Est-ce que les trains sont plus sûrs que les avions ? Hormis quand il y a des grèves, ça va sans dire. Il y a un groupe anglais qui ne se demande pas si le train est le moyen le plus assuré pour voyager, mais qui en fait une source manifeste d’inspiration. Et j’en ai pour preuve Night Train, le dernier album de Keane !
Keane est connu pour les ballades mélancoliques et ses flirts avec les émotions qui nous emportent vers l’abîme de notre cœur. Un chemin tortueux lequel nous plonge parfois dans un face-à-face pas évident, et Keane s’impose dans le monde pop rock. Des albums qui s’enchaînent en une décennie, dépassant les frontières anglaises, ils ont ce quelque chose de particulier. Le parfum d’un groupe visionnaire. Dépassant les modes, ils s’inscrivent dans une atmosphère musicale dont le moule est repris par les autres tant la qualité et l’originalité est impressionnante.
Seulement huit titres ?
Keane revient donc avec leur dernier album, ou plutôt un EP. Piqûre de rappel ? Allez, soyez tranquilles, tout le monde aura son vaccin rock. Un EP ? Trop de titres pour que ce soit un single, pas assez pour que ce soit un album et pour cause, Keane revient avec tout simplement huit titres. Huit pistes différentes les unes des autres avec la participation de K’NAAN, un rappeur jamaïcain installé au Canada et de Tigarah spécialiste du Baile Funk ou funk carioca, très en vogue au Brésil. Mais qu’on se le dise, il ne s’agit pas d’entacher à la réputation pop du groupe. On passe donc très rapidement d’un monde à un autre sans qu’il y ait toutefois une cassure d’un morceau à l’autre. Très bien étudié, très actuel, une couleur pop Keane qui a tout compris ! Pensez à prendre votre passeport, le train se faufile dans des contrées parfois en altitude.
Keane réinvente le rock
Le groupe anglais nous avait habitués à surfer sur un vague pop rock tantôt énergique, parfois mélancolique ; aujourd’hui ils revoient leur mode de fabrication s’influençant des Beatles, de Blur et de Radiohed. Encore que l’album sur conclue sur une balade très « keane » avec « My Shadow », mais, mais, mais revenons en arrière.
En effet, l’album s’ouvre sur une intro Trip Hop d’une minute vingt et marque du même coup le changement de style. Qu’on se le dise, le rock change de peau au fur et à mesure du temps allant tantôt vers une folk très 70’s , quelquefois vers un rock aux guitares saturées et surtout aux influences Depech Mode, Radiohed, comme le prouve « Back In Time ». « Clear Skies » est un titre très pop rock presque tribal très bien ficelé. Léger, entraînant, percutant, très joli… on est vite emporté dans leur manière de négocier le virage rock plus saturé, plus électrique, plus atmosphérique.
L’influence rap sur fond musical cinématographique
Cannes oblige ou quoi ? Mais que se passe-t-il ? que s’est-il passé sur « Looking Back » ? Sylvester Stallone est passé dans les studios, ou dans le train, ils ont bu un coup et hop, ils se sont dits, si on faisait un ou deux titres en hommage à Rocky ? Non, parce que sur « Looking Back » c’est tout simplement la bande-son du titre phare du film qui est revu par le groupe.
Quant à « Stop For A Minute » c’est un mélange de musique commerciale à souhait, avec quelques riffs piano qui rappellent Paul Young. Dommage, vraiment dommage puisque comme par hasard, les morceaux qui semblent incongrus dans ce EP marquant un tournant important dans la manière d’appréhender le pop rock, K’NAAN y participe. Cependant pour dédouanée le rappeur, « Your Love » au clavier Jean Michel Jarre très 80’s est tout aussi inaccoutumé. C’est comme si, le groupe jonglait avec le passé et le futur.
Keane a du nez, ils proposent un mélange excitant, probant, dérangeant par moment. Le tout géré de manière artistiquement intéressante. Un EP où les titres se suivent, mais aucun ne se ressemble. Un voyage d’un monde à un autre… en train tout simplement.