Recherche

manuscrit patrimoine

Extraits

ActuaLitté

Littérature érotique et sentim

Histoire merveilleuse et édifiante de Godemiché. Histoire de Suzon et des deux présidents à mortier ; Histoire du sage Pangloss

Nouvelles coquines d'un ex-abbé très turbulent. POUR UN PUBLIC AVERTI. L'origine du godemiché et son introduction dans une abbaye.L'innocente et chaste Suzon condamnée à la sentance pour adultère.Le sage Pangloss dont la passion est de cajoler les filles de son pays. Trois histoires différentes, ancrées dans le très érotique siècle des Lumières. Réhabilitation d'un recueil érotique et anticlérical.EXTRAITGodemiché, italien de naissance, naquit de parents catholiques, l'an premier de la création des voux monastiques ; de jeunes filles de quinze ans, à qui les lois ne laissaient pas la liberté de disposer de leur patrimoine, avaient-disposé, dès cet âge, de leur liberté, bien précieux sans lequel les autres sont sans substance. Ces innocentes avaient fait le marché de bonne heure, dans la crainte de faire des enfants ou d'être sollicitées par de beaux garçons, qui sollicitent toujours les filles à en faire. Les porte-collets de ce temps-là, plus froids que le porte-collets de ce temps-ci, avaient prêché et assuré à ces filles qu'un habit de bon goût offensait le ciel, qu'un vêtement ridicule et grotesque allait mieux à des vierges destinées par la création de l'argile du premier homme à jouir du bonheur éternel. Les haillons, qui rendent la vertu maussade, sont de très saintes choses. Un capucin habillé en satire, en égipan, est un objet très récréatif pour les anges. Ces indignes, mal vêtus dans ce monde, seront richement habillés là-haut où ils occuperont les premières loges. Leur crasse, leur vilaine barbe et leur vermine, placées à côté de l'agneau sans tache, jetteront un furieux éclat dans le paradis. L'incroyable et l'extraordinaire entrent aisément dans l'esprit des filles de quinze ans, parce que les filles de quinze ans sont très crédules.A PROPOS DE L'AUTEUR : Henri-Joseph Laurent, dit l'abbé Dulaurens, né le 27 mars 1719 à Douai et mort le 17 août 1793 à Marieborn, était un jésuite et écrivain français. Dès son plus jeune âge, il étudia les lettres et la théologie chez les Jésuites. Marginal, l'abbé Dulaurens fut constamment poursuivi pour ses libellés anticléricaux et contraires aux bonnes mours. On attribue à ce pamphlétaire de nombreux pseudonymes : Du Laurens, L'auteur du " Compère Matthieu ", Brise-Crosses, Laurent d'Henriville, Modeste-Tranquille Xan-Xung, L'abbé de Saint-Albin, J.-B. Dulaurens, G. J. Laurens, Frère Mirtile...A PROPOS DE LA COLLECTION : Retrouvez les plus grands noms de la littérature érotique dans notre collection Grands classiques érotiques.Autrefois poussés à la clandestinité et relégués dans " l'Enfer des bibliothèques ", les auteurs de ces ouvres incontournables du genre sont aujourd'hui reconnus mondialement. Du Marquis de Sade à Alphonse Momas et ses multiples pseudonymes, en passant par le lyrique Alfred de Musset ou la féministe Renée Dunan, les Grands classiques érotiques proposent un catalogue complet et varié qui contentera tant les novices que les connaisseurs.

02/2018

ActuaLitté

Montagne

L'Alpe N° 88 : Refuges. De l'abri de fortune au tourisme d'altitude

Abri pour la nuit, havre de réconfort et de convivialité, les refuges alpins sont des lieux emblématiques de la moyenne et haute montagne. Des repères pour les alpinistes chevronnés comme pour les randonneurs d'un jour. Ce numéro accompagne l'exposition "Refuges alpins. De l'abri de fortune au tourisme d'altitude" que le public est invité à découvrir au Musée dauphinois à Grenoble du 4 juin 2020 au 21 juin 2021. Trouver un lieu où passer la nuit en sécurité, telle est la première fonction du refuge, celle-là même des hospices implantés sur les grands cols qui accueillaient les voyageurs au Moyen Age et les dérobaient au froid, à la neige et à la peur de la mort. Avec la naissance de l'alpinisme et la création des clubs alpins, l'arc alpin se couvre peu à peu de refuges de toutes tailles et de toutes sortes (cabanes non gardées, refuges " gardiennés ", " hôtels " d'altitude, etc.). Ces dernières années, nouveau bouleversement, les refuges se métamorphosent ici en ateliers culturels, là en observatoires du changement climatique, ailleurs en lieux touristiques, devenant même le but de certaines randonnées (et non plus seulement une étape). Ce sont toutes ces mutations que ce numéro de L'Alpe va examiner à la loupe. AU SOMMAIRE DE CE NUMERO DE PRINTEMPS : - De l'abri au tourisme Dans son exposition, le Musée dauphinois se penche sur l'histoire des refuges, réfléchit à leurs usages et à l'imaginaire qu'ils véhiculent. - Système débrouille Les cabanes de bergers, prisées aujourd'hui, n'ont longtemps été qu'un abri spartiate. - Un laboratoire architectural Depuis la fin du XVIIIe siècle, combien de structures ont été expérimentées pour abriter alpinistes et randonneurs ? - Des modèles de durabilité ? Comment construire un abri dans les conditions extrêmes de la haute montagne avec le moins d'impact sur l'environnement ? - (Ré)inventer l'inventaire ? L'Inventaire du patrimoine a lancé une campagne photographique atypique sur les refuges des Alpes françaises. - Un p'tit coin d'paradis Formidable, cet (autre) inventaire sur les... toilettes en montagne (! ) entrepris par le photographe suisse Marco Volken. - Chroniques des hauteurs Les livres d'or des refuges sont une source précieuse pour suivre l'évolution des pratiques. - Le casse-tête du casse-croûte Le refuge du col de la Vanoise accueille une centaine de visiteurs par jour. Une foule incertaine qu'il faut nourrir. - Gardienne du Temple (Ecrins) Marie Gardent est gardienne. Elle évoque son quotidien là-haut... - Portfolio : Uli Wiesmeier Quarante ans de photographie. Un regard respectueux et corrosif, lumineux et sombre. - La nouvelle vie des refuges Buts de randonnées, pôles culturels, échappatoires pour urbains en mal d'authenticité ou écoles de la montagne : quelles seront les fonctions des refuges demain ? - Brèves de refuges Guide, Claude Gardien a fréquenté les bat-flanc de centaines de refuges et y a glané des petites tranches de vie.

03/2020

ActuaLitté

Sociologie

Tel-Aviv. Le quartier de Florentine, un ailleurs dans la ville

Fruit d'une collaboration entre une géographe et un architecte-urbaniste, cet ouvrage propose une lecture inédite de Tel-Aviv. En trois parties et sept chapitres, il fait découvrir au lecteur l'histoire urbaine, sociale et forcément politique de cette ville " globale " du Moyen-Orient, éminemment méditerranéenne et maintenant mondialement reconnue pour son patrimoine architectural et la modernité de son plan d'urbanisme, celui dessiné par P. Geddes en 1925. Ce récit renouvelé de la ville, de son développement au début du XXe siècle et de ses transformations les plus contemporaines, est porté par une géographie urbaine et sociale minutieuse et de longue haleine du quartier de Florentine : un ancien quartier dit juif de Jaffa, de migrants d'abord venus de Salonique, puis d'Iran et aujourd'hui d'Afrique comme d'Asie, longtemps abandonné des services publics et particulièrement défavorisé malgré sa centralité. L'auteur montre, déambulation graphique à l'appui (dessins d'analyse et d'ambiance dans ses rues, arrière-cours et intérieurs), comment ce quartier a en réalité été l'un des pivots, peu connus, du développement de Tel-Aviv comme ville à part entière et prospère de la Palestine mandataire avant même la création de l'Etat d'Israël. Premier quartier commerçant puis industriel d'une ville qui se voulait à ses débuts uniquement résidentielle, Florentine contribuera en effet à établir à la fois la centralité économique et l'autonomie politique de Tel-Aviv. Cela étant, après la conquête de Jaffa et la fin de la guerre de 1948, ce quartier va progressivement être " effacé " de la carte de la ville. Il réapparaîtra un demi-siècle plus tard, au début des années 2000, comme espace de mobilisation civile et culturelle pour la jeunesse du pays et pour les milliers de travailleurs immigrés européens, asiatiques et africains qui y vivent. Porté par ces transformations, Florentine fait maintenant l'objet d'un véritable engouement et d'une fièvre immobilière et de rénovation particulièrement intense et rapide. Articulant enjeux locaux, nationaux et globaux, cet ouvrage met ainsi en regard la géohistoire du quartier, les traces déposées dans ses rues et ses commerces par ses populations successives et les manifestations les plus banales de l'identification au lieu recueillies dans de nombreux entretiens approfondis aussi bien avec des habitants, des militants associatifs que des décideurs politiques. En circulant entre différents registres de sens et niveaux de lecture, il dépasse la simple étude de cas pour nourrir également les débats sur l'urbain et la mondialisation. Comment comprendre, à partir de cet exemple singulier mais emblématique la quête toujours plus forte de lieux et d'espaces d'identification ? Comment, encore, y déchiffrer, la manière dont se nouent le local et le global ? C'est aussi à cette double interrogation que l'ouvrage propose de répondre, pour repenser le sens du lieu et sa place dans la ville.

06/2018

ActuaLitté

Du XVIe au XIXe siècle

Du monde au désert, l'aspiration à la solitude au XVIIe siècle

Dans la première moitié du xviie siècle, un véritable engouement apparaît pour la vie contemplative et solitaire, en dehors des ordres constitués. Cet engouement touche des femmes du siècle, d'anciens militaires, des laïcs, avocats, chevaliers, seigneurs de province, clercs qui tout en souhaitant mener une vie intérieure plus dense et plus contemplative, ne s'engagent pas dans les ordres monastiques. Ils se retirent du monde, totalement ou partiellement, dans des lieux isolés, parfois éloignés des villes et s'engagent au silence, à la prière et à la conversion de leurs moeurs. Ils rejoignent les solitaires de Port-Royal, comme Pierre-Thomas du Fossé, ou fondent, pour certains, des résidences, comme ce fut le cas de Jean de Bernières-Louvigny, Trésorier du roi de France, membre laïc du Tiers-Ordre franciscain et qui fonda, à la fin de sa vie, l'ermitage de Caen. Cet univers de l'entre-deux, du monde au désert, se constitue de façon pérenne dans un contexte encore marqué par le souvenir de la Ligue et bientôt confronté à la Fronde. Il s'élabore dans une période où le sentiment religieux s'individualise et s'approprie la mystique Rhéno-flamande et la Devotio moderna dont la chartreuse de Paris - qui fut une des grandes inspiratrices du désir de retrait du monde - favorisera la diffusion en français. Ces nouveaux convertis s'attachent donc à la contemplation mais aussi à la doctrine de la pauvreté volontaire, dans la mouvance franciscaine, comme Gaston de Renty qui se retirera de la vie militaire, en Normandie, pour se consacrer aux pauvres. Tous sont attirés par la doctrine de l'abandon véhiculée par les écrits de Benoît de Canfield, de Surin et plus tard de Madame Guyon, ce qui vaudra à certains d'entre eux la méfiance de l'autorité ecclésiale, voire la condamnation pour quiétisme. Il s'agit avant tout de fortes personnalités qui iront jusqu'au bout de leur projet, parfois en marge des institutions, comme Jean de Labadie. L'aspiration à la solitude, à travers ses modèles institutionnels, leur dépassement et sa réinvention permanente pose ainsi la question de la liberté de l'homme face aux enjeux de sa foi et de son engagement sociétal dans un XVII e siècle commençant, marqué, comme le soulignait Henri Bremond, par l'invasion mystique. Et au-delà des cas de figure étudiés au cours de la première journée, c'est toute une tradition esthétique du retrait du monde qui se laisse percevoir et qui perdurera dans les milieux laïcs où progressivement retraite et contemplation de la nature se rejoignent laissant un patrimoine architectural et pictural riche qui évoqué dans la troisième partie de ce livre. Conseil scientique : Nathalie Nabert, Institut Catholique de Paris, CRESC, Pascal Pradié (osb), CRESC, attaché de recherches au CNRS, CRAHAM, Jean-Robert Armogathe, Ecole Pratique des Hautes Etudes, président de la Société d'étude du XVII e , Gérard Ferreyrolles Paris IV-Sorbonne, Philippe Luez, Conservateur général du patrimo

04/2021

ActuaLitté

Musique

Chemin d'écriture. Intégrale 16 CD Yves Duteil

Retracer dans un coffret ce demi-siècle d'écriture et de musique est plus qu'un itinéraire, c'est un nouveau voyage. Pour offrir un écrin à ces deux cents chansons, il fallait trouver une cohérence, donner un reflet fidèle à leur parcours, montrer comment naissent les chansons, "de ces riens qui pour moi font un tout... " , deux vers surgis d'une révolte, une phrase volée au vent léger d'une conversation ou l'instant précieux d'un regard échangé... . La vie est une source d'inspiration permanente que la poésie enveloppe de beauté pour la rendre plus supportable. Rien n'est indicible en chanson. La souffrance, le désespoir, la violence et la douceur y cheminent de concert. Dans un même album, l'amour, le regret, la nostalgie et l'espérance font bon ménage. Nos années se succèdent en laissant au passage le sillage de leur tristesse ou de la joie qui les illumine. Un carnet de chansons... Comme si j'étais peintre en émotions. Pour surtout ne rien perdre de ces instantanés fragiles à ranger dans nos malles aux trésors. L'immatériel est plus résistant parfois que la pierre des statues, et la mosaïque exige du recul pour en révéler l'image... Elle suppose aussi parfois qu'on couche sans attendre sur le papier la photographie des sentiments avant qu'elle ne s'efface. Du plus intime au plus ouvert, tout est là, en partage de confiance... Entre jardin secret et jardin public, voici l'intégrale de mes chansons... Yves Duteil auteur-compositeur-interprète du patrimoine de la chanson francophone, signe 50 ans de carrière. Par son goût des mots et de la musique, il nous propose un voyage en chanson au coeur de la langue française ! Son 1er single Virages sort en 1972 mais c'est en 1974 que sa carrière sera lancée suite aux prix du public et de la meilleure chanson remportés au festival international de la chanson française en Belgique et à la parution de son 1er album studio L'écritoire. Tout au long de sa carrière, Yves Duteil sera récompensé à de nombreuses reprises : le prix Jeune Chanson du Haut Comité de la langue française, l'Académie Charles Cros, le prix du secrétariat à la Culture... A la sortie de l'album Statut d'histoire, il reçoit l'insigne de Chevalier des Arts et des Lettres. En 1985, La langue de chez nous obtient la médaille d'argent de l'Académie française et le grand prix de la meilleure chanson française par la SACEM. En 1988, Prendre un enfant est élue meilleure chanson française du XXè siècle. Il signe La fleur de l'impossible, chanson des Jeux Olympiques d'hiver d'Albertville en 1992. En 1997, il reçoit à nouveau le grand prix de la SACEM pour l'album Touché. En 2018, il reçoit le grand prix de la société des poètes français.

05/2023

ActuaLitté

Revues Ethnologie

Barvalo. Roms, Sinti, Gitans, Manouches, Voyageurs... Edition bilingue français-romani

Si les populations romani constituent la plus grande minorité ethnique d'Europe (12 millions de personnes), elles font l'objet, hier comme aujourd'hui, de nombreuses discriminations. Tout en mettant l'accent sur l'antitsiganisme contre lequel toutes luttent, il s'agit cependant ici de faire connaître, d'affirmer et de revendiquer la richesse et la diversité des cultures romani. " Barvalo ", le mot qui donne son titre à cet ouvrage et à l'exposition au Mucem (Marseille) qu'il accompagne, signifie en romani " riche " et par extension " fier ". Il est programmatique et défend, en s'intéressant à l'histoire et à la diversité des populations romani d'Europe, neuf siècles de présence européenne et d'affirmation culturelle. L'exposition comme le livre, entièrement bilingue français-romani, ont été conçus de manière collaborative avec un comité composé de cinq commissaires et quatorze experts d'origine romani (Roms, Sinti, Manouches, Gitans, Gens du voyage/Voyageurs) et non romani, de nationalités et de profils différents. Tous et toutes oeuvrent à ce projet depuis 2018 et ont contribué au livre. Ce catalogue, richement illustré, est découpé en trois grandes parties. La première présente l'ambition du projet : une minorité discriminée, voire persécutée (ce sont 500 000 personnes romani qui ont péri dans les camps nazis), est invitée à prendre la parole. Les directrices et directeur d'ouvrage y présentent la méthodologie de ce travail collaboratif ainsi que les enquêtes de terrain commandées dans ce cadre. La seconde partie s'attache à renverser le regard, par la reconnaissance notamment du rôle des représentations stéréotypées dans la culture et le folklore. Il s'agit également d'affirmer que le temps est venu de valoriser en tant que tel l'héritage et le patrimoine romani. La troisième partie, intitulée " Nous sommes le peuple romani " (Ian Hancock), propose une réflexion contrastée sur les notions d'appartenance et d'identité, au fil de la longue histoire des populations romani en Europe. La présentation de l'installation de l'artiste Gabi Jimenez, le " Musée du gadjo ", est centrale et prend le parti d'inverser la perception du lecteur/visiteur. La " gadjologie ", une science imaginaire et parodique de l'Autre selon la perception romani, que l'artiste met en scène vient ainsi révéler ainsi l'absurdité de l'essentialisation de l'Autre quand elle est poussée à son extrême. Se trouve aussi questionné par ce biais le rôle du musée d'ethnographie comme diffuseur d'une " vérité ". Au fil de l'ouvrage, on trouvera aussi des espaces sensibles et incarnés, avec la parole de quatre personnes vivant en France et appartenant chacune à un groupe romani distinct ; leurs récits personnels et familiaux entrent en résonnance avec une histoire européenne plus large et partagée. Enfin, le livre se clôt par une galerie de portraits de personnalités célèbres et moins connues, témoignant de la richesse des cultures romani et de la fierté des différentes communautés à contribuer à la diversité culturelle des sociétés européennes, afin d'affirmer haut et fort : " Barvalo ".

05/2023

ActuaLitté

Pléiades

Romans et récits. Tome 2

Kessel est difficile à situer dans le paysage littéraire. On l'y prenait parfois pour un intrus. A la NRF, Gaston Gallimard crut très tôt en lui, tandis que Gide (qui changerait d'avis) et Paulhan avaient, comme on dit, "des réserves" . Peut-être n'était-il à leurs yeux qu'un reporter écrivant des romans, avec une circonstance aggravante : le succès. Alors romancier ou reporter ? Un pur romancier ? un authentique reporter ? La question, à vrai dire, ne se pose pas en ces termes. Cette édition ne fait pas acception de "métiers" ni d'ailleurs de genres littéraires. Elle juxtapose dans l'ordre chronologique des ouvrages relevant, à des degrés divers, de la fiction, du récit, du reportage ou de ce que Kessel aimait à nommer documentaire - un mot encore neuf dans les années 1920 et qu'il donna pour titre à la première partie de Vent de sable. Elle bénéficie d'autre part d'un fait nouveau : les manuscrits de Kessel sont désormais accessibles. Ces deux volumes en reproduisent de nombreux éléments - dont le scénario inédit du Bataillon du ciel - et les exploitent pour cerner ce qui fait la spécificité de l'oeuvre. Le "système Kessel" , on croit le connaître : courir le monde, faire provision de "choses vues" , livrer des reportages à la presse, en tirer (selon des modalités variables) un récit, puis publier un roman qui utilise (dans des proportions tout aussi variables) ces reportages et ce récit. Mais les apparences sont trompeuses : Le Lion (roman "kényan" de 1958), par exemple, aurait été conçu avant que ne soit achevé La Piste fauve (récit, kényan lui aussi, de 1954). L'oeuvre ne décrit pas une trajectoire systématique qui mènerait du réel (terrain du reporter) à la fiction (ou littérature). Chez l'auteur de Makhno et sa juive, la réalité n'est jamais chimiquement pure. Kessel pourrait bien être un précurseur de ce qu'on appelle aujourd'hui en bon français la creative non fiction. L'aventure, l'événement, tel homme rencontré, telle situation vécue possèdent pour lui un potentiel poétique ou romanesque qui fait d'eux des objets pour l'imagination. Pour le dire à la manière de Malraux, le réel est une musique sur laquelle nous sommes contraints de danser. Mais Kessel le trouve insuffisant. Comme Malraux lui-même, comme Cendrars, Saint-Exupéry et bientôt Gary, il est de ceux qui offrent à la réalité des prolongements puisés dans l'imaginaire. Ce faisant, il place son oeuvre - et ses aviateurs, ses Russes blancs, ses guerriers masaï, ses cavaliers afghans - aux confins "du réel, du rêve, de l'errance et de l'histoire" (Malraux encore). Il la rend transfrontalière, se rend lui-même inclassable et fait de l'aventure un mythe moderne. Sans doute respire-t-il "l'air du temps" , qui est aussi le nom d'une collection à laquelle il donna des livres ; mais il sait s'en abstraire et atteindre à l'essentiel. Ecrite en un siècle qui menaça de mille manières l'espèce humaine, toute son oeuvre peut être lue

06/2020

ActuaLitté

Pléiades

Romans et récits. Tome 1

Kessel est difficile à situer dans le paysage littéraire. On l'y prenait parfois pour un intrus. A la NRF, Gaston Gallimard crut très tôt en lui, tandis que Gide (qui changerait d'avis) et Paulhan avaient, comme on dit, "des réserves" . Peut-être n'était-il à leurs yeux qu'un reporter écrivant des romans, avec une circonstance aggravante : le succès. Alors romancier ou reporter ? Un pur romancier ? un authentique reporter ? La question, à vrai dire, ne se pose pas en ces termes. Cette édition ne fait pas acception de "métiers" ni d'ailleurs de genres littéraires. Elle juxtapose dans l'ordre chronologique des ouvrages relevant, à des degrés divers, de la fiction, du récit, du reportage ou de ce que Kessel aimait à nommer documentaire - un mot encore neuf dans les années 1920 et qu'il donna pour titre à la première partie de Vent de sable. Elle bénéficie d'autre part d'un fait nouveau : les manuscrits de Kessel sont désormais accessibles. Ces deux volumes en reproduisent de nombreux éléments - dont le scénario inédit du Bataillon du ciel - et les exploitent pour cerner ce qui fait la spécificité de l'oeuvre. Le "système Kessel" , on croit le connaître : courir le monde, faire provision de "choses vues" , livrer des reportages à la presse, en tirer (selon des modalités variables) un récit, puis publier un roman qui utilise (dans des proportions tout aussi variables) ces reportages et ce récit. Mais les apparences sont trompeuses : Le Lion (roman "kényan" de 1958), par exemple, aurait été conçu avant que ne soit achevé La Piste fauve (récit, kényan lui aussi, de 1954). L'oeuvre ne décrit pas une trajectoire systématique qui mènerait du réel (terrain du reporter) à la fiction (ou littérature). Chez l'auteur de Makhno et sa juive, la réalité n'est jamais chimiquement pure. Kessel pourrait bien être un précurseur de ce qu'on appelle aujourd'hui en bon français la creative non fiction. L'aventure, l'événement, tel homme rencontré, telle situation vécue possèdent pour lui un potentiel poétique ou romanesque qui fait d'eux des objets pour l'imagination. Pour le dire à la manière de Malraux, le réel est une musique sur laquelle nous sommes contraints de danser. Mais Kessel le trouve insuffisant. Comme Malraux lui-même, comme Cendrars, Saint-Exupéry et bientôt Gary, il est de ceux qui offrent à la réalité des prolongements puisés dans l'imaginaire. Ce faisant, il place son oeuvre - et ses aviateurs, ses Russes blancs, ses guerriers masaï, ses cavaliers afghans - aux confins "du réel, du rêve, de l'errance et de l'histoire" (Malraux encore). Il la rend transfrontalière, se rend lui-même inclassable et fait de l'aventure un mythe moderne. Sans doute respire-t-il "l'air du temps" , qui est aussi le nom d'une collection à laquelle il donna des livres ; mais il sait s'en abstraire et atteindre à l'essentiel. Ecrite en un siècle qui menaça de mille manières l'espèce humaine, toute son oeuvre peut être lue

06/2020

ActuaLitté

Critique littéraire

Pourquoi ce monde. Clarice Lispector, une biographie

Argumentée par des années de recherche, de consultation de manuscrits inédits et de correspondance privée, d’entretiens avec des proches de l’écrivaine, la biographie de Clarice Lispector par Benjamin Moser est à la fois un témoignage et un roman. Déjà traduite en portugais et publiée au Brésil, elle paraît pour la première fois en français aux éditions Des femmes-Antoinette Fouque, qui ont entrepris depuis les années 1980 de publier l’intégralité de l’œuvre de Clarice Lispector (1920-1977) et ont permis de faire connaître en France celle qui compte parmi les plus grands écrivains du xxe siècle, à l’égal de Joyce, Rilke ou Kafka. À sa mort, Clarice Lispector, bien que peu connue en Europe, était depuis longtemps devenue l’une des figures mythiques du Brésil, le « Sphinx de Rio de Janeiro », une femme qui fascinait ses compatriotes depuis son adolescence et la publication de son premier roman, Près du cœur sauvage. Avec ce portrait de femme aussi passionnant, élégant et divers que son modèle, Benjamin Moser rend compte de la troublante identité de cette écrivaine qui pouvait dire : « Je suis si mystérieuse que je ne me comprends pas moi-même », sans jamais altérer le mystère de la personnalité de cet être d’élection, ni de son écriture si singulière. Par touches subtiles autant que précises, il se tient au côté de la petite fille née en Ukraine, dans les atrocités d’une épouvantable guerre civile et dont les racines plongeaient dans un monde de violence et de pauvreté, comme de la femme de diplomate qui tiendra pendant des années ce rôle à la perfection, voyageant d’un continent à l’autre. Mais elle ne se reconnaissait qu’une patrie, le Brésil, qu’une langue, le portugais. De l’enfant qui inventait des histoires magiques à l’écrivaine pour qui la question des noms et de la nomination domine toute l’œuvre, Clarice Lispector ne cessa jamais de s’approprier les mots et d’en faire ressortir toute l’étrangeté jusqu’à devenir la « princesse de la langue portugaise ». Âme ardente, amoureuse de la vie, ayant une conscience aiguë de la mort, toujours en révolte, contre le monde autant que contre son propre mythe, proche de la mystique juive, politiquement engagée, sûre de sa valeur et assaillie de doutes, elle a exprimé toute la gamme des sentiments et de l’expérience humaine à travers les multiples facettes de son oeuvre, dans les romans, les nouvelles, la correspondance, le journalisme. Femme, épouse, mère, écrivaine : Benjamin Moser s’attache à toutes les expressions d’une personnalité unique et exceptionnelle, tout en mettant en lumière le contexte historique et culturel, en Europe comme au Brésil, qui sous-tend cette destinée particulière. Les nombreuses citations d’une œuvre qui fut peut-être, selon lui, la « plus grande autobiographie spirituelle du xxe siècle », nous invitent à lire ou relire, inlassablement, la prose splendide de Clarice Lispector. « Il sera très difficile pour quiconque d’écrire ma biographie », écrivait-elle. Le défi a été relevé avec succès, entre ce que Pourquoi ce monde donne à lire et ce qu’il laisse le lecteur imaginer.

03/2012

ActuaLitté

Critique littéraire

Histoire romaine. Tome 5, Livre IX, Le livre illyrien ; Fragments du livre macédonien, Edition bilingue français-grec ancien

Ce livre, le neuvième de l'Histoire romaine, marquait une étape importante dans la série des guerres étrangères puisqu'il racontait comment les Romains, intervenant pour la première fois dans le bassin oriental de la Méditerranée, avaient vaincu et soumis Philippe V puis anéanti la monarchie macédonienne après la défaite de Persée à Pydna. Appien lui avait donc donné le titre de "Livre macédonien" et avait ajouté une sorte d'appendice, le "Livre illyrien", où il exposait les circonstances de la conquête, achevée par Auguste, des régions qui formeront l'Illyricum. Fâcheusement, le Livre macédonien fut perdu, peut-être dès le IXe siècle de notre ère et le Livre illyrien aurait sans doute connu le même sort si les éditeurs byzantins ne l'avaient pas inséré à la suite du livre V des Guerres civiles. Paradoxalement, nous avons donc perdu ce qu'Appien considérait à juste titre comme le plus important et conservé un appendice moins travaillé. Heureusement, les Extraits constantiniens nous ont conservé les passages du Livre macédonien relatifs aux négociations entre Romains et Macédoniens à l'occasion des trois guerres qui les opposèrent. On constate qu'Appien suivait une tradition différant sensiblement de celle qui prévaut depuis Polybe et, en particulier, qu'il n'était pas dupe des accusations portées contre Persée par des adversaires décidés à l'anéantir, quoi qu'il fît. Il était donc utile de rééditer et de traduire ces pages où il apparaît qu'Appien jugeait justifiée la rancune de Philippe V, ulcéré de l'ingratitude des Romains qu'il avait loyalement soutenus contre Antiochos III, et portait sur Persée un jugement favorable en montrant que ses qualités l'avaient rendu suspect aux Romains. Le Livre illyrien, malgré sa brièveté, reste une source historique de première importance. Dans la première partie du livre, consacrée aux guerres menées par les Romains dans la région de l'Adriatique contre des populations pratiquant la piraterie, Appien suit une tradition originale fort éloignée de Polybe, en particulier pour tout ce qui concerne Démétrios de Pharos. Dans la seconde partie, la plus détaillée, Appien relate, d'après les Mémoires d'Auguste, les opérations menées par celui-ci dans les Balkans après sa victoire sur Sextus Pompée et l'élimination de Lépide. Même s'il ne s'agit que d'un résumé, d'ailleurs plus complet que celui que Dion Cassius donne des mêmes événements d'après la même source, nous remontons à travers Appien au témoignage d'Auguste, qui, dirigeant les opérations et participant aux combats, donna de ces guerres engagées contre des populations mal connues une relation qui s'apparentait, semble-t-il, aux fameux "Commentaires" de César. Bref, en dépit des accidents de la tradition manuscrite qui ont entraîné la perte d'une partie de sa substance, et plus particulièrement le récit des fameuses batailles de Cynoscéphales et de Pydna, ce livre IX de l'Histoire romaine reste une source documentaire de première importance dont la réédition sur des bases scientifiques solides et la traduction en langue française paraissent entièrement justifiées. Le commentaire a bénéficié d'un concours de premier ordre, celui du professeur Pierre Cabanes, le meilleur connaisseur français des questions illyriennes.

11/2011

ActuaLitté

Ethnologie

Les Pandé de Bali : la formation d'une "caste" et la valeur d'un titre

Avant-propos Brève note sur la transcription et la prononciation des mots balinais Introduction Première partie Le positionnement du fait Pandé Chapitre I : Le repérage des groupes Pandé 1. Les artisans et les Pandé dans l'ancienne société 1. 1 Présentation des sources 1. 2 Les chartes des anciens rois de Bali 1. 3 Les sources javanaises 1. 4 Les sources néerlandaises 2. Les métiers de Pandé, la parenté et le titre de Pandé dans la société contemporaine 2. 1 Groupes d'artisans et groupe de parenté 2. 2 Différences et similitudes des groupes Pandé 2. 3 Les Pandé Bali Aga Chapitre II : Les cadres de l'identité Pandé 1. Groupes locaux ou localisés et unités translocales 1. 1 Introduction au contexte de la parenté 1. 2 Unités de résidence, sanggah, sanggah gedé et dadia 1. 3 Les unités translocales : parenté et hiérarchie 2. Déformations et déplacements des groupes de parenté 2. 1 Fusions et scissions 2. 2 Localisation et délocalisation Deuxième partie Le cas des Pandé Bratan Chapitre III : La formation d'un groupe titré 1. Les groupes localisés et leurs temples 1. 1 Les dadia et familles du Nord et du Sud 1. 2 Les différences inscrites dans les temples 2. La tradition des origines et l'origine de la tradition 2. 1 Les nouveaux Pandé Bratan du Sud 2. 2 Les Bratanais et l'ancien village de Bratan 2. 3 Changements sociaux et glissements d'identité Chapitre IV : La mise en écriture du récit des origines 1. La version de Jadi 1. 1 Mpu Bumi Sakti, l'ancêtre de Madura 1. 2 Les voyages à Bali 1. 3 Les circonstances du départ de Madura 1. 4 Le châtiment de Brahma 2. Les différences de la version de Mengwi 2. 1 Les références au fonds littéraire javanais 2. 2 Les emprunts à la chronique de Gélgél 2. 3 L'appel à la tradition des Pandé Tusan 2. 4 Autres distorsions et réajustements Troisième partie L'idéologie Pandé Besi et ses fondements Chapitre V : Le mouvement Pandé et son contexte social 1. L'affirmation de la différence Pandé 1. 1 Les signes d'un statut noble 1. 2 Le refus de l'eau lustrale brahmanique 1. 3 L'impulsion en faveur de l'unité 2. Conformité et opposition aux valeurs de la société de castes 2. 1 L'attraction du statut de Satria 2. 2 Les implications de la dissidence religieuse Chapitre VI : La double tradition écrite des Pandé Besi 1. Présentation des manuscrits étudiés 1. 1 Les textes non-retenus 1. 2 Les textes de la tradition Pandé Besi 2. L'histoire des guerriers de Majapahit 2. 1 Le fait et le dit des ancêtres javanais 2. 2 La conformité au modèle Triwangsa 3. Le "Trésor Révélé" 3. 1 Aji Besi, le forgeron primordial 3. 2 Antériorité, supériorité et séparation des Pandé Besi 4. Acceptation et contestation de la hiérarchie des castes Conclusion Appendice A : Le texte balinais de l'histoire des origines des Pandé de Serongga Appendice B : Traduction du texte et commentaires introductifs Appendice C : Quatre documents sur l'affaire de Ben

01/1987

ActuaLitté

Ecrits sur l'art

Soliloques d'un peintre. Écrits 1896-1958

Contemporain des avant-gardes du début du XXe siècle, Georges Rouault (1871-1958) participa au Salon d'Automne de 1905, dit des "? fauves ? ", avec Matisse, Camoin, Derain et Manguin. Peintre de nus, de portraits, de paysages, il fut également céramiste, graveur et illustrateur de livres pour Ambroise Vollard, qui fut son marchand à partir de 1917 ; puis dessinateur de modèles pour la tapisserie et le vitrail. Inspiré par les sujets religieux et par le cirque, dont il fut un fervent spectateur, Rouault s'impose comme le peintre des laissés pour compte de la société, dont il donne une image expressive et intense, souvent saturée de matière. Or sa création artistique, très riche et variée, fut doublée d'une production littéraire continue, que ce recueil permet de redécouvrir. G. Rouault fut d'abord un témoin de son temps ? : auteur de mémoires sur ses contemporains, notamment sur son maître à l'Ecole des Beaux-Arts Gustave Moreau, ou sur ses amis écrivains Léon Bloy, André Suarès et Joris-Karl Huysmans, il publia en 1926-1927 Souvenirs intimes, qui reste son ouvrage le plus célèbre avec Soliloques, édité en 1944. Premier conservateur du musée Gustave Moreau de Paris, il fut encore un théoricien, dont les articles étaient très prisés dans la presse artistique entre les années 1920 et 1950. Poète polémiste, il composa un texte en prosimètre enflammé, Cirque de l'Etoile filante (1938), qui use de la métaphore du cirque pour donner une image onirique et très personnelle de l'actualité politique et sociale. Une grande partie des textes parus du vivant de Rouault étaient épuisés ou bien difficiles à réunir ou encore très lacunaires. L'édition établie et annotée par Christine Gouzi avec la collaboration d'Anne-Marie Agulhon, réunit pour la première fois la majorité d'entre eux et les replace dans leur contexte. Le lecteur y trouvera encore de nombreux manuscrits inédits, qui complètent la connaissance de Rouault polygraphe. L'ouvrage permet ainsi d'aborder des textes autobiographiques jamais retranscrits, des souvenirs sur les artistes que le peintre a côtoyés, mais aussi un livre théorique intitulé Ingres, Degas, Renoir, Cézanne, ainsi qu'une pièce de théâtre burlesque, narrant les aventures d'Ubu fils critique d'art, rédigée à l'imitation de l'Ubu Roi d'Alfred Jarry. On a aujourd'hui oublié qu'à la suite du procès qui l'opposa aux héritiers de Vollard, en 1946-1947, Rouault fut le rédacteur du texte qui servit à établir la loi sur la propriété intellectuelle : un des chapitres rappelle cet épisode essentiel des années d'après-guerre. De même Rouault poète restait un inconnu ? : influencé par Apollinaire, par Jehan-Rictus, Verlaine et Villon, il composa pourtant de nombreux poèmes en vers libres ou en prose, qui peuvent être analysés en symbiose avec ses gravures, ses peintures ou même les nombreuses illustrations qu'il imagina au cours de sa vie. A travers les écrits de Rouault, c'est donc l'homme et l'artiste qui se révèle sous un nouveau jour, à la fois plus familier et plus engagé.

10/2022

ActuaLitté

Histoire de France

Journal d'un interné. Drancy 1942-1943

Drancy de Georges Horan est un manuscrit inédit récemment découvert par sa famille. Connu pour ses 56 estampes publiées en 1947 sous le titre Drancy, seuil de l'enfer juif (dont la réédition a lieu en parallèle par les éditions Créaphis), Horan livre ici un texte exutoire et cathartique rédigé dans les semaines qui suivent sa libération du camp en mars/avril 1943. La sincérité et l'immédiateté du texte lui confèrent une portée particulière. "Ecrit pour [lui], pour [s]e libérer d'une obsession", ce texte à usage privé ne le force pas à l'optimisme, contrairement à sa correspondance avec sa famille. Il fait preuve d'humour, d'ironie et de lucidité, s'autorise un style très personnel qui ajoute à ce texte une indéniable dimension littéraire, rare pour ce type de document. Il s'agit de "fixer sur le papier" ce dont il fut le témoin au cours de son internement, débuté le 10 juillet 1942. Encouragé par René Blum, jeune frère de Léon, il a dessiné ces "choses vues" mais il les a aussi décrites. Ce texte inédit, qui documente notamment l'été 1942, une des pires périodes du camp, éclaire ses dessins d'un jour nouveau et donne des clefs de compréhension sur ce moment majeur pour l'histoire du camp de Drancy. Celui-ci devient alors le camp de transit de l'ensemble des camps d'internement des juifs de zone occupée, comme de zone libre, principalement vers Auschwitz-Birkenau. Son témoignage sur les déportations en gare du Bourget est exceptionnel : de "corvée de Bourget" il est "porteur de bagages" pour les départs et les arrivées. Thomas Fontaine, historien et directeur du musée de la Résistance national, développe en postface l'importance du rôle de cette gare dans le processus de déportation et de l'enjeu mémorial qu'elle constitue. Extraits de texte (avant-propos de Georges Horan) : 16 avril 1943. J'écris ceci pour moi. Pour me libérer d'une obsession. J'essayerai difficilement d'être objectif et m'appliquerai à n'être qu'un témoin, un oeil attentif. Si la subjectivité ne veut point se soumettre, tant pis. [...] J'écris pour moi-même. Peut-être en donnerai-je une lecture, afin que personne ne m'interroge plus sur Drancy. Je suis intoxiqué de Drancy, saturé. Toutes ses images - j'en ai fait des centaines, peut-être un millier – me sont familières ; elles sont impressionnées dans ma pensée, et mes yeux les reconstituent. Je dors encore sous leur maléfique influence. Je n'ai que ce moyen de leur échapper ; les fixer sur le papier. Elles s'useront. Mais auparavant je dois leur donner un corps, une forme. Je ne suis malheureusement ni Callot ni Goya ni Picasso. Mais j'ai promis aux compagnons de retracer leur misère. C'est un devoir. De ces centaines de croquis, de silhouettes, je dois tirer une documentation vengeresse. [...] Je dois dire pour ceux qui ne le peuvent. Certaines affirmations déplairont parce que vraies. Je ne dresse pas un réquisitoire : il se dégagera lui-même. Je ne plaide pas une cause ; d'autres le feront. J'ai vu fort peu de noblesse ; mais énormément de laideur, de bassesse et d'horreur. Quoique je fasse je ne saurai jamais dépeindre l'épouvante des nuits précédant les déportations : les hurlements désespérés des femmes, les lamentations, les pleurs, les gémissements des enfants et des bébés. Je suis tellement inférieur à la tâche à accomplir. Dussé-je revivre péniblement en ma chair, en mon esprit, en mon coeur les tourments qui ont cessé provisoirement pour moi, que je dois l'entreprendre. Et que mes compagnons et les autres me pardonnent si je ne réalise que partiellement ce travail épouvantable.

10/2017

ActuaLitté

Critique littéraire

Quelques bibliothèques de la famille royale sous la tempête révolutionnaire à Versailles. Tome 2

En 1791, les acquéreurs des Biens Nationaux des couvents et des abbayes se sont vites précipités pour acheter les terres et bâtiments appartenant aux religieux. Il faut reconnaître qu'à la fin des enchères, les municipalités se trouvent avec un nombre considérable d'archives et d'ouvrages souvent très anciens, restant sans affectation et jugés plutôt encombrant. Dans les grandes villes un dépôt se constitue (souvent dans un ancien couvent) pour stocker ces archives et ces livres en attendant. Inutile de rappeler que les bibliothèques des monastères et des abbayes sont les plus anciennes et les plus riches du royaume à l'époque. En 1794, la vente des biens des émigrés pose à nouveau k même problème : si les terres et les meubles sont toujours facilement monnayables et nouaient facilement de nouveaux acquéreurs ; les archives et les livres intéressent toujours peu de monde et certainement pas les acheteurs étrangers. Des personnes avisées, souvent d'anciens bibliothécaires, vont user de toutes leurs influences auprès de leurs administrations (surtout à Paris) pour que mm ce qui ne peut pas être utilisé directement par l'Administration Républicaine, l'Armée ou l'Instruction Publique ne soit pas détruit. L'idée est de regrouper ces livres et ces archives dan un local dédié pour l'instruction des Enfants de la République et la connaissance des Citoyen : c'est l'origine de la création des bibliothèques Nationales et Municipales et des Archives Nationales / Départementales que nous connaissons aujourd'hui. Les bibliothécaires Parisien vont imposer l'idée de constituer un catalogue général des ouvrages les plus remarquables à conserver qui sont contenus dan les Bibliothèques des émigrés sur tout k territoire de la République et en particulier des membres de la famille royale. Tous les départements doivent se mettre au travail pour réaliser le catalogue en suivant les critères de sélection de l'époque et d'envoyer le résultat à Paris .... L'administration du département de la Seine et Oise (aujourd'hui Yvelines) va trainer : elle a fort à faire par ailleurs et ton ses employés sont occupés à plein temps dans la vente des bien nationaux de la famille "Capet" et des émigrés, trouver dan l'urgence des locaux pour héberger des troupes militaires de passages, s'occuper des blessés dans une ambiance permanente de guerre civile ou de crainte d'une invasion étrangère. Le 23 juin 1794, les administrateurs du département de Seine et Oise reçoivent une lettre venant de Paris qui les invite à se mettre immédiatement au travail et sans chercher de nouvelles excuses. Grâce à cette lettre (reproduite au début de cette transcription), nous pouvons découvrir aujourd'hui le catalogue des ouvrages des membres de la famille royale qui sont estimés dignes d'être conservés en 1794 et qui fait l'objet de cette publication. Les livres ne sont plus dans les bibliothèques, mais regroupés dan des salles du château pour en faciliter leur conservation et leur surveillance car le mobilier du château est entrain d'être vendu... Ce catalogue est construit à partir d'une sélection rigoureuse, on évite de mentionner des titres en double voir en triple exemplaires et même plus, les ouvrages ou manuscrits concernant la Religion, les usages de l'Ancien Régime ne sont pas mentionnés sauf si ils présentent une reliure remarquable. Malgré ces limites, ce "catalogue" est tout de même un remarquable témoin de la richesse culturelle des bibliothèques de la famille royale !! Jean-Luc Augustin

12/2018

ActuaLitté

Critique littéraire

Quelques bibliothèques de la famille royale sous la tempête révolutionnaire à Versailles

En 1791, les acquéreurs des Biens Nationaux des couvents et des abbayes se sont vites précipités pour acheter les terres et les bâtiments appartenant aux religieux. Il faut reconnaitre qu'à la fin des enchères, les municipalités se trouvent avec un nombre considérable d'archives et d'ouvrages souvent très anciens, restant sans affectation et jugés plutôt encombrant. Dans les grandes villes un dépôt se constitue (souvent dans un ancien couvent) pour stocker ces archives et ces livres en attendant. Inutile de rappeler que les bibliothèques des monastères et des abbayes sont les plus anciennes et les plus riches du royaume à l'époque. En 1794, la vente des biens des émigrés pose à nouveau le même problème : si les terres et les meubles sont toujours facilement monnayables et trouvent facilement de nouveaux acquéreurs ; les archives et les livres intéressent toujours peu de monde et certainement pas les acheteurs étrangers. Des personnes avisées, souvent d'anciens bibliothécaires, vont user de toutes leurs influences auprès de leurs administrations (surtout à Paris) pour que tout ce qui ne peut pas être utilisé directement par l'Administration Républicaine, l'Armée ou l'Instruction Publique ne soit pas détruit. L'idée est de regrouper ces livres et ces archives dans un local dédié pour l'instruction des Enfants de la République et la connaissance des Citoyens : c'est l'origine de la création des bibliothèques Nationales et Municipales et des Archives Nationales / Départementales que nous connaissons aujourd'hui. Les bibliothécaires Parisiens vont imposer l'idée de constituer un catalogue général des ouvrages les plus remarquables à conserver qui sont contenus dans les Bibliothèques des émigrés sur tout E territoire de la République et en particulier des membres de la famille royale. Tous les départements doivent se mettre au travail pour réaliser le catalogue en suivant les critères de sélection de l'époque et d'envoyer E résultat à Paris... L'administration du département de la Seine et Oise (aujourd'hui Yvelines) va usiner elle a fort à faire par ailleurs et tous ses employés sont occupés à plein temps dans la vente des biens nationaux de la famille "Capet" et des émigrés, trouver dans l'urgence des locaux pour héberger des troupes militaires de passages, s'occuper des blessés dans une ambiance permanente de guerre civile ou de crainte d'une invasion étrangère. Le 23 juin 1794, les admistrateurs du département de Seine et Oise reçoivent une lettre venant de Paris qui les invite à se mettre immédiatement au travail et sans chercher de nouvelles excuses. Grâce à cette lettre (reproduite au début de cette transcription), nous pouvons découvrir aujourd'hui le catalogue des ouvrages des membres de la famille royale qui sont estimés dignes d'être conservés en 1794 et qui fait l'objet de cette publication. Les livres ne sont plus dans les bibliothèques, mais regroupés dans des salles du château pour en faciliter leur conservation et leur surveillance car le mobilier du château est entrain d'être vendu... Ce catalogue est construit à partir d'une sélection rigoureuse, on évite de mentionner des titres en double voir en triple exemplaires et même plus, les ouvrages ou manuscrits concernant la Religion, les usages de l'Ancien Régime ne sont pas mentionnés sauf si ils présentent une reliure remarquable. Malgré ces limites, "catalogue" est tout de même un remarquable témoin de la richesse culturelle des bibliothèques de la famille royale !! Jean-Luc Augustin

12/2018

ActuaLitté

Littérature française

Carnets. En un mot comme en quatre

Samuel Taylor Coleridge a commencé à tenir un carnet de notes en 1794 dans sa vingt deuxième année, lors d'une randonnée au Pays de Galles. Il devait en garder l'habitude quarante ans durant, jusqu'aux dernières semaines de sa vie. Ces carnets, le poète les qualifia lui-même de "carnets de poche" , de "confidents" , "d'amis" ou de "compagnons" . C'est dire le rôle et l'importance que ces notations au fil de la plume revêtent pour celui qui dit encore de ces "confidents" qu'ils sont sans doute les seuls qui ne "l'ont point trahi" et de ces "compagnons" que devant eux il n'avait "pas honte de se plaindre, de languir, de pleurer". Ces Carnets constituent une masse considérable de manuscrits, Coleridge tenant simultanément plusieurs carnets, parfois sans date, parfois entrecoupés de pages blanches que le poète remplissait parfois après de longues années. Mais la vitalité de cette pensée, l'acuité de l'observation font de cet ensemble bien davantage qu'une simple introduction à l'oeuvre poétique de l'auteur du Dit du Vieux marin. Il suffit de feuilleter les Carnets, dans la merveilleuse traduction de Pierre Leyris, pour être saisi par l'urgence poétique de cette écriture : "Mardi matin, 10heures et demi, 17 avril 1804 : La nuit dernière, bourrasques, ballottements sans merci, mes rêves pleins de peine et de larmes amères". Puis : "Souvent il pleurait dans soin sommeil et il s'éveillait pour trouver/Son oreiller, sous sa joue, froid de larmes/Et pour trouver ses rêves/Si fidèles au passé, ou si prophétiques". Décrire un ciel, une lumière, un arbre, c'est à la fois apaiser la fièvre de la pensée et lui donner une direction. Les Carnets sont l'expression même de l'incandescence d'une pensée qui donnera par la suite les poèmes les plus bouleversants. Suivis de "En un mot comme en quatre" par Antonin Artaud (1896 - 1948) "En un mot comme en quatre, Samuel Taylor Coleridge, comme un certain nombre de poètes notoires à qui comme à lui il fut ordonné de se taire par tels moyens de brimade occulte auxquels il serait temps enfin d'apprendre à résister, Coleridge, dis-je, avait eu vent d'une vérité qu'il n'a pu transmettre à personne et qu'il n'a pu faire passer dans ses poèmes que de très loin (...)" Ainsi commence cet étonnant commentaire des Carnets par Artaud, en 1947, lequel poursuit un peu plus loin : "Car ce qui reste de Coleridge dans ses poèmes est encore moins que ce qui de lui-même est resté dans sa propre vie". Ces quelques lignes disent assez la proximité profonde, intime, presque indicible en réalité, qui, à un siècle distance, lie Coleridge à Antonin Artaud. Peu de temps après le retour d'Antonin Artaud de Rodez, Henri Parisot lui demanda d'écrire une préface pour une traduction qu'il préparait de poèmes de Coleridge. Entre juillet et octobre 1946, Antonin Artaud entreprit à plusieurs reprises d'écrire cette préface sans parvenir à un texte qui le satisfasse. Finalement il envoya en novembre un texte à Henri Parisot sous forme de lettre à laquelle il donna le titre de "Coleridge le traitre". Texte sur lequel Artaud pratiqua par la suite nombreuses corrections manuscrites. Ecrit en juin 1947, au moment où il apportait les derniers remaniements de son texte, le dernier fragment présenté ici, constitue vraisemblablement l'un de ces adendas. Les deux oeuvres ont été publiées ensemble dans la revue L'Ephémère (n° 17) à l'été 1971.

03/2024

ActuaLitté

Policiers

Il était une fois dans les Etats de Savoie Tome 4 : Le suaire

Oeuvres d'art sacrées incendiées, empoisonnement d'un chevalier de Saint-Jean de Jérusalem, cadavre gisant dans la rue Droite de la cité niçoise, mystérieux personnage retrouvé noyé avec des stigmates sur le corps, disparitions de jeunes bergères, usurpation d'identité sur la route entre Nice et Turin... Les polars historiques que Christian MARIA publie avec passion depuis 2004 ont suscité un engouement dans les Alpes-Maritimes. Ils forment aujourd'hui une saga de huit romans (un neuvième est en cours d'écriture) qui situent des aventures entre la Savoie, la Provence, le comté de Nice et le Piémont au XVIe siècle, une saga qui plonge ses racines dans l'Histoire, le patrimoine, les croyances, les superstitions et les moeurs de cette époque tourmentée. C'est l'ensemble de cette production, plusieurs fois récompensée par des prix de littérature, que les Elix Editions (Groupe Entreprendre) proposent désormais au format livre de poche. Les lecteurs amoureux d'aventure et d'Histoire pourront y découvrir, sous un format standardisé, tous les personnages de cette fresque romanesque qui traverse les Etats de Savoie : Charles de Montreil et son épouse, la belle Anne, en prise avec la foi, le doute, l'amour et les passions exacerbées par les nouvelles idées qui parcourent le siècle. Ces héros épris d'humanisme évoluent dans le comté de Nice, à bord de galiotes qui font du cabotage sur la côte du ponant, à Monaco, à Eze, dans les vallées de la Tinée et de la Vésubie, à Tende, à La Brigue, à Gênes, Annecy, Genève et Turin. L'art sacré à Nice, les ruelles médiévales de Lantosque, le palais des Gubernatis à Saint-Martin-Vésubie, les ponts à L'Escarène, Sospel, les moulins, les taillanderies, les châteaux des ducs de Savoie, les routes muletières qui remontent les Alpes, constituent le fabuleux décor des aventures qui tourmentent les hommes et révèlent les âmes. Comment percevait-on les imprécations de Luther ? L'inébranlable volonté des Valois de dominer les terres du Sud ? Les miraculeuses traces sur un linceul que les Savoie promenaient pour asseoir leur dynastie ? Le partage du pouvoir entre les communautés et les seigneuries déclinantes ? Les volontés d'un Dieu tout-puissant et l'infinie douceur des retables de Ludovic Brea ? Les fresques culpabilisatrices de Jean Canavesio ? La Bible traduite en langue française par Jacques Lefebvre d'Etaples ? Les influences démoniaques ? La sorcellerie ? La justice ducale en butte aux prérogatives seigneuriales ? Les mathématiques de François Fulconis ? Le soleil qui tourne autour de la terre ou la terre qui tourne autour du soleil ? Comment ressentaient-ils la peur de la damnation éternelle ? Le labeur harassant sur une terre ingrate ? La jalousie ? La félonie ? La folie ? Le temps qui fuit inéluctablement ? La situation du comté de Nice et du duché de Savoie dans la géopolitique européenne du XVIe siècle est développée, à travers ses aspects économiques, religieux, culturels. Elle sert de cadre aux intrigues qui puisent leur sève dans les grands mouvements religieux, intellectuels et artistiques qui font de ce siècle le début des temps modernes.

05/2019

ActuaLitté

Policiers

Il était une fois dans les Etats de Savoie Tome 1 : La Pala

Oeuvres d'art sacrées incendiées, empoisonnement d'un chevalier de Saint-Jean de Jérusalem, cadavre gisant dans la rue Droite de la cité niçoise, mystérieux personnage retrouvé noyé avec des stigmates sur le corps, disparitions de jeunes bergères, usurpation d'identité sur la route entre Nice et Turin... Les polars historiques que Christian MARIA publie avec passion depuis 2004 ont suscité un engouement dans les Alpes-Maritimes. Ils forment aujourd'hui une saga de huit romans (un neuvième est en cours d'écriture) qui situent des aventures entre la Savoie, la Provence, le comté de Nice et le Piémont au XVIe siècle, une saga qui plonge ses racines dans l'Histoire, le patrimoine, les croyances, les superstitions et les moeurs de cette époque tourmentée. C'est l'ensemble de cette production, plusieurs fois récompensée par des prix de littérature, que les Elix Editions (Groupe Entreprendre) proposent désormais au format livre de poche. Les lecteurs amoureux d'aventure et d'Histoire pourront y découvrir, sous un format standardisé, tous les personnages de cette fresque romanesque qui traverse les Etats de Savoie : Charles de Montreil et son épouse, la belle Anne, en prise avec la foi, le doute, l'amour et les passions exacerbées par les nouvelles idées qui parcourent le siècle. Ces héros épris d'humanisme évoluent dans le comté de Nice, à bord de galiotes qui font du cabotage sur la côte du ponant, à Monaco, à Eze, dans les vallées de la Tinée et de la Vésubie, à Tende, à La Brigue, à Gênes, Annecy, Genève et Turin. L'art sacré à Nice, les ruelles médiévales de Lantosque, le palais des Gubernatis à Saint-Martin-Vésubie, les ponts à L'Escarène, Sospel, les moulins, les taillanderies, les châteaux des ducs de Savoie, les routes muletières qui remontent les Alpes, constituent le fabuleux décor des aventures qui tourmentent les hommes et révèlent les âmes. Comment percevait-on les imprécations de Luther ? L'inébranlable volonté des Valois de dominer les terres du Sud ? Les miraculeuses traces sur un linceul que les Savoie promenaient pour asseoir leur dynastie ? Le partage du pouvoir entre les communautés et les seigneuries déclinantes ? Les volontés d'un Dieu tout-puissant et l'infinie douceur des retables de Ludovic Brea ? Les fresques culpabilisatrices de Jean Canavesio ? La Bible traduite en langue française par Jacques Lefebvre d'Etaples ? Les influences démoniaques ? La sorcellerie ? La justice ducale en butte aux prérogatives seigneuriales ? Les mathématiques de François Fulconis ? Le soleil qui tourne autour de la terre ou la terre qui tourne autour du soleil ? Comment ressentaient-ils la peur de la damnation éternelle ? Le labeur harassant sur une terre ingrate ? La jalousie ? La félonie ? La folie ? Le temps qui fuit inéluctablement ? La situation du comté de Nice et du duché de Savoie dans la géopolitique européenne du XVIe siècle est développée, à travers ses aspects économiques, religieux, culturels. Elle sert de cadre aux intrigues qui puisent leur sève dans les grands mouvements religieux, intellectuels et artistiques qui font de ce siècle le début des temps modernes.

05/2019

ActuaLitté

Beaux arts

Eglises Médiévales des Alpes-Maritimes

Savamment évoqué par Jacques Thirion dans son ouvrage Alpes romanes paru il y a quarante ans, et réexaminé depuis lors d'études monographiques ou à l'occasion du congrès de la Société française d'archéologie en 2010, le patrimoine religieux médiéval méritait que l'on aille plus loin, en posant sur lui un regard nouveau. Pour cette publication, il ne fut pas chose facile de déterminer les édifices qui allaient être évoqués. Chaque bâtiment, chaque ruine avait son sens et son histoire. Des choix ont été effectués cependant : certains édifices s'imposaient, d'autres ont été retenus pour la forte empreinte médiévale qu'ils pouvaient encore porter. En ouverture de l'ouvrage, une présentation générale des monuments chrétiens de l'Antiquité tardive et du Haut Moyen Age a paru nécessaire, tant le semis de lieux de culte, qui s'est mis en place par strates successives du ve au xe siècle, a influé sur la construction du paysage monumental roman. Ce tableau d'une christianisation qui irrigue largement le territoire et qui se poursuit, malgré l'instabilité politique, avec la période carolingienne, nous conduit au début du xie siècle, lorsque s'amorce, grâce à l'action de certains acteurs, évêques, ordres monastiques, seigneurs, un vaste mouvement de construction qualifié d' "architecture romane" . Ainsi le premier âge roman apparaît-il comme un temps de réorganisation où des forces structurantes sont à l'oeuvre, notamment celle du clergé régulier. Cette vague de construction fait naître des édifices qui se distinguent selon leur plan, la présence d'une crypte, la qualité technique et esthétique de l'appareil, son décor et parfois sa polychromie. Simplicité et austérité sont ensuite les maîtres-mots du second âge roman dont les chantiers se prolongent, bien plus qu'ailleurs, jusque dans la seconde moitié du xiiie siècle. Toute son élégance tient au talent des artisans et à leur maîtrise de l'outillage pour produire des parements homogènes et harmonieux, caractéristiques de cette période. C'est dans cet art maîtrisé de la taille que s'inscrivent les constructions de Valbonne ou de Grasse. Le corpus démontre également les liens qui s'établissent avec des formules architecturales adoptées dans le nord de l'Italie, le Languedoc et au-delà, la Catalogne. Une fois le cadre posé, les auteurs se sont attachés à reprendre, pour chaque édifice, l'examen des sources historiques et à fonder leurs nouvelles interprétations sur des observations de terrain. Chaque monographie évoque les sources écrites, réalise une description archéologique du bâtiment, en souligne les évolutions afin d'en proposer, in fine, la datation. Dans de nombreux dossiers, les connaissances ont été affinées par de nouvelles analyses ; la chapelle Saint-Sauveur sur l'île Saint-Honorat est ainsi mieux comprise grâce aux fouilles menées par Yann Codou, l'église Saint-Gervais de Sospel ou l'église Saint-Véran d'Ascros sont redécouvertes à la faveur des analyses de Catherine Poteur, la cathédrale de Vence s'impose comme un modèle dans les chantiers innovants du premier âge roman. L'ouvrage renouvelle les connaissances scientifiques sur cette architecture dont on conserve des exemples exceptionnels et qui font des Alpes-Maritimes un haut lieu des origines de l'art roman.

01/2021

ActuaLitté

Littérature française

Carmina sacra. Poésie latine chrétienne du Moyen-Age

Wilamowitz, le plus fameux des philologues allemands, dit de la poésie latine en général qu'elle n'atteint son sommet que lorsqu'elle acquiert dans les nouvelles formes rythmiques chrétiennes une richesse que les Romains n'ont jamais possédée. Henry Spitzmuller le sait bien lorsqu'il publie en 1971 un livre magistral et monumental, une somme bilingue de poésie latine chrétienne couvrant la totalité du Moyen Age - un millénaire et quart. De ce livre de référence, même cinquante ans plus tard, il n'existe pour le lecteur français aucun équivalent. Aucune publication n'a, comme celle-ci, donné accès à la vastitude poétique et littéraire de ce premier millénaire. Ces 1200 ans de poésie, du IIIe siècle au XVe, commencent à Rome avec le christianisme, dans cette langue latine qui est le socle de la nôtre. L'ouvrage édité par Spitzmuller ne comble pas seulement une lacune, mais il efface un gouffre d'ignorance. Dès sa parution l'on ne cessa de s'y référer. De nombreux auteurs et de nombreuses oevres ne se trouvent en effet qu'ici. On peut lire ce volume aussi bien en esthète qu'en mystique, aussi bien en philosophe qu'en historien. Des figures centrales le composent qui, réduites à leurs travaux théoriques par un siècle partisan, ne purent donc apparaître comme étant aussi les grands écrivains et poètes de leur temps : saint Ambroise et saint Augustin, Lactance, Boèce, Commodien, Prudence, Arator et le pape saint Grégoire le Grand (qui donna son nom au chant "grégorien"), mais également Bède le Vénérable, saint Pierre Damien, saint Anselme, Abélard, saint Bernard, sainte Hildegarde, Adam de Saint-Victor, Alain de Lille, Thomas de Celano, saint Bonaventure, saint Thomas, Jacopone da Todi, Thomas a Kempis, Savonarole, Pic de la Mirandole... Au total ce sont cent-seize écrivains médiévaux dont on découvre l'oeuvre poétique : des auteurs célèbres que l'on n'a pas encore lus, aussi bien que des auteurs inconnus dont, sans le savoir, l'on a déjà entendu les pages car elles font partie du patrimoine de l'humanité. S'ajoute à cela un large ensemble de textes anonymes transmis par la tradition populaire ou liturgique, et qui, des Hymnes de Pâques du Ve siècle aux Cantiques de Noël du XVe en passant par la Lamentation de l'âme damnée ou le Rythme pour le jour du Sabbat éternel, sont autant de chefs-d'oeuvre dont l'existence imprègne l'histoire littéraire tout autant que la vie de la liturgie contemporaine. Une telle somme de poésie ne fût pas complète si elle n'était irréprochablement éditée par Spitzmuller : pédagogiquement annoté et commenté, le volume réserve deux-cents pages aux divers éclaircissements historiques ainsi qu'aux notices biographiques de chacun des auteurs. En dépit du trésor qu'il constitue à lui seul, ce livre magnifique demeurait parfaitement introuvable. A ceux qui vont découvrir ce grand-oeuvre comme à tous ceux qui l'attendaient depuis longtemps, cette nouvelle édition fera saisir, peut-être, la façon dont certains rares ouvrages peuvent devenir le livre d'une vie.

11/2018

ActuaLitté

Sociologie

Destins de garçons en marge du symbolique. Jean le Sot et ses avatars

Ce livre se propose d'explorer les tours et détours de l'initiation des garçons à leur identité sexuée en cheminant au travers du foisonnement créatif fort méconnu des contes de tradition orale, facétieux en particulier, et des pratiques carnavalesques. Les contes facétieux ont en effet été longtemps négligés par les ethnographes qui les écartaient des collectes ou les publiaient dans des ouvrages confidentiels. Ils constituent pourtant un patrimoine d'une richesse insoupçonnée car ils véhiculent des significations psychiques essentielles relatives à la sexualité infantile et à la vie pulsionnelle inconsciente. Ils ont ainsi pour figure emblématique un personnage masculin résolument antihéroïque, Jean le Sot, qui subvertit dangereusement, avec les meilleures intentions du monde, tous les repères logiques, éthiques ou symboliques qui fondent l'ordre social, et dévoile crûment à quel destin fou sont voués ceux qui ne peuvent se détacher de leur mère. À partir de la confrontation d'une centaine de versions françaises, nous commençons donc par examiner la trajectoire complexe et débridée de ce personnage complètement étranger à lui-même dont les mille et une beotiana nous instruisent sur les ratés les plus tragiques du processus initiatique masculin. Nous sommes alors conduits à évoquer le destin d'autres figures folkloriques de la marge qui présentent des affinités parfois surprenantes avec le personnage du niais : ogres et hommes sauvages, enfants monstrueux des fées qui ne grandissent pas et ne prennent langue avec personne : garçons trop forts et terribles qui ont tété trop longtemps leur mère, niais aussi, en amont des collectes orales, dans les grands cycles épiques de la Mésopotamie à l'Irlande, nombre de figures héroïques qui, dans leur déni des limites, sombrent dans la confusion sexuelle et la lassitude mortelle. Tous ces personnages sont à leurs façons des figures tragiques de la démesure qui révèlent la prégnance dans l'imaginaire d'une problématique fondamentale relative aux impasses qui menacent le sexe fort dans l'acquisition de son identité : celle de l'aliénation désexualisante qui attend celui qui ne saurait se dégager des liens incestueux et entamer le meurtre de l'enfant tout-puissant. la destruction de la " représentation narcissique primaire ". Enfin, comme si les figures du narcissisme infantile dégagées au fil des pages exigeaient d'être projetées dans le miroir d'une réalité ethnographique particulière, nous interrogeons les manières facétieuses des garçons dans le Carnaval de Pézenas (Languedoc). Au sein de bandes complices et paillardes, les jeunes pis cénois se livrent en effet à des jeux régressifs et transgressifs avec le corps, avec les mots et avec la mort, par lesquels ils vivent de joyeuses retrouvailles avec la figure de l'infans investie comme le noyau d'eux-mêmes. Nous nous attachons cependant à montrer combien ces jeux recèlent, en tant que processus rituel, une portée initiatique résolutive visant au rétablissement de l'ordre après le surgissement chaotique de l'imaginaire ; si bien que loin d'aboutir au destin funeste que les récits ne cessent de dénoncer, ils constituent de véritables exercices symboliques permettant aux garçons de se déprendre du lien originel et de célébrer l'assomption de leur virilité.

11/2010

ActuaLitté

Beaux arts

Peinture murale gothique en Poitou. XIIIe-XVe siècle

L'ouvrage de Claudine Landry-Delcroix, illustré par les très belles photos de Jean-François Amelot, invite à la découverte d'un patrimoine très méconnu : la peinture murale gothique du Poitou. Au XIIIe siècle, la peinture murale investit les édifices anciens qui avaient parfois déjà reçu un premier décor roman, mais aussi les quelques édifices nouvellement construits, tels la cathédrale Saint-Pierre de Poitiers. La commande émane principalement dos institutions religieuses, chapitres cathédral ou collégiaux et des paroisses. S'ils ont existé, rares sont les décors retrouvés dans des chapelles castrales ou des édifices civils. A partir de la seconde moitié du XVe siècle, période de reconstruction et de renouveau après la guerre de Cent Ans, la peinture murale demeure une composante essentielle du décor et les édifices qui en portent le témoignage aujourd'hui demeurent essentiellement des édifices religieux, églises paroissiales et, ce qui diffère de la période précédente, chapelles de châteaux. Les décors sont étudiés sous deux angles, celui des ensembles peints car, pour certains d'entre eux particulièrement bien conservés, la notion de programme peut être évoquée, et celui des images, avec leur richesse et leur variété. Au XIIIe siècle, dans les collégiales, l'élaboration du projet décoratif semble avoir été dictée par la réflexion d'un milieu savant sur la fonction ou le culte de son église tandis que les églises paroissiales mettent en oeuvre des programmes où se côtoient vie du Christ et tableaux hagiographiques. Ainsi se tissait d'un décor à l'autre un réseau de correspondances, instrument d'une pastorale efficace. Le XVe siècle, loin d'exclure cette dimension du décor de ses églises, apparaît également, avec ses nombreux décors de chapelles castrales et la présence massive de donateurs devant des images de saints, comme le siècle d'une dévotion privée. Les thèmes de la peinture murale concernent toujours principalement le Christ, la Vierge et les saints mais de nouvelles images voient le jour en accord avec la sensibilité religieuse de l'époque marquée par la dévotion au Christ de la Passion et par un sentiment prégnant de la mort et de la précarité de la vie. La plupart des artistes, dans cette terre de riche tradition picturale, sont probablement locaux, mais ils sont sensibles à l'air du temps. Au début du XIIIe siècle, le style 1200 laisse son empreinte au Vieux-Pouzauges. A partir du milieu de ce siècle, les influences viennent de la capitale ; l'art qui s'élabore à ce moment-là marque durablement la peinture murale du Poitou. Au tournant du XVe siècle, le gothique international lui apportera de nouvelles inflexions, avant que n'apparaisse, au cours de la seconde moitié du siècle, une floraison d'influences diverses. A côté de peintures dont le style suit l'esthétique du temps, il en existe d'autres dont le langage formel, plus vernaculaire pourrait-on dire, ne permet pas de les rattacher à un courant précis, surtout à partir du XVe siècle. Un catalogue dans lequel ont été pris en compte les décors restaurés au XIXe siècle et ceux qui, disparus aujourd'hui, sont connus par des sources écrites ou iconographiques, accompagne cette histoire de la peinture murale gothique du Poitou.

01/2012

ActuaLitté

Provence-Alpes-Côte d'Azur

Provence

Des voyages à vélo ou à vélo à assistance électrique pour découvrir les richesses patrimoniales, naturelles et paysagères de la Provence. Découvrir une région à vélo est plus que jamais écoresponsable et dans l'air du temps. Et aujourd'hui avec l'assistance électrique, voyager à vélo est offert au plus grand nombre quel que soit le profil du terrain. Nul besoin d'être un cycliste aguerri et entraîné, vous pourrez profiter des lieux traversés en mode plaisir, à l'écoute et au contact de la nature. Partez à la découverte de la Provence des auteurs et peintres, ses montagnes, calanques et ses villes de caractère, sur les traces de Pagnol, Daudet, Mistral ou encore Cézanne, de la Provence des étangs, la Camargue, pays des flamants roses, des taureaux et des chevaux camarguais, de la Provence historique et ses vestiges gallo-romains, des arènes d'Arles en passant par le pont du Gard, des Alpilles et des villages perchés parsemés de véritables trésors de notre patrimoine, du Luberon, ses paysages grandioses et ses champs de lavande, du Ventoux, pays des cyclistes et des défis dans un décor à couper le souffle ou des Côtes du Rhône aux vins à la réputation mondiale. Philippe Calas a concocté des parcours sur mesure : neuf itinéraires, essentiellement en boucle, de 2 à 5 jours, et de nombreuses variantes. Au total, ce ne sont pas moins de 1500 km avec des trajets qui vont d'une centaine de kilomètres le temps d'un week-end, à un peu plus de 250 km à envisager sur une petite semaine. Des itinéraires inédits et originaux, sur voies vertes et sur petites routes à la circulation la plus modérée possible avec, parfois, des portions sur revêtement stabilisé ou sur chemins de terre, accessibles aux VTC et VAE (vélo à assistance électrique). Les étapes courtes, de l'ordre de 50 à 60 km, soit 4 heures de vélo en mode balade, laisseront le temps aux visites et aux activités en chemin ou à l'étape. 9 parcours de 2 à 5 jours et leurs variantes ; 29 à 30 jours et 1 500 km de voyage cumulés ; un guide complet : cartes détaillées, profils altimétriques, descriptifs précis, présentations touristiques au fil des voyages, hébergements... Les parcours : Le Parc naturel régional des Alpilles 2 jours Cavaillon, Saint-Rémy-de-Provence, Saint-Etienne-du-Grès, Fontvieille, Les Baux-de-Provence, Maussane-les-Alpilles, Eyguières, Cavaillon ; La Provence historique 3 jours Arles, Saint-Gilles, Vauvert, Nîmes, Uzès, Pont-du-Gard, Remoulins, Abbaye de Saint-Roman, Beaucaire, Arles ; La Provence des étangs, Camargue 3 jours Arles, Port-Saint-Louis-du-Rhône, Saintes-Marie-de-la-Mer, Saint-Gilles, Aigues-Mortes, Arles ; La Provence des auteurs et peintres 4 à 5 jours Marseille, Cassis, La Ciotat, Aubagne, Saint-Maximin, Aix-en-Provence, Marseille ; Le tour du Luberon 4 jours Cavaillon, Apt, Saignon, Forcalquier, Manosque, Ansouis, Cavaillon ; Le tour du Ventoux 3 jours Villes-sur-Ozon, gorges de la Nesque, plateau de Sault (lavandes), vallée du Toulourenc, Dentelles de Montmirail, piémont du Ventoux, plaine du Comtat Venaissin - Sur la Via Rhôna 152 km.

03/2021

ActuaLitté

Critique littéraire

Bibliothèque historique. Fragments Tome 1 Livres VI-X, Edition bilingue français-grec ancien

Le livre offre une édition critique, accompagnée d'une traduction et d'un commentaire philologique et historique, des livres de la deuxième pentade de Diodore de Sicile, qui fait aller le lecteur de la fin des antiquités grecques à la première guerre médique. Participant avant tout du renouveau d'intérêt qu'a connu l'oeuvre de Diodore dans les dernières décennies, cette édition entre également de façon générale dans le cadre des recherches qui se sont développées en Italie, en France, et en Belgique, dans le cadre des historiens "fragmentaires" . En effet, comme les livres des troisième et quatrième décades, les livres VI-X ne subsistent plus qu'à l'état de fragments, depuis qu'a péri, en 1453, le dernier témoin manuscrit du texte complet. Le gros des fragments se trouve dans les Excerpta Constantiniana, une collection d'extraits d'historiens de langue grecque que l'empereur byzantin Constantin VII Porphyrogénète fit compiler durant la première moitié du Xe siècle ; le reste est constitué de citations ou de paraphrases, témoignages de quelques apologistes, chronographes ou autres érudits de l'antiquité tardive et de la période byzantine, qui, pour différentes raisons, citèrent Diodore de Sicile dans leurs oeuvres. A partir de ce matériau riche et complexe, l'auteur a entrepris de reconstituer l'économie générale et le contenu de chacun des cinq livres, avec une attention particulière portée aux problèmes de chronologie : lorsque l'historien présente, au livre I, le plan d'ensemble de son enquête, en insistant sur l'unité des six premiers livres, celui-ci met en place une construction chronologique et thématique qui fait du livre VI le dernier livre "mythologique" , mais aussi le dernier livre des "archéologies grecques" . Dans la transition avec les temps olympiques (de 1184/3 à 777/6), Diodore semble suivre le modèle d'exposition défini par Apollodore d'Athènes dans ses Chronika : l'historien s'achemine donc définitivement vers le spatium historicum (introduit au livre VII), l'articulation choisie étant la fin de la guerre de Troie. Cet examen de la chronologie s'inscrit dans le cadre d'une analyse historiographique plus large. En effet, il est un point essentiel, pivot dans l'interprétation de la structure de la Bibliothèque, sur lequel Diodore se détache particulièrement de ses prédécesseurs : c'est dans la conception qu'il propose de l'histoire universelle, étudiée en détail dans l'édition. La tâche était particulièrement difficile de fondre dans une même narration le récit des épisodes survenus en tant de points de l'oecoumène (traitée comme ??? ?????), en partant des origines et rejoignant son temps, tout en respectant la méthode annalistique : comment éviter de manquer au précepte de continuité, à celui d'unité dans la composition, et enfin à celui de symétrie, que Diodore professe en tout point de l'oeuvre ? Dans les livres VI-X se trouvent certains éléments de réponse, et certaines traces de la façon dont l'historien tissa ensemble épisodes principaux et narrations de faits parallèles. Le commentaire examine en outre plusieurs questions d'exégèses théologiques, liées notamment à la doctrine évhémériste, qui trouvait un aboutissement dans la Bibliothèque historique. Les fragments de tendance évhémériste constituent du reste une parfaite illustration de la difficulté qu'il y a d'interpréter la littérature fragmentaire : le commentaire tâche de démêler soigneusement dans chaque fragment ce qu'il importe de prêter au citateur, voire aux citateurs successifs, dont la concaténation demandait à être détaillée, et ce qu'il convient de reconnaître en dernière analyse à Diodore de Sicile. Ancienne étudiante de l'université Paris-IV-Sorbonne et de l'Ecole normale supérieure de la rue d'Ulm, docteur de l'université de Paris-IV et de la Scuola Normale Superiore de Pise, Aude Cohen-Skalli enseigne depuis 2010 à l'université de Nice-Sophia Antipolis. Elle a participé à plusieurs colloques sur l'oeuvre de Diodore de Sicile et sur l'histoire de la Sicile grecque et romaine, et est l'auteur d'une dizaine d'articles sur la Bibliothèque historique de Diodore, sur l'histoire de la Sicile, sur les historiens grecs de Rome et sur des questions d'historiographie fragmentaire.

05/2012

ActuaLitté

CD K7 Littérature

Le Maître et Marguerite

Le Maître et Marguerite, « roman-univers » au même titre que Gargantua et Pantagruel, Don Quichotte, La Guerre et la Paix, ou encore La Montagne magique et quelques autres, est incontestablement le grand oeuvre de Mikhaïl Boulgakov (1891-1940). Il l’appelle lui-même son « grand roman » . Son élaboration, son écriture ont occupé, plus ou moins secrètement, les douze dernières années de sa vie. L’étoffe dans laquelle est habilement « coupé » et façonné ce roman est un tissu serré de composantes autobiographiques et de savoirs, mais c’est un tissu dont on ne sent pas le poids. Ce « grand » roman n’est pas volumineux, comparé aux romans les plus célèbres d’un Tolstoï, d’un Dostoïevski ou d’un Victor Hugo. On vient aisément à bout de ses deux parties. Le lecteur non russe n’achoppe même pas sur le premier obstacle que constitue souvent pour lui la mémorisation des prénoms, patronymes et noms de famille, grâce à l’ingéniosité avec laquelle ils sont introduits. En Russie, actuellement, Le Maître et Marguerite est même considéré comme un « livre pour la jeunesse » : cet avatar inattendu de la grande popularité posthume dont il a toujours joui témoigne, en tout état de cause, de l’agrément et de la facilité que présente sa lecture. L’attrait le plus immédiat du roman tient à la richesse et aux rebondissements de son sujet. Le Maître et Marguerite se développe à partir d’une journée de printemps dans un quartier tranquille du Moscou soviétique des années 1920-1930. Sous le regard d’un énigmatique étranger, quantité d’événements « scandaleux », tragiques et comiques déferleront sur la population moscovite et sur quelques individus spécialement ciblés, des événements auxquels les victimes et les pouvoirs publics s’évertueront en vain à trouver des explications rationnelles, se refusant obstinément à leur attribuer une cause « magique ». Le lieu de la scène initiale a tôt fait de s’agrandir et les protagonistes de se multiplier : le cadre de l’action s’élargit à tout Moscou (centre et périphérie), à la Russie, à la Palestine et à tout l’au-delà. Un autre roman commence ici à s’imbriquer dans le roman « moscovite » ; il sera mené à son terme dans trois autres chapitres non consécutifs, ingénieusement intégrés dans le sujet contemporain. Il s’agit bien en effet d’un roman dans le roman, nourri de tout une documentation, biblique, apocryphe et légendaire, qui s’inscrit dans le genre fondé par Renan dans sa Vie de Jésus. Mais le héros en est Pilate plutôt que « Iéchoua » . L’écrivain génial qu’est le Maître, par manque de courage et d’audace, renonce à sauver son oeuvre menacée et préfère disparaître ; la téméraire Marguerite, prête à tout pour retrouver l’écrivain et son manuscrit, conclut une forme de pacte avec le fameux étranger, qui lui dit se nommer Woland, et se voit entraînée, de son plein gré, dans d’extraordinaires aventures. Si, malgré la complexité de son sujet, Le Maître et Marguerite n’est pas d’une lecture ardue, si l’on s’oriente sans effort aux croisements de sa double intrigue, cela s’explique, pensons-nous, par les talents de conteur et d’homme de théâtre que Boulgakov applique ici à sa prose romanesque. Mais comment ce roman pourrait-il être à ce point divertissant s’il ne l’avait pas été en premier lieu pour son auteur ? C’est d’abord pour se « divertir » lui-même d’une existence que des frustrations bien amères lui ont rendue insoutenable que Boulgakov entreprend, en 1928, son roman « sur le diable », d’abord sans intention, et bientôt sans espoir, de le voir jamais publier. Le Maître et Marguerite apparaît bien comme une quête à la fois passionnée et incertaine de Vérité et d’Absolu. La seule Vérité qui s’impose à l’écrivain, à laquelle il se voue avec une grande constance et un grand bonheur, c’est l’écriture. C’est, en définitive, un exploit d’écriture qui est illustré dans et par Le Maître et Marguerite, et qui s’y révèle superbement rédempteur.

01/2011

ActuaLitté

Manga

Vie de Mizuki Tome 1 : L'enfant

Shigeru Mizuki est né en mars 1922 à Sakai-minato, petite ville côtière du sud-ouest du Japon. Il connaît dans cette province tranquille une enfance libre et heureuse, période faste dont il s'inspirera à de nombreuses reprises dans ses mangas. Très tôt, il montre des aptitudes étonnantes pour le dessin, talent encouragé sans réserve par ses parents. Il a à peine vingt ans lorsque la guerre du Pacifique vient interrompre ses espoirs de carrière. Enrôlé dans l'armée impériale japonaise, il est envoyé dans la jungle de Nouvelle-Guinée, où il va vivre un véritable cauchemar: il contracte rapidement la malaria, assiste à la mort de ses camarades et perd le bras gauche dans un bombardement... Détenu sur place à la fin de la guerre, il se lie avec les membres d'une tribu locale, amitié qui le sauvera de la famine, de la maladie et de la folie. Ce n'est finalement qu'en 1957, après une vie déjà trop riche de souvenirs et de blessures, qu'il entame la carrière de mangaka qui a fait de lui l'un des plus grands raconteurs d'histoires de son pays. Auteur singulier et généreux, il ne cesse d'explorer tout au long de son oeuvre les univers qui se cachent derrière notre monde pour mieux dire sa profonde compréhension de l'âme humaine, et communiquer à ses lecteurs l'empathie qu'il éprouve pour toutes les formes de vie. Après NonNonBâ et Opération Mort (Fauves du Meilleur Album et du Patrimoine en 2007 et 2009 au festival d'Angoulême), les éditions Cornélius présentent avec Vie de Mizuki un autre chef-d'oeuvre et une nouvelle facette de ce géant du manga. Le succès sans commune mesure de la bande dessinée au Japon, son ancrage dans la société, sa forme unique et ses thèmes de prédilection, s'expliquent une fois placés en regard de l'Ere Showa (1926-1989). Les biographies des pionniers du manga, de Vie et Mizuki de Shigeru Mizuki à Une vie dans les marges de Yoshihiro Tatsumi, témoignent autant de l'explosion d'un art populaire que de cette période parmi les plus complexes de l'histoire du Japon. La Vie de Mizuki rappelle qu'en un peu plus d'un siècle, cet archipel presque exclusivement constitué de villages de pêcheurs s'est mué en l'une des plus grandes puissances industrielles mondiales. Entre-temps, un élan de modernité et de nationalisme a emporté ses hommes vers la guerre, avant de rapatrier les survivants sur une terre occupée, en perte d'identité, en marche d'industrialisation forcée, démunie de son armée et de son besoin de produire de l'énergie. Cette société qui n'aurait plus besoin de se défendre ni de se nourrir allait accoucher d'une forme d'expression naturellement enfantine, mais d'une richesse indéniable: le manga. Shigeru Mizuki, cet artiste qui a ressuscité le goût du folklore au Japon, incarne plus que quiconque cette édifiante réaction artistique face au poids de l'Histoire: celle d'un homme qui a perdu un bras au combat et rentre dans son pays pour donner vie à un courageux fantôme à qui l'on a volé un oeil. Récit d'un destin hors du commun, témoignage unique sur la mutation d'un monde, Vie de Mizuki est une extraordinaire fresque romanesque qui embrasse un siècle de chaos et d'inventions.

10/2012

ActuaLitté

Romans historiques

L'épée de l'empereur. Mons sous les occupations française, hollandaise et allemande

Le Montois Philippe Yannart, amoureux de sa cité et de son prestigieux passé, collectionneur invétéré et historien local avisé, signait, en 2014, deux belles études documentaires, Mons avant la Grande Guerre, publié par l'association des Montois Cayaux, et Mons, la Septième Porte, chez Memogrames. A l'occasion du bicentenaire de la bataille de Waterloo, il renoue avec le genre romanesque, qu'il avait déjà pratiqué en 2012 avec Le Secret du Gouverneur de Mons et nous propose L'Epée de l'Empereur, superbe intrigue ayant pour décor Mons sous les occupations française, hollandaise et allemande, et pour héros les anciens de la Grande Armée. Chargé de récolter, pour compte de la Régence montoise, les candidatures des anciens soldats de l'Empire pour l'obtention de la médaille de Sainte-Hélène, instaurée par Napoléon III en souvenir de son oncle Napoléon 1er, Louis Dechembry se retrouve mêlé à un terrible complot qui fixera son destin. Dès sa première rencontre avec le colonel Dumoulin, le futur notaire est fasciné par le récit de la vie mouvementée de son interlocuteur. L'individu a connu, tout jeune, l'arrivée à Mons des Sans-Culottes, suivie du vote en faveur de la réunion de la ville avec la France révolutionnaire, puis de la sinistre parenthèse de la Terreur. Enfin, le Consulat et l'Empire, durant lesquels il sert dans la Grande Armée. Simple acteur dans ces luttes gigantesques qui ont marqué le début du 19e siècle, le colonel Dumoulin se proclame fièrement enfant de la Nation, qui en fit un soldat n'ayant que son courage pour tout patrimoine, le monde pour famille, ses blessures comme passeport... Un soldat ayant accepté de n'avoir pour patrie que là où il pouvait se nourrir, pour tout protecteur que le bon Dieu, mais aussi un père : l'Empereur ! ... Jusqu'à ce jour de juin 1815 où, pour lui comme pour tous ses camarades, le Soleil s'était couché définitivement. Alors, abandonnés du Roi et de la Nation, il ne resta à ses Braves que leur demi-solde et leur courage pour survivre. Heureusement, les commémorations au sein de l'Association des Anciens Frères d'Armes de l'Empire, qu'ils ont créée et que préside le colonel Dumoulin, leur permettent de trouver un peu de chaleur, un peu de réconfort dans une paix retrouvée. Des circonstances rocambolesques ont mis entre leurs mains un des des plus beaux trophées qui soit à leurs yeux, une des plus belles reliques de leur gloire passée - une épée personnelle de l'Empereur. Un précieux trophée pour lequel l'orgueil des hommes et des nations déclenche une longue lutte acharnée qui ne trouvera son épilogue que de nos jours. Au fil du roman, le lecteur est invité à revivre tantôt les émeutes survenues durant la Révolution de 1830, qui chassent les Hollandais de la ville et du pays, tantôt l'invasion allemande en août 1914, la bataille de Mons et les quatre ans d'une occupation aussi humiliante que rigoureuse. Quant au notaire Dechembry, héritier et dépositaire du secret des anciens vétérans de l'Empire, il se sacrifie à cette noble cause qu'il a fini par embrasser, en mémoire de ces hommes ayant donné leur jeunesse, parfois leur vie, souvent leur santé pour un unique idéal : la défense de la Liberté. Tout ce qui est décrit dans ce récit est vrai. Ce qui ne l'est pas aurait pu l'être...

12/2015

ActuaLitté

Essais

Les Templiers. Lieux et héritages du Temple Franc-Maçonnerie - Néo-Templiers

Un ouvrage (tome III) qui remonte à l'époque templière à travers ce qu'elle a laissé aujourd'hui à titre de vestiges encore visibles et leur histoire à travers un "tour de France" des villes et des villages fourmillant d'anecdotes illustratives d'un esprit templier. La question se pose surtout de savoir ce que l'Ordre a vraiment laissé via des pierres dans le patrimoine, ses anciens sites, les cathédrales peut-être, son esprit et une influence de pensée. Y a-t-il des héritiers de cet esprit et les trouve-t-on dans telle ou telle mouvance ésotérique ou religieuse ? Depuis le XVIIIe siècle, les Ordres templaristes ou néo-templiers ont fleuri dans plusieurs régions du monde, surtout en Europe, en France et dans le monde anglo-saxon. Il est malaisé de s'y retrouver mais tous revendiquent une légitimité avec l'Ordre dissous des "Pauvres Chevaliers du Christ et du Temple de Salomon". La Franc-Maçonnerie a connu un intérêt filial avec l'Ordre. Le Temple a nourri et alimente encore de nos jours une partie de la Franc-Maçonnerie à travers des Rites et des Grades, en dépit d'événements majeurs ou grâce à eux, mais l'Ordre des Hospitaliers, devenu Ordre religieux de Malte, très présent dans le monde au XXIe siècle, est l'héritier matériel du Temple depuis sept cents ans. Cependant, l'ADN templier tient de son esprit. Celui-ci a traversé les âges. L'intérêt pour le Temple a été occulté pendant plusieurs centaines d'années. Excepté à travers des chroniqueurs des croisades, il a repris au XVIIe siècle et a connu un engouement rapide mondain à travers le discours du Chevalier Ramsay, d'autres tendances templières notamment à Lyon et en Suède, mais aussi auprès des médiévistes qualifiés. Après une recherche sur les origines de l'esprit du Temple (tome I), un ouvrage (tome II) sur les arcanes et les coulisses des croisades, du procès et de la métamorphose des Templiers où on découvre une force supra-étatique dotée d'une marine et coupée en deux réalités, Philippe Liénard se penche sur les traces matérielles et immatérielles de l'Ordre templier et ses explorations dont en Amérique, en Europe et en Ecosse, sur les liens héritiers avec le templarisme, celui qui a investi la Franc-Maçonnerie encore aujourd'hui (tome III) et celui qui engendre de nombreux émules dits néo-Templiers du XXIe siècle, souvent catholiques. Ce tome troisième remonte aux donations et aux constructions, et examine les liens entre Temple et Compagnons, pour revenir au début du XVI' siècle, période charnière (thèses de Calvin, alliance de François lef et des Habsbourgs pour réduire l'islam ottoman, etc) et arriver à nos jours à travers les messages, les métiers du Temple, et l'ésotérisme qu'on lui prête. L'Histoire du Temple a laissé des édifices, des ruines ou des lieux spéciaux, une part de vérité, une part de légende et une place pour la confusion matérielle et spirituelle. L'Ordre des moines-soldats n'a jamais été que cela. En Occident, au sein du Temple on cultive, on vit chiche, on cherche, on finance la "multinationale", on encourage la rénovation sociale et on crée une nouvelle économie. Les tomes premier et deuxième ont débroussaillé certains lieux communs répétés à l'envi. La marque du Temple se ressent dans des mouvances diverses, mais des questions subsistent : y-a-t-il encore des Templiers, que font-ils, et où se trouverait le trésor de la légende ? Le Temple du XXIe siècle, c'est quoi ? Chacun serait-il un potentiel Templier ?

05/2022

ActuaLitté

Sciences historiques

La fin du village. Une histoire française

À travers la description et l’analyse de la vie quotidienne d’une ancienne collectivité villageoise provençale, ce livre s’attache à décrire la mentalité et le style de vie de ses habitants en soulignant les mutations et les bouleversements que cette collectivité a subis depuis la dernière guerre jusqu’aux années 2000. L’urbanisation et la modernisation ne signifient pas seulement la fin d’un monde clos et de son « chauvinisme de clocher » ; elles se paient d’une dissolution du lien collectif, entraînant l’individualisme vers une « postmodernité » problématique. De la « communauté villageoise » et du « peuple ancien » au « nouveau monde », les différentes parties du livre sont ordonnées autour de cette mutation : le développement de la consommation, du loisir et du tourisme ont érodé les anciennes traditions provençales ; les « néo ruraux » formés de couches moyennes urbaines et de catégories fortunées se sont substitués aux anciennes couches populaires touchées par le chômage et la fin de leur « petite patrie » qu’était la collectivité villageoise. La fracture est à la fois sociale et culturelle et met en jeu des conceptions et des rapports différents à la vie individuelle et collective. À rebours d’une vision idéalisée de la Provence, La fin du village montre une autre réalité où les populations locales ont le sentiment d’être « envahies » dans la période estivale – la Provence étant devenue, selon une expression largement usitée dans la région, le « bronze-cul de l’Europe ». Tandis qu’affluent touristes et nouveaux habitants fortunés en mal de soleil et de ciel bleu, les Provençaux se vivent comme les derniers témoins d’un patrimoine qui ne leur appartient plus, ou pire encore, les gardiens d’un décor de théâtre ou une « espèce en voie de disparition ». Aux anciens rapports villageois a succédé un individualisme désaffilié dont le rapport à la collectivité est devenu problématique. Sans nostalgie pour un supposé « bon vieux temps », l’auteur passe au crible de l’analyse critique les dérives du « nouveau monde ». Sur fond de chômage et de « village dortoir », il souligne l’importance prise par les fêtes en tout genre, l’« animation sociale et culturelle » et ce qu’il nomme d’un sobriquet les « cultureux » dont l’« ouverture » et les « pratiques artistiques » constituent un curieux mélange de pédanterie et de militantisme revisité ; il rend compte de formes nouvelles d’éducation et d’animation de la jeunesse qui tentent de façonner des individualités nouvelles avec un angélisme des droits de l’homme et une écologie qui verse dans le moralisme et les bons sentiments ; il s’interroge sur la façon dont la collectivité envisage aujourd’hui son rapport à la nature, à la vieillesse et la mort. Ces conceptions et ces comportements coexistent avec des formes nouvelles de misère et de désaffiliation (la « déglingue ») liées à la combinaison du chômage et à la déstructuration familiale. Le « village bariolé » qui succède à l’ancienne collectivité villageoise fait coexister des catégories sociales et des mondes séparés à l’intérieur d’un même espace géographique vide de projet commun. En ce sens, la « fin du village » constitue une sorte de « groupe témoin » d’une France morcelée et d’une évolution problématique des sociétés démocratiques, que les responsables politiques et les citoyens se doivent d’affronter au plus près des réalités.

09/2012

ActuaLitté

Architecture régionale

La Cité des Electriciens

La Cité des Electriciens est la plus ancienne cité minière préservée du Nord de la France. Ce " Regards... " revient sur la réhabilitation de ce coron, laissé à l'abandon plusieurs années et devenu aujourd'hui un véritable lieu culturel dynamique, marqué par une directive sociale, architecturale, économique et touristique. Présentation du site La Cité des Electriciens est la plus ancienne cité minière préservée du Nord de la France. Inscrite aux Monuments historiques depuis 2009, elle est située à Bruay-la-Buissière. La cité devient en 2012 l'un des cinq grands sites miniers dans le cadre de l'inscription du Bassin Minier sur la liste du Patrimoine mondial de l'UNESCO au titre de Paysage culturel, évolutif et vivant. Construite entre 1856 et 1861, elle a pour vocation de loger les familles de mineurs. De grands scientifiques, notamment dans le domaine de l'électricité ont donné leurs noms aux rues (Ampère, Marconi, Volta, Edison, Coulomb, Franklin, Laplace, Faraday, Branly et Gramme) d'où le nom, la Cité des Electriciens. En 2008, les habitants abandonnent peu à peu le coron, laissé à l'abandon depuis l'arrêt de l'activité minière en 1979. Il accueille alors une première intervention de la compagnie artistique Les Pas Perdus qui donna l'élan pour les travaux de réhabilitation qui commencèrent en 2013. La Communauté d'agglomération a fait le choix de proposer un nouvel usage d'équipement culturel et touristique. La cité a ouvert ses portes au public en mai 2019. La configuration du quartier a été conservée : sur une superficie totale de trois hectares, six des neufs " barreaux " ont été réhabilités (trois ont conservé leur usage d'habitation), de même que les " carins ", petites dépendances annexées aux logements et qui servaient de poulailler, de latrines ou de buanderie. Les jardins ont également fait l'objet d'une rénovation paysagère. La cité révèle la progressive évolution de l'habitat ouvrier au XIXe siècle et de l'architecture des premiers corons. Conçu par l'agence d'architecture Philippe Prost, avec l'agence Du&Ma pour la muséographie et la scénographie, un centre d'interprétation du paysage, de l'urbanisme et de l'habitat miniers accueille le public dans deux bâtiments : le premier, contemporain, repérable à sa magnifique carapace de tuiles rouges émaillées, présente le bassin minier à travers les terrils, fosses et cités, des origines de la révolution industrielle à la fermeture de la dernière fosse. Le second est un " barreau " qui offre un habitat minier réhabilité. Aujourd'hui la cité accueille des expositions, propose des résidences d'artistes, des ateliers nature, arts plastiques, des visites guidées, des espaces de restauration, des gîtes... L'ouvrage En première partie, l'ouvrage présente, par le biais d'un entretien avec Philippe Prost et Isabelle Mauchin, le projet de réhabilitation de la Cité. La deuxième partie de l'ouvrage, le " portolio ", expose le projet en images. On pourra suivre le processus de réhabilitation grâce à des photographies avant restauration, des images du chantier et des documents graphiques tels que plans, coupes... , et de nombreuses photographies du projet achevé. La troisième partie évoque la vie dans la Cité des Electriciens lorsqu'elle était encore habitée par les mineurs et leurs familles, ainsi que l'importance des jardins ouvriers et le projet qui a permis leur réhabilitation.

10/2021