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Malick Evariste Tchakpedeou

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Littérature française

Le Chat, l'Ankou et le Maori. Conte

Jules Joseph Chamsou était un chat à quatorze rayures et trois prénoms, de la famille féline Tabby (son état civil complet était donc Jules Joseph Chamsou Tabby), pas mal du tout de sa personne. En d'autres termes, c'était un très beau grand fort chat. Comme tout le monde, il connaissait l'histoire du chat qui s'en va tout seul et pour qui tous les lieux se valent, et comme tous les chats, il trouvait l'histoire plutôt bonne. Cependant, quelque chose là-dedans l'avait toujours tracassé : pourquoi, se disait-il, s'en aller si tous les lieux se valent ? Si là-bas et ici, c'est la même chose, pourquoi ne pas rester ici au lieu d'aller làbas tout seul ? Dans le doute, il avait donc décidé, par prudence, de rester à Pennoën dans la crêperie bretonne où il était né, parmi les humains crêpier et crêpière qui s'occupaient de sa subsistance et de son confort, d'être un chat immobile, sédentaire et domestique, un chat aussi apprivoisé que peut l'être un chat, un chat fixe ou à l'arrêt, en somme. Mais un jour, l'ennui lui vint de voir toujours les mêmes choses aux mêmes places et d'entendre aux mêmes heures les mêmes réflexions des mêmes gens de la même maison. [...] Jules Joseph Chamsou décida donc d'aller voir si tous les lieux se valaient ou s'ils étaient pleins de surprises et de nouveautés, s'ils étaient dans ce cas là des lieux intéressants, et si l'histoire du chat qui l'avait tarabusté depuis l'enfance était véridique ou juste une histoire comme ça pour endormir les chatons. Ce qui revenait pour lui à passer de la profession de chat à l'arrêt à celle de chat haret, comme on appelle les chats domestiques qui retournent à l'état sauvage. Et un beau matin, il quitta la crêperie pour s'en aller tout seul vers d'autres lieux comme dans l'histoire. Il allait au hasard. Peu importait la direction ou le but si tous les lieux se valaient. Sans le savoir, il marchait vers l'ouest et l'océan, à travers les bois, les champs et les landes. Michel Rio, impeccable styliste et romancier à l'intelligence crépitante, a par le passé publié quelques contes, chez Nathan et aux éditions du Seuil. Renouant avec cette veine narrative, il nous entraîne aujourd'hui sur les traces du chat qui, lassé de sa crêperie, décide d'aller voir si tous les lieux se valent. Au gré de ses tribulations, Jules Joseph Chamsou comprend bien vite que, livré à lui-même, il ne lui sera pas si facile de trouver sa pitance. Mais sa malice et son audace raisonneuse le tireront de bien des mauvais pas, et il nouera même quelques amitiés, notamment avec les korrigans de la lande, à qui il chantera un branle. Répondant au charme et à la verve du conte, les dessins de Marie Belorgey, par leur précision et leur mystère conjugués, invitent le lecteur, enfant ou adulte, dans l'irrésistible tourbillon de cette aventure de chat casse-cou et trompe-la-mort.

11/2017

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Essais biographiques

Georgia O'Keeffe, une icône américaine

Avant propos : Cet ouvrage est né de la curiosité et de l'admiration pour une artiste découverte sur ses terres natales, dans le Middle West américain, et d'un constat : une lacune bibliographique en français. Doit-on l'imputer à l'absence durable et flagrante de l'artiste sur les cimaises des musées français, alors qu'elle est une icône outre-Atlantique, au même degré que Frida Kahlo et présente dans de nombreux foyers américains sous forme de reproductions ? Ce livre n'a pas l'ambition de combler un vide bibliographique, mais celle d'éveiller la curiosité d'un public français à l'égard d'une oeuvre et d'une vie exceptionnelles. O'Keeffe pourrait être l'héroïne d'un roman d'aventures ou d'un western. Elle est celle de notre livre. Sa liberté est à tout crin. Son sens de l'aventure, doublé d'une ambition intacte et d'une intelligence de la situation (et d'un soupçon d'opportunisme ? ) en font une réussite américaine exemplaire mais non conformiste. La vie de Georgia, la plus américaine des Américaines est un drôle de mélange entre modernité d'un langage visuel et d'un mode de vie, et retour à une Amérique primordiale. Pour celle qui, avant Warhol, fut l'une des premières à comprendre le rôle de l'image dans la promotion d'une oeuvre, l'art et la vie sont indissociables. En résulte une légende dorée et une oeuvre unique qui a traversé le siècle sans se démoder ni se dévaloriser, littéralement. En témoignent les prix qui ne cessent d'augmenter. Celle qui se qualifiait de " diablement indépendante " et que l'on associe trop systématiquement à une peintre de fleurs, a trouvé sa voie dans l'Amérique, dont sa peinture fut aussi la voix. Nous voulions que cette voix résonne en français, en donnant un aperçu de cette vie longue d'un siècle passée entre le plus moderne des hôtels new-yorkais et les canyons de l'Ouest, entre la ferme familiale du Wisconsin et un ranch aux confins du désert, entre la solitude de l'atelier immaculé et les cimaises des plus grands musées américains. Ce fut une vie à créer, patiemment et impatiemment, inépuisablement au gré des mouvements géographiques, avec une exigence infaillible et une curiosité sans cesse renouvelée. Plus qu'aucun de ses collègues masculins, affranchie des étiquettes régionaliste ou moderniste, elle a donné avec sa peinture une identité plastique à ce Nouveau Monde, à travers sa flore, sa géologie, son histoire. Elle est l'un des phares de l'histoire de l'art du XXe siècle. O'Keeffe défie toutes les conventions, morales et esthétiques, sillonne le continent, se choisit soigneusement son entourage et ne vit que pour sa peinture. L'atelier, où de très rares proches sont conviés, est son ultime havre. Avec une discipline de fer, elle s'est tenue fidèlement à l'image qu'elle a, à l'aide des plus grands photographes de son temps, forgée d'elle. Elle n'a laissé au hasard aucune de ses expositions ni le destin d'aucune de ses oeuvres. Figure austère et sophistiquée, fantasque et résiliente à l'image de cette terre américaine dont elle est l'émanation pour ne pas dire la quintessence, elle est devenue une icône, figure admirée au-delà du monde de l'art, par celui de la mode par exemple et par les féministes qui tissent avec elle une généalogie. Déroutant parfois les critiques, cette oeuvre protéiforme, qui court des fleurs monumentales en gros plan aux vues verticales de New York, des levers de soleil sur la plaine texane à l'aquarelle aux ossements tapissant le désert de l'Ouest, du ciel le plus éclatant à une rivière réduite à une virgule balayant un paysage de neige, est d'une poésie inouïe, moins grandiloquente toutefois que celle d'un Walt Whitman ou d'un Terrence Malick qui s'inscrivent dans la même lignée. Nous ne saurions qu'inviter notre lecteur à regarder ses oeuvres, sur les cimaises d'un musée ou reproduites sur les pages d'un livre, car comme le disait notre héroïne, " The meaning of a word - to me - is not as exact as the meaning of a color. Colors and shapes make a more definite statement than words " . Qu'on se le tienne humblement pour dit...

09/2021

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Décoration

Fabienne Delvigne. Sublimer par la différence

Des chapeaux à en perdre la tête ! Il est des artistes croisés au hasard d'un cocktail ou d'un dîner dont on ne saurait oublier le nom. Ma première rencontre avec Fabienne Delvigne fut avant tout marquée par un pimpant chapeau, flottant au beau milieu d'une réception donnée dans un bel hôtel de Bruxelles. De cette circonstance naquit une complicité puis, très vite, l'envie de retranscrire son univers unique à travers mes articles dans la presse, mais aussi par le biais de textes plus profonds, dans lesquels se dévoilerait sa véritable sensibilité artistique. L'idée de célébrer les trente années de création de la Maison Fabienne Delvigne fut le prétexte idéal pour lancer la rédaction de cet ouvrage aux multiples facettes. Un brin de malice, une imagination à foison, un zeste d'innovation, peut-être devrais-je dire d'audace, la gaîeté incarnée et surtout une belle dose de passion au service de clientes fidèles venues de toute l'Europe pour se faire chapeauter avec grâce. Voici brossé en quelques traits le portrait de cette délicieuse modiste. Perfectionniste jusqu'au bout des ciseaux, Fabienne ne laisse jamais rien au hasard et mène sa vie à cent à l'heure sans jamais se départir de son entrain. Entrepreneuse heureuse, équilibriste dans l'âme, elle jongle avec bonheur entre les moments consacrés à la création, confortablement installée dans sa jolie maison de maître bruxelloise où elle a aménagé son atelier boudoir, ses apparitions dans les cocktails et soirées mondaines où elle ne manque jamais une occasion de porter ses créations et sa vie de famille qu'elle n'entend surtout pas sacrifier. Femme de caractère, Fabienne souhaite sublimer la beauté de ses clientes par la différence. Elle sait apporter un regard rafraîchissant sur la mode, un regard libre et sensuel où la laideur ne trouve nulle grâce. Véritable ode à la belle esthétique, ses chapeaux aspirent à rendre le monde plus beau. Fabriqués selon des savoir-faire artisanaux, ils ne manquent cependant pas de surprendre par leur créativité et leur modernité. Portée par sa passion, elle relève tous les défis et réussit haut la main le pari audacieux de rendre l'objet désirable, indissociable de la personnalité et de la silhouette de la femme en redonnant sa part de rêve au port du chapeau. Entrer dans son atelier, c'est suspendre le temps et s'accorder un moment de pur plaisir artistique. Elle y crée des pièces uniques inspirées par les matières qu'elle travaille, sculpte et drape avec doigté jusqu'à trouver la forme parfaite, le bon coiffant ou l'équilibre absolu entre originalité et féminité. Ses élégants chapeaux s'exposent sur les longues étagères parmi les jolies boîtes rondes réalisées à façon. Un véritable enchantement pour les yeux, l'impression inestimable de retomber en enfance, de se rêver en princesse de conte de fées. Dans l'un de ses poèmes, Paul Eluard fait l'éloge d'une femme à travers la seule courbe de ses yeux, il aurait, à n'en point douter, été conquis par la vision artistique de Fabienne Delvigne où la courbe est reine. Tendance le chapeau ? Assurément ! Surtout lorsqu'il prend vie entre les mains de Fabienne ! Au fil des pages qui suivent, je vous laisse découvrir son parcours unique et passionnant. Catherine Seiler Journaliste, auteure

12/2019

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Faits de société

Nègre, qui es-tu ?

Le Grand Cataclysme nègrechronoholocauste Nègre, Qui Es-Tu ? , porte une attention particulière sur la cause de la Race Noire, étant toujours d'actualité au point de vue racial dans le monde actuel. Il examine les défis du changement de sa mission en tant que père et mère de l'humanité sur terre, et se penche sur les étapes de son abaissement, son asservissement, ses conditions et statuts de vie avant et après la révision de son statut, et le mandat qui lui a été réservé pour son développement dans le monde après l'esclavage ; ses réalisations et la contribution apportées au monde au fil du temps, en tant que patrimoine. Son texte traite de l'historicité humaine ; de la vérité historique des livres de la Bible, du créationnisme et plus largement de la perception humaine du monde invisible. Il est considéré comme un ouvrage de vulgarisation de l'histoire biblique au travers de l'histoire de la religion, et de la métaphysique. Hier nous étions terrifiés de nombreux actes effrayants de l'humanité ; et pas très loin, était le danger. Mais c'est ici notre monde, où règne la loi de nos péchés, ne méritant pas d'être humain, avec un coeur aimable. Hier, quand nous sommes arrivés ici, quelque chose s'est brisé en nous, quand ils nous ont sortis de notre adorable berceau, aux murmures de l'isolement d'un vaste océan, abritant une coquille décorée avec une haine concrète, qui nous entourait ; oui, nous avions peur de nombreux actes effrayants de l'humanité. Et la nuit jeta sa draperie ici et là ; le vent mythique alertant l'horreur, murmurant sa musique. Ainsi, hier, nous nous sommes réveillés de l'autre côté de l'océan isolé de terreur, la mort étant sous les vagues bleues empoisonnées, une tombe bien faite dans son abîme. "Je suis blanc, je peux te tuer et rien ne m'arrivera" et nous avions peur de nombreux actes effrayants de l'humanité. "Cependant, nous ne serons jamais vaincus par le racisme, nous nous écriâmes ; l'amour est ce que nous ressentons, des sentiments intenses d'amour". "Mais alors, l'âme répondit, soyez avertis, parce que l'amour peut être pire que la haine, et en soi, c'est une mauvaise volonté". Nègre, Qui Es-Tu ? , révèle sa narration philosophiquement ; et sa révélation religieuse commence avec l'Egypte ancienne et s'étend jusqu'à l'avènement de la Bible ; enfin, il inscrit une chronologie de la Bible, et où elle tire ses sources. Il est qualifié comme une histoire émouvante d'un homme qui veut un monde sans malice et sans haine, et fait quelque chose à ce sujet. Il explore comment au cours des siècles de l'esclavage, les Noirs ont subi des massacres, des génocides et d'autres formes de souffrance dans le monde entier ; et se noyant toujours dans un environnement hostile racial historique dans plusieurs parties du monde, depuis l'abolition de l'esclavage. Le mot "Race" est utilisé ici pour justifier la déportation de la race noire qualifiée d'inférieure pour la domination de la race blanche. Ce mot a été utilisé pour la première fois en Europe au Xe et au XIe siècle pour distinguer diverses communautés aristocratiques. Il est aussi inscrit dans la constitution des Etats-Unis depuis 1865. Il dévoile aussi quelques inventions cachées des Noirs, sans lesquelles le monde ne serait pas ce qu'il est aujourd'hui. Aujourd'hui encore en général, l'auteur déplore que le berceau de l'humanité – l'Afrique – soit davantage balisé jusqu'aujourd'hui par le reste des pays.

05/2020

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Thèmes photo

Lost Shadows

En Camargue, Marco Rigamonti a rencontré un monde premier, l'eau et la terre épousant leurs intensités sous un ciel de lumière pure. Les paysages qu'il contemple sont silencieux. L'homme est passé par là, qui disparaîtra plus vite que la forme des lieux. Percevant les correspondances entre les objets façonnés et le territoire qui les porte, le photographe aborde l'espace comme on le respire, calmement, les poumons se remplissant d'air, puis se vidant. Ses images sont ainsi dépouillées d'affects faciles ou de sentimentalité, la psychologie étant le plus souvent une taie entre le regardeur et les scènes qu'il reçoit. Au pays des manades, Marco Rigamonti propose un voyage dans l'ocre et la grâce de toute présence, entre allègement du moi et solennité très ancienne. Il y a dans ses rectangles de vision de la gravité, mais aussi de l'absurde et de l'humour spontané, sans moquerie. L'émouvante intimité des choses y rencontre le saugrenu, ou l'incongru, et l'éclat de la vérité de ce qui est, simplement baigné de soleil, la malice du spectateur. On entre en ses photographies comme on pénètre dans une arène sans savoir d'où viendra l'animal qu'il nous faudra affronter dans un combat plus spirituel que physique. Les signes de la culture camarguaise sont montrés, entre sentiment de survivance de l'ethos d'un peuple et surprise d'advenue. Si l'on perçoit ici de l'oisiveté, ce n'est pas au sens du vice que déploraient nos grands-mères, et les affairés du Spectacle tournant sans fin dans le vide, mais au sens du souci du soi des Antiques, cette sagesse dans l'approche du temps et des corps jetés dans l'impermanence. C'est une attente sans drame sous la brise chaude, ou les rayons de plomb, une conscience de la maturation nécessaire pour que chaque entité - végétale, animale, humaine - arrive à son terme en développant le meilleur de son suc. Marco Rigamonti a photographié un Far-West français à la fois drôle et sauvage, ouvert à tous les êtres ayant su préserver leur part d'indocilité, leur liberté, leur grain de folie. La Camargue qu'il révèle, sèche et recouverte d'eau séminale, est une puissance, un royaume camarade pour les solitaires, un désert où affronter, front droit, la Camarde. Dans le dialogisme de ses images, un tuyau d'arrosage est bien plus qu'une ligne de caoutchouc serpentant dans le sable, c'est aussi, dans la conversation secrète des formes, l'arcature surplombant une fontaine en construction, le rail d'un train fantôme, ou la courbe délicieuse d'un tobogan. S'il est identifiable sur une carte de géographie, l'espace qu'arpente l'artiste italien est aussi de l'ordre d'une cosa mentale peuplée de signes pouvant paraître étranges pour les non-initiés, comme des archétypes sibyllins. On peut penser à la peinture métaphysique de Giorgio De Chirico, et à la sensation troublante d'un monde de pure autonomie échappant à la causalité ordinaire. En ces territoires de sable et de poussière, des Aliens débarqueront peut-être, les tables de pique-nique arachnéennes n'étant d'ailleurs pas sans rappeler tel épisode fameux de La Guerre des étoiles. Par petites touches et décalages de détails, presque imperceptiblement, Marco Rigamonti nous fait entrer dans une fiction où un homme torée une camionnette, et où les éléments de la réalité semblent concourir à la construction d'un vaste trompe-l'oeil. Plane en ce pays unique, et rempli d'artefacts, une âme taurine gigantesque, comme si le moindre acte, la moindre scène, était regardée par qui a déjà été soumis au combat ultime, et l'a perdu. Voyant défiler les grandes étapes de son cadre familier, le bel animal trépassé prend le temps, luxe pour une noble bête à cornes élevée pour la lutte - mais l'éternité n'est pas pressée -, d'aller flâner du côté de Piémanson, de ses caravanes parfois éventrées, de ses pirates, de ses baigneuses graciles et de ses touristes égarés. Par la stupeur sereine de ses images, et leur douce ironie, le photographe affirme qu'il n'y a pas de pureté identitaire, mais un jeu, certes sérieux, intime, avec les codes de l'appartenance, ce qui ne peut que réjouir. Faulkner l'écrivait : "Le temps ne passe pas, il n'est même pas passé". Fabien Ribery

09/2023