Les sept chiens de l'Avent

Pierre simonet Jean

Les sept chiens de l'Avent sont douze, douze chiens qui traversent quinze nouvelles étranges, mettant en scène des personnages parfois étonnants, toujours attachants, des personnages que l'on suit d'une nouvelle à l'autre, des personnages dont le destin est lié à celui des chiens qui les accompagnent. Dans ces nouvelles, les chiens sont doués de facultés extraordinaires, ils guident les humains dans leur cécité existentielle, sont les gardiens de l'au-delà, tissent des liens avec les morts. Qui de l'homme ou du chien a le plus besoin de l'autre ? Le lecteur appréciera !

Par Pierre simonet Jean
Chez Les Editions du Net

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Genre

Littérature française

Les sept chiens de l’Avent

« En ce bas monde, on n’en a jamais fini … » se dit Amélie Carimentran, la cheffe de la police municipale de Cachan, département du Val-de-Marne, ancien département de la Seine. C’est qu’elle croyait en avoir définitivement fini avec cette étrange affaire qui avait empoisonné son existence il y a tout juste un an.

Il y a tout juste un an, dans les sept jours précédant Noël, elle avait retrouvé chaque matin un corps de chien écrasé au pied de l’aqueduc de Cachan. Les chiens n’avaient pas été écrasés par des voitures, des bus ou des camions, non ! Ils s’étaient fracassés par terre, en tombant du haut de l’aqueduc qui enjambe la vallée de la Bièvre et la surplombe de quarante mètres. Les chiens tombaient, en fin de nuit semble-t-il ; les chiens tombaient, ou se jetaient, ou bien étaient jetés du haut de l’aqueduc. Mais ce n’était que des chiens, et la police nationale, alertée par Amélie, n’avait pas cru bon se déranger pour si peu. Au bout de sept jours et de sept chiens écrasés, le phénomène avait cessé de lui-même, le jour de la Noël. L’affaire avait été classée sans suite. Amélie en avait été longtemps troublée, elle qui adorait les chiens, elle qui avait passé toute son enfance avec des chiens, elle qui entretenait avec cette espèce animale une relation particulière, très forte, au point de se demander si elle-même n’avait pas été chien dans une vie antérieure.

Adolescente, elle avait fui, sans but et sans raison apparente, la maison de ses parents adoptifs. Elle avait connu des années d’errance et de misère, des années sur le trottoir, à vivre de mendicité, à fréquenter les centres d’hébergement d’urgence et les services de désintoxication des Hôpitaux. Puis, vers vingt cinq ans, « guérie », elle était revenue dans sa famille, avait repris ses études et, après un diplôme de droit, avait passé et réussi un concours pour entrer dans la police municipale. Depuis ses années de galère, où son seul compagnon avait été un magnifique labrador noir, elle aimait les chiens plus que les hommes ; elle n’avait d’ailleurs point d’homme qui partageât sa vie.

Elle avait précieusement rangé les rapports rédigés l’année passée, chacun des sept derniers jours de l’Avent. Depuis ce temps-là, tous les jours, en passant près de l’aqueduc dans sa tournée matinale, elle pensait aux sept chiens morts de l’Avent.

Et voilà que ce matin même, vers sept heures, quelqu’un avait téléphoné pour signaler un nouveau chien écrasé au pied de l’aqueduc. Elle avait pris son arme de service, sa lampe torche et son appareil photo, enfilé son uniforme, sa parka et couru jusque là-bas.

Le corps fracassé de l’animal gisait approximativement au même endroit que ses malheureux prédécesseurs de l’année d’avant. C’était un dalmatien mâle qui pouvait avoir quatre ou cinq ans et devait peser vingt-cinq à trente kilos. La tête avait heurté le sol en premier. La gueule, brisée en son milieu, formait un angle droit avec le crâne, la truffe était arrachée, laissant un trou béant au bout du museau ; ça n’était pas très joli à voir. La cage thoracique avait été enfoncée par le choc, le pelage était maculé de sang, les os fracassés des pattes le faisait ressembler à une marionnette désarticulée. C’était pitoyable et Amélie parvint à peine à surmonter sa nausée. Elle se concentra sur l’établissement du constat, prit plusieurs photos de ce malheureux cadavre. Le froid lui piquait les yeux, faisant couler de grosses larmes sur ses joues et elle avait du mal à faire la mise au point. Elle prit son dictaphone électronique et enregistra une description précise de la scène. Puis elle appela la fourrière pour faire enlever le cadavre du chien. Elle rentra au poste de police et fit dactylographier le procès verbal à son assistante.

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24/07/2015 116 pages 12,00 €
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