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Code pénal

Le déni du viol. Essai de justice narrative

Un essai qui dit la puissance mobilisatrice du récit, source essentielle et nécessaire d'un Droit vivant. Depuis #MeToo, une nouvelle sensibilité centrée sur la femme, son histoire, son corps et ses droits s'est imposée. Les souffrances privées se sont invitées dans l'espace public et nous interpellent en toute légitimité, revendiquant une place dans une mémoire partagée qu'il revient au Droit d'instituer. Toutes ces femmes viennent dire haut et fort que cette violence intime ne peut plus être masquée par les mots du Droit. Mais comment une scène pénale pourra un jour réparer une commotion psychique aussi intime ? Une scène de procès est le miroir d'une société démocratique, au terme de laquelle la parole doit faire oeuvre de reconnaissance. Pour le juge, l'enjeu d'un débat contradictoire est d'établir les faits objectifs dans un temps et un espace délimité. Sa démarche relève d'une grammaire juridique en opposition avec " la grammaire de l'action militante ". Autrement dit, vu de près, un procès est une bataille du langage. Il ne s'agit pas de combattre une loi, mais une culture, un vocabulaire, une manière de penser. Son enjeu est de remettre sans cesse des mots justes sur des actes. Face à une justice hors d'atteinte et inadéquate, la plainte se constitue dans un récit porté devant son lectorat. La démarche de Vanessa Springora, par exemple, est comparable à celle des héroïnes de la tragédie grecque (Antigone ou Electre) interdites de parole sur l'agora et qui se placent sur la scène pour se faire entendre. Sources agissantes d'un droit vivant, ces récits de justice font partie de notre culture, au même titre que la littérature et la peinture. Fiction, témoignage ou expérience, ils donnent la mesure de la détresse extrême qui emporte ces figures féminines. C'est là, dans des arènes discursives parallèles, que sont nommées pour la première fois le viol conjugal, le harcèlement sexuel au travail ou les discriminations sexuelles à l'emploi - soit autant de situations vécues au quotidien par les femmes dans un espace privé qui jusque-là n'avaient pas de vocabulaire capable de les identifier, de les contester publiquement ou de les politiser, ni les moyens qu'ont aujourd'hui les réseaux numériques pour porter cette contestation dans un espace public élargi. Car ces voix singulières doivent se faire entendre dans l'espace public. C'est la condition pour qu'une société accède à une nouvelle conscience d'elle-même. Au terme d'un essai entre littérature et droit, entre la cause des femmes et leur plainte en justice, entre le cri de colère et le langage du droit, entre l'urgence d'une réponse et les pesanteurs institutionnelles, Denis Salas montre comment la chair émotionnelle du témoignage redonne un contenu aux mots du Droit.

06/2023

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Moyen Age

Les reines maudites Tome 3 : Jeanne Seymour. La reine bien-aimée

Jeanne n'avait aucun désir d'être mariée. Son souhait était de devenir religieuse. Chacun la taquinait à ce sujet, nul ne la prenant au sérieux. A leur guise. Bientôt, ils s'apercevraient que sa détermination n'avait rien à envier à celle de son frère quand il s'agissait d'obtenir ce qu'elle voulait. Onze jours après l'exécution d'Anne Boleyn, Jeanne Seymour devient la nouvelle épouse du roi Henri VIII. Entraînée contre son gré dans ce dangereux jeu politique, elle sait qu'elle devra donner naissance à un fils ou subir le même destin funeste que les deux reines qui l'ont précédée. Malgré l'affection sincère que semble lui porter le roi, celle qui se prédestinait à une vie de nonne s'expose à une mort brutale en s'accrochant à l'ancienne foi, dans une Angleterre en pleine révolution religieuse. Alors qu'elle doit chaque jour lutter pour sa survie, au-delà des murs de la Cour, la peste fait rage et la rébellion gronde. Le danger est partout, peut-être même là où Jeanne l'attend le moins. L'autrice et historienne de renom, Alison Weir, livre ici le troisième volume d'une série de six romans fascinants sur les épouses de Henri VIII, les reines maudites. Un incontournable pour les fans de Philippa Gregory et d'Elizabeth Chadwick. "La série des "Reines maudites" fera date dans les annales du roman historique". The Times "Dans ce roman captivant et absolument convaincant, Jeanne Seymour prend vie devant nos yeux émerveillés". Tracy Borman "Alison Weir donne vie à l'histoire comme nulle autre. L'héroïne, aimable et digne, ne laisse pas indifférent, d'autant que sa fin cruelle l'a privée d'un bonheur sincère". Barbara Erskine "Ce livre remarquable fera l'effet d'une bombe ! Jeanne Seymour timide et craintive ? Détrompez-vous ! Elle est dynamique, obstinée et enflamme la cour du roi". Kate Williams "Alison Weir parvient mieux que personne à transformer un travail de recherche documentaire en un récit captivant et c'est précisément la raison d'être du roman historique". Sarah Gristwood "Avec l'histoire de Jeanne Seymour, Alison Weir fait une fois encore revivre le passé de manière fascinante, comme elle seule sait le faire. Elle ajoute ainsi un autre classique à la grande tradition du roman historique". Josephine Ross " Alison Weir nous offre un portrait saisissant et empli de compassion de Jeanne Seymour. Une fiction biographique de qualité, qui deviendra assurément une référence du genre. " Kirkus "Très agréable à lire. Alison Weir maîtrise son sujet et a le don raconter et d'enrichir son récit de mille détails passionnants". Daily Mail

06/2024

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Littérature anglo-saxonne

Girls of Summer

Je me sentais comme une déesse grecque. Mais bien sûr, c'était avant. Avant que les chuchotements ne commencent à assombrir l'air de l'été comme un orage imminent. Avant que la police ne débarque sur l'île, uniformes oppressants et sombres sous le soleil de midi. Avant que le corps ne s'échoue, brisé, sur la plage. Rachel est amoureuse d'Alistair depuis ses dix-sept ans. Même si elle ne l'a pas revu depuis des années et qu'elle est maintenant mariée à quelqu'un d'autre. Même si elle était adolescente lorsqu'ils se sont rencontrés. Même s'il a vingt ans de plus qu'elle. Elle n'a jamais pu oublier l'été qu'ils ont passé ensemble sur une île grecque isolée et baignée de soleil. Mais lorsque Rachel renoue inopinément avec une fille qu'elle a connue à l'époque, ses souvenirs idylliques se couvrent de nuages. Le malaise va grandissant à mesure qu'elle replonge dans les souvenirs de cet été-là. Et si rien de ce qu'elle avait vécu ne s'était passé comme elle le pensait ? Roman coup de poing post #MeToo, Girls of Summer s'attaque frontalement au rapport de domination et au consentement. Il explore le rapport entre mémoire et traumatisme et la façon de se réapproprier son véritable passé. "Un roman terriblement percutant. Katie Bishop s'est inspirée des débats sur #MeToo pour écrire ce récit troublant sur le consentement et le contrôle". The Times "Sombre, d'actualité et qui donne à réfléchir. C'est un livre qu'il faut lire". The Sun "Une lecture incontournable, captivante, viscérale et crue. A acheter absolument". Glamour "Ecrit comme un thriller, vif et efficace. Un succès garanti". The Independent "Une lecture sombre parfaite pour les fans de My Dark Vanessa". Cosmopolitan "Ce premier roman prometteur est une exploration opportune de la façon dont les hommes prédateurs plus âgés séduisent et manipulent les jeunes femmes... Une dissection sans faille du pouvoir abusif des hommes et de la force de la solidarité féminine". Publisher's Weekly "Le premier livre de Katie Bishop, très perspicace, montre une compréhension aiguë de la façon dont les choses étaient et de la façon dont elles sont maintenant. L'histoire actuelle est peut-être une fiction, mais il y a beaucoup de vérités dans les pages, et cela donne une lecture puissante, captivante et pleine de suspense". Culturefly "Il y a longtemps que je n'avais pas lu un premier ouvrage aussi captivant. Magnifiquement écrit et incitant à la réflexion, plein de suspense. C'est le livre que je recommanderai à toutes mes amies d'emporter en vacances cet été". Lucy Clarke "Un premier roman envoûtant, troublant et captivant". Catherine Ryan Howard "Une nouvelle voix audacieuse. C'est LE livre de l'été". Katie Couric Media

06/2024

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Histoire de France

L'oeil du pouvoir. Tome 3, Face au terrorisme moyen-oriental, 1981-1986

" Ce troisième et dernier volume de L'OEil du pouvoir, consacré à la période 1981-1986 du premier septennat de François Mitterrand, décrit les assauts répétés - et d'une ampleur exceptionnelle - des terrorismes de la scène moyen-orientale, ainsi que la politique suivie par le gouvernement français et les moyens qu'il utilisa pour y faire face. Jamais jusqu'alors la France n'avait été si violemment attaquée sur son territoire ou à l'étranger, principalement au Liban, pour l'action qu'elle menait afin de contribuer au retour à la paix civile de cette nation, déchirée par déjà six années de guerre fratricide ; pour participer à la difficile réconciliation entre Palestiniens et Israéliens ; enfin, pour avoir fait le choix stratégique du maintien de l'équilibre ancestral entre les mondes arabe et persan en fournissant des armes performantes à l'Irak. Le Liban, où les organisations et les moyens de la terreur florissaient, devint l'exutoire de ces trois conflits majeurs, dans le dédale des rivalités entre factions appuyées par la logistique des Etats qui trouvaient là l'occasion de prolonger leurs ambitions politiques et diplomatiques par l'usage de la violence. Face à ces terrorismes qui frappèrent si durement la France et les Français, civils et militaires - au total près de deux cents morts, des milliers de blessés, une vingtaine de compatriotes prisonniers pendant plusieurs mois, voire plusieurs années, dans les geôles du Hezbollah libanais, dont l'un, Michel Seurat, ne devait pas revenir -, les gouvernements successifs de François Mitterrand ont été longtemps démunis, parfois impuissants. Quant à la volonté du Président de lutter durement contre le terrorisme, il l'avait lui même définie dans une formule lapidaire résumant sa position face au problème des otages français détenus au Liban : " Tout faire, sauf céder. " Mais l'appareil de lutte contre le terrorisme, inexistant à l'origine, fut long à se mettre en place et jamais performant à l'étranger. La nécessaire unité des acteurs politiques de la scène française fit trop souvent défaut, ceux-ci étant plus enclins à dénoncer leurs déficiences respectives qu'à faire bloc contre des adversaires habiles à exploiter leurs divisions, quand ils ne les suscitaient pas. Pire fut l'absence de communauté de vue et de solidarité dans l'action de la part des pays victimes des mêmes attaques terroristes. Pour illustrer ces constats, cet ouvrage abonde d'exemples, dont certains d'une douloureuse intensité dramatique. Avec le recul du temps, les enseignements à tirer de ces faits sont lumineux. Reste à espérer que si, par malheur, il était nécessaire de s'y référer dans l'avenir, ils seraient entendus. Au-delà du témoignage apporté sur la conduite quotidienne de la lutte antiterroriste, sur le rôle joué dans cette lutte par François Mitterrand et les responsables politiques, et au-delà de l'analyse des causes profondes de la plus violente campagne terroriste endurée par la France dans les années quatre-vingts, telle est l'ambition de cet ouvrage. " Gilles Ménage.

02/2001

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Psychologie, psychanalyse

Oeuvres complètes. Tome 4 (1982-1984)

Le rapport de la psychanalyse à la psychopathologie est examiné d'emblée et de manière plus étendue sous le rapport aux sciences, en général. Par cette méthodologie, il s'agit de savoir si, inconsciemment, se crée une fiction de la science de telle sorte que, par exemple, la biologie deviendrait une biologie imaginaire. Les contributions ici présentes constituent la base pour la conception de la psychopathologie fondamentale, que développera, quelques années plus tard, Pierre Fédida. Tout d'abord, faudrait-il se demander, selon lui, si la crise n'est pas une notion inhérente à la psychopathologie et si la chronicité constitue un véritable risque. La référence à la médecine et à la biologie est abordée sous l'aspect du dépassement théorique et des contours d'une discipline telle que la psychologie. Par exemple, la référence à la génétique interroge tout aussi bien le psychanalyste par rapport à une filiation imaginaire, que le généticien qui doit pouvoir anticiper sur ce qu'il peut communiquer à son patient. Comment ce dernier, peut-il l'entendre et de quelle façon le diagnostic sera intégré dans la vie du patient ? En ce début des années 1980, l'intérêt pour le somatique s'est déplacé vers les disciplines traitant du corps et du vivant, notamment la biologie. Pierre Fédida, directeur de l'UFR à ce moment là, a organisé un grand débat sous la direction de ses collègues (François Gantheret, Jean Laplanche, Serge Leclaire) tout en conviant ses maîtres de pensée et amis pour s'assurer de la présence de la phénoménologie dans le débat ainsi que celle de la référence à la psychiatrie : Henri Maldiney, Jean Guyotat, Jacques Schotte ... Comme il s'agit d'un moment important dans l'histoire de l'UFR "Sciences Humaines Cliniques" (Univ. Paris 7), le débat a été reproduit dans son intégralité. De même l'intervention de P. Fédida à la soutenance de la Thèse d'Etat de Maud Mannoni, dans ce lieu, pour discuter de la cohabitation entre psychose, institution et psychanalyse est reproduite. Cette thèse a inauguré une soutenance "sur travaux" , précédant ainsi le passage de la Thèse d'Etat à l'Habilitation à diriger des recherches (HDR). En effet, lors de la création de "Bonneuil" , M. Manonni a pu s'appuyer sur la collaboration de P. Fédida et de ses élèves à l'UFR. Les écrits de Fédida se consacrent également aux questions cruciales de la clinique psychanalytique, chahutée par les effets de société : le traitement de la violence, la culture du corps (body culture), la demande de supervision comme éventuel rattrapage d'un cursus universitaire ou au risque d'une cure personnelle trop sommaire, la référence à l'hypnose et à la suggestion et la tendance à la "libéralisation" de la psychanalyse. Toutes ces questions conduisent au travail sur le contre-transfert et l'auteur met ici en garde contre les expressions toutes faites entre psychanalystes.

06/2020

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Pléiades

Oeuvres. Réunit Au revoir et merci ; La gloire de l'Empire ; Au plaisir de Dieu ; Histoire du juif errant

"Je suis, à ma façon, un amateur d'histoire, un spectateur du bon Dieu. Dans la mesure de mes moyens, j'étais, j'essayais d'être, je suis toujours ou j'essaie d'être le témoin du temps qui passe et de ma propre vie. C'était l'ambition avouée de La Gloire de l'Empire et d'Au plaisir de Dieu. Au revoir et merci n'avait pas d'autre sens. Est-ce qu'il y a rien d'autre à faire, pour un écrivain, pour un homme, que de s'efforcer de comprendre notre monde et sa vie ? Est-ce qu'il existe d'autre tâche pour moi que de balancer mon fanal le long des trains étincelants du temps qui nous emporte ? Je suis une espèce de lampiste de l'histoire. Je suis une espèce d'agent secret de Dieu. Peut-être, un jour, tremblez, bonnes gens ! je m'en expliquerai à nouveau." Jean d'Ormesson, Au revoir et merci, préface de 1976. Comme on lui demandait un jour s'il n'avait pas été tenté de varier son style, Jean d'Ormesson répondit qu'il était au contraire heureux d'avoir pu rester identique à lui-même. "C'est pour cela, précisait-il, que vous retrouverez, par clin d'oeil et comme une marque de fabrique, dans chacun de mes livres un passage d'un livre précédent." Le lecteur découvrira ces discrets rappels dans les quatre ouvrages ici réunis et dont, c'est la première vertu d'un tel recueil, l'unité saute aux yeux : la préoccupation essentielle de l'auteur et de ses personnages, le trait commun à toutes les histoires auxquelles ceux-ci donnent vie (récit d'une jeunesse, histoire d'un Empire, histoire d'une famille, histoire sans fin des pérégrinations du Juif errant), c'est le temps. Le temps qui dure, le temps qui passe, celui contre lequel on remporte parfois des victoires plus ou moins éphémères : "Il n'y a qu'une chose sous le soleil qui mette un terme, pour un temps, à l'écoulement perpétuel : c'est l'amour." Entré en littérature pour des raisons (selon lui) "douteuses", Jean d'Ormesson a construit une oeuvre sur le "mélange du temps historique et du temps individuel", en héritier de Chateaubriand ("Chaque âge est un fleuve qui nous entraîne...") mais aussi, peut-être, de Borges : "La croyance générale a décidé que le fleuve des heures, le temps, s'écoulait vers l'avenir. Imaginer un sens contraire n'est pas moins raisonnable et en tout cas plus poétique." Etabli en lien avec l'auteur, préfacé par Marc Fumaroli, ce volume propose en outre, grâce à Bernard Degout, des notices retraçant la "carrière" des ouvrages inscrits à son sommaire, et de nombreux documents aujourd'hui inaccessibles, comme le magnifique article par lequel Jacques Le Goff salua en 1971 La Gloire de l'Empire, "oeuvre pionnière" marquant la naissance de "l'histoire-fiction".

04/2015

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Histoire

Histoire Auguste et autres historiens païens

En 313, Constantin, empereur chrétien, accorde la liberté de culte à toutes les religions ; nul ne sera plus contraint de vénérer l'empereur à l'égal d'un dieu. En 391-392, Théodose, empereur très chrétien, interdit les cultes païens. Le monde a basculé. Ce qui est en cause, ce ne sont pas seulement des croyances et des cultes, mais toute une civilisation fondée sur la paideia - la culture, les moeurs et les pratiques de la Rome éternelle. C'est en ce sens que les historiens réunis dans ce volume peuvent être dits païens : nourris à l'antique paideia, ils en partagent toujours les valeurs. Ils écrivent entre 360 et 394 (avant 408 pour l'auteur des Vies et moeurs des empereurs) sous les règnes de princes chrétiens, occupent des postes importants, proches du pouvoir, et, par force, s'avancent masqués. De belles carrières restent ouvertes à ces lettrés, émules de Tite-Live, de Suétone ou de Tacite ; les empereurs chrétiens ne peuvent se passer d'eux. Les lois de 391-392 ne les réduisent pas au silence, mais ils sont assez lucides pour comprendre jusqu'où ils peuvent aller dans leur éloge du passé. La plupart évitent prudemment de parler du christianisme. L'Histoire Auguste, elle, s'autorise des moqueries, des parodies des Evangiles ou des Pères de l'Eglise, des allusions plus ou moins voilées. Le livre - trente vies d'empereurs, à partir d'Hadrien - est truffé d'indices révélant à des lecteurs choisis le fond de la pensée de son auteur, écrivain dissimulé, semet ridente, "souriant dans son for intérieur". Cet auteur pourrait passer pour le digne successeur du Suétone des Douze Césars. Il a du goût pour les frivolités d'alcôve, les anecdotes à portée moralisante, les prodiges et les oracles. Mais il se révèle en outre particulièrement imaginatif. L'Histoire Auguste n'est pas une oeuvre historique au sens moderne du terme : elle enrichit son récit par tous les moyens qu'offre l'écriture romanesque, jusqu'à effacer les frontières entre histoire et fiction. C'est l'occasion de savoureux morceaux de bravoure, d'autant plus soignés littérairement qu'ils sont historiquement douteux. Histoire sans autorité donc, mais pleine de vie et finalement de vérité : une oeuvre personnelle et sensible sur l'âge d'or du paganisme et sur son déclin. "Une effroyable odeur d'humanité monte de ce livre", disait Marguerite Yourcenar, qui y avait trouvé la matière des Mémoires d'Hadrien. Cette humanité en désarroi, c'est celle des païens qui assistent impuissants à la dissolution du monde auquel ils tiennent et appartiennent. A la bataille de la Rivière froide, en 394, les armées de Théodose affrontent l'usurpateur Eugène et le général Arbogast, soutenus par le parti païen. Théodose vainqueur, certains vaincus se donnent la mort. Parmi eux, Nicomaque Flavien senior, aristocrate, préfet du prétoire d'Italie, probable auteur de l'énigmatique Histoire Auguste.

11/2022

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Critique Poésie

Monde(s) et poésie. Au coeur des sciences du langage et de la culture

Un ouvrage pluridisciplinaire qui lie de manière originale art du langage et linguistique du sens dans le cadre d'une anthropologie sémiotique. Il renouvelle la compréhension de la notion de " monde(s) " à partir de la poésie. L'idée d'une fonction de l'art comme fabrique de mondes est aujourd'hui très largement répandue, notamment en raison de la forte influence de la théorie de la fiction inspirée de la notion leibnizienne de " monde possible " et des approches postmodernes d'orientation ontologique. Celle d'un texte-monde est appliquée quasi exclusivement au genre romanesque. Les sciences du langage, de leur côté, se désintéressent majoritairement de ces problématiques venues du champ littéraire, occupées qu'elles sont à se développer au croisement de la cognition, des mathématiques et de l'informatique. Cependant dans le cadre d'une anthropologie sémiotique renouvelée, il est possible de penser un décloisonnement fécond des savoirs entre sciences et Humanités à partir de la question des conditions d'accès au sens, question qui se pose de manière cruciale si l'on reconçoit la question de la créativité langagière comme problème linguistique et sémiotique central. Interpréter/décrire la façon dont les écrivains disent le monde ou créent un monde revient alors à inscrire le travail critique dans une conscience du hors-champ et des transferts culturels, en soulignant l'enjeu éminemment politique de toute épreuve du dehors, y compris au sein d'une seule langue. Si le monde humain est fait d'institutions, de pratiques et d'objets supposant à la fois le couplage complexe à son entour et son façonnement plastique en retour, si l'on restitue au langage sa dimension écologique, c'est-à-dire si on le définit non comme un simple instrument, mais comme un milieu traversé de normes et de valeurs, alors travailler la langue, c'est travailler le monde, réinventer sans relâche le monde humain et son rapport à la Terre et aux autres espèces, entrer dans des dynamiques cosmomorphes inédites. C'est pourquoi " poésie " désigne ici un processus d'individuation d'une langue dans la langue par un sujet inscrit dans l'histoire et dans le rythme de son corps – rapport particulier au langage que le genre poétique maximalise sans doute, mais sans exclusive. La poésie n'est pas ici conçue comme une sortie du langage, mais au contraire comme un approfondissement de ses possibles, où le blanc, le papier, la matière sonore, les rapports aux sciences, aux mythes, à la technique, à l'environnement, à la politique, ont toute leur place – et qui met au défi les linguistes, au moins autant en tant que spécialistes du langage qu'en tant que lecteurs et citoyens du monde. L'approche micrologique par la poésie contemporaine et ses mondes flottants, en émergence, hybrides, et l'approche macrologique par une anthropologie sémiotique peuvent ainsi, de manière imprévue, se rendre de mutuels services en soulignant la nécessité d'un point de vue multifocal et pluralisé, sensible aux différenciations critiques.

06/2023

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Divers

Lapérouse 64

Quand l'océan livre ses secrets : le mystère du naufrage de Lapérouse Paris. 1964. Le nageur de combat François Guérin est dépêché à l'autre bout du monde pour une opération "secret-défense" : retrouver l'épave perdue de La Boussole, le mythique vaisseau amiral de Lapérouse ! De nouvelles informations ont en effet été livrées aux autorités françaises, qui se mobilisent pour percer enfin le mystère de Vanikoro... François n'est pas attiré par cette légende "lapérousienne" mais le devoir l'appelle et il sait que le destin funeste de cette expédition n'a cessé d'obséder tous les pouvoirs français en place depuis près de deux siècles. Partie de Brest en 1785 à bord de deux frégates, La Boussole et L'Astrolabe, l'expédition a subi plusieurs drames avant de disparaître corps et biens début 1788, après une halte dans la nouvelle colonie anglaise de Sydney. Sous la Révolution et durant tout le XIXe siècle, des recherches et fouilles ont été entreprises, notamment à Vanikoro, une île "maudite" du Pacifique. Là, on sait qu'en effet L'Astrolabe s'est bien fracassée sur des récifs coralliens... mais quid de La Boussole, le navire où se trouvait Lapérouse ? Il semble bien que cette fois, on puisse apporter la preuve définitive du lieu du naufrage. Lorsque le patrouilleur français, La Lilloise, arrive aux abords de Vanikoro, François ne se doute pas encore de ce qui l'attend. Sous les ordres du Capitaine de frégate Durieux, c'est une véritable "fièvre" qui semble s'emparer de l'équipage, prêt à tout pour arracher une relique des profondeurs... François va devoir agir avec prudence. Après tout n'est-ce pas l'orgueil des hommes qui mena l'équipage à sa perte 176 ans en arrière ? Et si la quête de la preuve ultime du naufrage de Lapérouse ne devenait pas, sous une météo exécrable et des périples hasardeux dans la jungle, le terrain idéal pour se tromper encore une fois et mettre des vies en danger ? Sous l'oeil parfois narquois de Viviane, une journaliste photographe indépendante et peu encline à suivre la hiérarchie militaire, François navigue assurément en eaux troubles... Est-ce la plus belle des quêtes qui est en cours, ou la plus absurde ? Inspiré par les missions d'exploration menées par la France à Vanikoro dans les années 1960, ce superbe roman graphique écrit par LF Bollée (La Bombe, Terra Australis, Terra Doloris, Patrick Dewaere...) et Marie-Agnès Le Roux, grande passionnée de Lapérouse, remet au goût du jour le naufrage le plus célèbre de la Marine française, qui restait alors un mystère et ne cessait de hanter les esprits depuis près de deux siècles. Une aventure humaine entre Cousteau et Conrad, Histoire et fiction, qui nous plonge dans les eaux fascinantes et dangereuses du Pacifique sud. Vincenzo Bizzarri rend à cette expédition toutes ses couleurs et nous invite à évoluer dans des décors plus vrais que nature, où les hommes semblent devenir plus fragiles que jamais...

09/2023

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Moyen Age

Les chroniques de Camulod Tome 3 : Le fils de l'aigle

Né du chaos des Ages Sombres, le rêve des Aigles a fait naître un roi, un pays et une légende immortelle. Mais les légendes ne racontent jamais qu'une partie de l'histoire... Certains l'appellent Merlyn, mais tous voient en lui leur commandant. Caius Merlyn Britannicus veille à la sécurité de la colonie de Camulod, et ses habitants comptent sur lui pour les guider, les diriger, les défendre... les sauver. Uther Pendragon, futur père du fameux Arthur, est le cousin bien-aimé de Merlyn. Le hasard a voulu qu'ils naissent le même jour, l'année où les légions romaines ont quitté la Bretagne. Très différents et néanmoins inséparables, ils sont comme les deux faces d'une même pièce. Dans un monde déchiré par la guerre et la tourmente, chacun représente pour l'autre une certitude, et une garantie de survie pour Camulod. Mais un crime abject, qui touche Merlyn en plein coeur, pourrait bien les séparer... et mettre en péril le destin de tout un peuple. " Avec l'Histoire pour briques et la réalité pour ciment, Jack Whyte a bâti le monde d'Arthur. Sous la chair de la légende, il nous montre les os. " Diana Gabaldon " Les meilleurs auteurs gardent leurs lecteurs en haleine grâce à leurs intrigues, leurs personnages, et un sens aigu du spectacle. Whyte donne vie aux mythes arthuriens en y mêlant savamment les réalités de l'histoire. " Tony Hillerman Sur les tomes précédents : " Une admirable description des derniers jours de la Bretagne romaine et des débuts de l'époque légendaire du roi Arthur... Un récit énergique et bourré d'action. " The Register Herald " Un superbe exemple de fiction historique, riche en détails et péripéties. " The Globe and Mail " Si vous vous êtes déjà demandé comment naît une légende, celle des origines de la Bretagne arthurienne telle que la traite Whyte ici va vous fasciner. " Brazosport Facts " Whyte offre un socle historique passionnant (et très plausible) aux légendes arthuriennes... Une aventure rythmée, faite de combats rapprochés, de trésors cachés et de péripéties ; un changement bienvenu par rapport aux autres oeuvres arthuriennes parfois si politiquement correctes dans leur respect de la vérité historique. " Locus " L'un des romans historiques les plus intéressants qu'il m'ait été donné de lire, et j'en ai lu beaucoup. " Marion Zimmer Bradley " Il aura fallu plus d'un siècle, mais nous disposons enfin d'une légende arthurienne telle que les corps d'armée en ont fait l'expérience éprouvante, brutale mais palpitante. " Torn Shippey, professeur émérite en littérature anglaise du Moyen-Age à l'université de Leeds " L'un des livres les plus importants portant sur les légendes arthuriennes. " Professeur Randy Lee Eickhoff, auteur de The Fourth Horseman " Les personnages bien campés et une scrupuleuse attention portée aux détails ne manqueront pas d'attirer les amateurs de légendes arthuriennes. " Library Journal " Des événements historiques traités avec un luxe de détails... une toile de fond plus captivante encore qu'un cadre imaginaire. " Hackensack Record

08/2021

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Littérature étrangère

Les vies parallèles

Les Vies parallèles débute le 28 juin 1883 - date de la nouvelle de la folie de Mihai Eminescu - et s'achève à sa mort, le 15 juin 1889 : deux dates enregistrées dans la mémoire collective qui consolident et renforcent le mythe du poète national roumain. Car il s'agit bien du mythe de Mihai Eminescu, le poète "absolu", celui dont la vie et l'oeuvre n'ont jamais cessé d'alimenter sa propre légende. La vie du poète, son sacrifice pour l'oeuvre littéraire et pour l'amour sont devenus un matériel de propagande pour les divers régimes politiques. D'abus en abus, Eminescu a été revendiqué et manipulé pour légitimer ou soutenir diverses causes et intérêts politiques, moraux ou intellectuels de la postérité. Il est intéressant de remarquer que sa pensée, à l'origine conservatrice va être récupérée par les extrêmes : de la droite (déformée dans le sens racial par l'extrême droite des années 1930) à la gauche (déformée dans le sens prolétaire, social, par le pouvoir stalinien des années 1950-1960), pour devenir nationaliste (dans le sens de la propagande patriotique nationaliste de Ceausescu). Mihai Eminescu est considéré comme le plus grand poète roumain, comparé à Hölderlin, Lenau, Lermontov ou Leopardi. Sa vie et son oeuvre sont connus par chaque écolier, par chaque lecteur roumain ; toute personne est capable de réciter un vers du poète. A la création du mythe ont contribué son aura de poète romantique ainsi que sa fin tragique dans un asile de fous. De ce point de vue, le poète roumain a de nombreuses affinités avec les grands romantiques européens, le romantisme étant le courant littéraire qui a imposé dans la conscience européenne l'image du génie malheureux. Ses amours avec Veronica Micle, un des personnages clé de ce roman font partie d'une sorte de "patrimoine national". Dans cette "fiction documentaire" d'une extraordinaire richesse, Florina Ilis reconstitue la dernière partie de la vie de Mihai Eminescu, et même au-delà, c'est-à-dire cent cinquante ans d'existence du mythe. Car la vie, la maladie et la mort du poète continuent encore d'être des sujets de dispute : A-t-il été un génie ? A-t-il aimé ? Etait-il réellement fou ou y-avait-il une grande conspiration ? Florina Ilis s'emploie à la démystification du culte du poète national. Elle superpose sur les épisodes de la vie d'Eminescu, des voyages dans le temps qui troublent les rapports temporels. Le lecteur découvre ainsi le projet de la Securitate et le dossier "Le poète national", ouvert afin de corriger, dans la perspective du glorieux présent communiste, l'image du poète, récupéré par le précédent régime. Des agents de la Securitate se retrouvent infiltrés dans le temps et dans la vie du poète et ils seront chargés d'observer et d'intervenir si nécessaire dans le cours des événements : un voisin de chambre d'Eminescu dans un sanatorium viennois ou une jeune femme téléportée comme infirmière au même endroit, etc.

01/2015

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Pléiades

Pierre Drieu la Rochelle

Drieu assignait à l'intellectuel le devoir «d'essayer les chemins de l'Histoire». Le jeu est risqué, il le savait. Mais prévoir le risque d'égarement n'est pas tout. Une erreur est une erreur, une faute est une faute ; il faut en répondre. Il savait cela aussi. Peu avant la fin, il fit le bilan : «nous avons joué, j'ai perdu. Je réclame la mort.» Il fut son propre procureur, son propre juge, son propre exécuteur. «Il était sincère, dira Sartre ; il l'a prouvé.» Il fut aussi son propre avocat, non sans talent, mais sans grande conviction. Sa nature le poussait plutôt à l'autodénigrement (la critique le suivit sur cette pente), au doute, aux contradictions réelles ou apparentes : «Un artiste doute, en effet, de lui-même ; il est en même temps sûr de lui.» Il savait qu'il appartient à la postérité de juger en appel, voire en cassation, mais il ne s'y fiait pas trop. Préservé de toute certitude par une inquiétude foncière, il doutait autant de son élection future que de sa condamnation définitive. «Et pourtant la cohérence de ma sensibilité et de ma volonté apparaît à qui me fait la justice de relire dans leur suite une bonne partie de mes ouvrages», écrivait-il au moment de rééditer Gilles. Cette édition propose, précisément, «une bonne partie» de ses ouvres romanesques : des romans, des nouvelles et des textes dans lesquels le récit tourne à l'essai ou à l'autobiographie. Au reste, les idées de Drieu et sa propre histoire («je n'ai qu'elle à raconter») sont présentes partout, avec une intensité variable. Lui-même parlait de «fiction confessionnelle», mélange de confession et d'invention, de sincérité et d'affabulation, de mémoire et de rêve. La richesse du cocktail n'est pas pour rien dans le charme qu'exercent ses livres et que renforcent encore des alliances peu fréquentes, entre désinvolture et gravité, lucidité et aveuglement, espoir et désarroi. Hantée par l'idée de décadence, l'ouvre de Drieu est, comme sa vie, dominée par la mort, qui est l'informe, c'est-à-dire l'envers de l'art. Peut-on, par et dans les livres, donner forme à l'informe ? Selon Drieu, qui avait le culte de l'échec (en art, en amour, en politique.), «l'ouvre d'art la plus réussie est une déception pour qui a tenu dans ses mains la misérable vérité». Mais le lecteur qui lui fera «la justice de relire dans leur suite» ses ouvrages ne sera sans doute pas de son avis. Il découvrira l'une des plus fortes analyses romanesques du cynisme, la satire d'une époque qui pèse encore sur la nôtre, et une forme inédite de diatribe, dans laquelle l'écrivain retourne à tout instant ses armes contre soi. Toujours incertain de lui-même, Drieu s'est mis à la merci de ses contemporains. C'est peut-être cette même incertitude de soi qui permet qu'aujourd'hui l'on s'attache à lui.

04/2012

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Policiers

Heureux veinard

À San Francisco, Nick Monday est détective privé. Mais, surtout, Nick Monday est un « braconneur de chance ». Comme de rares personnes sur terre, il a la capacité d’« aspirer » la chance que les gens possèdent – et certains en possèdent plus que d’autres – simplement en leur serrant la main. Grâce à un complexe système de filtration, il récupère cette chance avant de la stocker en vue de la revendre à qui en a besoin et, surtout, les moyens. Car plus la chance est de bonne qualité, plus elle coûte cher. Un matin, il reçoit à son bureau la visite d’une séduisante jeune femme, dénommée Tuesday Knight, laquelle lui demande de retrouver la personne qui a « dérobé » la chance de son père, Gordon Knight, qui n’est autre que le maire de San Francisco, depuis empêtré dans diverses affaires politicojudiciaires. Nick Monday accepte le marché, se gardant bien d’avouer que la personne qu’il doit retrouver, c’est lui-même. Peu après, il reçoit la visite d’une autre Tuesday Knight, au physique aussi attrayant que semblable à la première, qui lui apprend qu’une femme se fait passer pour elle pour une raison qu’elle ignore. Aussi lui demande-t-elle d’enquêter et de découvrir son identité. Dans la même matinée, Tommy Wong, le parrain de la mafia chinoise de San Francisco, lui demande de lui trouver de la « Pure », soit le niveau le plus élevé de chance que l’on puisse trouver dans la nature. Nick Monday refuse, avant de se faire intercepter par un mystérieux personnage, travaillant visiblement pour un organisme gouvernemental secret, lui intimant de livrer de la « mauvaise chance » à Tommy Wong afin de faire s’effondrer son empire du crime. Nick Monday n’a d’autre choix que d’accepter mais la journée s’annonce longue, très longue… Si les premières pages semblent reprendre la trame classique des polars américains des années 1950 (un détective privé à la petite semaine qui se fait embaucher par une femme fatale manipulatrice et qui cache son jeu…), très vite, le récit part en vrille, l’auteur nous projette dans un univers violent et loufoque, créant un monde parfaitement irréel mais totalement crédible. Ici, le fantastique n’est pas un fantastique de science-fiction, plutôt un nouveau regard sur la réalité qui nous entoure. Nous nous laissons d’autant plus facilement prendre que l’intrigue est parfaitement menée : tout le monde semble manipuler tout le monde, et le lecteur est placé dans la tête du narrateur, antihéros hors du commun, looser aux pouvoirs exceptionnels, grande gueule toujours prêt à faire un bon mot. À l’arrivée, un roman tendre et poétique, à travers cette vision d’un monde gouverné de manière invisible par la chance et la malchance – comme autant de substances illicites que l’on vend sous le manteau –, un polar hard boiled sec et nerveux, et un livre drôle et divertissant.

10/2012

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Animaux, nature

Alpha chat

Les Alphachats sont une race à part : ce sont tout d'abord des chats (de race ou de gouttière) peints "au poil près" par l'illustratrice naturaliste Gabriella Gallerani, et bien rangés dans un ordre "alpha-bêtique". A chacun sa lettre, qui pour y grimper, se cacher, jouer, s'étirer, bailler ou simplement prendre la pose : A comme Angora, B comme Bengal, C comme Chartreux, ou encore G comme Greffier, M comme Maine Coon, P comme Persan, S comme Siamois... jusqu'à Zzz pour les 18 à 20 heures par jour qu'un chat passe à dormir. Les Alphachats sont aussi les chats qui ont fait l'histoire, la littérature, le cinéma, la BD, la musique et, naturellement, le bonheur des auteurs qui ont vécu en leur compagnie. Qu'ils soient tigrés ou écaille-de-tortue, roux ou noirs, avec ou sans pedigree, ces chats ont quelque chose en commun : chacun a un nom. En voici donc plus de 600 assortis d'autant d'anecdotes glanées par Paola Gallerani : sans Apollinaris, Bébert, Boise, Catarina, Giuseppe, Jellylorum, Murr et Tyke, est-ce que Twain, Céline, Hemingway, Poe, Morante, Eliot, Hoffmann et Kerouac auraient écrit les mêmes oeuvres ? Si nous sommes certains que c'est pour Pulcinella que Domenico Scarlatti a composé la fugue Le Chat pour clavecin, sans Elvis (le chat, what else) John Lennon aurait-il composé les mêmes chansons ? Et s'il n'y avait pas eu Spithead, Newton aurait-il inventé la chatière ? Sans parler du Fripouille de Klee, des Sam de Warhol et de la Polly de Kubrick... Les chats muses, dans le sens le plus traditionnel, mais aussi les chats comme Micetto qui se cachait sous la soutane du pape Léon XII, ou Brilliant, l'angora favori de Louis XV, Lucifer et Perruque, les éminences à fourrure de Richelieu, ou encore Jock, qui assistait avec Churchill aux conseils de guerre, et Socks "First Cat" à la Maison Blanche sous Clinton, tous ont contribué à inspirer bien des décisions. Et si Mitsou et Marcus sont les chats d'acteurs célèbres (Marilyn Monroe et James Dean), Orangey et Pyewacket montent eux-mêmes sur les podiums pour recevoir le PATSY Award (pour Diamants sur canapé et L'Adorable Voisine). Enfin qu'en serait-il d'Alice sans le chat du Cheshire, ou de Titi sans Gros Minet ? C'est pourquoi même les chats "de fiction" ont leur place ici. Et comme les derniers seront les premiers : CC, le premier chat cloné, Nadjem le plus ancien chat égyptien dont on connaisse le nom et All Ball, le premier chat adopté par une gorille. Voici donc un portrait inédit pour le style et la beauté des illustrations de ces fascinants "tigres de maison", en forme de recueil des faits et dits mémorables de tous les chats qui ont su se rendre dignes de leur nom.

09/2013

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Policiers

Une enquête d'Emily Roy et Alexis Castells : Mör

Le nouveau roman de Johana Gustawsson va vous couper l'appétit " Une écrivaine audacieuse et bourrée de talent. " RJ Ellory Après Block 46, le duo d'enquêtrices Emily Roy (profileuse de renom) et Alexis Castells (écrivaine de true crime) revient pour une enquête terrifiante qui explore, cette fois encore, l'histoire et les liens familiaux. On retrouve, en Suède, un cadavre de femme amputé de plusieurs kilos de chair. Au même moment, à Londres, Emily Roy enquête sur une disparition inquiétante : une actrice célèbre a été enlevée, et ses chaussures abandonnées à proximité de son domicile, dans un sac plastique, avec une paire de chaussettes soigneusement pliées dedans. Ces deux crimes portent la signature de Richard Hemfield, le serial killer qui a tué l'ancien compagnon d'Alexis Castells. Hemfield est enfermé à vie à l'hôpital psychiatrique de haute sécurité de Broadmoor, pour le meurtre de six femmes, retrouvées, en l'espace de deux ans, assassinées et amputées de leurs seins, de leurs fesses, de leurs cuisses et de leurs hanches... Le problème, c'est que Richard Hemfield est en prison depuis dix ans. Comment expliquer que ses crimes recommencent ? Le nouveau roman de Johana Gustawsson plonge cette fois encore ses racines dans l'histoire : au coeur du Londres du XIXe siècle, dans les ruelles sillonnées par Jack L'Eventreur. Comme chez Camilla Läckberg, à qui on a plusieurs fois comparé Johana Gustawsson, l'évolution personnelle des personnages apporte toute sa profondeur au développement de la série. Mör est un roman d'une grande féminité, qui explore le désir, la fusion, la folie des liens familiaux. Familles dysfonctionnelles, heureuses ou mise en péril par les pulsions et la transmission, violente ou inconsciente, des perversions familiales. Chargés de résoudre de nouveaux crimes atroces, les équipes de recherche suédoise (Bergström, Olofsson, et deux nouveaux personnages féminins, Karla Hansen et Aliénor Lindbergh) et anglaise (Emily Roy, Alexis Castells et Jack Pearce), sentent résonner profondément, dans leur histoire personnelle, les événements auxquels ils sont confrontés. Pour Alexis Castells, Richard Hemfield fait violemment resurgir le passé et la mort de son compagnon : replonger dans les dossiers qui l'obsèdent depuis dix ans est peut-être, cette fois, la seule façon pour elle d'envisager l'avenir. Elle doit combattre ses fantômes et sa peine, achever son deuil, pour revenir à la vie aux côtés de Stellan, rencontré en Suède au cours du premier roman de la série. Emily Roy porte en elle la cicatrice jamais refermée de la mort de son enfant et de la mutilation qu'elle a subie à la fin de Block 46, quand Ebner lui a tranché le sein. Comme Block 46, Mör repose sur un twist majeur qu'il est impossible de révéler sans lui faire perdre toute sa saveur : Johana Gustawsson travaille, de façon documentée toujours, sur la manipulation de son lecteur, pour faire résonner la réalité de ce qui donne chair à la fiction.

10/2017

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Littérature française

Les Contemporaines ou Aventures des plus jolies femmes de l'âge présent. Tome 8, Nouvelles 188-211

Cette première édition moderne des Contemporaines de Rétif de la Bretonne, recueil de nouvelles publié de 1780 à 1785, donne à lire dans sa totalité les 42 volumes de l'édition originale, soit "272 nouvelles en 444 histoires". Cette oeuvre, dont n'a été rééditée qu'une infime partie, offre le panorama complet de l'univers rétivien. Rétif a mis dans ce monument narratif ses idées, ses obsessions, ses fantasmes, son panthéon féminin ; il y a mis aussi des contes, des chansons, des saynètes, le langage du monde et celui du peuple, toutes les formes d'expression qui lui étaient chères. Depuis 1760, la mode était aux recueils de récits courts, adaptés au goût d'un public élargi qui tendait à préférer la lecture aisée d'anecdotes, d'historiettes, de faits divers à celle des romans nécessitant un effort d'attention soutenu. Mais le recueil des Contemporaines est d'une ampleur et d'une ambition sans précédent. Rétif le présente comme "l'histoire complète des moeurs du XVIIIe siècle". Au-delà de l'objectif moral affiché (proposer des leçons de bonheur conjugal), s'impose l'intérêt documentaire. De même que Rétif sera, quelques années plus tard, "le spectateur nocturne" des Nuits de Paris, il est ici le spectateur diurne du monde qui l'entoure. Tandis que les autres écrivains, dit-il, ont "travaillé d'imagination", lui a "négligé tous les ornements de la fiction". Le titre du recueil est déjà une promesse de vérité : en étant des contemporaines, les héroïnes appartiennent au monde du lecteur, et c'est l'image de cette société de la deuxième moitié du XVIIIe siècle que nous restituent les nouvelles. Une image fondée sur des choses vues et entendues. Mais sur ce terreau, le romanesque se déploie librement, jusqu'à l'extravagance. Le succès de l'ouvrage en son temps (la deuxième grande réussite de Rétif, après la publication du Paysan perverti en 1775) montre que cette formule correspondait bien à l'attente des lecteurs. L'originalité de Rétif est aussi d'avoir voulu dépasser la simple addition de récits en tissant des liens entre les nouvelles, guidé par le souci de donner à l'ensemble la cohésion d'une totalité narrative. Il a ébauché ce que Balzac systématisera quelques décennies plus tard : la récurrence des personnages, la connexion entre des histoires. Mais il ne faut pas pour autant lire et juger Les Contemporaines à la lumière des nouvelles du siècle suivant. Rétif, quelle que soit son aspiration à la différence, son mépris proclamé des codes stylistiques de l'époque, appartient à la littérature et à la société de son temps. De l'une et de l'autre, il a été le témoin privilégié. Enfin, on ne saurait donner aujourd'hui une édition des Contemporaines sans les estampes qui accompagnaient chaque nouvelle, tant ces illustrations ont une fonction narrative et contribuent au charme des volumes.

09/2017

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Pléiades

Oeuvres. Tome 1

Notre "contemporain capital posthume" : ainsi a-t-on qualifié Perec vingt ans après sa mort. La formule n'est pas une simple boutade, elle dit quelque chose de la fortune de l'oeuvre. Celle-ci a laissé sa marque dans la culture populaire, ce qui n'est pas banal. "Mode d'emploi" est utilisé à tout propos, et "Je me souviens" est devenu une scie. Mais de tels stéréotypes ne présagent pas toujours la présence réelle des livres. De cette présence, la multiplication des publications posthumes, qui rivalisent, du moins en notoriété, avec les ouvrages que Perec publia lui-même, est un indice plus convaincant. Plus significatif encore, le nombre des écrivains, des artistes, des architectes, etc., qui se revendiquent de l'auteur d'Espèces d'espaces. Perec serait-il déjà devenu un classique ? La relative intemporalité que cela suppose ferait alors écho au désir qu'exprimait le titre rimbaldien de son dernier poème, L'Eternité, et qui se lisait déjà dans Les Revenentes : "Je cherche en même temps l'éternel et l'éphémère". Perec, pour sa part, se décrivait comme "un paysan qui cultiverait plusieurs champs" : sociologique, autobiographique, ludique, romanesque - ce dernier, tributaire de l'envie (bien naturelle chez un lecteur de Jules Verne) "d'écrire des livres qui se dévorent à plat ventre sur son lit". Mais on tenterait en vain de ranger ses ouvrages dans quatre cases distinctes. Les quatre perspectives ne s'excluent pas les unes les autres ; elles sont autant de modes de lecture possibles, et compatibles. "Je cherche en même temps l'éternel et l'éphémère" est certes, comme Les Revenentes tout entier, un lipogramme monovocalique (la seule voyelle employée est e) qui inverse l'époustouflant lipogramme en e de La Disparition (où cette voyelle n'est jamais employée) : nous voici au royaume des contraintes, des prouesses, de l'Oulipo. Mais cette phrase envoûtante est aussi, et avant tout peut-être, un mode d'emploi de la vie. Chez Perec, les contraintes formelles miment en quelque sorte celles, tragiques, de l'histoire, "la grande, l'Histoire avec sa grande hache". La disparition d'une voyelle dit celle de l'univers familial. La place centrale qu'occupe dans l'oeuvre le chiffre 11 est à rapprocher de la date de la déportation, le 11 février 1943, de la mère de l'écrivain. Une vie commence alors qui s'écrira à l'irréel du passé : "Moi, j'aurais aimé aider ma mère à débarrasser la table de la cuisine après le dîner". Pas de temps retrouvé euphorique pour Perec. La mémoire demeure lacunaire, et Je me souviens souligne sa fragilité. Aucun palindrome, aucun Voyage d'hiver ne saurait inverser le fleuve du temps. Du moins la fiction peut-elle en suspendre le cours, et donner au monde une forme conquise sur le désordre du réel. C'est à cette ambition que La Vie mode d'emploi et l'oeuvre tout entière de Perec doivent leur intensité.

05/2017

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Pléiades

Oeuvres. Tome 2

Notre "contemporain capital posthume" : ainsi a-t-on qualifié Perec vingt ans après sa mort. La formule n'est pas une simple boutade, elle dit quelque chose de la fortune de l'oeuvre. Celle-ci a laissé sa marque dans la culture populaire, ce qui n'est pas banal. "Mode d'emploi" est utilisé à tout propos, et "Je me souviens" est devenu une scie. Mais de tels stéréotypes ne présagent pas toujours la présence réelle des livres. De cette présence, la multiplication des publications posthumes, qui rivalisent, du moins en notoriété, avec les ouvrages que Perec publia lui-même, est un indice plus convaincant. Plus significatif encore, le nombre des écrivains, des artistes, des architectes, etc., qui se revendiquent de l'auteur d'Espèces d'espaces. Perec serait-il déjà devenu un classique ? La relative intemporalité que cela suppose ferait alors écho au désir qu'exprimait le titre rimbaldien de son dernier poème, L'Eternité, et qui se lisait déjà dans Les Revenentes : "Je cherche en même temps l'éternel et l'éphémère". Perec, pour sa part, se décrivait comme "un paysan qui cultiverait plusieurs champs" : sociologique, autobiographique, ludique, romanesque - ce dernier, tributaire de l'envie (bien naturelle chez un lecteur de Jules Verne) "d'écrire des livres qui se dévorent à plat ventre sur son lit". Mais on tenterait en vain de ranger ses ouvrages dans quatre cases distinctes. Les quatre perspectives ne s'excluent pas les unes les autres ; elles sont autant de modes de lecture possibles, et compatibles. "Je cherche en même temps l'éternel et l'éphémère" est certes, comme Les Revenentes tout entier, un lipogramme monovocalique (la seule voyelle employée est e) qui inverse l'époustouflant lipogramme en e de La Disparition (où cette voyelle n'est jamais employée) : nous voici au royaume des contraintes, des prouesses, de l'Oulipo. Mais cette phrase envoûtante est aussi, et avant tout peut-être, un mode d'emploi de la vie. Chez Perec, les contraintes formelles miment en quelque sorte celles, tragiques, de l'histoire, "la grande, l'Histoire avec sa grande hache". La disparition d'une voyelle dit celle de l'univers familial. La place centrale qu'occupe dans l'oeuvre le chiffre 11 est à rapprocher de la date de la déportation, le 11 février 1943, de la mère de l'écrivain. Une vie commence alors qui s'écrira à l'irréel du passé : "Moi, j'aurais aimé aider ma mère à débarrasser la table de la cuisine après le dîner". Pas de temps retrouvé euphorique pour Perec. La mémoire demeure lacunaire, et Je me souviens souligne sa fragilité. Aucun palindrome, aucun Voyage d'hiver ne saurait inverser le fleuve du temps. Du moins la fiction peut-elle en suspendre le cours, et donner au monde une forme conquise sur le désordre du réel. C'est à cette ambition que La Vie mode d'emploi et l'oeuvre tout entière de Perec doivent leur intensité.

05/2017

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Critique littéraire

Chien de lisard

Loin de son poste de surveillance, Julien se plonge donc et s'égare dans Le Mémorial de Sainte-Hélène. Il ne voit plus les haches brandies par ses géants de frères, ne compte plus les troncs équarris, roulés sur des copeaux énormes, portés un à un dans la scierie, et poussés vers la machine qui les débite en planches. Et soudain, le vieux Sorel est là, gesticulant au milieu du hangar, cherchant son fils dans les hauteurs, le découvrant assis à califourchon sur une des poutres du toit. Il l'apostrophe, saute sur la passerelle, enchaîne des coups. Le premier fait tomber le livre dans le ruisseau. Le second frappe la tête. Le troisième atteint une épaule. C'est le point de départ du Rouge. C'est aussi le centre dérobé qui se déplace sous la pression du roman de moeurs. On le sait et on l'a dit sur tous les tons : pour raconter un fait divers, pour justifier aussi la triste affaire Berthet, Stendhal oppose un jeune homme pur et criminel à tous les monstres de besogne, de niaiserie, de veulerie, d'envie, de cupidité. Mais surtout, il grossit l'histoire du héros identifié à ses livres, lié à ses bibliothèques de fortune, soucieux de trouver dans tout ce qu'il lit de quoi agir, improviser, et apprendre à mourir. La "manie de lecture" de Julien, qui nous renvoie aux livres du Livre, est si vivace qu'elle réussit à soutenir, voire à déterminer toute son existence fictive. Et puis, il arrive aussi que certaines liaisons durent plus longtemps que toutes celles que la fiction a rendues dangereuses. Le personnage de Laclos a eu certainement la leçon qu'il préméditait. Il en savait certainement plus long que ses juges imaginaires et ses juges réels. Il a emporté, on ne sait où, les mystères de sa séduction. Stendhal, encore lui, ne reprend pas les hypothèses des critiques. Dans La vie de Henri Brulard, ce n'est pas Mme de Merteuil, mais plutôt son modèle, Mme de Montmaur, qui surgit, vingt-cinq après la publication du roman "libertin". Dans les quelques pages que Laclos n'aura pas écrites, on découvre un adolescent embarrassé, qui se morfond, qui n'a vu du monde des adultes que "ce que l'on peut voir par le cou d'une bouteille". Il est reçu chez les amis de ses parents, dans une maison grenobloise. Il se sent perdu devant les bibelots, les bergères défraîchies. Mais il a rencontré l'héroïne sévère qui époustouflait ses lecteurs aînés et qui, retirée en province, tient à offrir des douceurs à ses visiteurs. Stendhal se raconte comme le ferait un acteur : "Elle était vieille maintenant, riche et boiteuse. Cela, j'en suis certain ; quant au moral, elle s'opposait à ce que l'on ne me donnât qu'une moitié de noix confite quand j'allais chez elle au Chevallon, elle m'en faisait toujours donner une tout entière."

01/2017

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Littérature française

Les Contemporaines ou Aventures des plus jolies femmes de l'âge présent. Tome 6, Nouvelles 135-167

Cette première édition moderne des Contemporaines de Rétif de la Bretonne, recueil de nouvelles publié de 1780 à 1785, donne à lire dans sa totalité les 42 volumes de l'édition originale, soit "272 nouvelles en 444 histoires". Cette oeuvre, dont n'a été rééditée qu'une infime partie, offre le panorama complet de l'univers rétivien. Rétif a mis dans ce monument narratif ses idées, ses obsessions, ses fantasmes, son panthéon féminin ; il y a mis aussi des contes, des chansons, des saynètes, le langage du monde et celui du peuple, toutes les formes d'expression qui lui étaient chères. Depuis 1760, la mode était aux recueils de récits courts, adaptés au goût d'un public élargi qui tendait à préférer la lecture aisée d'anecdotes, d'historiettes, de faits divers à celle des romans nécessitant un effort d'attention soutenu. Mais le recueil des Contemporaines est d'une ampleur et d'une ambition sans précédent. Rétif le présente comme "l'histoire complète des moeurs du XVIIIe siècle". Au-delà de l'objectif moral affiché (proposer des leçons de bonheur conjugal), s'impose l'intérêt documentaire. De même que Rétif sera, quelques années plus tard, "le spectateur nocturne" des Nuits de Paris, il est ici le spectateur diurne du monde qui l'entoure. Tandis que les autres écrivains, dit-il, ont "travaillé d'imagination", lui a "négligé tous les ornements de la fiction". Le titre du recueil est déjà une promesse de vérité : en étant des contemporaines, les héroïnes appartiennent au monde du lecteur, et c'est l'image de cette société de la deuxième moitié du XVIIIe siècle que nous restituent les nouvelles. Une image fondée sur des choses vues et entendues. Mais sur ce terreau, le romanesque se déploie librement, jusqu'à l'extravagance. Le succès de l'ouvrage en son temps (la deuxième grande réussite de Rétif, après la publication du Paysan perverti en 1775) montre que cette formule correspondait bien à l'attente des lecteurs. L'originalité de Rétif est aussi d'avoir voulu dépasser la simple addition de récits en tissant des liens entre les nouvelles, guidé par le souci de donner à l'ensemble la cohésion d'une totalité narrative. Il a ébauché ce que Balzac systématisera quelques décennies plus tard : la récurrence des personnages, la connexion entre des histoires. Mais il ne faut pas pour autant lire et juger Les Contemporaines à la lumière des nouvelles du siècle suivant. Rétif, quelle que soit son aspiration à la différence, son mépris proclamé des codes stylistiques de l'époque, appartient à la littérature et à la société de son temps. De l'une et de l'autre, il a été le témoin privilégié. Enfin, on ne saurait donner aujourd'hui une édition des Contemporaines sans les estampes qui accompagnaient chaque nouvelle, tant ces illustrations ont une fonction narrative et contribuent au charme des volumes.

02/2017

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Finances publiques

Financer la Justice en France : Contributions à l'étude de la construction d'un budget

L'influence des mythes sur le droit est un phénomène bien connu des juristes et le droit public financier n'échappe pas à la règle. Dans le sillage de la modernité juridique celui-ci s'est construit autour d'un mythe devenu célèbre : le mythe des "quatre temps alternés" . Cette fiction, qui a profondément marqué la pratique française de la gestion publique, est-elle encore d'actualité, près de deux siècles après son avènement ? L'alternance institutionnelle rythme-t-elle encore la procédure budgétaire, alors même que la fonction du Parlement se fait plus trouble aujourd'hui ? De nouveaux acteurs ne bousculent-ils pas l'ordre établi en s'immisçant dans la procédure, en profitant, peut-être, de la nouvelle place qui est désormais laissée à l'expertise dans la conduite de l'action publique ? N'existe-t-il pas de nouvelles étapes de la vie d'un budget alors que l'on s'attache à distinguer, désormais, le contrôle et l'évaluation ? Autant de questions que les membres du Département Sorbonne Fiscalité et Finances Publiques de l'Université Paris I (IRJS EA 4150) ont souhaité envisager, avec leurs étudiants, dans le cadre du séminaire d'actualité des Masters 2 de la mention Droit des finances publiques de l'Ecole de Droit de la Sorbonne. Grâce au concours décisif de Madame la Ministre Nicole Belloubet, ancienne Garde des Sceaux, c'est à travers l'analyse de la construction d'un budget particulier que le présent ouvrage entend répondre : le budget de la Justice. On sait que celui-ci a pu être au coeur de l'actualité politique et financière de ces dernières années. Chantiers de la Justice, vote et discussion de la Loi de programmation et de réforme pour la Justice, vote et discussion des lois de finances successives, contrôles du Conseil constitutionnel ou de la Cour des comptes, Printemps de l'évaluation successifs, vote et discussion des lois de règlement successives... constituent autant de "moments" politiques, autant de préalables nécessaires, autant de procédures juridiques susceptibles de jalonner, d'influencer et d'encadrer, en somme, de "normer" la procédure de construction budgétaire. Le financement de la Justice en France illustre ainsi, à merveille, les virtualités de la procédure budgétaire et rappelle, s'il en était encore besoin, l'intrication profonde du financier, du juridique et du politique. L'ouvrage apporte ainsi des éléments relatifs à la théorie générale du budget tout en améliorant la connaissance de l'un des budgets - régaliens - parmi les plus scrutés de l'Etat. Avec les communications des invités : Nicole Belloubet, Patrick Hetzel, Philippe Clergeot, Gérald Sutter. de l'équipe de recherche du Département Sorbonne Fiscalité et Finances Publiques : Matthieu Conan, Alexis Fourmont, Emilien Quinart, Jean-Baptiste Jacob, Magdalena Marin. des étudiants des Masters 2 - Mention droit des finances publiques : Sarah Elgozi, Elie Noza, Laure Puydebois ; Léopold Comtet ; Ulysse Gouëdar, Pauline Oger ; Joseph Dalibon, Younès D

03/2022

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Littérature étrangère

The Picture of Dorian Gray

Le manuscrit original du Portrait de Dorian Gray "Les livres que le monde juge immoraux sont ceux qui révèlent sa propre ignominie". Les éditions des Saints Pères présentent le manuscrit original du Portrait de Dorian Gray. Ce document montre le texte de Wilde ainsi qu'il est initialement écrit, dans sa toute première version. Le lecteur peut à la fois observer l'écrivain aiguisant sa prose et pratiquant une forme d'autocensure bien en amont de la publication, ayant sans doute l'intuition d'avoir franchi quelques lignes rouges sur le plan des bonnes moeurs. Oscar Wilde et la censure Oscar Wilde entreprend l'écriture de ce premier jet de 13 chapitres en 1889. Il est destiné à être publié dans les pages du Lippincott's Magazine, une revue américaine. Celles-ci révèlent le talent de leur auteur, mais aussi un contexte : celui d'une Angleterre prude et homophobe au 19e siècle, que Wilde a conscience de pouvoir choquer avec un tel texte. C'est pourquoi il atténue l'ambiguïté de la relation entre Basil et Dorian - par exemple, lorsque Basil évoque la beauté de son modèle, "beauty" devient "good looks" (allure), "passion" devient "feelings" (sentiments), etc. Certains passages entiers sont barrés, comme des confessions émouvantes et amoureuses de Basil. En avril 1890, Wilde finit son texte et le fait taper à la machine afin de le soumettre à Lippincott's. James Stoddart, le rédacteur en chef, l'accepte tout en redoutant son parfum homo-érotique. Il se met à lui-même censurer Le Portrait de Dorian Gray, effaçant environ 500 mots, dont des phrases entières, comme la tirade de Basil au sujet de son portrait. Le manuscrit du scandale En dépit des nombreuses strates de censure qui ont donné à Dorian Gray la forme de sa publication, le numéro de juillet 1890 de Lippincott's suscite l'hostilité des lecteurs. Les critiques décrient le texte, le décrivant comme "une fiction toxique, dont l'atmosphère étouffante et diabolique abonde d'odeurs de putréfaction morale et spirituelle" écrite à l'attention de "nobles hors-la-loi et petits télégraphistes pervertis" . Directe conséquence de ce tollé : la puissante enseigne WS Smith refuse de vendre le numéro dans ses librairies. Malgré, ou grâce à cette réception scandaleuse qui ne peut qu'attirer l'attention, Wilde commence alors à retravailler et à développer l'histoire, afin de la publier sous forme de livre. Il effectue des changements de structure, imagine d'autres personnages, ajoute 6 chapitres et une sélection d'aphorismes pour préfacer l'ensemble et atténue encore un peu plus les passages décriés. La magnifique confession de Basil à Dorian disparaît alors complètement. Une préface de Merlin Holland Merlin Holland est un spécialiste d'Oscar Wilde et le petit-fils de l'écrivain. Il est l'auteur de plusieurs livres de référence : The Wilde Album (1998), Coffee with Oscar Wilde (2007), A Portrait of Oscar Wilde (2008).

09/2018

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Littérature française

Sergio le Sicilien

Ce roman est l'histoire de Sergio, mon copain d'enfance, venu comme moi s'enraciner en France parce que certains événements en avaient voulu ainsi. Malgré l'amour de sa famille et l'amitié de notre petite bande, il n'a jamais su conduire sa vie comme il l'aurait pu. Il avait presque tout pour réussir, ce petit presque lui a cruellement manqué. Sa vie s'est terminée un jour sur les trottoirs lyonnais. J'ai voulu écrire ce livre à la première personne, parce que l'hommage rendu à Serge n'aurait pas eu, sinon, la même charge affective. En composant ces pages, je me suis mis dans la peau du personnage, comme un acteur dans un film ou dans une pièce de théâtre. Dans ce récit je suis Sergio, Sergio le Sicilien. Bien entendu cet ouvrage est un roman, les personnages sont tous fictifs. Toute ressemblance avec des personnages existants ou ayant existé ne serait que pure coïncidence. A moins que certains pans de ma vie et de mon vécu ne se soient glissés dans ce récit. Et que, finalement, certains des personnages décrits dans cet ouvrage ont peut-être existé. Ont sans doute existé. Comme Sylvie, ma fille, ma chérie, et sa trop courte histoire, comme Colette et Monique, mes premiers amours, Colette décédée prématurément de maladie il y a quelques années, avant que je ne retrouve sa trace, Monique qui a mis fin à ses jours du haut des Galeries Lafayette à Lyon. Colette et Monique c'est du vécu. Depuis j'ai retrouvé les deux enfants de Monique, Natacha et son frère, la maman de Colette et Monique, le mari de Colette, Jacques Morel, que j'ai retrouvé à Lyon et que je revois souvent. Nous avons d'ailleurs effectué un pèlerinage avec Jacques et les enfants de Monique dans cette fameuse rue du Plat à Lyon. J'ai regretté à ce moment-là l'absence de Colette. Du vécu comme cette bande de franco-siciliens avec J. Claude Prat, dit Kiki, J. Claude Faivre, Marcel Treffort, Daniel Romans, décédé prématurément, Marie-Madeleine Merlin, ma conscrite, Michélino, Michou ? . Ma bande de copains. Je relate aussi la période avec mon ex épouse, Chantal, Pascale dans cet ouvrage, une mauvaise expérience, un mauvais souvenir. Oui, cet ouvrage est un mélange de fiction et de vécu. C'est bien une histoire sur un copain disparu, un copain décédé dans la solitude, que je voulais raconter ? Mais au fil des lignes mon vécu est venu s'intégrer dans cet ouvrage. Pourquoi ? J'en avais sans doute besoin car depuis le décès de Sylvie, ma fille, je ne vis pas bien, je n'ai pas encore fait mon deuil. Suis-je soulagé? Non. Le décès d'un enfant ne s'efface pas, Sylvie est toujours près de moi, je la vois grandir, elle a 52 ans le 19 juin 2020. Mais elle n'est plus là pour souffler les bougies... Je vous souhaite une bonne lecture.

08/2020

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Critique littéraire

Elizabeth Craig, une vie célinienne

Issue d'une famille de la bourgeoisie californienne, Elizabeth Craig a rêvé très tôt d'une carrière de grande ballerine et projeté sa soif de réussir dans l'art et la danse. La vie de cette femme d'une beauté saisissante sera marquée par l'amour de trois hommes qui eurent chacun des destins exceptionnels. Le premier, son maître de danse, un sulfureux danseur étoile du Bolchoï devenu une vedette du cinéma muet, lui fera connaître l'envers comme l'endroit de l'industrie du cinéma naissant. Déçue par son amant, elle fuit Los Angeles et un amour devenu impossible pour s'installer à New York. Danseuse de revue sur Broadway, elle mène une vie d'aventure qui la conduit, un an plus tard, dans le Paris des Années folles. Les excès festifs des nuits de Montparnasse qui altéreront son état de santé l'amènent à rencontrer un certain docteur Destouches, le futur Céline. Ils vivront ensemble huit années de passion, période qui verra la transformation du docteur en écrivain. La grande dépression qui met fin aux Années folles met aussi un terme à l'épisode parisien de sa vie. Suivant le reflux de la "génération perdue" de ses compatriotes vers les Etats-Unis, Elizabeth Craig quitte Paris en 1932. De retour dans une Amérique en crise, sa carrière de danseuse sur le déclin, elle partage la vie d'un "gangster juif" associé aux capos de la mafia américaine. En entrant dans la vie de Louis Destouches, Elizabeth Craig a participé à la naissance d'un écrivain et pris place elle-même dans la fiction célinienne, un univers qu'elle aura aidé à concevoir et auquel son destin n'échappera plus, même dans la fuite. Elle deviendra le modèle de nombreux personnages féminins de ses oeuvres, sinon le modèle de la féminité célinienne. La danse et les danseuses étaient pour Céline l'objet d'une véritable adoration. "Je suis tout à la danse, la danseuse m'ensorcelle", avoue-t-il à Milton Hindus le 12 juin 1947. Sensuelle et amorale de nature, Elizabeth Craig n'a jamais eu de scrupule à rechercher l'amour au-delà des interdits. Quand elle arrive à Paris à l'âge de vingt-quatre ans, c'est déjà une libertine que Céline rencontre. Cette compatibilité de goût pour le désordre sexuel nourrira leur histoire d'amour, ou du moins la facilité d'Elizabeth à se soumettre aux fantasmes de l'écrivain, à ces "combinaisons" dont il avait un besoin vital. Il n'hésite pas à partager sa maîtresse, à l'offrir à ses amis, et à assister à leurs ébats, pour y trouver un de ses moyens d'inspiration. Elizabeth Craig n'est pas non plus étrangère à l'antisémitisme célinien, même si celui-ci préexistait à leur rencontre. Céline focalisera sa haine des juifs sur le rival américain qui lui a succédé dans le coeur d'Elizabeth. Cette dernière est morte en 1989 sans que les deux amants ne se soient jamais retrouvés.

02/2018

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Romans historiques

Les Chroniques de Camelot Tome 1 : La Pierre céleste

Nous savons tous qu'Arthur a extrait l'épée de la pierre, qu'il a fondé Camelot, que les luttes de pouvoir ont fini par détruire ses rêves. Mais comment la légende est-elle née ? Avant Arthur, avant Camelot, la Bretagne est une contrée obscure et sauvage. Les citoyens romains qui y sont installés depuis plusieurs générations sont confrontés à un dilemme : quitter la province et regagner une société corrompue qui leur est devenue étrangère, ou endurer la violence des guerriers pictes et de l'envahisseur saxon. Mais que se passera-t-il lorsque les légions, dernier rempart de la civilisation romaine, se retireront ? Pour Publius Varrus et Caius Britannicus, une seule option possible : il leur faut rester, préserver les coutumes romaines dans ce qu'elles ont de meilleur, tout en inventant une nouvelle culture à partir des vestiges de l'ancienne. Ils donneront ainsi naissance à la légende. Car ces deux héros sont les arrière-grands-pères d'Arthur, et ils vont par leurs actes forger une nation... mais aussi une épée, nommée Excalibur. " Une admirable description des derniers jours de la Bretagne romaine et des débuts de l'époque légendaire du roi Arthur... Un récit énergique et bourré d'action. " The Register-Herald " Un superbe exemple de fiction historique, riche en détails et péripéties. " The Globe and Mail " Si vous vous êtes déjà demandé comment naît une légende, celle des origines de la Bretagne arthurienne telle que la traite Whyte ici va vous fasciner. " Brazosport Facts " Whyte offre un socle historique passionnant (et très plausible) aux légendes arthuriennes... Une aventure rythmée, faite de combats rapprochés, de trésors cachés et de péripéties ; un changement bienvenu par rapport aux autres oeuvres arthuriennes parfois si politiquement correctes dans leur respect de la vérité historique. " Locus " L'un des romans historiques les plus intéressants qu'il m'ait été donné de lire, et j'en ai lu beaucoup. " Marion Zimmer Bradley " Il aura fallu plus d'un siècle, mais nous disposons enfin d'une légende arthurienne telle que les corps d'armée en ont fait l'expérience éprouvante, brutale mais palpitante. " Torn Shippey, professeur émérite en littérature anglaise du Moyen-Age à l'université de Leeds " L'un des livres les plus importants portant sur les légendes arthuriennes. " Professeur Randy Lee Eickhoff, auteur de The Fourth Horseman " Les personnages bien campés et une scrupuleuse attention portée aux détails ne manqueront pas d'attirer les amateurs de légendes arthuriennes. " Library Journal " Des événements historiques traités avec un luxe de détails... une toile de fond plus captivante encore qu'un cadre imaginaire. " Hackensack Record " Si James Michener fut le maître des sagas grandioses, il a sans doute trouvé en Jack Whyte son digne successeur. " Calgary Herald " Le monde tel qu'il existait alors, le quotidien des peuples et les fondements d'un âge nouveau. Whyte a inscrit ses personnages mémorables dans un environnement fascinant. " The Ottawa Citizen

06/2022

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Pléiades

Oeuvres. Tome 2

Philosophe peu soucieux de se reconnaître tel, Kierkegaard partage avec quelques autres géants, avec Nietzsche par exemple, le privilège, si c'en est un, de trouver de nombreux lecteurs parmi les non philosophes. La question, ici, n'est pas de se demander s'il faut voir en lui un antiphilosophe, comme le voulait Sartre. Ni de rappeler, même si c'est vrai, et la présente édition ne néglige pas tout à fait cet aspect de son oeuvre, qu'il fut aussi ou surtout un penseur religieux. Il s'agit plutôt de souligner ce qui saute aux yeux quand on ouvre ses livres : les ouvrages philosophiques de Kierkegaard ne sont pas écrits comme le sont habituellement les traités de philosophie. Généralement dissimulé sous des pseudonymes qui brouillent les cartes, leur auteur est un digter. Le danois digt renvoie à la fantaisie, à l'imagination, à la rêverie, à la fiction même. Digter est souvent traduit par "poète" . Et de fait les "Diapsalmata" (dans Ou bien... ou bien) ou l'éloge d'Abraham (dans Crainte et tremblement) sont de véritables poèmes en prose, tandis que d'autres textes ("Journal du séducteur" , "Coupable... non coupable") pourraient passer pour des chapitres de romans, que certaines pages, telle l'histoire de ce roi amoureux d'une jeune fille dans les Miettes philosophiques, semblent relever du conte, et que d'autres encore, par exemple la marche d'Abraham et d'Isaac dans Crainte et tremblement, ont une structure dramatique. Ecrivain à coup sûr. Philosophe pourtant, "mais d'une philosophie qui veut être philosophie en étant non-philosophie" (Merleau-Ponty). A cette (non-)philosophie on est souvent arrivé, en France notamment, par le biais de l'existentialisme, qui fut peut-être la "nouvelle conscience culturelle" dont Kierkegaard lui-même prédisait l'avènement. Mais un tel cheminement ne va pas sans quelque malentendu et passe volontiers par profits et pertes l'ancrage (et le mot est faible) de ce Danois dans le luthéranisme, dans son milieu (piétiste) et dans son époque (romantique). Il serait évidemment vain de prétendre n'expliquer Kierkegaard, cette énigme, que par sa sensibilité à la figure de son puritain de père, par sa rupture avec la trop célèbre Régine Olsen, ou par la violence de ses querelles avec l'Eglise danoise. Mais tout aussi inutile (et l'on s'est efforcé d'éviter cet écueil dans ces volumes) d'exiger de lui des réponses à des questions philosophiques qu'en son temps il ne pouvait pas se poser. C'est d'autant moins utile que les questions qu'il se pose sont de tous les temps et que chaque génération pourrait, pour des raisons qui lui seraient propres et seraient chaque fois différentes, faire siens les propos de Denis de Rougemont qui en 1934, dans le contexte de la montée des totalitarismes, voyait en Kierkegaard "le penseur capital de notre époque, nous voulons dire : l'objection la plus absolue, la plus fondamentale qui lui soit faite, une figure littéralement gênante, un rappel presque insupportable à la présence dans ce temps de l'éternel" . L'article de Rougemont s'intitulait "Nécessité de Kierkegaard" . Ce titre conserve son actualité.

05/2018

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Littérature française

Je suis une surprise

On trouvera ici : une table de ping-pong, une grosse enveloppe de la NASA, un fusil, une part de flan renversée, de nombreuses heures de colle, des diapositives du Sahara, un crâne humain exhumé et brisé, plusieurs vélos, un hôpital psychiatrique, un petit carnet décrivant la planète Mars, un voyage éclair à Bruges et un autre à Venise, des pins parasols, un immense bateau et un minuscule voilier. Et aussi, sans cesse, partout sous les pieds du narrateur, des caves sombres pleines de bouteilles. Autant d'étranges souvenirs que Marc Pautrel interroge pour nous dire : "Je est un autre, je est une surprise... j'écris, je suis une surprise". Je suis une surprise, Claudine Galéa Voix intérieures. Jeanne Bastide et Marc Pautrel mènent, chacun à sa façon, une enquête sur l'être et le non-être. Aux éditions de l'Amourier et chez In8. Sujets et objets Lucie se sent enfermée. Prisonnière d'une absence. Celle d'André, mais pas seulement. L'espace de la maison est devenu oppressant. Pour se reconnecter au monde réel, celui des sensations, elle s'allonge à même la terre. Plus tard, à la fin, elle franchira la porte, sortira. Jeanne Bastide raconte le lent réapprivoisement d'une femme par elle-même. "Un silence ordinaire" décrit l'histoire d'une perte qui est peut-être davantage celle du sentiment d'exister que de l'être aimé. Ce sont les objets qui prennent en charge le manque, le vertige. Il y a quelque chose de l'univers de la peinture dans ce lent et pointilleux récit d'un retour à la vie. Aux natures mortes de l'univers intérieur, s'opposent les éléments de l'extérieur, de la brume hivernale au renouveau de la lumière printanière. Jeanne Bastide prend la mesure du temps, et réussit à créer une suspension atmosphérique, entre asphyxie et reprise d'air. C'est une plongée en soi qui évite tout pathos et toute explication au mystère de la disparition. "L'autre" est un miroir où Lucie s'est peut-être perdue. Parfois, on frôle l'hallucination dans une sorte de syncope du verbe. Pour retrouver la continuité d'existence qui lui permettra de demeurer vivante, Lucie écrit. Une deuxième voix s'élève dans le livre, plus fluide, gaie, avec de forts accents d'oralité. Une voix de vivante, heureuse de l'être. Marc Pautrel est le sujet de son récit "Je suis une surprise". Tout à lui-même - il écrit à plein temps, son temps lui appartient jusqu'à l'obsession -, la scène du "Je" lui est familière ! Et pourtant, écrit-il, "en moi, tellement de morceaux me sont étrangers". Remontant le fil d'une existence où les déménagements successifs de ses parents le préparèrent à la solitude et au détachement dont il use avec ivresse une fois devenu adulte, l'auteur-narrateur impose l'idée d'un décollement de soi plutôt qu'un dédoublement. La collection Alter & Ego, pour laquelle il a écrit ce récit, est un écrin parfait à l'aventure en chambre de cet anti-héros. Il aurait désespérément aimé franchir les frontières de la fiction au point d'habiter le seul pays des mots,

02/2009

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Science-fiction

Aux douze coups de minuit

Un recueil de nouvelles fantastiques et de SF à la découverte de mondes pleins de mystères. Les Tales from the Past reprennent des textes fantastiques du 18ème et 19ème siècle. Souvenons-nous que l'écriture, à cette époque, n'était pas la même qu'aujourd'hui, de même que le style. Le fond des nouvelles rassemblées ici était propre à faire frissonner le public d'antan. De nos jours, avec les moyens de communications modernes, le terme de « fantastique » ou de « science-fiction » prend une autre signification, de sorte que ces écrits peuvent nous paraître légers et désuets, mais ils n'en gardent pas moins leur charme à la lecture.Avec des nouvelles de Emmanuel Delporte, Johanna Almos, Emilie Chevallier, Barnett Chevin, Christian Aubin, Wendy Daw, Maxime Jaillet, Xavier Thebault, Célie Guignery, Lilie Bagage, Kate Dau, AF Lune, Frédéric Livyns, Christophe Tréfeu, Barnett Chevin, Andrée Sodjinou, Tim Corey, Jean Bury, Béatrice Ruffié Lacas, Teddy Wadble, Rose Marie-Noële Gressier, Christine Penaux, Hélène Perrin Merelle, Sébastien Ducouret, Ruwan Aerts, Christophe Olry, Françoise Grenier Droesch, Guillaume Dalaudier, Wendy Daw, Wilfried Renaut, Olivia Billington, Alexis Piat, Steve Martins, Samantha ChauderonPlongez-vous sans plus attendre ce recueil de nouvelles et découvrez les mondes mystérieux des otherlands !EXTRAIT DE Opération Hell- Mes chers enfants, l'heure est venue pour moi de vous révéler certaines choses de mon passé. Je pense que vous êtes assez grands maintenant pour comprendre ce qu'il m'est arrivé lorsque j'avais trente ans. Matthew Picton avait réuni toute sa famille autour de lui. Il savait qu'il vivait la dernière nuit de sa longue existence. Transmettre son histoire lui était dorénavant devenu une nécessité. Il espérait qu'il aurait assez d'énergie pour réaliser son ultime volonté. Georges était assis sur une chaise à proximité de son lit tandis qu'Ambert et Théodore le regardaient depuis le chevet. Denise, sa femme, pleurait silencieusement en contemplant les jardins extérieurs. - Économise ton souffle, Papa, dit Théodore. Il trouva beau son aîné. Ils l'avaient appelé ainsi pour rendre hommage au président Roosevelt. Il lui ressemblait lorsqu'il était encore dans la force de l'âge. La chambre d'hôpital dans laquelle ils étaient réunis était froide et glauque. Matthew avait croisé maintes fois la Faucheuse durant sa longue vie. Lui qui avait vécu une existence aventureuse n'aurait jamais imaginé que la Mort viendrait le saisir sur ce lit austère.- Laisse parler ton père, dit Denise qui comprenait que la fin était proche. Sa femme avait toujours été là dans les moments difficiles. Le vieil homme posa un regard attendri sur chaque membre de sa famille. Il se racla la gorge et commença son récit.- Il y a beaucoup de choses que vous ne savez pas de ma jeunesse, et pourtant vous pensez bien me connaître. Ce que je m'apprête à vous révéler vous fera à jamais changer d'opinion sur moi. Cette histoire est si incroyable que vous aurez du mal à penser qu'elle est vraie. Sachez cependant que tout ce que je vous dirai n'est que la stricte vérité, même si j'admets que tout ceci a plus l'attrait d'un cauchemar que de la réalité.

03/2019

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Littérature Espagnole

Don Quichotte de la Manche

Don Quichotte lui-même, au seuil de la "Seconde partie" (1615), n'en croit pas ses oreilles : "Il est donc vrai qu'il y a une histoire sur moi ?" C'est vrai, lui répond le bachelier Samson Carrasco, et cette histoire – la "Première partie" du Quichotte, publiée dix ans plus tôt –, "les enfants la feuillettent, les jeunes gens la lisent, les adultes la comprennent et les vieillards la célèbrent". Bref, en une décennie, le roman de Cervantès est devenu l'objet de son propre récit et commence à envahir le monde réel. Aperçoit-on un cheval trop maigre ? Rossinante ! Quatre cents ans plus tard, cela reste vrai. Rossinante et Dulcinée ont pris place dans la langue française, qui leur a ôté leur majuscule. L'ingénieux hidalgo qui fut le cavalier de l'une et le chevalier de l'autre est un membre éminent du club des personnages de fiction ayant échappé à leur créateur, à leur livre et à leur temps, pour jouir à jamais d'une notoriété propre et universelle. Mais non figée : chaque époque réinvente Don Quichotte. Au XVIIe siècle, le roman est surtout perçu comme le parcours burlesque d'un héros comique. En 1720, une Lettre persane y découvre l'indice de la décadence espagnole. L'Espagne des Lumières se défend. Cervantès devient bientôt l'écrivain par excellence du pays, comme le sont chez eux Dante, Shakespeare et Goethe. Dans ce qui leur apparaît comme une odyssée symbolique, A.W. Schlegel voit la lutte de la prose (Sancho) et de la poésie (Quichotte), et Schelling celle du réel et de l'idéal. Flaubert – dont l'Emma Bovary sera qualifiée de Quichotte en jupons par Ortega y Gasset – déclare : c'est "le livre que je savais par coeur avant de savoir lire". Ce livre, Dostoïevski le salue comme le plus grand et le plus triste de tous. Nietzsche trouve bien amères les avanies subies par le héros. Kafka, fasciné, écrit "la vérité sur Sancho Pança". Au moment où Freud l'évoque dans Le Mot d'esprit, le roman est trois fois centenaire, et les érudits continuent de s'interroger sur ce qu'a voulu y "mettre" Cervantès. "Ce qui est vivant, c'est ce que j'y découvre, que Cervantès l'y ait mis ou non", leur répond Unamuno. Puis vient Borges, avec "Pierre Ménard, auteur du Quichotte" : l'identité de l'oeuvre, à quoi tient-elle donc ? à la lecture que l'on en fait ? Il est un peu tôt pour dire quelles lectures fera le XXIe siècle de Don Quichotte. Jamais trop tôt, en revanche, pour éprouver la puissance contagieuse de la littérature. Don Quichotte a fait cette expérience à ses dépens. N'ayant pas lu Foucault, il croyait que les livres disaient vrai, que les mots et les choses devaient se ressembler. Nous n'avons plus cette illusion. Mais nous en avons d'autres, et ce sont elles, peut-être – nos moulins à vent à nous –, qui continuent à faire des aventures de l'ingénieux hidalgo une expérience de lecture véritablement inoubliable.

09/2015

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Romans historiques

Le livre des noms oubliés

C'est un samedi matin, en plein service à la bibliothèque publique de Winter Park, que je le revois. Le livre sur lequel j'ai posé les yeux pour la dernière fois il y a plus de six décennies. Que je croyais disparu pour toujours. L'ouvrage qui représentait tout pour moi. Le monde s'arrête alors que j'attrape le journal, la main tremblante. Ce livre m'appartient - ainsi qu'à Rémy, un homme mort depuis longtemps et auquel je me suis efforcée, après la guerre, de ne plus penser. Floride, mai 2005. Eva Traube Abrams retrouve la trace de l'homme qu'elle pensait avoir perdu à tout jamais, et du livre qui a tant compté pour eux, plus de soixante ans auparavant... En 1942, Eva fuit Paris à la suite de l'arrestation de son père, Juif originaire de Pologne. Bouleversée, elle trouve refuge dans un village de montagne, en Zone libre, où elle rencontre Rémy, un séduisant faussaire. Avec son aide, elle produit de faux papiers pour aider des enfants juifs à passer la frontière suisse. Ne pouvant se résoudre à effacer leur identité, Eva consigne leurs véritables noms grâce à un code dont seuls Rémy et elle possèdent la clé. Ce Livre des noms oubliés devient encore plus vital lorsqu'ils sont trahis et que Rémy disparaît. Eva parviendra-t-elle à retrouver celui qu'elle aime, et à protéger les enfants de l'horreur du nazisme ? Inspiré d'une histoire vraie, ce roman évocateur, rappelant Le Réseau Alice de Kate Quinn ou Toutes les lueurs de Londres de Julia Kelly, est une ode à la résilience et à la force du courage face à la barbarie. " Depuis Le Chant du rossignol, je n'avais pas été aussi submergée par l'émotion à la lecture d'un livre. L'autrice s'est inspirée de l'histoire vraie de citoyens français ayant combattu avec courage et détermination pendant la Seconde Guerre mondiale. Elle met en lumière ceux dont les vies ont été détruites et les identités effacées, elle raconte un pays déchiré, l'héroïsme de ceux et celles qui, comme Eva, ont risqué leur vie dans des actes d'héroïsme épique. Emouvant et magnifique. " Fiona Davis " Kristin Harmel décrit avec brio la vie d'une jeune femme juive franco-polonaise, dans la tourmente de la Seconde Guerre mondiale. Elle illustre de façon émouvante le courage d'Eva qui risque sa propre vie pour les autres, et dépeint ses personnages avec une compassion réaliste. Cette oeuvre d'une grande justesse touchera les lecteurs avec son témoignage sur la force de l'espoir. " Publishers Weekly " L'autrice rend hommage à une histoire bouleversante, réelle mais oubliée, de la Seconde Guerre mondiale, à laquelle se mêle une belle histoire d'amour et un soupçon de suspense. A recommander aux fans de fiction historique romantique, notamment les romans de Beatriz Williams. " Booklist " Une histoire de survie et d'héroïsme à couper le souffle, centrée sur une faussaire qui risque sa vie pour aider des enfants juifs à quitter la France occupée par les Nazis. " People

07/2023