront y ajouter" , témoignent à l'évidence de la connivence qui pour Desnos lie poésie et chanson. L'exercice de la publicité radiophonique pendant les années trente favorisa ce rapprochement. La parole s'y plie à la musique, le poème se fait ductile pour épouser la mélodie. Desnos franchit allègrement le pas et se mit à écrire des chansons qui prennent le rythme des blues, de valse ou de java, qui sont souvent composées pour un musicien et un interprète déterminés. Le journaliste radiophonique se double alors d'un parolier professionnel. Si l'on remonte aux années surréalistes, l'on décèle chez Desnos un goût pour l'expression orale. Il est lui-même celui qui "parle surréaliste à volonté" (André Breton), le prophète d'une "parole d'or" (Michel Leiris) Livre relié à la chinoise 232 pages avec photos 21 X 21 ISBN 9782-371455238 25 ? Desnos est spontanément le poète de l'oral et il est particulièrement sensible à l'inflexion des voix - celle d'Yvonne George par exemple. Il rêve d'un échange de paroles que la vie rend improbable, mais que la merveilleuse invention du disque réalise d'une certaine manière Sachons tirer de son enseignement une leçon digne des hommes libres que sont les Français" . Contre les autodafés hitlériens, Robert Desnos revendique ainsi la liberté de la pensée - liberté esthétique et politique. Liberté : maître mot de son oeuvre et de sa vie. - Marie Claire DUMAS (extrait de l'avant-propos)

05/2018

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Philosophie

Philosophie N° 140, janvier 2019 : Heiddeger, Hölderlin, Eschyle

Ce numéro s'ouvre sur "Voix de l'éternel à l'éterne " de C. Layet, consacré à l'essai philosophique de Hölderlin Sur la manière dont procède l'esprit poétique. Il y nomme sensation transcendantale l'état harmonique auquel permet d'accéder la position d'un principe relationnel – dont demeure privée la fondation dans le Moi absolu défendue par Fichte ; en tant que lien irréductible avec l'extériorité, cette sensation se distingue aussi de ce que Hegel nomme intuition transcendantale dans la Differenzschrift. Si l'épreuve d'une telle sensation est caractérisée comme condition nécessaire pour tout accomplissement humain, elle n'est cependant pas suffisante pour que l'homme atteigne sa destination, la sensation exigeant en outre de se manifester dans une langue poétique. A partir des années trente, la pensée de Heidegger se caractérise de plus en plus explicitement par la tentative de restituer la "possibilité première" de l'autre commencement (der andere Anfang) de la pensée de l'être. Dans "Vers une démodalisation du possible : Heidegger et le clivage de l'estre", I. Macdonald esquisse une interprétation de cette possibilité, en lien étroit avec la critique de la modalité qu'elle présuppose – critique surtout mise en oeuvre dans les Beiträge zur Philosophie (Contributions à la philosophie) – et la réception heideggérienne de Hölderlin. Dans "L'angoisse dans l'Agamemnon d'Eschyle à la lumière d'Etre et Temps de Heidegger",J.-J. Alrivie tente de montrer que lorsque Heidegger inclut expressément Eschyle dans ce qu'il nomme commencement grec, cela procède d'une conviction bien étayée – et ce même s'il ne se livre pas, comme il le fait pour Homère ou Sophocle, à l'exégèse élaborée de textes précis. Par la question centrale de l'angoisse qui y est en jeu, Agamemnon apparaît dans l'Orestie comme l'oeuvre d'Eschyle la plus propre à manifester cette parenté entre la poésie tragique d'Eschyle et l'analyse existentiale. Dans "Martin Heidegger, un recteur nazi et l'"anéantissement total" de l'ennemi intérieu ", G. Payen se livre à une analyse historique précise. Selon Emmanuel Faye, Heidegger aurait lancé un appel à l'extermination dans un cours de 1933. Or, en parlant d'anéantissement total de l'ennemi intérieur, il reprenait l'expression d'un slogan de la campagne d'autodafés menée par la Corporation des étudiants allemands contre "l'esprit non-allemand" ; pour comprendre le sens qu'il pouvait lui donner, il faut la replacer tant au sein de la méditation du combat héraclitéen qu'il fit dans son cours, qu'à la lueur de la lutte antisémite qu'il mena comme recteur nazi de l'université de Fribourg-en-Brisgau. Dans les Questions jadis parues chez Gallimard, les traductions étaient assorties de remarques des traducteurs sur les difficultés de traduction et les choix terminologiques adoptés. Cette pratique s'est perdue, l'éditeur allemand des oeuvres de Heidegger n'autorisant ni explicitation de la pensée de Heidegger en notes, ni commentaire sur les choix terminologiques – ce qui entrave le progrès de la traduction au fil des générations, fondé sur la comparaison explicite des choix et leur discussion. Les présentes "Remarques sur la traduction de certains termes heideggériens" de D. Pradelle, prévues en annexe à la traduction des Pensées directrices sur la genèse de la métaphysique, de la science et de la technique modernes (Seuil), tentent une explicitation de termes fondamentaux de la pensée du second Heidegger. D P.

01/2019