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Satka. Ou la conquête de l'Est

Un voyage au coeur de la Russie d'aujourd'hui : un cahier de 32 photographies couleur et noir et blanc assorti d'un récit composé de 32 portraits d'habitants de la ville de Satka. En 2019, l'Ambassade de France en Russie et l'Institut français invitent le photographe Bruno Boudjelal à réaliser un travail sur la Russie. Celui-ci propose à l'écrivain François Beaune de l'accompagner. Pour leur résidence de création, ils cherchent une petite ville à même d'incarner la Russie contemporaine. Ce sera Satka, ville minière de l'Oural où la vie s'organise autour de Magnezit, une entreprise qui extrait un minéral, la magnésite, dont on fait des moules pour manipuler les métaux en fusion. Qui sont aujourd'hui les habitants de Satka ? Comment vit-on à Satka ? Jusqu'au milieu du 18e siècle et l'arrivée des premiers paysans, forcés de quitter leurs villages de l'Ouest et de se transformer en ouvriers pour forger les armes du tsar, cette région de basse montagne est peu peuplée. C'est une terre d'estivage, une forêt de bouleaux, de pins et de fraises des bois. Pendant un siècle et demi, Satka est un camp de travail pour les ouvriers des hauts fourneaux. Puis, la découverte de la magnésite au début du 20e siècle et son exploitation font de Satka une ville, officiellement, en 1937. Elle est aujourd'hui une unité de production de 30 000 habitants, avec ses HLM des années 60-70 typiques de cet oblast industriel de Tchéliabinsk. Entre 2019 et 2020, le photographe et l'écrivain séjournent à Satka à deux reprises (un été et un hiver), partant à la rencontre de ses habitants, tissant des liens avec une trentaine d'entre eux qui ont choisi de leur raconter leurs histoires. Le livre s'ouvre sur un cahier de 32 photographies légendées : paysages dépouillés souvent austères, qui dévoilent la pauvreté des habitats et portraits, certains en surimpression sur les paysages, les corps s'inscrivant dans les paysages qui les déterminent. Le grain marqué, le flou assumé et les teintes tragiques suggèrent les parts d'ombre et les traumatismes de l'Histoire qui se lisent sur les visages. Les photographies guident le lecteur jusqu'au récit qui les suit : 32 portraits de femmes et d'hommes que dresse François Beaune à partir d'une histoire, une anecdote intime, qu'ils lui confient : Svetlana, la belle enseignante aux origines mixtes, ukrainienne et bashkir, Marina la nostalgique de l'Union soviétique, Sergueï le tigre d'acier, nationaliste convaincu qui vit dans l'attente d'une guerre à venir, ou encore Alexander le dissident, opposant déclaré à Poutine, qui témoigne d'une Russie désunie. Les récits collectés, entrecoupés de réflexions plus personnelles de l'auteur, dévoilent par petites touches la réalité quotidienne d'un peuple qui n'a cessé de subir les guerres, les déportations, le joug des pouvoirs politiques. Un peuple souvent nostalgique du passé soviétique qui vit avec le mythe d'une nation héroïque, fière et vertueuse. Un peuple qui résiste à l'absence de perspectives en nourrissant un imaginaire riche et poétique.

03/2023

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Esotérisme

La nature, nous vivons en elle et elle vit en nous

"La nature ne deviendra éloquente et pleine de sens pour vous que si vous apprenez son langage. Toute votre existence doit tendre vers ce but : entrer en relation avec ce monde ouvert et ses habitants. Et des habitants, il y en a partout : dans l'eau, l'air, la terre, le feu, les montagnes, les arbres, le soleil, les étoles... Ils vous saluent, vous font des signes. Mais pour qu'ils se lient d'amitié avec vous, préparez-vous à entrer dans ce monde immense avec votre respect, votre compréhension, votre amour". Omraam Mikhaël Aïvanhov Extraits de la table des matières : - Pourquoi la nature a toujours suscité la curiosité des humains - Le salut à donner dès le matin à toute la création - Le soleil : lumière, chaleur et vie - Microcosme et macrocosme : l'homme dans l'univers - S'ouvrir à la vie de la nature - Se nourrir est autre chose que manger - Nos dettes envers la nature - Ouvrir des portes aux rayons du soleil - L'air entretient en nous le feu de la vie - Lumière et obscurité : une alternance qui est la loi de la vie - La chaleur et le froid : l'amour et la sagesse ; le coeur et l'intellect - S'ouvrir au langage de la nature - Du chaos à l'harmonie : la loi de la création - Tous les habitants de la nature nous font des signes - La vie : une forme de combustion La terre, un enfant du soleil - Le corps humain : une reproduction de l'édifice cosmique - Le greffage, une opération que nous pouvons réaliser aussi en nous - L'union du soleil et de la terre - Les pieds et la tête : la terre et le ciel - Le fleuve, de la source à l'embouchure - Les quatre éléments : notre nourriture quotidienne - Les différentes fonctions de l'arbre se retrouvent en nous - Lire et écrire dans toutes les régions de l'espace - Comme pour l'arbre, nos racines sont indispensables à notre vie - Faites naître le printemps en vous et on vous aimera - Lune croissante ou décroissante, son influence sur nos activités - Les animaux, l'énigme de leur présence - L'obéissance à l'ordre universel - Pour que la vie de l'univers se révèle à nous - Des graines à semer dans notre âme - Nos mains et nos pieds : des antennes - Les racines de l'arbre, une analogie avec le plexus solaire - Le soleil et la lune dans notre ciel intérieur - Se nourrir concerne la totalité de notre être - Le sommet que nous ne devons jamais perdre de vue - L'univers entier nous appartient - La lumière, nourriture de notre cerveau - S'élever dans le ciel avec le soleil - La rose nous conduit sur le chemin du véritable amour - Les nombres, charpente de l'univers - Lune croissante et décroissante utiliser ces deux périodes - Le fruit : peau, chair, noyau - Comètes, planètes et soleils - Sur l'arbre cosmique de la vie - La lumière du soleil, une nourriture à prendre chaque jour - Notre lien avec l'univers - Le corps humain, une synthèse de tous les règnes de la nature - Dans le temple de la nature ... . .

09/2021

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Sécurité incendie

Livre "Formation des Jeunes Sapeurs et Marins Pompiers - JSP1"

La formation des jeunes sapeurs et marins-pompiers a pour objectifs principaux : - d'inculquer aux JSP/JMP des valeurs citoyennes, d'engagement, de solidarité et d'éthique, - de développer certaines connaissances, habiletés et attitudes requises pour participer, en tant qu'équipier de sapeurs-pompiers, à l'activité opérationnelle des services d'incendie et de secours dans le domaine des missions de lutte contre les incendies, de secours d'urgence aux personnes et de protection des personnes, des biens et de l'environnement, - de sensibiliser les jeunes aux risques et de les initier aux messages de prévention afin qu'ils puissent se positionner en tant que citoyens, acteurs de leur propre sécurité et de celle des autres. Ce livre reprend toutes les connaissances nécessaires au cycle 1 de la formation des JSP/JMP - Ce livre est basé sur le référentiel national de formation des JSP et des JMP de juillet 2022 ainsi que sur les données fondamentales des GDO, GTO, PIO, PEX en cours à la date d'édition. La partie prompt secours est basée sur les recommandations relatives aux Prévention et Secours Civiques de niveau 1 de décembre 2021. SOMMAIRE : PREVENTION ET SECOURS CIVIQUES - niveau 1 PROTECTION INDIVIDUELLE ET COLLECTIVE Règles d'emploi et de sécurité des équipements vestimentaires de protection individuelle, Les équipements vestimentaires de protection individuelle, La tenue des jeunes sapeurs-pompiers, La description et la composition de l'Appareil Respiratoire Isolant à Circuit Ouvert SAUVETAGES ET MISES EN SECURITE Le Lot de Sauvetage et de Protection Contre les Chutes, Les échelles à main ALIMENTATION, ETABLISSEMENTS, EXTINCTION Les matériels de lutte contre l'incendie, Alimentation, La Marche Générale des Opérations (M. G. O.) L'ENGAGEMENT CITOYEN ET LE RESEAU ASSOCIATIF Les valeurs et l'éthique du jeune Sapeur-Pompier, Le réseau associatif fédéral, L'organisation et les missions du réseau fédéral, Les liens entre les S. D. I. S. et les unions départementales ou les associations départementales, Le rôle associatif et ses valeurs, L'engagement citoyen, Les protocoles et cérémonies LA PREVENTION DES RISQUES ET LA SECURITE Information préventive aux comportements qui sauvent ORGANISATION ET MISSIONS DU SDIS Les grades ACTIVITES PHYSIQUES ET SPORTIVES Préparation physique, Les objectifs de l'activité physique chez les sapeurs-pompiers Ma progression personnelle - Ma section 1ère édition - octobre 2022 - ISBN 978-2-35738-749-2 - format 17 x 24 cm - 208 pages - Réf. JSMP1

10/2022

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Littérature française

Ma vie, côté père

Journaliste littéraire (Le Monde) et musical (Télérama), Michel Contat a beaucoup travaillé sur Sartre, qu'il a bien connu. En 2000, il a publié Paris 1959 (Zoé), ouvrage dans lequel il racontait son année d'études de lettres à la Sorbonne, son amitié avec Michel Thévoz, qui allait devenir le principal théoricien et historien de l'Art Brut, avec qui il jouait du jazz. Ma vie, côté père constitue sa première réelle incursion dans la littérature personnelle. Il y évoque la figure de son père, personnage très romanesque, avec qui il avait eu dans son adolescence des rapports assez tourmentés. Né en Suisse en 1906, son père a en quelque sorte traversé l'histoire européenne - bien que venant d'un pays épargné par les guerres. Il avait commencé sa carrière dans les assurances à Berlin, avant l'arrivée d'Hitler au pouvoir. Il avait perdu sa place après celle-ci, la firme pour laquelle il travaillait appartenant à un juif qui en avait été dépossédé. Juste après la guerre, il était tombé amoureux d'une très jeune Allemande, veuve d'un général de la Wehrmacht, et avait quitté pour elle femme et enfants. C'était extrêmement audacieux ou totalement inconscient et irresponsable : en conséquence, il fut, à 40 ans, mis au ban de son milieu bourgeois. Il devint ensuite représentant de commerce pour des appareils médicaux puis des livres de luxe. Il fréquentait les casinos d'Europe. Puis il épousa une femme fortunée et mena une vie d'homme riche entouré de jeunes femmes plus ou moins vénales. Il fit des affaires en Indonésie. Il profitait en somme éhontément des " trente glorieuses ". Sa femme finit par le chasser. Il se relança en s'associant à un financier aventureux, qui fit une faillite frauduleuse. Il refit front une nouvelle fois en devenant traducteur free lance pour une grande banque zurichoise. Il mourut pour ainsi dire à sa table de travail, laissant d'énormes dettes. Ses proches découvrirent à sa mort qu'il avait épousé peu de temps auparavant une call-girl française pour qu'elle ait un passeport suisse. Un drôle d'exemple pour un fils. Mais ce n'est nullement un portrait à charge ni un règlement de comptes que Michel Contat propose ici. Tout joueur compulsif et amateur de femmes qu'était son père, il a toujours nourri de l'affection pour cet homme qui avait de l'esprit, des idées politiques libérales, une formation de juriste et d'économiste. Un homme qui, vivant selon le principe de plaisir, mettait à l'épreuve ses convictions d'intellectuel de gauche, tentant de lui inculquer son sens des réalités économiques et du caractère passager de la vie. Au fil des apparitions-disparitions de la figure paternelle et du parcours du narrateur lui-même, l'on croise en outre des personnalités historiques et intellectuelles, au premier rang desquelles Sartre, avec qui Michel Contat s'était lié d'amitié, celui-ci devenant en quelque sorte son père de substitution. Plus qu'un portrait, Ma vie, côté père est donc également le roman de la formation d'un jeune homme, qui grandit avec et contre son père, s'initie à la politique (les évènements de Mai 68, la guerre d'Algérie, sont autant d'éléments qui apparaissent en filigrane), à la littérature et au jazz.

01/2016

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Histoire régionale

Dictionnaire historique de la franche-comte sous les habsbourg. Tome 2 les matieres

Ce Dictionnaire historique de la Franche-Comté sous les Habsbourg (1493-1678) comprend trois tomes : Tome 1 : les personnages ; parfois connus ou célèbres, il s'agit surtout d'hommes et de femmes représentatifs de leur milieu social ou pro­­fessionnel. Tome 2 : les matières, dans tous les domaines : géographie, politique, diplomatie, administration, religion, économie, société, culture, art, sciences naturelles. Tome 3 : les lieux ; villes, bourgs, forteresses, abbayes, prieurés, etc. ; un atlas complète la présentation. Ce dictionnaire ambitionne de rassembler toutes les connaissances accu­­mulées par diverses recherches depuis une trentaine d'années. L'époque des Habsbourg a été peu étudiée. Il n'existe, pour l'instant, aucune synthèse globale, depuis le règne de Philippe le Beau ou celui de Charles Quint jusqu'à l'annexion de la province par le roi de France Louis XIV. Cinquante historiennes et historiens ont participé à la réalisation de cet ouvrage. Ce dictionnaire en trois tomes est d'abord un instrument de travail. Il ambitionne de rassembler toutes les connaissances accumulées par diverses recherches depuis une trentaine d'années. L'époque des Habsbourg a été peu étudiée. Il n'existe, pour l'instant, aucune synthèse globale, depuis le règne de Philippe le Beau jusqu'à l'annexion de la province par le roi de France Louis XIV. Tout reste à faire, grâce aux archives abondantes disponibles. C'est la raison pour laquelle nous avons accordé beaucoup d'importance à la bibliographie, aux livres et aux articles. Chaque notice est suivie, si possible, d'une ou plusieurs références. Chemin faisant, nous voulons aussi lever des malentendus, défendre quelques idées fortes, mettre en évidence des caractères originaux : La Franche-Comté, correspondant au comté de Bourgogne, n'était pas un Etat indépendant, autonome ou souverain, mais une province. Cette province était unie aux Pays-Bas (issus des anciens Etats bourguignons des ducs Valois), d'où l'abondance et la fréquence des liens avec les Flandres, terme familier pour désigner à l'époque l'ensemble des Pays-Bas. La Franche-Comté n'était pas espagnole ou hispanique mais elle avait des liens très étroits et très fréquents avec les souverains espagnols, puisque les comtes de Bourgogne étaient aussi (très souvent) en même temps rois de Castille et d'Aragon. En dépit de ce rattachement dynastique, la Franche-Comté ne fut pas hispanisée ; en réalité, les influences politiques, religieuses, artistiques, économiques, situent la province au coeur des liaisons entre les Pays-Bas (Malines, Bruxelles, Louvain, Lille, Arras, Tournai, Valenciennes, etc.) et les Etats de l'Italie du Nord (Milan, Gênes, Turin, etc.). L'hostilité envers le royaume de France n'empêchait nullement les échanges économiques et sociaux ; les possessions de fiefs de part et d'autre de la frontière, les déplacements de population, la fréquentation des universités françaises, les influences artistiques et les approvisionnements alimentaires (aux foires de Lyon et par la Saône, au port d'Auxonne) en témoignent. La "guerre de Dix Ans" n'a pas existé, pas en tant que telle ; il s'agit de la partie comtoise de la grande déflagration européenne appelée guerre de Trente Ans (1618-1648). Les liens entre la Franche-Comté et la couronne espagnole se sont fortement renforcés à partir de 1635 et surtout entre 1668 et 1678. Enfin, Besançon, cité impériale et métropole (siège d'un archevêché), était une enclave qui entretenait des liens étroits avec le comté de Bourgogne mais aussi avec les institutions de l'Empire des Habsbourg, notamment la Diète et la cour impériale.

05/2023

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Ecrits sur l'art

L'oeil immuable. Articles, conférences et essais sur l’art

De Kokoschka, on retient surtout en France les peintures viennoises des années 1910, celles qui le rattachent à la Sécession, à Klimt et à Schiele dans l'"apocalypse joyeuse" de l'empire austro-hongrois. C'est risquer d'ignorer que ce peintre bientôt exilé se sentit toute sa vie beaucoup plus proche de l'art grec et baroque, qu'il pensait sans frontière, que de tous les mouvements ponctuels et des étiquettes mortifères de la critique ; et que, loin de se contenter de capter dans des portraits d'aristocrates phtisiques une ambiance de fin de monde, il fut un inlassable objecteur de conscience, résolu à ouvrir les yeux de ses contemporains à la dimension proprement culturelle des catastrophes passées et à venir. Le présent recueil d'articles, de conférences et d'essais remédie à ce danger en donnant la parole à Kokoschka lui-même. Cet ensemble de textes choisis en 1975 par l'auteur comme les plus représentatifs de sa pensée et de son engagement en matière d'art, est inauguré par les quelques brefs mais denses essais d'esthétique de sa jeunesse, où il énonce la conviction qu'il ne fera au fond que déplier et réaffirmer par la suite : celle du primat en art de la "conscience" individuelle de l'artiste, chargé de garder les yeux ouverts, de transmettre sa vision singulière à autrui et ainsi de mettre en forme et d'humaniser le monde. Cette formule, où il décèle l'essence même de l'art et du concept d'humanité tel que la culture européenne l'a hérité des Grecs, il en relève ensuite l'illustration idéale chez les artistes qu'il admire - Altdorfer, Rembrandt, Maulbertsch, Van Gogh, Munch... - et la faillite complète chez ceux qu'il pourfend avec une férocité constante : les artistes abstraits à partir de Kandinsky, responsables selon lui du bannissement de la figure humaine et du monde hors de l'art, et donc complices d'un appauvrissement de notre expérience qui aurait concouru aux atrocités du XXe siècle. C'est que les prises de position de Kokoschka excèdent amplement la discussion esthétique. S'élargissant aux dimensions d'une critique culturelle, elles font retour sur des moments-clefs de l'histoire de l'Europe - théâtre selon lui, depuis les guerres médiques, d'un affrontement permanent entre les penchants humains et barbares de l'homme - pour détecter des tendances de fond et mieux agir sur le présent. Le peintre se distingua en effet par son action dans le domaine de la pédagogie, documentée dans la troisième partie par les textes issus de son expérience d'"Ecole du regard" à Salzbourg de 1953 à 1964, dans laquelle il offrit à plusieurs centaines de jeunes gens de leur apprendre à "voir de leurs propres yeux". La quatrième partie, enfin, retrace quelques étapes décisives de son propre parcours et réaffirme les principes qui guidèrent notamment son oeuvre de portraitiste, d'allégoriste, de dessinateur et même de scénographe. C'est dire que ce volume, révélant l'écrivain, inconnu en France, qui double le peintre Kokoschka, enrichit l'expérience d'une peinture novatrice qui sut réactualiser la tradition pour penser le présent, tout en méritant d'être rangé parmi les ouvrages remarquables de la Kulturkritik du XXe siècle.

04/2021

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Poésie

Le Galaté au Bois. Edition bilingue français-italien

- Andrea Zanzotto : " Le Galaté au bois " (Il Galateo in bosco) Le titre, pour partie néologistique en français, emprunte au célèbre traité des règles de savoir-vivre de Monsignor Della casa, intitulé en italien Galateo, oppose culture (les règles sociales) et nature (bois touffu). Il s'agit du premier volet (1978) de la trilogie de la maturité du poète que le plus grand critique italien du siècle dernier, Gianfranco Contini a tenu à présenter. C'est aussi le seul recueil de cet ambitieux projet poétique à ne pas être aujourd'hui disponible en français. Les deux autres pans dudit triptyque, " Idiome " (1983) et " Phosphène "s (1986), sont tous deux présents en librairie. L'ouvrage prend pour thème un lieu défini, celui de la forêt du Montello situé au sud du bourg où le poète est né. Cette région s'avère particulièrement riche en sédiments historiques, échos, réseaux et figures. Là se dressent, par exemple, les ruines d'une grande abbaye où vécu Monsignor Della Casa, dans ces mêmes parages évolua la poétesse de la Renaissance Gaspara Stampa. Ce fut aussi un champ de bataille durant la première guerre mondiale et, de tout temps, un refuge pour les marginaux. Ces éléments, ici rapidement évoqués à titre indicatif, campent un sud et son histoire érodée reconduite à ses bribes surnageant dans l'histoire locale sous forme de fourmillantes historiettes, citations mémorables, épiphanies diverses. Cet enchevêtrement de temporalités dissemblables détermine un mélange stylistique familier aux lecteurs italiens : celui d'un plurilinguisme dont le Dante de la " Divine Comédie " est l'épigone. Autrement dit, la rencontre de styles diversifiés appartenant à des âges différents, tous dûment déhiérarchises dans une promiscuité généralisée mêlant mémoire littéraire, onomatopées, oralité : du sublime au trivial. Cet encyclopédisme langagier se révèle comme le juste rendu stylistique d'une histoire s'offrant tout à tour comme enfouissement et surrection, survivance et oubli, dont la faille périadriatique traversant de part en part la géographie concernée est aussi une métaphore seyante. Une syntaxe inattendue en résulte dans laquelle l'articulation est dévolue non au mot mais, le plus souvent, à des séquences verbales hétérogènes : accidenté, seul leurs heurts, chevauchements, juxtapositions, télescopages assoit le sens. L'histoire littéraire s'en trouve remaniée d'autant : paradoxalement, des styles distincts appartenant à des ères différentes finissent par y tenir un seul et même discours. Les styles mis en oeuvre sont ainsi arrachés à leur historicité pour vérifier la circulation du symbolique qu'ils viennent vérifier par-delà toute prétendue clôture : de langues en langages irréductibles. D'un italien d'une littérarité soutenue à un dialecte simplement parlé, par exemple. La critique italienne y a vu non seulement l'oeuvre maîtresse du poète de Vénétie mais également le chef-d'oeuvre le plus original de la poésie cisalpine du XXe siècle, qui en compte pourtant beaucoup d'autres. Au-delà, on peut tenir pareil recueil pour " généalogique " (dans une acception non nietzschéenne du terme) dans la mesure où prenant conscience du caractère suranné d'une tradition, l'européenne à travers l'italienne, ce recueil opère, idéalement et réellement, une synthèse de toutes les traditions précédentes, un peu comme Rabelais en son temps vis-à-vis de la tradition médiévale, et, cela, rien que pour donner un futur au genre poétique. Au reste, sa temporalité n'est-elle celle d'un futur antérieur (titre d'un célèbre poème de " Phosphènes " : " Futurs simples - ou antérieurs ") ? (Philippe Di Meo)

03/2023

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Italie

Leone Ginzburg, un intellectuel contre le fascisme. Suivi de Entretiens avec Giovanni de Luna, Paola Agosti et Martin Rueff

Leone Ginzburg (1909-1944) fonde en 1933, avec Giulio Einaudi et Cesare Pavese, les éditions Einaudi. Il meurt de sa radicalité en 1944, assassiné par les nazis. Il a inscrit la culture comme premier front de l'antifascisme. Florence Mauro raconte sa vie tirée comme un trait droit et sans bavure, sans aucune compromission, marquée par l'exigence intellectuelle. A la fin des années 1920 à Turin s'était formé un groupe de jeunes, au lycée d'Azeglio et ensuite à l'université. Leur maître Augusto Monti disait qu'il leur enseignait Dante et la politique. Les élèves se nommaient : Leone Ginzburg, Cesare Pavese, Noberto Bobbio, Massimo Mila, Vittorio Foa, Mario Lévi. Leone Ginzburg (1909-1944) est apparu très vite comme la figure émergeante de ce groupe par son attitude morale exemplaire, tant sur le plan intellectuel que politique. En 1933 il fonde, avec Giulio Einaudi et Cesare Pavese, les éditions Einaudi : en 1937 et 1938, il y installe les grandes collections, historiques, scientifiques, et les traductions de la littérature européenne : lui-même, d'origine russe et russophone, traduit les auteurs russes ou révise des traductions (Gogol, Tolstoï, Pouchkine, Dostoïevski, Tourgueniev) tandis que Cesare Pavese traduit les textes les plus novateurs de la littérature américaine (Sinclair Lewis, Herman Melville, John Dos Passos, Gertrude Stein...). De 1941 à 1943, condamné par le régime fasciste à la relégation dans un petit village des monts des Abruzzes, il écrit sans cesse pour la " Casa " Einaudi, et exige l'excellence du travail éditorial. Dans une incessante revendication de ses positions antifascistes, Ginzburg est mort de sa radicalité en 1944, à la prison romaine de Regina Coeli, assassiné par les nazis. Avec une écriture impliquée, Florence Mauro raconte la vie de Leone Ginzburg tirée comme un trait droit et sans bavure, sans aucune compromission, marquée par l'exigence intellectuelle. Par sa lutte jamais relâchée pour la liberté d'écrire, de traduire, d'enseigner, de transmettre, il a contribué à maintenir un rempart indispensable contre la montée d'une société totalitaire. L'autrice remet en lumière son intransigeance et sa radicalité face aux événements contemporains de sa génération. Il est un modèle qui parle aujourd'hui et enseigne à ne pas manquer de vigilance. Elle transmet au lecteur d'aujourd'hui son empathie pour le personnage de Leone Ginzburg qui devient par moments héros de roman : elle l'imagine dans une quotidienneté, avec ses camarades de lycée dans les cafés de Turin, ou avec sa famille dans le confino des Abruzzes où il est exilé par le pouvoir fasciste. Elle le met en scène, se fondant sur des écrits retrouvés, des témoignages, des archives. Elle décrit ses enquêtes dans les archives à Turin et à Rome, ses déambulations sur les pas de Leone Ginzburg, ses rencontres avec des témoins ou des historiens. A travers le geste d'écriture, Leone Ginzburg inscrit la culture comme premier front de l'antifascisme. Pour lui tout acte de langage devient acte politique. Comment des articles écrits dans la célèbre revue La Cultura - reprise par la Casa Einaudi - apparaissent-ils comme les mots les plus engagés de la Résistance ? Comment la Casa Einaudi est-elle au coeur, dès sa création, d'un des enjeux essentiels de la démocratie, du renouvellement d'un patrimoine qui a fondé un pays, et de sa très nécessaire leçon de résistance à venir ? Il est à noter que l'épouse de Leone, Natalia Ginzburg, née Natalia Levi, a été une grande écrivaine. Leone et Natalia ont eu trois enfants dont Carlo Ginzburg le célèbre historien pionnier de la micro-histoire et historien de l'art.

09/2022

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Histoire de France

Je brulerai ma gloire

Historien de la condition des auteurs, des Grecs anciens à nos jours, Jacques Boncompain a couronné ses recherches par la publication d'un Dictionnaire de l'épuration des gens de lettres jugé " si nécessaire " par Jean d'Ormesson, fruit du dépouillement systématique des dossiers de la Commission nationale d'épuration conservés aux Archives Nationales. Des années durant il a vécu dans la compagnie de plus de 3000 auteurs, interprètes, producteurs et agents, sommés de rendre compte de leur comportement sous l'Occupation. Les côtoyer a changé son regard sur " un temps où manque toute lumière ", selon le jugement de Saint-Exupéry, et incité à élargir son étude aux deux principaux acteurs politiques du temps, le maréchal Pétain et le général de Gaulle. D'où ce nouvel essai. Le propre du Maréchal est d'être toujours demeuré en retrait. A Verdun, pendant la guerre du Rif, ambassadeur en Espagne, à chaque fois les autorités en place sont venues le chercher. Ce l'est de manière encore plus éclatante en 1940. Jules Jeanneney, Président du Sénat, reconnaît : " Il est incontestable qu'à ce moment tous les yeux étaient tournés vers le maréchal Pétain. Il était une sorte de bouée de sauvetage vers laquelle toutes les mains se tendaient. Il était certainement le seul nom autour duquel on pourrait faire l'union et la concorde de notre pays... " A 85 ans il ne s'est pas défaussé. Toute sa vie, entre deux solutions, il a choisi la plus exigeante. Doté des pleins pouvoirs, l'expatriation serait la plus facile. Par esprit de sacrifice il décide de rester en métropole et de s'interposer, autant que faire se peut, entre le peuple et l'envahisseur. Comme en 1916, mais en sous main, il va mener une guerre d'attente de l'arrivée des Américains. Au général Héring qui le félicite de son élévation au sommet de l'Etat, il répond tout de go : " A titre de martyr seulement. " Sans illusion sur ce qui l'attend il dit autrement : " Je brûlerai ma gloire. " Impossible, face à Hitler et la soldatesque allemande, d'empêcher toute atrocité. En fin de partie, il le sait, toutes lui seront comptées à charge, sans que soient prises en compte celles qu'il aura réussi à parer. D'avance il accepte d'être déshonoré par ceux qui lui devront la vie. Son amour de la France passe l'entendement, aussi ne sera-t-il pas compris. . Pendant quatre ans il va louvoyer et tenter de trouver un gentleman agreement avec Churchill qui dira en 1941 à son envoyé, le colonel Groussard : " Moi aussi, si je gouvernais votre pays, je ne dirais pas aux Allemands : " ; Je vous déteste ! " ; , parce qu' ; il faut toujours éviter le pire, avec acharnement... Moi aussi, je biaiserais, je chercherais à gagner du temps, à propos de tout : mais j' ; aiderais par tous les moyens possibles ceux qui restent mes compagnons d' ; armes... Dites à Vichy que je respecte profondément la personne du maréchal Pétain. Jamais je n' ; ai cru que cet homme puisse souhaiter la victoire allemande. " Telle n'est pas aujourd'hui l'opinion dominante, preuve que sur la période trouble de l'Occupation tout n'a pas encore été dit. Ce livre a le mérite d'ouvrir d'autres perspectives.

11/2019

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Russie

Voyage au pays des Ze-Ka suivi de Le Chemin vers l’Occident

Les Ze-Ka ou Zeks (abréviation écrite sous la forme "z/k" de "zaklioutchonny kanaloarmeets") ce sont les "détenus-combattants du canal" , ces esclaves d'un des grands chantiers soviétiques du début des années 1930, le canal mer Blanche-Baltique. Le terme désigne par la suite tout détenu des camps du Goulag. Comme l'écrit Julius Margolin : "Le pays des Ze-Ka ne figure sur aucune carte soviétique et ne se trouve dans aucun atlas. C'est le seul pays au monde où il n'y a aucune discussion sur l'URSS, aucune illusion et aucune aberration". Enfin publié par nos soins dans son intégralité en 2010, sous son titre original, le Voyage au pays des Ze-Ka est l'un des plus bouleversants témoignages jamais écrits sur le Goulag. Le livre était précédemment paru, abrégé, en France en 1949 sous le titre La Condition inhumaine, bien avant les chefs-d'oeuvre de Soljénitsyne et de Chalamov. Cet hallucinant récit de cinq années passées dans les camps soviétiques ne le cède en rien à ceux de ses célèbres successeurs, ni pour la qualité littéraire, ni pour l'acuité de pensée et la hauteur de vue avec lesquelles l'auteur s'efforce de donner un sens à son expérience, aux limites de l'humain. "Il est absurde et incompréhensible qu'un livre de l'importance de Voyage au pays des Ze-Ka, [... ], n'ait jusqu'ici jamais pu figurer à sa place dans les bibliothèques : aux côtés de Si c'est un homme, de Primo Levi et des Récits de la Kolyma, de Varlam Chalamov (entre autres, mais avant tout) ; autrement dit, aux limites et au coeur de ce que la littérature peut révéler de l'espèce humaine" , écrivait dans Libération, Philippe Lançon au moment de sa parution. Douze ans plus tard, notre seul best-seller est devenu un classique de la littérature sur les camps, il a été traduit chez de grands éditeurs en Allemagne, en Pologne, et aux Etats-Unis (préfacé par l'auteur de Terres de sang, Timothy Snyder). Dans sa présentation du livre, en 2010, Luba Jurgenson écrivait : "Margolin fut témoin de cette page de l'histoire encore insuffisamment connue en France qui fait suite au pacte Molotov-Ribbentrop, à savoir la répression soviétique contre les citoyens polonais affluant massivement de la Pologne occidentale et, plus généralement, le nettoyage des confins pratiqué dès le début de l'occupation soviétique sur les territoires destinés à faire partie de l'URSS. Ces purges, qui visaient à la russification des populations, devaient assurer en premier lieu la destruction des élites et des institutions démocratiques, étape déjà réalisée partout ailleurs en Union soviétique". La Russie de Poutine, en se livrant à nouveau à ce qui s>apparente au "nettoyage des confins" de sinistre mémoire, s'est hélas chargée de rendre au Voyage au pays des Ze-Ka une brûlante actualité, et il était donc urgent de rééditer dans une collection de grande diffusion. Pour cette réédition, le livre est augmenté des neuf chapitres dans lesquels, sous le titre "Le chemin vers l'Occident" , l'auteur relate son retour en Palestine depuis Slavgorod, en Asie centrale, où Margolin s'était rendu à sa sortie du goulag, jusqu'à son embarquement à Marseille, en passant par la Pologne où il retourne à Lódz, où il marche au milieu des ombres de ses concitoyens juifs disparus "comme un somnambule" . Et des repères cartographiques qui permettent de suivre ses tribulations.

11/2022

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Littérature française

GHERASIM LUCA. L'intempestif

L'œuvre de Gherasim Luca pourrait se prêter à la légende d'une traversée du dadaïsme, du surréalisme et de la " poésie sonore ", aventures de la création, qui fondent notre épopée moderne. Elle entretient pourtant avec ces avant-gardes une relation d'intimité qui n'est pas " allégeance " ni dialogue. Dès les premiers textes, l'écriture poétique naît du litige entretenu à l'égard des mythes littéraires, suspecte les récits rétrospectifs et lutte contre toutes les figures édifiantes auxquelles la modernité aime à associer l'écrivain. Elle tire sa singularité d'une intransigeance nourrie à l'encontre de ses propres idéaux. L'intempestif caractérise alors cette voix discordante qui s'empare des représentations philosophiques contemporaines et les place sous une lumière qui révèle subtilement les tensions irrésolues qui les traversent. La poésie est ici la danse de la pensée lorsqu'elle refuse toute précaution, et " comme le funanbule à son fil s'accroche à son propre déséquilibre ". Cette approche poétique de l'abstraction philosophique révèle les désirs qui la nourrissent et dessine, dans la langue, les contours sensuels parcourus par l'idée avant son expression. La poésie de Gherasim Luca, au moment même où elle se voue à la matérialité du langage, inventant son " bégaiement " inspiré, décèle en effet dans cette syntaxe désarticulée le moyen d'une relecture démystificatrice de l'héritage, littéraire et philosophique, dont notre modernité poétique se réclame. Ce questionnement impromptu des valeurs de l'excès et de la subversion qui commandent notre représentation moderne de la littérature se manifeste dans des textes où la place réservée au lecteur est elle-même d'une instabilité radicale. L'interprétation se voit contrainte d'avouer son intéressement et sa violence. La démystification n'est pas la fin ultime de cette œuvre. La création poétique se voue à la conquête de l'incertitude. S'esquisse une théorie poétique du signe, qui, de recueil en recueil, fait se rejoindre la tragique d'une fuite éperdue du sens et la jubilation d'une chasse vouée à la répétition indéfinie. L'humour, si rarement associé à la poésie en France, devient soudain l'indice d'une distance intérieure du langage qui ne saisit sa proie qu'en se faisant, voluptueusement et désespérément " ombre ". Gherasim Luca poursuit cependant l'invention d'une " physique élémentaire " de la langue poétique. Il refuse le constat ou la déploration de l'absurde, qui contemple mélancoliquement la désertion du langage par les " valeurs " qui fondaient autrefois sa transcendance. Dans l'immanence des qualités plastiques et sonores de la langue, un rythme est conquis. La fuite de la signification, qui se dérobe à mesure qu'elle se construit, devient un geste érotique qui ouvre le discours au surgissement d'autrui. Le langage est-il ici un nouveau dieu trompeur et furtif, tout puissant ? Certes, le rire se glisse imperceptiblement derrière le sérieux de chaque acte aveugle devant ses propres risques et immuablement solitaire : il en révèle la nature théâtrale. Mais la " ruse " du langage s'effondre dès lors que surgit le dernier geste intempestif de cette poésie. Un autre rire éclate dans les mots, rire héraclitéen, qui exerce la séduction du néant pour mieux démentir sa victoire : Gherasim Luca opère l'union improbable de la tradition apocalyptique et de l'humour. L'effondrement humoristique du sens rejoint alors son relèvement : la catastrophe se fait révélation par le rire, et le désir, la silhouette d'un Thanastos énergumène.

07/1998

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Sociologie

Tchernychevski et l'âge du réalisme. Essai de sémiotique des comportements

Nikolaï Tchernychevski (1828-1889) est un personnage d'une importance colossale en Russie, encore bien trop méconnu en Occident. Journaliste et critique littéraire, peut-être le plus influent des années 1860, théoricien paradoxal des relations entre l'art et la réalité, activiste politique (aussi bien Dostoïevski qu'Alexandre II le jugeaient à tort responsable de la naissance du mouvement révolutionnaire étudiant), Tchernychevski est resté dans l'histoire comme l'auteur de Que faire ? (1863), roman qui prétendait fournir un "guide dans la vie", sur lequel les jeunes radicaux pourraient modeler leur vie quotidienne, leurs relations personnelles et leurs émotions. La volonté de créer des "hommes nouveaux" et des "femmes nouvelles" pour le nouvel âge révolutionnaire était née. Et Que faire? devint bel et bien un guide de vie, ses situations fictionnelles (mariage et adultère organisés de façon rationnelle, vie en communautés, création d'un corps révolutionnaire parfait) se trouvant mis en application dans la réalité, avec des résultats variables. On trouve de nombreuses allusions implicites et explicites à Que faire ? dans la littérature de l'époque, dans tous les romans de Dostoïevski postérieurs à 1863 et chez Tolstoï (l'intrigue maritale du roman se retrouve sous la forme d'un cauchemar d'Anna Karénine). Plus tard, Lénine déclara que Que faire ? était son livre préféré (et reprit le titre de Tchernychevski pour son propre ouvrage - exposant un programme concret d'action révolutionnaire qui eut bien plus de succès). En 1937, Tchernychevski apparaît sous la forme d'un personnage de fiction dans Le Don de Vladimir Nabokov, écrit dans l'émigration, tentative cette fois-ci pour exorciser ce démon par l'ironie et le ridicule, notamment grâce à une lecture féroce du journal intime de Tchernychevski, publié en Union soviétique dans un tout autre but : développer son culte en le présentant comme un saint Jean-Baptiste, prophète du bolchévisme. L'influence de Tchernychevski dépassa sans l'ombre d'un doute ce que ses actes méritaient, mais le fait est que, amis ou ennemis, contemporains ou auteurs postérieurs, tous y virent une figure d'une importance particulière : un symbole de son époque et un prototype du mouvement révolutionnaire russe naissant. Cette fusion de "la littérature et la réalité", l'un contaminant l'autre, fournit une matière idéale à une étude sémiotique de la culture qui puisse illustrer l'action réciproque de l'auteur en tant qu'homme et de son époque. Dans son ouvrage, Paperno étudie de très près la vie et l'oeuvre de Tchernychevski, et montre comment l'écrivain naît d'un contexte historique spécifique, de préoccupations sociales et psychologiques communes à son milieu et sa génération et des codes littéraires en vigueur. Parmi eux, le passage d'une vision religieuse du monde à l'athéisme et la foi en la science, de la prééminence de l'aristocratie et la noblesse sur la scène culturelle à l'émergence d'intellectuels roturiers au sein des étudiants et des lecteurs de revues, du Romantisme au Réalisme (et à une nouvelle perception des rapports entre l'art et la vie), etc. Au bout du compte, Paperno montre comment l'expérience personnelle de l'auteur se transforme en structure littéraire, donnant naissance à un roman à même d'influer sur la vie émotionnelle et le comportement de lecteurs placés dans la même situation culturelle.

06/2017

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Sciences historiques

Histoire de la cavalerie des origines à nos jours

La cavalerie est née sous l'Antiquité. Au Moyen Âge la chevalerie lui donnera une dimension héroïque et grandiose. Mais elle succombera sous le tir des arcs anglais de la guerre de Cent ans. Cependant, la cavalerie cuirassée n'est pas morte. À Marignan, ce sont les " Gens d'Armes ", emmenés par François Ie en personne, qui enfoncent les Suisses après que l'artillerie royale lui ait ouvert les rangs. Mais cette cavalerie lourde est menacée par la puissance de feu de l'arquebuse. C'est plus tard sous le règne de Louis XIII que Richelieu va tenter d'enrégimenter les cavaliers. La première tentative sera un échec du fait de leur indiscipline chronique, mais le Cardinal têtu réussira finalement. C'est cette cavalerie organisée qui sera victorieuse à Rocroi en 1643, sous les ordres du duc d'Enghien. Sous le règne de Louis XIV, la cavalerie porte un uniforme. C'est ainsi qu'elle se couvre de gloire dans toutes les guerres du grand roi, sous les ordres de Turenne et de Condé, même si la guerre de siège domine l'époque. À la fin du règne, elle sauve la France sous le commandement de Villars à la bataille de Denain. Au XVIIIe siècle, le roi Frédéric le Grand de Prusse transforme la guerre et la cavalerie, dans sa forme et son emploi. Représentant cinquante pour cent de son armée, la cavalerie de Frédéric domine l'Europe avant de succomber. Mais elle a transformé toutes les cavaleries européennes. La Révolution hérite de la cavalerie de la Monarchie, et c'est Bonaparte qui, devenu empereur, va l'amener à l'apogée de son histoire, en dominant notre continent. Amenant son utilisation à une perfection rarement atteinte, celle-ci disparaît en Russie, et ne sera pas remplacée. C'est alors que la cavalerie va subir le choc du feu qui va rendre désuète toute charge directe sur l'ennemi. C'est ainsi que la cavalerie de Napoléon III sera détruite en 1870. Ne tirant pas les conséquences de ce désastre, la cavalerie française commencera la guerre de 14-18 en casque et cuirasse. Massacrée par les mitrailleuses allemandes en 1914, les cavaliers s'enterrent alors dans les tranchées. C'est alors que le moteur entre en scène pour propulser les chars de combat. Après la victoire de 1918, la cavalerie va alors se motoriser. Cependant, en 1940 six divisions de cavalerie sont encore à cheval. En 1944, la nouvelle arme blindée n'a plus de chevaux. La cavalerie montée est morte. Mais la cavalerie blindée vient de libérer Paris, Strasbourg, Toulon, Marseille et Lyon. Sous les ordres de Leclerc et de Lattre, elle a vaincu l'ennemi. Engagée de nouveau en Indochine et en Algérie, l'arme blindée cavalerie est aujourd'hui présente sur tous les théâtres d'opérations de l'armée française. Fidèle à ses traditions, elle continue sur ses engins blindés à cultiver un esprit fait de panache et d'audace, au service de la France.

12/2010

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Critique littéraire

Discours sur l'universalité de la langue française. Précédé de La Langue humaine

Antoine Rivarol (1753-1801), dit le comte de Rivarol, est surtout connu aujourd'hui pour son opposition farouche à la Révolution qui le contraignit à l'exil, et pour son esprit léger, caustique, brillant qui fit de lui une gloire des salons européens. Burke l'appela le "Tacite de la révolution" et Voltaire affirma qu'il était "le Français par excellence". Ses bons mots ont fait florès dans tous les dictionnaires de citations. Mais il est une autre facette de son personnage qui mérite davantage attention : son goût passionné pour les langues (il traduisit L'Enfer du Dante) et singulièrement la langue française dont il forma le projet de rédiger un grand dictionnaire dont il publia à Hambourg, en 1797, le Discours préliminaire. Il avait écrit également un brillant essai, le Discours sur l'universalité de la langue française, couronné quatorze ans plus tôt, en 1783, par le prix de l'Académie royale des Sciences et Belles Lettres de Berlin et qui lui valu une immense notoriété. C'est ce texte qui est ici reproduit dans son édition de 1784 ou 97 ?. Rivarol, après avoir examiné les différentes langues européennes (l'allemand "trop guttural et encombré de dialectes", l'espagnol dont "la simplicité de la pensée se perd dans la longueur des mots", l'italien qui "se traîne avec trop de lenteur", l'anglais qui "se sent trop de l'isolement du peuple et de l'écrivain") conclut à une supériorité de la langue française de par sa proximité avec la structure même de la pensée rationnelle qui lui permet ainsi de prétendre à l'universalité : "Ce qui distingue notre langue des langues anciennes et modernes, c'est l'ordre et la construction de la phrase. Cet ordre doit toujours être direct et nécessairement clair. Le français nomme d'abord le sujet du discours, ensuite le verbe qui est l'action, et enfin l'objet de cette action : voilà la logique naturelle à tous les hommes ; - voilà ce qui constitue le sens commun. Or cet ordre, si favorable, si nécessaire au raisonnement, est presque toujours contraire aux sensations, qui nomment le premier l'objet qui frappe le premier. C'est pourquoi tous les peuples, abandonnant l'ordre direct, ont eu recours aux tournures plus ou moins hardies, selon que leurs sensations ou l'harmonie des mots l'exigeaient ; et l'inversion a prévalu sur la terre, parce que l'homme est plus impérieusement gouverné par les passions que par la raison...". Dans une certaine mesure, et pour le dire d'une façon moderne, Rivarol aurait posé les prémisses des avancées récentes de la réflexion sur le rapport entre le langage et la pensée, à savoir l'étroite dépendance entre structure de la langue et structure de la pensée, loin de la théorie instrumentaliste du langage qui prévalaient à l'époque où Rivarol écrivit son essai.

02/2013

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Procédure pénale

Droit de l'exécution des peines. 6e édition

Le droit de l'exécution des peines est probablement la discipline juridique la plus touchée par l'inflation législative. Les dix lois s'étant succédées depuis 2000 ainsi que leurs décrets d'application, ont porté la matière dans des directions opposées : après la juridictionnalisation de l'application des peines en 2000 et 2004, le législateur s'attache aujourd'hui à différencier le régime applicable aux récidivistes et aux longues peines, dans le sens d'un durcissement, et développe les mesures de sûreté. Dans le même temps et à l'inverse, il favorise le prononcé des aménagements de peine, réduit l'intensité, voire fait disparaître le suivi, et fait de la surveillance électronique statique la mesure d'élargissement phare. Pour y parvenir, et dans un esprit de marginalisation des juridictions classiques d'application des peines, il transfère aux SPIP une partie des missions du JAP. Le rythme forcené de ces réformes rend plus que jamais indispensable une présentation claire, et complète des normes juridiques, dont la complexité technique a considérablement cru ces dernières années. Cette sixième édition comporte ainsi de très importantes modifications. Elle intègre les réformes législatives et réglementaires, comme la loi pour la confiance dans l'institution judiciaire, tout comme une substantielle production jurisprudentielle. De nouveaux chapitres relatifs aux nouvelles mesures de sûreté ont été ajoutés, telles que le placement sous surveillance électronique ou à domicile. Surtout, le présent ouvrage comporte d'importants développements relatifs aux connaissances en criminologie appliquée à la probation qui se sont développées ces dernières années, ainsi qu'en droit comparé, afin de donner au lecteur le nécessaire recul pour comprendre les enjeux actuels de l'exécution des peines. Cet ouvrage est destiné aux avocats, aux Jap et autres magistrats chargés de l'exécution et de l'applicationdes peines (ministère public, tribunaux et chambres de l'application des peines) et leurs greffiers. Il s'adresse également aux directeurs et travailleurs sociaux des Spip, directeurs et éducateurs de la PJJ, directeurs d'établissements pénitentiaires, directeurs du secteur privé des établissements pénitentiaires, membres du greffe judiciaire pénitentiaire, chefs de service pénitentiaire, et surveillants, élèves de l'Enap, de l'Enm, des centres de formation des avocats, bénévoles du milieu associatif. L'auteure, Martine Herzog-Evans (http : //herzog-evans. com), est professeure à l'Université de Reims et enseigne au sein des masters de droit pénal de l'Université de Nantes, de l'Université de Reims et de droit de l'exécution des peines de Pau/Bordeaux IV/Enap. Elle est membre du comité de rédaction des revues Actualité juridique pénal et European Probation Journal. Elle est également membres de Community Sentences and Measures et de Sentencing and Penal decision-making, panels de la European Criminology Society. Elle contribue à l'élaboration d'un diplôme européen en Criminal Social Justice work entre plusieurs universités européennes et la faculté de droit de Reims. Elle effectue des formations auprès des praticiens.

11/2022

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Aviation

MALLETTE DUO PPL : LE MANUEL DU PILOTE D'AVION 19e ED + LECONS DE PILOTAGE 6e ED

La mallette DUO PPL contient : - Le Manuel avion, 19e édition, ouvrage de référence pour préparer la PPL et la LAPL. - Le livret de progression associé au Manuel Avion - Le livre Leçons de pilotage, 6e édition - une fiche récapitulative Météo - une fiche récapitulative Préparation et gestion du vol Le Manuel Avion : Progressif, pédagogique, garant d'un apprentissage réussi, ce manuel vous présente les données théoriques, techniques et pratiques indispensables, les connaissances et savoir-faire nécessaires. Cet ouvrage est utile et nécessaire à l'Elève-Pilote qui trouvera là un support de référence, fiable, éprouvé. Il est aussi un outil sécurisant pour l'Instructeur. Il constitue enfin un pertinent moyen de maintien de connaissances et compétences pour le Pilote déjà breveté. Les phases du Manuel : Phase 1 : Connaissance de l'avion Phase 2 : Pilotage de base Phase 3 : Aérodromes, radiotéléphonie et circulation aérienne Phase 4 : Navigation Phase 5 : Météorologie Phase 6 : Pilotage avancé Phase 7 : Préparation et gestion du vol Phase 8 : Le cadre institutionnel Phase 9 : Les licences européennes Phase 10 : Performance humaine et ses limites La richesse de l'index est une aide précieuse - pour l'apprenant, permettant un travail d'apprentissage et de révision efficace - et pour l'instructeur, facilitant ses recherches rapides. La table des figures est un deuxième outil de recherche précieux ; on y retrouve listées les 570 figures du manuel. Le livret de progression : Le livret de progression un document unique pour la LAPL et la PPL. Les Leçons de Théorie et d'Instruction en Vol sont logiquement associées dans une progression pédagogique souhaitable, mais que l'Instructeur adaptera en fonction des conditions rencontrées. Il s'agit là d'un guide et non d'une contrainte. Avant chaque future Leçon l'Instructeur pourra facilement demander à son Elève de la préparer : en effet les renvois vers les pages du Manuel Avion sont mentionnés. L'Instructeur cochera chaque item en fonction de l'avancement de son Elève : en cours d'acquisition, objectif atteint, objectif maîtrisé. Une Leçon dans sa globalité ne sera cochée que lorsque tous les items de cette Leçon auront été maîtrisés ; l'Instructeur reviendra sur les items non encore "maîtrisés" autant de fois que nécessaire. Quant aux cartouches récapitulant chaque vol ils sont communs aux deux Licences et se suivent facilitant ainsi un suivi chronologique. L'Instructeur (qu'il s'agisse de l'habituel ou un FI qui prend le relais) visualisera aisément le stade auquel est parvenu l'Elève. La dimension Compétences a été prise en compte en évitant de compliquer la tâche de l'Instructeur ; chaque item se voit d'ores et déjà affecté d'une ou plusieurs compétences ; case(s) que cochera l'Instructeur le moment venu. Les "Matrices Théorie & Instruction en Vol" permet à l'instructeur de suivre et de piloter la progression de l'élève tout au long de la formation. Il s'agit là d

09/2021

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Policiers

Les anges noirs

Brigitta Vesteindottir est l’une des meilleures informaticiennes freelance d’Islande. Si tout semble lui réussir dans sa vie professionnelle, côté coeur c’est plutôt la Bérézina : divorcée, elle vient tout juste de se faire larguer sans ménagement par son nouvel amant, directeur d’un grand groupe industriel. C’est d’ailleurs pour se venger que Brigitta pénètre dans l’appartement de ce dernier par une nuit d’été afin de pirater son système informatique. Quelques heures plus tard, elle disparaît mystérieusement avec son ordinateur portable et ne donne plus aucun signe de vie. Une enquête de grande envergure est immédiatement lancée par un trio de policiers chevronnés. Très vite l’affaire apparaît bien plus complexe que celle d’une simple disparition : les enquêteurs reçoivent en effet un dossier étonnamment fourni sur Brigitta et s’aperçoivent surtout, quand ils interrogent ses proches, qu’ils ont été précédés par un inconnu s’étant fait passer pour un membre de la police islandaise. Quand les policiers découvrent que Brigitta travaillait pour une société liée aux États-Unis et qu’elle était sur le point d’élaborer un programme de surveillance informatique visant à tracer les terroristes internationaux, ils comprennent qu’ils viennent de mettre les doigts dans un engrenage qui les dépassent. Pour le meilleur et pour le pire… Ce roman policier insidieux joue parfaitement avec les codes du genre, l’intrigue ne cessant d’évoluer tout au long du récit : d’un côté, la sphère intime, avec les histoires de coeur malheureuses de la disparue ; de l’autre, une dimension beaucoup plus politique, avec la problématique industrielle et informatique. Les anges noirs révèle les liens qui unissent l’Islande aux États-Unis depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale et l’avènement de la Guerre Froide. À présent que les communistes soviétiques ont mordu la poussière, l’Islande continue d’être le cheval de Troie de l’Amérique sur le chemin de l’Europe : c’est là que sont installés les radars et autres systèmes d’écoute qui composent le programme Échelon (vaste programme américain de surveillance des télécommunications européennes). Les anges noirs offre aussi un saisissant tableau de l’Islande avant la crise financière de 2008 : une société ultra capitaliste où tout le monde paraît obsédé par l’idée de faire un maximum de profit le plus vite possible, et où la morale semble avoir disparu. Josepsson jette un regard sans concession sur son pays qui, pour lui, marche sur la tête. La dureté des relations amoureuses dont a été victime Brigitta n’est au fond que le reflet intime de la férocité qui gangrène cette société où règnent cynisme et opportunisme. Avec Les anges noir, nous avons la sensation d’un pays qui a fini par se perdre, hypnotisé par ce « veau d’or » que sont les États-Unis. La banqueroute généralisée, et la gueule de bois qui s’ensuivit pour tous les Islandais, ne peuvent que donner raison à l’auteur…

09/2012

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Ouvrages généraux

Les infortunes contemporaines de la démocartie

Que s'est-il passé depuis le tournant du siècle pour que la démocratie se voit ainsi mise en cause, tant dans les pays occidentaux que dans les cultures extérieures qui auparavant s'en réclamaient comme d'un modèle ? L'histoire tumultueuse de ce régime a-t-elle finalement eu raison de lui ? Les sortilèges mêmes de la démocratie, qui nous l'ont faite appliquer sans retenue dans tous les domaines et dans tous les territoires, l'ont-ils finalement profanée ? Peut-on vouloir la démocratie sans la liberté, et de quelle liberté s'agit-il, selon quels critères peut-on dessiner ses limites ? Faut-il voir dans les démocraties illibérales d'aujourd'hui un nouveau courant anti-moderne ? La technocratie, la gouvernance, le consensus, sont-ils des renforcements de la démocratie ou bien ses nuisances ? Peut-on imaginer des démocraties sans visions du monde, sans croyances, fondées sur le seul pragmatisme, en un mot sans pluralisme ? Avant la saison des Lumières il n'y a pas de démocratie en Europe, elle apparaît en Amérique et en Europe occidentale à partir du tournant du XVIIIe et du XIXe siècles. Le choc culturel est tel qu'il suscite l'écriture de cet ouvrage extraordinaire : La démocratie en Amérique de Tocqueville (1835). Les démocraties européennes, encore censitaires, se développent au long du XIXe siècle. Au XXe siècle, l'époque d'entre-deux guerres connaît une forte critique des démocraties parlementaires, corrompues et déliquescentes. C'est pourquoi monte une justification de la dictature et l'Europe va connaître une floraison de régimes autocratiques pendant les années 30, pendant que le totalitarisme communiste s'étend jusqu'en 1989 sous l'appellation fallacieuse de " démocratie populaire ". En 1983, lorsque Jean-François Revel publie Comment les démocraties finissent, c'est pour prédire la fin des démocraties faibles et complexées devant le totalitarisme arrogant et sans scrupule. Ces autocraties, dictatures ou totalitarismes, laissent derrière elles tant de désastres que la période suivante affiche une grande ferveur démocratique. Les années 1950-2000 sont celles pendant lesquelles il n'est pas permis de nuancer la louange de ce régime. La chute du mur de Berlin en 1989 suscite même chez nombre d'Occidentaux la certitude, présentée par Francis Fukuyama, selon laquelle la démocratie représente le régime de la " fin de l'histoire " : sans suite ni alternative possible, littéralement irremplaçable. Ce qui s'avère être un aveuglement du même ordre que ceux, idéologiques, qu'il vient remplacer. Le tournant du siècle voit les choses changer. Reproches et accusations apparaissent contre la démocratie, plus graves que celles des années 30. Et pour des raisons profondes qui tiennent au déplacement du sacré, la démocratie perd son aura. Nous en sommes là. Chantal Delsol est professeur des universités en philosophie politique, membre de l'Institut de France (Académie des Sciences Morales et Politiques), auteur de livres de philosophie, d'essais, de romans traduits en une quinzaine de langues.

02/2024

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Indépendants

Vivre libre ou mourir. Punk et Rock Alternatif en France, 1981-1989

L'utopie du punk rock alternatif français des années 80 - préface de LORAN, Bérurier Noir L'histoire du rock alternatif français des années 80, reflet d'une société en mutation, racontée à travers les destins croisés de musiciens de l'époque. L'histoire de ces groupes français qui ne ressemblaient qu'à eux, Bérurier Noir, Mano Negra, Négresses vertes, les Garçons Bouchers... un récit choral, mettant en scène des personnages clefs de la scène : Loran et François du groupe Bérurier noir, Didier Wampas (The Wampas), François Hadji-Lazaro (Les Garçons bouchers, Pigalle), Helno (Négresses vertes) sont ainsi suivis à travers leurs aventures de l'époque, superposant le temps de l'action et celui du recul et des leçons tirées. On s'intéresse aux destins croisés des uns des autres, révélateur des espérances, des illusions et des désillusions, des réussites et des échecs du "mouvement". Mais cette histoire se distingue des autres aventures purement musicales parce que cette scène fut aussi le précis témoin de son époque, de ses turbulences politiques et sociétales. Née avec l'élection de François Mitterand et achevée la même année que la chute du mur de Berlin, elle épouse l'histoire sociale et politique de la décennie, de l'arrivée de la gauche au pouvoir au tournant de la rigueur, de la cohabitation et des années Pasqua à la création des Restos du coeur, de la marche des Beurs de 1983 au score du Front National aux Européennes de 84, des attentats d'Action Directe à la mort de Malik Oussekine. Chaque événement impacte l'histoire du rock alternatif et conditionne la suite de son odyssée. Dans ce contexte, l'explosion de la popularité du groupe Bérurier Noir, qui est un des ressorts puissants du mouvement, est de première importance : ses disques se vendent par dizaines de milliers, se passent sous le manteau dans les lycées et dans les collèges : c'est un véritable phénomène sociologique, emblématique des tensions et des aspirations de la jeunesse de l'époque. Un groupe politisé, qui politise son public. En guise d'adieu, le groupe, miné par les contradictions internes liées au succès, à la pression médiatique et policière, remplit trois soirs de suite l'Olympia, et une foule de jeunes scande et chante, le majeur levé : "La jeunesse emmerde le Front national". La dissolution des Bérus marque un échec ou la fin d'un rêve, au moment où la Mano Negra, autre groupe emblématique, signe son deuxième album sur Virgin, signant symboliquement l'arrêt de mort d'une certaine innocence, d'une certaine utopie, d'une certaine époque, et d'une certaine jeunesse. Après Underground (2021) Arnaud Le Gouëfflec et Nicolas Moog nous proposent une plongée dans l'histoire du punk rock alternatif français des années 80. A travers divers entretiens et les destins croisés de musiciens, ce livre documentaire se fait le témoin d'une des plus belles utopies de la fin du 20ème siècle en France. Un ouvrage musical et social puissant, préfacé par LORAN de Bérurier Noir.

03/2024

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Histoire des idées politiques

Un Nouveau Paradigme Politique

POURQUOI AVOIR ECRIT CE LIVRE ? Après un moment de sidération et après que les premières révélations ont vu le jour, j'ai constaté que beaucoup se posait la question : que faire ? Comment sortir de ce marasme, de ce piège ? J'ai fait le constat que cette crise est révélatrice d'une situation préexistante depuis déjà fort longtemps et que cette situation est juste arrivée à son paroxysme. Donc, la première partie de mon livre fait le constat et l'historique du : comment en est-on arrivé là ? PARTICRATIE D'une part, je retrace l'histoire de l'émergence des partis politiques en Belgique et comment ces organisations, au départ, représentatives d'intérêts socio-économiques se sont affranchies de ces groupes et sont devenues des entités autonomes, qui vivent dans une sorte d'écosystème fermé, opaque et qui intègrent des individus par cooptation. Ces organisations politiques ne poursuivent qu'un but, occuper le pouvoir, asseoir leurs cadres dans toutes les sphères de l'Etat et détourner l'argent public, l'argent du contribuable du domaine régalien de l'Etat vers le superflu. Depuis 50 ans, nous assistons à une expansion sans précédent de nouvelles structures, organismes soi-disant d'intérêt public, asbl qui transforment notre Etat en usine à gaz gaspilleuse et inefficace. L'existence de ses structures nouvelles permet cependant aux partis à placer leurs affidés et à occuper le terrain. Nombre de compétences ont glissées des ministères vers des structures externalisées peu ou pas du tout contrôlées. En outre, le mode de représentation politique est totalement faussé. Tous les cinq ans (six pour le communal et le provincial), nous sommes appelés à voter pour élire nos députés fédéraux et régionaux. Mais les listes qui se proposent à nos suffrages n'ont pas été sélectionnées par l'électeur et les personnes et leur ordre sur les listes ont été choisis par les instances des partis politiques. Les députés élus sont donc des personnes sous dépendances, ils ne décident de rien. Toutes les décisions se prennent au sein des organisations où le citoyen n'a aucun regard. Tout le pouvoir décisionnel est détenu par ces partis qui s'arrangent en coalition et qui se partagent les postes à pourvoir. Le jeu démocratique est totalement faussé. LA MONDIALISATION Parallèlement, depuis la fin de la seconde guerre mondiale, on constate l'importance croissante prise par des institutions internationales qui imposent aux états des réglementations et un modèle économique qui bénéficient unilatéralement aux multinationales et à la finance internationale. L'Union européenne représente en ce sens un premier avatar de gouvernance mondiale. L'orientation voulue par les élites et la finance internationale est de soustraire aux états-nations le pouvoir de décision et de les transférer à des instances internationales non élues évidemment, qui leurs servent de paravents. Puisque ces puissances privées privilégient l'anonymat. La crise du Covid est l'aboutissement de ce processus, démarré depuis plus de deux siècles. Aujourd'hui, cet événement a accéléré et dévoilé au monde entier ce panorama et a dévoilé que nos mandataires politiques sont des marionnettes de ce système. La démocratie actuelle est un leurre complet et le citoyen n'a aucun appui de levier dans ce mode de gouvernance. Pourtant, malgré les apparences, ce colosse est un géant aux pieds d'argile. Car, pour nous imposer leurs diktats, pour le moment, les élites globalisées doivent encore passer par la courroie de transmission représentée par les organisations politiques nationales. C'est comme une multinationale qui doit passer par des franchisés locaux pour nous vendre sa marchandise. Et c'est là le maillon faible du système. C'est à cet endroit là que les citoyens d'un pays peuvent encore, pour le moment, renverser la table et imposer un autre mode de fonctionnement de la société. UN AUTRE PARADIGME C'est l'objet de la deuxième partie de ce livre, qui propose, d'une part, un nouveau schéma du vivre ensemble et d'organisation juridique et institutionnelle, en particulier de notre pays et d'autre part, un mode de fonctionnement, une feuille de route pour y arriver. Le livre s'intitule bien "un nouveau paradigme politique" , c'est-à-dire que nous partons sur de nouvelles bases en renversant la pyramide institutionnelle, cette fois, du bas vers le haut. D'abord, on simplifie le système institutionnel belge en conservant trois niveaux de pouvoirs : le communal, le régional et le fédéral. Exit donc les communautés et les provinces. Pour être plus conforme à la réalité sociologique du pays, nous aurons quatre régions au lieu des trois actuelles : la région flamande, wallonne, bruxelloise et une nouvelle région germanique. Mais les grands changements fondamentaux proviennent des trois pouvoirs constitutifs : l'exécutif, le législatif et le judiciaire. Votation En ce qui concerne le pouvoir législatif, nous partons du principe qu'il sera désormais constitué par le peuple lui-même, qui vote les lois. Nous connaissons déjà le système de votations en Suisse. Mais ici, nous allons lui donner une ampleur jamais vue dans aucun pays du monde et utiliser les technologies modernes, notamment la "blockchain" pour en sécuriser le fonctionnement. Ce système de démocratie directe remplacera donc les assemblées législatives aussi bien sur le plan fédéral que régional. RIP Les lois, en général, émanent des projets établis par les pouvoirs exécutifs (fédéral et régional). Dans le nouveau dispositif démocratique, les citoyens pourront également présenter un " Référendum d'initiative populaire" (RIP). Celui-ci émane donc de la population. Pour être organisé, il doit au préalable recueillir 100. 000 signatures de citoyens en âge de voter pour une matière relevant du niveau fédéral ou 50. 000 signatures, pour une matière régionale. Un RIP peut également être élaboré dans le cadre communal (10. 000 signatures à disposer au préalable). Si le quorum est atteint, le pouvoir exécutif compétent est obligé de procéder à l'organisation du RIP. Les comités de secteurs Le pouvoir exécutif tant sur le plan fédéral que sur le plan régional sera également complètement transformé. Au lieu d'avoir un gouvernement central composé de ministres ayant chacun en charge des compétences particulières, comme actuellement, nous aurons des "comités de secteurs" , constitués de professionnels, qui maîtrisent parfaitement les matières et des représentants du peuple. Ces derniers seraient élus pour une durée maximale de 2 ans et choisis par tirage au sort au sein de la population de plus de dix-huit ans révolus. Tant pour le fédéral que pour le régional, il existe aussi des comités de coordination chargés notamment des procédures de votations et référendaires. Instances de de contrôle La Cour des comptes et le Comité Supérieur de Contrôle sont les instruments juridiques et administratifs visant à contrôler le bon usage des fonds publics. Ils devront en référer au nouveau Sénat, qui est l'instance qui contrôle les travaux des exécutifs fédéraux, c'est-à-dire, les comités de secteurs fédéraux et le comité de coordination fédéral. Le Sénat est composé de 30 sénateurs, tirés au sort parmi les citoyens belges âgés de dix-huit ans et plus. Le mandat est d'une durée de 2 ans. Chaque région disposera également d'un organe de contrôle analogue. Le Pouvoir judiciaire Aussi, puisque la démocratie émane du peuple, il faut partir du principe que seul ce dernier est en mesure de nommer ceux qui sont censés dire le droit et rendre la justice. A l'instar des mandataires politiques, les juges doivent être élus par les citoyens, au moyen du système mis en place pour le pouvoir exécutif, la votation publique. En pratique La dernière partie du livre est une sorte de "vade mecum" pratique que pourrait suivre les citoyens qui le souhaite pour organiser des groupes de réflexions locaux, qui déboucherait sur la création de comités régionaux élargis, qui ensuite passeraient à l'adoption de résolutions en vue de présenter un projet de constitution adopté par un grand nombre de nos compatriotes. Nous appellerons ces comités, des Comités de Salut Public (CSP). Je n'entrerai pas ici dans les modalités pratiques d'organisations de ces réunions. Le livre se termine par une mise en scénario des possibilités futures : 1)Un scénario "électoral" où les comités de salut public se transforment en liste électorales ; 2) Un scénario plus "insurrectionnel" où les citoyens émanant des forces de police et de l'armée jouent un rôle primordial à l'instar de la Révolution des Oillets, en 1974 au Portugal. 3) Enfin, un scénario que je ne souhaite pas, de guerre civile, au cas où le pouvoir actuel passe à une tyrannie violente et dure.

03/2023

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Sociologie

Pornotopie. Playboy et l'invention de la sexualité multimédia

"Je voulais faire de ce Manoir une maison de re^ve. Un lieu ou` travailler et aussi s'amuser, sans les proble`mes et les conflits du monde exte´rieur. A` l'inte´rieur, un ce´libataire avait le contro^le total de son environnement. Je pouvais passer de la nuit au jour, visionner un film a` minuit et commander a` di^ner a` midi, avoir des re´unions au milieu de la nuit et des rendez-vous galants l'apre`s-midi". Voici le projet de Hugh Hefner, le créateur du magazine Playboy et concepteur du fameux Manoir à l'intérieur duquel il va se confiner pendant plus de quarante ans. Publié pour la première fois en 1953, Playboy n'a pas seulement été le premier magazine érotique populaire des Etats-Unis ; il a également fini par incarner un style de vie entièrement nouveau, construisant une série d'espaces multimédia et utopiques : manoir, penthouse, clubs, hôtels... tous ultraconnectés, comme s'ils préfiguraient l'ère contemporaine de l'incessante émission-réception d'images et d'informations et d'une vie conçue pour se donner en spectacle. Simultanément, l'invention de la pilule contraceptive donne accès à une technique biochimique qui sépare la sexualité (hétéro) et la reproduction. Là où on a pour habitude de ne voir que des femmes déguisées en lapin pour le plaisir des hommes, Paul B. Preciado étudie les relations stratégiques entre l'espace, le genre et la sexualité dans des sites liés à la production et à la consommation de pornographie hétérosexuelle restés en marge des histoires traditionnelles de l'architecture : garçonnières, lits rotatifs multimédias ou objets de design. En combinant les perspectives historiques avec la théorie critique contemporaine, la philosophie de la technologie et un éventail de sources primaires transdisciplinaires - Sade, Ledoux, Restif de la Bretonne, Giedion ou Banham, traités sur la sexualité, manuels médicaux et pharmaceutiques, journaux d'architecture, magazines érotiques, manuels de construction et romans -, Pornotopia explore l'utilisation de l'architecture comme technique biopolitique pour gouverner les relations sexuelles et la production du genre pendant la guerre froide aux Etats-Unis, et raconte la genèse de la nouvelle masculinité hétérosexuelle des réseaux sociaux d'aujourd'hui. Paul B. Preciado est philosophe, commissaire d'exposition et auteur. Dans la lignée des travaux de Gilles Deleuze et Félix Guattari, Michel Foucault, mais aussi de Monique Wittig et Judith Butler, ses ouvrages sont des références internationales des études queer, trans et non-binaires. POSTFACE INEDITE DE L'AUTEUR

03/2022

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Beaux arts

Salons et expositions Bordeaux (1771-1950). Répertoire des exposants et liste de leurs oeuvres (3 volumes)

Notre initiative d'un corpus éditorial consacré aux Salons artistiques de province (corpus amorcé avec les Salons de Lyon par D. Dumas, les Salons du Havre et de Rouen par G. Bonnin et F. Lespinasse, les Salons de Dijon) conforte l'assurance d'une Histoire de l'Art qui ne se confond pas entièrement avec celle des Salons parisiens. En France, à partir de la Monarchie de Juillet jusqu'au Second Empire, des Sociétés des Amis des Arts sont fondées en maintes villes, qui organisent des expositions" des Beaux-Arts". Ce corpus consacré aux Salons artistiques de province s'enrichit aujourd'hui d'une nouveauté d'importance : les Salons de Bordeaux, le répertoire exhaustif des oeuvres présentées à Bordeaux de 1771 à 1950, telles qu'elles sont décrites dans les sources imprimées disponibles, généralement des catalogues ou livrets. Voici la liste de ces sources : - Les Salons de l'Académie de peinture, sculpture et architecture de Bordeaux (1771-1787) - La Société Philomatique ou Exposition des Produits des Arts et de l'Industrie (1827 à 1895) - La Société des Amis des arts de Bordeaux (1830 à 1939) - L'Atelier (1906 à 1950) - Les Artistes Indépendants Bordelais (1928 à 1950-1951) - Le Salon d'Automne de Bordeaux (1899, 1946 et 1947) - Le Salon de Mai de Bordeaux (1947) - Le Studio (1931 et 1934) - L'OEuvre – Société des Artistes de Guyenne (1935 à 1937) - Le Salon des Arts Décoratifs de Bordeaux et du Sud-Ouest (1922 à 1924) - L'Exposition Internationale des Beaux-Arts de la Ville de Bordeaux (1927) - Le Salon des Société Artistiques de Bordeaux (1941 à 1944) Cet ensemble d'environ 165 catalogues, tous décrits soigneusement, d'un accès souvent compliqué, a été organisé simplement sous forme de répertoire alphabétique des artistes avec la liste chronologique des oeuvres présentées. Nous arrivons ainsi à une somme de 7000 artistes qui ont présenté tout au long du XIXe siècle et dans la première moitié du XXe, des oeuvres diverses, peintures, aquarelles, sculptures, gravures, projets architecturaux, art appliqué, etc. Ce nouveau répertoire manifeste, une fois de plus, la vitalité des capitales provinciales en France. Pour Bordeaux, ce dynamisme se fonde sur une activité commerciale et industrielle qui a apporté des liquidités aux élites leur permettant d'encourager les beaux-arts, les arts décoratifs ou industriels ou appliqués. Cet élan se concrétise par l'émergence du musée des beaux-arts de Bordeaux et de la constitution de ses collections, qui sont redevables de manière notoire aux manifestations qui nous intéressent. Les oeuvres présentées ne se cantonnent pas à la production nationale. On trouvera de nombreux artistes étrangers présents à Bordeaux (Grande-Bretagne, Belgique, Pays-Bas, Espagne principalement). La" façade atlantique" est ouverte au vent du large, aux influences européennes. La variété et la qualité des oeuvres décrites dans les livrets des expositions de groupes qui se sont tenues à Bordeaux dès le XVIIIe siècle et jusqu'au XXe en sont la preuve. Bordeaux peut être fière de son musée, de son goût pour les arts qui se perpétue encore aujourd'hui par les manifestations culturelles qui font le prestige de la capitale des Girondins.

05/2017

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Poésie

Sonnets de la prison de Moabit. Edition bilingue français-allemand

Les "Sonnets de la prison de Moabit" d'Albrecht Haushofer occupent une place particulière dans la poésie allemande du XXe siècle : leur auteur, avant de les écrire, n'avait composé que très peu de poèmes et était surtout connu pour ses travaux savants. Professeur d'université, géographe réputé, spécialiste de géopolitique, Haushofer, sans jamais adhérer au Parti nazi, avait occupé des fonctions officielles, notamment dans une organisation diplomatique du IIIe Reich (le "bureau Ribbentrop"). Impliqué, comme bon nombre de ses amis, dans le putsch manqué du 20 juillet 1944 (tentative d'assassinat de Hitler), il fut arrêté les jours suivants et incarcéré à la prison de Moabit, prison berlinoise tenue par les SS. C'est là qu'il composa, sur seulement cinq feuilles A4 recto-verso couvertes d'une écriture minuscule, les 80 sonnets qu'on retrouva sur lui après sa mort : il fut abattu avec quatorze autres prisonniers par un détachement de SS dans la nuit du 22 au 23 avril 1945, à la veille de l'entrée des armées soviétiques dans Berlin. Publiés en 1946, ces "Sonnets" eurent aussitôt de nombreux lecteurs et furent traduits dans de nombreuses langues européennes. Une première traduction française (la seule à ce jour) parut chez Seghers en 1954 (sous le titre "Sonnets de Moabit"). Elle n'a jamais été réimprimée. Il était grand temps de donner de ce chef d'oeuvre de la poésie allemande une nouvelle traduction : non seulement parce que le temps a passé, mais aussi parce que le texte publié en 1946 était tronqué par rapport à l'original, comportait des erreurs de lecture et ne présentait les sonnets dans l'ordre voulu par l'auteur. Ce n'est qu'en 1976 qu'une édition fiable et complète a vu le jour, en édition de poche, vendue à plusieurs dizaines de milliers d'exemplaires en Allemagne. Comparables en un sens aux "33 sonnets composés au secret" de Jean Cassou (1944), les "Sonnets de la prison de Moabit" ne sont pas l'oeuvre d'un "résistant" de la première heure, mais d'un homme qui fait son examen de conscience et s'accuse de ne pas s'être opposé plus tôt à un régime qu'il désapprouvait depuis longtemps, mais en silence. Haushofer n'est pas tendre pour lui-même, ni pour son père, Karl Haushofer, plus gravement compromis que lui, qui souffla à l'oreille d'Hitler la notion d' "espace vital" (avant de rompre, il est vrai, avec les nazis). Ces sonnets sont le testament d'un homme qui sait qu'il ne sortira pas vivant de sa prison : il y passe en revue les épisodes de sa vie, se remémore ses voyages, ses amitiés, ses amours, cherche à prendre exemple sur d'illustres persécutés (de Boèce à Thomas More), et se fraye un chemin vers la sérénité en s'inspirant surtout des sagesses orientales. Ce sont les circonstances qui ont fait éclore en Haushofer le poète. Ces 80 sonnets suffisent pour lui assurer une place dans la poésie du XXe siècle.

01/2019

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Histoire antique

Les élites de cour de Constantinople (450-610). Une approche prosopographique des relations de pouvoir

L'histoire politique de l'Empire romain d'Orient au temps de Justinien (527-565) est d'ordinaire illustrée par quelques souverains à la postérité contrastée. Cet ouvrage étudie l'envers du décor de la cour de Constantinople entre 450 et 610, à l'époque où elle acquiert son existence propre. Il conduit donc du règne de Marcien, le promoteur du concile de Chalcédoine (451), à celui de Phocas, que l'on peut tenir pour le dernier empereur antique. Il repose sur une prosopographie des élites de cour connues pour leurs relations politiques avec les empereurs, mais aussi pour leurs liens familiaux, leurs origines géographiques et leurs orientation religieuses. Au sujet des individus répondant à ces critères, il discute le détail des carrières en particulier vis-à-vis des notices de la Prosopography of the Later Roman Empire. La question est abordée de manière chronologique. selon la succession des règnes impériaux : qui ont chacun valeur de test pour la configuration des élites de cour. L'origine géographique et l'orientation religieuse de ces élites font apparaître des groupes dominants et présentant une cohérence liée à ces deux facteurs. Les Balkans, l'Asie Mineure, le Proche-Orient et l'Egypte, tout comme le chalcédonisme et le monophysisme, occupent ainsi la scène des luttes de pouvoir dont la cour est le théâtre. Les solidarités familiales jouent un rôle longtemps sous-estimé et assez comparable à leur place dans l'histoire postérieure de Byzance. Des révoltes récurrentes invoquèrent souvent la légitimité des empereurs précédents. Mais ces contestation furent plus dangereuses dans les provinces que dans la capitale, et finalement peu menaçantes pour le pouvoir impérial, sauf au début du VIIe siècle. Si le personnel politique se renouvela fréquemment, il exista ainsi une permanence de certaines factions à la cour de Constantinople, qui acquit dans cette période une forme de stabilité. Le visage de la cour protobyzantine contribue ainsi à la connaissance de la culture politique européenne. The political history of the Eastern Roman Empire under Justinien is unusually embodied by few rulers with ambivalent legacies. This work studies the Constantinople court behind the scenes from 450 to 610, at the moment when it grew into a distinct entity. It thus spans the period from the rule of Marcian, the promoter of the Council of Chalcedon (451) to that of Phocas, who may be considered as the last Emperor of Antiquity. The approach relies on a prosopography of court elites known for their political ties with emperors. but also for their family bonds, geographical origins, and religious options. For each of the individuals meeting these criteria, career details are discussed, particularly in contrast with the entries of Prosopography of the later Roman Empire. The perspective is chronological and follows the successive imperial rule, each of them being studied with regard to the specific configuration of its court The geographical origin and religion orientation of these court Bites are main parameters delineating the dominant groups and cementing their cohesiveness The Balkans, Asia Minor, the Near East and Egypt were just as central as Chalcedonism and Monophysitism to the power struggles playing out in the court The importance of kinship loyalty during that period has long been underestimated, although it is similar to what is observed in the later history of the Byzantine Empire. Recurrent rebellion often harked back to the legitimacy of former Emperors. But these protests were more radical in the provinces than in the capital and ultimately proved to be only a tumor threat to the imperial power, except in the early seventh century. While the political personnel experienced a high turnover, certain faction still enjoyed relative longevity at the court of Constantinople, which gained a form of stability over the period. Studying the variation of the Byzantine court thus enriches our knowledge of European political culture.

04/2022

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Faits de société

J'ai survécu à la drogue, à la pédophilie et à la traite sexuelle

Un témoignage très dur. La jeune autrice et militante Maïté Lonne se raconte sans tabous dans un livre autobiographique poignant. Entre violences intrafamiliales et abus sexuels, elle vivra en vase clos et la peur constante d'être tuée. Dès le début de l'adolescence, c'est la dégringolade, entre autodestruction, les hôpitaux psychiatriques, les foyers de l'aide à l'enfance, la drogue, la rue et les viols multiples. Tout se passe surtout en Belgique. Elle est victime de traite des êtres humains dans un réseaux d'exploitation sexuelle. Pendant cette période, elle est vendue sur des sites lambdas tels que "2eme main" entre deux tables. Elle est livrée dans des hôtels de passe, chez des particuliers violents et dans des clubs. Violée, menacée d'une arme à feu, frappée, abandonnée la nuit sur le bord d'une route, elle survira. La jeune femme raconte les difficultés liées aux trauma complexes, à ses multiples rapports au monde et à son corps, qui fut un objet de déviants. Laissons parler l'auteure : (...) d'un père norvégien alcoolique, drogué, schizophrène et artiste peintre, et d'une mère belge, danseuse, d'origine ashkénaze, très mal dans sa peau. Vers l'âge de 8 mois, elle décide de prendre la fuite pour me protéger, en revenant dans son pays natale, la Belgique. Mes grands parents, plutôt bourgeois, autoritaires, et violents, prennent la place du père qui brille par son absence. Mon grand-père est ancien procureur, un homme ancien militaire obsédé par l'éducation et la réussite dans son sens le plus stricte. Ma grand mère est une survivante de la seconde guerre mondiale et m'apprendra à vivre dans la peur constante d'être tuée. Je vie en vase clos, enfermée par deux vieilles personnes abusives et maltraitantes. Très jeune, je suis abusée sexuellement par mon cousin, et ensuite par mon beau-père. Ma mère devient violente physiquement. Mes grands parents sont violents psychologiquement. Vers l'âge de 13 ans je suis placée en unité psychiatrique suite à une tentative de suicide et des multiples automutilations. Je suis assommée à coup de calmants sans être soignée. Par la suite je suis placée dans un foyer de l'aide à l'enfance et j'y découvre la rue, les drogues, la délinquance et la violence extrême (...). Points forts : Maltraitance - Viols- traite des êtres humains - drogue - femme-objet - violences - Reconstruction Ce qu'en dit l'Editeur : Maïté Lonne parle à coeur ouvert, avec douleur, force et un désir extraordinaire de reconstruction. Elle s'investit dans la pédagogie avec courage et conviction. Son ouvrage donne la nausée au sujet de certains humains inhumains. Ils existent ces prédateurs, ces consommateurs, ces destructeurs. Elle l'a vécu. Elle aurait pu en mourir. Elle apprend à se réapproprier et à se régénérer. Son témoignage puisse-t-il servir à tous ces femmes victimes de monstres ! L'auteure : née à Oslo en 1992, Maïté Lonne est éducatrice. Elle navigue entre France et Belgique en vivant entre Bruxelles et Paris. Elle s'est mise à la disposition de la Commission européenne, de Child Focus en Belgique, et plaide devant différents Parlements sur des thématiques telles que l'exploitation sexuelle et les violences sexuelles. Elle a aussi représenté l'Europe lors de l'ouverture de la campagne mondiale WithHer initiée par les Nations-Unies et Spotlight Initiative (USA). Elle a publié un ouvrage sur les Maltraitances faites aux humains et aux animaux. Elle signe ici une autobiographie, le récit horrible de ce qu'elle a subi, viols, drogue, traite d'être humains, clubs de sexe, etc, et surtout l'apprentissage de sa reconstruction. L'auteure se rend également dans les écoles pour sensibiliser les adolescents aux côtés de la Fondation Samilia. L'auteure contribue à la réalisation d'un documentaire TV qui sortira en 2024 presqu'en même temps que son livre témoin. A lire et à voir donc.

03/2024

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Thrillers

Clowns

Clowns est un thriller, un récit de politique fiction qui s'intéresse à l'avenir de l'Europe et à la fascination/répulsion que le non conformisme suscite dans une société très réglée. C'est aussi un regard acéré sur un monde face au chaos et aux dérives des nationalismes. En Europe, une officine cible des personnalités excentriques qui nuiraient à la réalisation voulue d'une société parfaite et idéale. Ces " clowns " sont éliminés discrètement. Mais, ces personnalités, par définition imprévisibles, peuvent donner du fil à retordre à ceux qui les suppriment. L'agent Paul Krafft, fasciné par les " personnages " qu'il cible, commence à montrer des signes de confusion. D'autant plus qu'il a eu le tort de s'abandonner à l'illusion du bonheur et de tomber amoureux. Quand on devient l'un des maîtres du destin, a-t-on encore le droit de vouloir être heureux ? et de céder à la magie d'une femme ? Les bureaucrates avec qui Paul Krafft oeuvre sont, pour la plupart, des gens biens, doués d'un fort sens éthique et dévoués à la chose publique. Ils forment une petite communauté sympathique, que l'on voit s'adonner aux banales actions de la vie de bureau. Car c'est ce qui caractérise les bureaucraties modernes où l'homme n'étant qu'un rouage, plus personne n'est personnellement responsable de rien. Il n'y a plus de coupable. Et on trouve toujours le moyen de se construire les justifications qui vont assurer notre confort moral. Les conséquences de nos actions sont loin, on les voit à peine. Chacun, tout en déplorant tel ou tel aspect " du système ", y contribue de toute sa force et de toute sa peur. Voici comment l'agent Paul Krafft voit sa mission : " Allons, avouez, si de temps à autre une personne disparaissait, vous vous en ficheriez bien, n'est-ce pas ? J'entends des gens que vous ne connaissez pas, avec qui vous n'avez aucun lien. Vous n'êtes pas d'accord ? Allons donc ! Eh bien moi je vous traite d'hypocrite ! D'autant plus si cette disparition, effectuée avec un sens du tact merveilleux et tout en douceur s'accomplissait pour le bien de tous. Arrêtons de tergiverser, notre vieux continent européen porte un rêve, celui d'une société juste et harmonieuse, un rêve transparent qu'il ne tient qu'à nous de rendre réel. Quant à tous ces clowns qui produisent de la frustration, de l'anxiété, qui sont source de souffrance morale et d'infinies désillusions, tant pis pour eux. Imaginez un instant que dans les années 1920, des gens compétents aient fait ce qu'il fallait pour empêcher Hitler, ce clown sinistre, de nuire, et avec lui les quelques philosophes, artistes et idéologues qui l'ont inspiré et qui ont démultiplié la force de sa parole ! si ces quelques personnes avaient été mises à l'écart, que de désastres, que de malheurs aurions-nous pu éviter à notre cher continent européen ! L'exemple de l'Union soviétique est parlant. Des millions de personnes y ont été envoyées au goulag. Regardez comment ça se passe, les gens disparaissent en masse et la société continue de fonctionner. Au fond, la plupart des gens s'en accommodent très bien. Ensuite, la mémoire des disparus disparaît, et le tour est joué ! alors moi ce dont je vous parle, ce n'est que de quelques personnes, une petite poignée d'enquiquineurs, d'empêcheurs de tourner en rond qui sèment la discorde et le chaos et empêchent les gens d'être heureux. Allez, vous me les donnez ces quelques personnes, j'en suis sûr. Non, peut-être que vous n'allez pas le proclamer haut et fort, votre assentiment, vous n'allez pas le crier sur les toits, et d'ailleurs, je ne vous le demande pas, mais dans le fond de votre coeur, je sais que, très volontiers, vous me l'accordez. "

06/2023

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Histoire internationale

Géopolitique de la Côte d'Ivoire

Le 21 mai 2011 à Yamoussoukro, se tenait la cérémonie d'investiture du Président ivoirien Alassane Ouattara en présence d'une vingtaine de chefs d'Etat dont Nicolas Sarkozy et de Ban Ki-moon, Sécrétaire général de l'ONU. Cet événement qui symbolise le retour à la démocratie en Côte d'Ivoire intervenait après dix années d'une crise qui, d'économique était devenue politique puis globale, car au cours de ces deux dernières années on avait pu constater l'effondrement du pays dans pratiquement tous les domaines. Le refus pendant cinq ans de Laurent Gbagbo d'organiser des élections présidentielles puis sa volonté par la suite d'en ignorer le verdict parce qu'il lui était défavorable, laissera sans aucun doute pour longtemps des traces profondes et traumatiques dans ce pays qui avait été le phare de l'Afrique noire francophone au lendemain des indépendances. Faut-il rappeler que cette ancienne vitrine de la coopération française est encore aujourd'hui confrontée aux problèmes du sous-développement, en même temps qu'elle doit relancer une économie tombée au plus bas et rasséréner des esprits encore choqués par des souvenirs de pillages, d'exactions, de déplacements de population. Certes, le milieu naturel ivoirien est riche. Mais il est aussi en danger. Certes, la population du pays est jeune, dynamique, de plus en plus citadinisée. Mais elle est demeurée un puzzle d'ethnies encore trop souvent rivales, comme l'a montré la guerre civile qui a ravagé ces dernières années les espaces et les esprits. Pourtant, le père de la nation, Félix Houphouët-Boigny avait su en faire un pays en plein essor en choisissant dès le début de l'indépendance l'économie de marché alors que plusieurs de ses voisins s'enlisaient dans les déboires d'un socialisme à l'africaine, disparu aujourd'hui. De fait, ce sont des turbulences économiques qui ont provoqué peu après la mort du " vieux " la fin du " miracle ivoirien ", et ce, parce que le pays était sans doute trop dépendant des cultures de rente. Cette dégradation a eu pour conséquence une lente désagrégation des structures politiques de la nation qui s'est parallèlement traduite par l'émergence d'une forte hostilité vis-à-vis des étrangers. Le pays allait même jusqu'à connaître la guerre civile, la partition et le jeu de pouvoirs factieux. Cela est d'autant plus étonnant que la tolérance politique et religieuse avait auparavant facilité l'installation sur le sol ivoirien de plus de 4 millions d'immigrés. On a pu croire un moment, à partir des années 2007, que la reprise économique était au rendez-vous dans un contexte national et international apaisé. Il n'en fut rien et ces deux dernières années furent sans doute les plus mauvaises que les Ivoiriens aient connues depuis l'indépendance, malgré les efforts développés par le gouvernement d'Union nationale dans l'attente d'élections présidentielles sans cesse repoussées. Enfin organisées, elles donnèrent la victoire à Alassane Ouattara. Les troubles qui s'en suivirent menèrent la crise à son paroxysme. L'arrestation de l'ancien chef d'Etat donna un coup d'arrêt à cette descente aux enfers. Exsangue aujourd'hui, la Côte d'Ivoire devra se relever, panser ses plaies tant physiques que morales et retrouver son unité. C'est la tâche ardue qui attend le Président Alassane Ouattara. Il reste aussi à espérer que revenue à la démocratie, la Côte d'Ivoire puisse, aidée par des pays amis et les institutions internationales, reprendre en matière économique sa place de " poumon vital " de l'Afrique de l'Ouest. Le pari est difficile. Il peut être tenu.

06/2011

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Littérature étrangère

Les belles de Halimunda

C'est à Halimunda, petite ville imaginaire sur la côte sud de Java, que se situe l'époustouflant premier roman d'Eka Kurniawan, dont la critique internationale a beaucoup souligné la filiation avec l'oeuvre de Gabriel García Márquez : plongée épique dans l'histoire de l'Indonésie pendant la deuxième moitié du xxe siècle, il retrace le turbulent destin de trois générations de femmes et s'inscrit clairement dans une tradition de réalisme magique. Le livre s'ouvre au moment où Dewi Ayu, qui fut la prostituée la plus célèbre de la ville, sort de sa tombe vingt et un ans après sa mort. Couverte de son linceul, sa très longue chevelure flottant au vent, elle traverse Halimunda pour rentrer chez elle. Dans la véranda est assise une jeune fille d'une insoutenable laideur. Dewi Ayu comprend que son voeu a été exaucé : épouvantée par la succession de catastrophes que la beauté de ses trois filles aînées, aussi séduisantes que leur mère, avait valu à la ville, elle avait tout mis en oeuvre pour que la quatrième fût laide. La repoussante jeune femme – la description de son physique laisse à l'écrivain l'occasion de déployer toute sa veine comique – reçoit pourtant la nuit les visites d'un mystérieux prince charmant. L'identité du visiteur nocturne – et la raison pour laquelle Dewi Ayu est revenue parmi les vivants – finira par être révélée, à la faveur d'un long retour sur le passé rocambolesque de la courtisane et de sa descendance : indonésienne par sa mère et hollandaise par son père – fils d'un riche propriétaire terrien –, Dewi Ayu se retrouve orpheline à seize ans, au début de la deuxième guerre mondiale. Seule maîtresse du domaine, elle se met en tête d'épouser un homme naguère lié par un serment d'amour éternel à sa défunte grand-mère. Plutôt que de consommer cette union, l'époux malgré lui préfère se jeter du haut d'une colline – il ne disparaît pas pour autant du roman. En 1942, à l'arrivée des Japonais, les civils européens sont parqués dans un camp, et les plus belles adolescentes expédiées dans un bordel pour gradés. Au moment où les Anglais libèrent la ville, Dewi Ayu – qui a enduré ces épreuves la tête haute – choisit de ne pas quitter l'Indonésie. Elle restera prostituée, ne se remariera jamais, et ses quatre filles naîtront de pères différents. Les années passent. A trente-cinq ans, elle accorde l'exclusivité de ses faveurs au nouveau chef de la pègre locale, l'invincible Mamane Gendeng. L'harmonie de la ville est perturbée quand un ancien partisan réclame à la fois Dewi Ayu et la main de sa fille aînée... En matière d'intrigues et de rebondissements, la destinée de ses séductrices de filles n'aura rien à envier à celle de leur mère. L'aînée deviendra la femme du partisan, nommé haut responsable militaire après l'indépendance ; la cadette se mariera avec l'amoureux transi de sa soeur, chef charismatique du parti communiste local – qui survivra aux massacres de communistes de 1965 ; sa mère arrangera le mariage de la troisième, douze ans à peine, avec Mamane Gendeng le truand. Le destin ne cessera de s'acharner sur les trois filles à la beauté maudite, et sur leurs enfants. Au point que Dewi Ayu devra se lever de sa tombe pour y mettre bon ordre : Kurniawan n'hésite pas à convoquer les morts et les fantômes pour régler le compte des vivants. Et si, dans ce roman kaléidoscopique, il fait défiler comme au théâtre d'ombres ses multiples personnages en proie à leur destin individuel et collectif, jamais il ne lâche le fil de son intrigue. Dans une narration nourrie d'oralité et de légendes, il conduit au pas de charge son lecteur fasciné vers un dénouement digne des plus grandes tragédies.

09/2017

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Musique, danse

Jean-Pierre Danel. Guitar Hero made in France

Guitariste virtuose et producteur musical indépendant numéro 1 en France : le parcours phénomène d'un musicien autodidacte. Jean-Pierre Danel est un cas d'école. Unique guitariste instrumental à connaître un véritable succès commercial en France (son album Guitar Connection fut numéro 1 du Top 50, et il a reçu de nombreux autres disques d'or et platine, réalisant les plus grosses ventes d'enregistrements à la guitare de l'histoire du disque dans l'Hexagone), il est entré au hit-parade de plus d'une soixantaine de pays, dont les Etats-Unis. Respecté pour le son, le phrasé complexe et la très grande finesse d'expression de son jeu, il est adoubé par ses pairs, et ceux-ci le rejoignent régulièrement en duos : Brian May de Queen, Hank Marvin des Shadows, Andy Powell de Wishbone Ash, les grands guitaristes Albert Lee et Scott Henderson, ou, en France, Louis Bertignac, Laurent Voulzy, Paul Personne, Michael Jones, Axel Bauer, Jean-Félix Lalanne et beaucoup d'autres… Danel Jr (il est le fils du créateur des Neiges du Kilimandjaro, Pascal Danel) est aussi devenu, via sa société créée à l'âge de 20 ans, le plus jeune, puis le premier producteur indépendant en France, récompensé en 2014 par un multidisque de diamant pour 23,3 millions de disques vendus. Il a reçu à ce jour, pour ses multiples productions, 198 disques d'or et platine. Dans le véritable travail d'investigation qu'est cette biographie, vous découvrirez les sources et les méthodes d'une réussite exemplaire et le profil hors norme de ce musicien issu d'une famille aux multiples personnalités, et au profil atypique : ami intime de François Mitterrand, végétarien depuis l'âge de 5 ans, collectionneur de voitures rares, self-made-man - sa vie personnelle est, elle aussi, spectaculaire. Fin lettré, il a publié une vingtaine de livres, dont deux biographies consacrées à Sacha Guitry, qui font partie du programme de l'étude du français aux universités américaines de Harvard, Stanford, Berkeley et Princeton. Il a également consacré un ouvrage à la Fender Stratocaster, dont il possède l'une des plus belles collections européennes, où figure Miss Daisy, une guitare exceptionnelle de 1954, parmi les plus rares du monde. Découvrez comment cet autodidacte, surdoué de la guitare, travailleur acharné aux capacités peu communes, a bâti un parcours remarquable et l'un des plus beaux CV de l'industrie musicale. Une minutieuse enquête, incluant les témoignages de plusieurs dizaines de personnalités du monde de la musique (Laurent Voulzy, Brian May (Queen), Michael Jones, Hank Marvin (The Shadows), et de nombreux autres artistes, journalistes, présidents de majors du disque, le président de la Sacem, les directions de médias nationaux, chaînes de télévision, de radio, attachés de presse, etc.), des dizaines d'extraits d'articles de presse français et internationaux, des extraits d'interviews radio et télévisées. Retrouvez également une analyse de son jeu de guitariste, appuyée des témoignages des plus grands spécialistes de la guitare en France, un survol de ses nombreux duos, sa discographie et un important cahier-photos. Un Guitar Hero made in France, résumé par le journaliste, grand spécialiste hexagonal de la guitare, Christian Séguret : "Il est l'un des rares musiciens de chez nous (avec Django Reinhardt et Marcel Dadi) à avoir fait de l'instrument un objet de rêve grand public, et à susciter des centaines de vocations".

02/2020

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Sciences historiques

Adoption et fosterage

L' adoption est pratiquée, sous des formes et avec des finalités différentes, dans de très nombreuses sociétés, sinon dans toutes : elle constitue un révélateur des valeurs et des pratiques sociales liées à la parenté, à son idéologie et à son image. Elle n'a pris de l'importance dans les pays occidentaux, notamment en France, que depuis peu. Elle apparaît aujourd'hui comme une réponse à la stérilité du couple. C'est le couple qui adopte, et qui adopte une fille aussi bien qu'un garçon, pour la joie d'élever un enfant et de lui donner une famille. Pourtant, lorsqu'elle a été réintroduite dans le droit, après une éclipse de douze siècles, l'adoption fut conçue plutôt comme une solution humanitaire à l'abandon massif des enfants, caractéristique de cette période. Dès lors elle ne pouvait être pratiquée que dans l'intérêt de l'enfant, dont tous les liens avec sa famille d'origine se trouvaient coupés par l'abandon. D'autres sociétés ont pratiqué l'adoption dans des intentions très différentes : ainsi la Rome ancienne, où l'adoption est liée à une politique, de la succession et de la transmission ; des hommes y adoptent d'autres hommes, enfants et adultes. En Occident, l'Eglise a été à l'origine de la disparition de cette "parenté sociale" en reconnaissant seulement deux types de parenté: la parenté biologique et la parenté spirituelle liée au baptême. Diverses formes de parentés de substitution, notamment spirituelles, ont alors été instituées, dont certaines continuent à mettre en oeuvre le vocabulaire de l'adoption. L'Empire byzantin a connu, pour sa part, une évolution différente de celle de l'Occident médiéval. Pour désigner au contraire la "mise en nourriture" ou "en éducation" le terme fosterage, largement admis dans les disciplines historiques et anthropologiques depuis les travaux de Marcel Mauss et de Louis Gernet, a été retenu comme un vocable technique susceptible de rendre compte de pratiques qui transcendent les cultures. Dans la Rome ancienne, où l'adoption n'a pas une finalité spécifique d'éducation, un enfant nourricier, garçon ou fille, est un enfant, souvent de statut inférieur, que l'on n'adopte pas, mais auquel on fait donner une éducation dans sa maison ; ce type de relation est accessible à la femme comme à l'homme. Dans l'Europe occidentale, l'époque médiévale et moderne a connu dans certains pays la circulation des enfants à l'intérieur de leur propre famille. Mais elle a connu aussi — c'est une des caractéristiques du modèle anglais — des formes de circulation d'enfants et de jeunes gens (filles et garçons) dans des familles distinctes de la leur, où ils n'avaient pas vocation à s'intégrer. La thématique met l'accent sur toutes les formes de parentés électives ou de délégations de rôles qui, dans nos sociétés, relèvent de la responsabilité parentale. Sur ces deux thèmes vingt auteurs ont essayé de faire le point sur l'évolution de la société occidentale de l'Antiquité à nos jours ; une comparaison a été tentée avec des sociétés extra-européennes dans lesquelles l'adoption ou la circulation des enfants ont joué dans le passé, et parfois jouent encore, un rôle important : la Chine et le Japon anciens, l'Afrique de l'Ouest et la Malaisie actuelles.

01/1999