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Pléiades

Oeuvres complètes. Volume 2

Marguerite Duras, qui fut une légende vivante, s'incarne pour beaucoup dans un livre particulier : souvent Un barrage contre le Pacifique (1950) ou L'Amant (1984), parfois Le Ravissement de Lol V. Stein (1964), ou encore dans un film et sa mélodie, India Song (1973). Plus rares sont les lecteurs qui se représentent l'oeuvre dans sa continuité souterraine. À travers la diversité des genres - romans, nouvelles, théâtre, scénarios, films -, Duras n'a jamais cessé d'explorer l'écriture elle-même. Car c'est précisément la recherche d'une voix qui lui fût propre qui l'a amenée à composer pour le théâtre (où le langage "a lieu") comme à prendre la caméra : "Je parle de l'écrit même quand j'ai l'air de parler du cinéma. Je ne sais pas parler d'autre chose." Bien sûr, l'expérience de l'écriture dramatique ou cinématographique influence l'écriture romanesque, et certains sujets passent d'un genre ou d'un support à un autre, mais il y a plus : peu à peu se fait jour un style reposant sur la porosité des genres. Sur la couverture d'India Song se lit une triple mention, "texte théâtre film"... Sa voix propre, Duras ne l'a pas trouvée d'emblée, et le mystère de sa découverte est l'un des charmes d'une lecture chronologique de son oeuvre. Ses deux premiers romans respirent l'air "existentialiste" de l'époque. Les trois suivants - Un barrage contre le Pacifique (1950), Le Marin de Gibraltar (1952), Les Petits Chevaux de Tarquinia (1953) - s'inscrivent dans l'"âge du roman américain". Puis, peu à peu, le romanesque narratif s'efface, les personnages s'estompent ou s'affinent - au point de se réduire bientôt, dans la nouvelle "Les Chantiers" (et plus tard dans Détruire dit-elle), à des séries d'états d'âme presque anonymes, voire à un étrange statut de regard regardé. L'évolution, toutefois, n'est pas linéaire : la tendance à la déréalisation du réel et au primat de la parole dialoguée ou soliloquée était marquée dès L'Après-midi de monsieur Andesmas (1962), mais les personnages du Vice-consul (1966) prennent corps dans la chaleur moite d'un décor indien quasi baroque. Les deux premiers volumes des oeuvres complètes, enrichis de nombreux textes et documents rares, retracent l'histoire d'une écriture et, par le biais d'épisodes ou de personnages récurrents (dont certains deviendront de véritables mythes littéraires), mettent en place les "cycles", informels et poreux, qui traverseront toute l'oeuvre : l'Indochine de l'enfance, l'Inde du fantasme.

10/2011

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Pléiades

Oeuvres complètes

Marguerite Duras, qui fut une légende vivante, s'incarne pour beaucoup dans un livre particulier : souvent Un barrage contre le Pacifique (1950) ou L'Amant (1984), parfois Le Ravissement de Lol V. Stein (1964), ou encore dans un film et sa mélodie, India Song (1973). Plus rares sont les lecteurs qui se représentent l'oeuvre dans sa continuité souterraine. À travers la diversité des genres – romans, nouvelles, théâtre, scénarios, films –, Duras n'a jamais cessé d'explorer l'écriture elle-même. Car c'est précisément la recherche d'une voix qui lui fût propre qui l'a amenée à composer pour le théâtre (où le langage "a lieu") comme à prendre la caméra : "Je parle de l'écrit même quand j'ai l'air de parler du cinéma. Je ne sais pas parler d'autre chose." Bien sûr, l'expérience de l'écriture dramatique ou cinématographique influence l'écriture romanesque, et certains sujets passent d'un genre ou d'un support à un autre, mais il y a plus : peu à peu se fait jour un style reposant sur la porosité des genres. Sur la couverture d'India Song se lit une triple mention, "texte théâtre film"... Sa voix propre, Duras ne l'a pas trouvée d'emblée, et le mystère de sa découverte est l'un des charmes d'une lecture chronologique de son oeuvre. Ses deux premiers romans respirent l'air "existentialiste" de l'époque. Les trois suivants – Un barrage contre le Pacifique (1950), Le Marin de Gibraltar (1952), Les Petits Chevaux de Tarquinia (1953) – s'inscrivent dans l'"âge du roman américain". Puis, peu à peu, le romanesque narratif s'efface, les personnages s'estompent ou s'affinent – au point de se réduire bientôt, dans la nouvelle "Les Chantiers" (et plus tard dans Détruire dit-elle), à des séries d'états d'âme presque anonymes, voire à un étrange statut de regard regardé. L'évolution, toutefois, n'est pas linéaire : la tendance à la déréalisation du réel et au primat de la parole dialoguée ou soliloquée était marquée dès L'Après-midi de monsieur Andesmas (1962), mais les personnages du Vice-consul (1966) prennent corps dans la chaleur moite d'un décor indien quasi baroque. Les deux premiers volumes des oeuvres complètes, enrichis de nombreux textes et documents rares, retracent l'histoire d'une écriture et, par le biais d'épisodes ou de personnages récurrents (dont certains deviendront de véritables mythes littéraires), mettent en place les "cycles", informels et poreux, qui traverseront toute l'oeuvre : l'Indochine de l'enfance, l'Inde du fantasme.

10/2011

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Musique, danse

La musique sous la République de Weimar

La défaite militaire et l'effondrement de l'Empire ont fait de l'Allemagne en 1918 un pays à reconstruire, où les bouleversements politiques et sociaux s'accompagnent de profondes mutations culturelles. La musique qui, comme les autres arts, se ressent de ces chocs et les répercute, devient un enjeu idéologique majeur. L'inflation entretient une angoisse qui trouve sa traduction dans de folles audaces créatives. Les repères traditionnels s'effacent, les frontières entre les genres s'estompent : le cabaret envahit l'opéra. Les mouvements d'avant-garde surenchérissent les uns sur les autres, les manifestations dadaïstes et antibourgeoises relèguent au second plan l'expressionisme. Si les grandes figures du début du siècle (Busoni, R. Strauss, Schoenberg, Schreker), forment une pléiade de disciples, elles n'en sont pas moins contestées dans leur esthétique. A cette période d'effervescence succède une phase de stabilisation (1924-1929) où, la prospérité revenant, se développe une intense vie musicale dominée par les plus grands noms (Furtwängler, Walter, Klemperer, Scherchen, Schnabel...). De nouvelles tendances s'instaurent telles que le fonctionnalisme, la musique communautaire, la Nouvelle Objectivité, illustrées notamment par Hindemith ; la tradition spécifiquement allemande de la pratique du chant choral trouve alors une expression idéologique au sein des différents partis politiques. Les nouveaux moyens d'expression (cinéma, radio) ouvrent également un champ d'expérience largement pratiqué tandis que prospère l'industrie de la musique légère avec l'opérette, les cabarets et les revues. La crise économique de 1929 exacerbe les tensions sociales et radicalise les mouvements esthétiques comme le théatre musical et les pièces didactiques de Brecht ; les compositeurs novateurs qui bénéficiaient jusque-là du soutien fragile de la social-démocratie, se heurtent au conservatisme des milieux académiques (inspirés principalement par Hans Pfitzner) et à la haine des nationaux-allemands qui, assimilant toute nouveauté au bolchévisme culturel, s'appuient sur les forces montantes du parti nazi. De très nombreux compositieurs, parmi lesquels Kurt Weill et Hanns Eisler, vont se trouver contraints à l'exil sous le IIIe Reich. Sur la toile de fond du Berlin des années vingt, ce livre restitue la violence et les audaces esthétiques d'une société vivant dans un climat quasi permanent de guerre civile Musicologue, critique musical, Pascal Huynh est l'auteur de nombreuses contributions sur la musique de l'entre-deux-guerres, l'histoire culturelle de Berlin et Kurt Weill dont il a publié les écrits et qu'il contribue à faire connaître en France. Il prépare un ouvrage sur la musique sous le IIIe Reich.

11/1998

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Musique, danse

LES JOACHIM. Une famille de musiciens

Alors que la France et l'Allemagne s'entre-déchirent au cours de trois conflits meurtriers, une famille germanique d'origine juive, les Joachim, va, à la faveur du mariage d'un de ses membres avec une Française, incarner et exalter à travers trois générations d'interprètes le génie musical des deux pays. Au départ, il y a Joseph Joachim (1831-1907), un des violonistes les plus célèbres de son temps, ami de Mendelssohn, Liszt, Wagner, Schumann et Berlioz, mais surtout de Brahms, dont il crée le concerto pour violon. Son épouse, Amalia Weiss, chanteuse au contralto superbe, connaîtra également son heure de gloire dans l'interprétation d'oratorios et de lieder, s'illustrant aussi bien dans Brahms que dans Mahler. Mais la grâce française va soudainement faire irruption au sein de cette famille : Suzanne Chaigneau, charmante violoniste, fille d'un peintre de l'école de Barbizon, forme avec ses deux sœurs, Marguerite et Thérèse, un trio piano, violon, violoncelle qui séduit si bien Joseph Joachim, lors d'un de ses séjours parisiens, qu'il leur propose de venir jouer avec lui en privé devant Guillaume II. Elle épouse l'un de ses fils, mais bien vite, la guerre bouleverse la vie de ce couple franco-allemand. Contrainte de vivre en territoire ennemi, Suzanne Chaigneau-Joachim va tout à la fois consigner sa détresse dans un bouleversant journal et tromper son angoisse dans la musique : elle joue Bach mais aussi révèle au public allemand César Franck et Gabriel Fauré. A la mort de son mari, officier allemand miné par la tuberculose et les épreuves morales de la guerre, elle regagne la France avec sa toute petite fille, Irène Joachim. Celle-ci deviendra en pleine Seconde Guerre mondiale la Mélisande de légende dans le célèbre opéra de Debussy, immortalisée par le disque et devenue depuis modèle de toutes les interprètes du rôle. Elle réunit, la guerre achevée, les goûts français et allemand, honorant le répertoire des lieder, tout en défendant les couleurs de la jeune musique française du groupe des Six à Pierre Boulez. Péripéties multiples et rencontres avec les personnalités prestigieuses de l'époque, issues aussi bien de l'univers de la musique que de celui du cinéma ou de la littérature, tissent la trame de cette riche saga familiale dont les membres, engagés dans les combats politiques et artistiques, ont joué un rôle déterminant dans l'histoire de l'interprétation des chefs-d'œuvre du patrimoine musical franco-allemand.

09/1999

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Histoire de France

Lettres, notes et portraits. 1928-1974

Ces écrits, inédits, de Georges Pompidou témoignent de manière intime de la façon dont il a vécu sa carrière politique, et donc un morceau d’histoire de France. Rien de lui n’a été publié depuis trente ans. Son itinéraire est singulier car il ne l’avait pas prévu. « Je suis tellement flemmard, dit-il, je serai un professeur moyen ou un secrétaire d’État moyen ». Ce que l’on découvre ici, c’est d’abord la construction d’une personnalité : une intelligence hors du commun, une capacité d’assimilation et une mémoire extraordinaires ; une affectation de peu travailler étant donné sa rapidité ; une passion pour la poésie, la littérature, les arts en général. Fou de musée, de théâtre et de cinéma, il est entouré d’amis, d’artistes et d’écrivains. Jeune, c’est un ardent socialiste. En 1944, professeur débutant, il rencontre le général de Gaulle : c’est un choc définitif pour lui, pour de Gaulle une découverte. Pompidou est ébloui mais cet intellectuel est lucide. Son admiration est immense et le ton est et sera libre ; il est le contraire d’un godillot. Ses notes montrent qu’il s’interroge sur l’intransigeance ou le mode d’action du Général. cet homme, entièrement dévoué, est néanmoins indépendant. L’élaboration d’un destin : ces écrits - en dehors des événements connus - apportent une foule de faits, de détails, d’anecdotes et d’impressions qui permettent de mieux comprendre les relations entre le Président et son Premier ministre dans la conduite des affaires de l’État. On saisit parfaitement, par exemple, pourquoi, après mai 68, une sorte de fatalité les pousse à s’éloigner l’un de l’autre. En 1969, il devient chef de l’État. La fidélité à l’héritage politique demeure, la continuité est évidente. Mais le gaullisme prend sans doute une dimension plus humaine. Pompidou n’a ni le même passé ni le même caractère que son prédécesseur. On voit clairement une personnalité complexe et secrète. Le contraste apparaît entre l’homme de culture sans la moindre exclusive et le grand politique, âpre au combat, n’admettant aucune compromission avec ce qu’il considère comme la vérité. Ce qui se dessine : un homme d’État et un homme tout court avec ses hésitations, ses doutes, ses blessures et ses souffrances. Des écrits passionnants pour le grand public, indispensables à ceux qui aiment l’histoire, d’un homme dont Henry Kissinger, dans ses Mémoires, soulignait « l’étendue de sa culture, la force de son caractère, la vigueur de sa personnalité ».

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Histoire de France

Pierre Sellier. Le "clairon de l'armistice"

Le clairon, chargé de la transmission des ordres militaires lorsqu'on ne disposait pas de moyens sophistiqués pour se faire entendre sur de grandes distances, est un combattant qui se trouve souvent en première ligne et possède un statut militaire, contrairement aux musiciens. Lors de la Première Guerre mondiale, il était une figure populaire, tout comme le tambour d'Arcole en son temps. Incorporé le 8 octobre 1913 au 172e RI à Belfort, Pierre Sellier ne devient clairon que le 3 février 1915. Après quatre ans d'épreuves, de vicissitudes et de pérégrinations, il entre dans l'histoire. Lorsque l'arrivée des représentants du gouvernement allemand est annoncée sur la route d'Haudroy-La Capelle, le 7 novembre 1918, le capitaine Lhuillier sait qu'il devra déclencher sur toute la ligne de front concernée, une sonnerie de cessez-le-feu. Il désigne "Pierre Sellier, 26 ans, ce caporal bien bâti, au large front et au grand nez droit, originaire de Beaucourt, près de Sochaux", pour accompagner, sur une automobile du cortège, des parlementaires jusqu'à La Capelle et exécuter les sonneries. Il s'agit d'un beau combattant dont la croix de guerre porte plusieurs clous en bronze et en argent. La légende s'installe ensuite. En effet, "pour une majorité des combattants, l'armistice c'est avant tout un son, celui d'une sonnerie réglementaire de l'armée française, celle du cessez-le-feu. La presse s'empare d'un nom, celui du clairon Pierre Sellier, qui devient ainsi le clairon de l'armistice." Mais Pierre Sellier fut seulement le clairon du 7 novembre. S'il refusa plusieurs sollicitations internationales, dont une tournée aux Etats-Unis, il multiplia les prestations commémoratives et mémorielles au cours des années suivantes. Dès le 11 novembre 1925, il se rendit régulièrement au pied du monument de la Pierre d'Haudroy qui marque l'endroit où arrivèrent les plénipotentiaires allemands et où il fit sonner son clairon. Cette cérémonie eut les honneurs du cinéma et conserva au fil du temps une belle ampleur grâce à des patronages et des invités prestigieux. 50 000 personnes y participèrent en 1935 et le prince de Monaco y assistait en 1938. Très attaché à ses racines, Pierre Sellier vécut avec son épouse pendant des décennies dans la région de Beaucourt, sa ville natale, qui mêlait nouveautés (la ville avait son tramway) et cités ouvrières où s'entassait une forte main-d'oeuvre attirée par le dynamisme des établissements Japy Frères.

10/2018

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Philosophie

La violence narrative. En quête d'une réforme constructive des rapports humains

La présence massive de la violence sur notre planète n'a cessé d'interpeller les chercheurs, alors qu'aucune analyse rendant compte de toutes ses manifestations n'a été élaborée. Cette absence est due à l'idée que la violence concerne surtout le corps et la fome physique pour dominer, tuer, détruire ou endommager, concrétisée par des actes qui provoquent des douleurs corporelles et des souffrances psychiques. Cette thèse fait rarement allusion à la violence narrative qui, d'une part, agit d'une façon performative dans les dialogues, par la menace, la colère ou l'incitation à la violence, et, d'autre part, raconte la violence par une variété de récits et d'images, impliquant des souffrances morales, lesquelles expriment les violences ou les causent. Or la narration fait également état de violences au moyen de la fiction, parfois sans aucun rapport au réel, conférant à la violence le statut d'un schème, — un modèle empirique utilisé de façon déréalisée et fonctionnelle —, créant un monde imaginaire, qui produit un nombre illimité de narrations. L'exposé, riche et varié, traverse presque tous les domaines de la parole vivante. Il illustre comment le schème de la violence régule la mythopoétique depuis le monde archuique jusqu'au cour de la littérature actuelle, enrichie par les moyens techniques qui contribuent au développement du septième art (cinéma), des arts suivants (photographie, télévision, bande dessinée, jeux vidéo, multimédias) et des réseaux sociaux, déroulant une myrhotechnique fascinante, mais inquiétante à cause de la profusion de la violence narrative qui divertit des milliards d'êtres humains. L'auteur montre que si cette pratique pose depuis longtemps le problème de l'origine et de l'impact de la violence narrative dans la vie et les cultures hautaines, notre civilisation a néanmoins réussi à quelques reprises à dépasser les violences physiques par de nouvelles cultures, comme les jeux panhelléniques et la démocratie antique, les Lumières, l'Etat de droit et le commerce à l'époque moderne, les droits de l'homme et le projet européen depuis la seconde guerre mondiale. L'auteur conclut, en prenant pour guide la question des souffrances qui y est impliquée, que notre contemporanéité, qui associe le monde technico-économique et les aspirations démocratiques, requiert une nouvelle culture. La proposition qu'il fait est de prendre la souffrance comme mesure des actions et de promouvoir l'esprit critique et l'émulation au détriment des rivalités intempestives, avec comme repère les émulations ludiques, éducatives et politiques qui avaient aidé à dépasser les violences, afin de réaliser une interculturalité et une vigilance environnementale, capables de réguler, en plus de la violence physique, les violences verbales et narratives.

11/2019

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Littérature française

Messieurs les ronds-de-cuir. Un roman de Georges Courteline

Messieurs les ronds-de-cuir (sous-titré Tableaux-roman de la vie de bureau) est un roman de Georges Courteline paru en 1891 et 1892 dans L'Echo de Paris, et en librairie en 1893, avec une préface de Marcel Schwob. En 1911, Robert Dieudonné et Raoul Aubry en tirent une pièce de théâtre, représentée au théâtre de l'Ambigu-Comique le 4 octobre 1911. Un premier film de même nom, en 1936, est l'adaptation du roman au grand écran, avec Yves Mirande à la réalisation. En 1959, Henri Diamant-Berger adapte le roman au cinéma avec le même titre, où jouent les acteurs Pierre Brasseur , Noël-Noël, Lucien Baroux. Le téléfilm français Messieurs les ronds-de-cuir de Daniel Ceccaldi, réalisé en 1978, porte lui aussi sur le roman de Courteline. L'expression "rond-de-cuir" qui désigne non plus seulement le coussin mais un bureaucrate ou un employé de bureau a été popularisée d'abord par ce roman de Courteline. Fonctionnaire au ministère des Cultes où il s'ennuya ferme pendant quatorze ans tout en pratiquant assidûment l'absentéisme, s'assurant la complicité d'un expéditionnaire qui le déchargeait d'une grande partie de son travail, Courteline mit à profit son sens de l'observation et de la dérision pour écrire ce tableauroman, géniale peinture satirique et caustique de la vie de bureau et des turpitudes administratives. Employé à la direction des Dons et Legs, Lahrier a pris l'habitude de s'absenter une fois par semaine sans que "l'Administration, bonne bête, eût l'air de s'en apercevoir" . Or, un jour de printemps, l'atmosphère joyeuse de la ville l'ayant peutêtre retardé plus qu'à l'accoutumée, son chef de bureau, M. de La Hourmerie, s'avise de le tancer vertement, à propos précisément de ses absences. Sauvé de l'ire de son supérieur par l'arrivée inopinée du conservateur du musée de VanneenBresse auquel on fait croire que son dossier est en passe d'être réglé alors qu'il a été perdu, Lahrier va retrouver dans l'atmosphère poussiéreuse de ces bureaux confinés son visàvis Soupe, baderne bougonne et obtuse, mais aussi Ovide, le garçon de bureau, Chavarax, aigri dans l'attente bilieuse d'un poste de souschef, l'expéditionnaire Sainthomme se surchargeant de travail dans l'espoir toujours déçu d'obtenir les palmes académiques, le souschef Van der Hogen, cloporte dénicheur de dossiers caducs et rédacteur d'invraisemblables rapports, enfin l'employé Letondu dont le comportement bizarre vire peu à peu à la folie...

02/2023

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Opéra

Histoire de l'Opéra français. De la Belle Epoque au monde globalisé

Si, au XIXe siècle, l'opéra français a continué à se définir en tant qu'expression artistique distincte des opéras italiens et allemands, au cours du XXe siècle l'internationalisation du répertoire et des créations conduit à une modification profonde de la notion d'école nationale. En revanche, perdure un lien important entre l'Etat, les collectivités territoriales et le genre, comme en témoigne l'inauguration en 1989 de l'Opéra Bastille, voulu par François Mitterrand, ou le label "opéra national" , décerné par le ministère de la Culture à quelques théâtres en régions. Plus que jamais, la place de l'opéra dans la société est un défi, à la fois esthétique, culturel, économique, social et politique. Jusqu'à 1945, et malgré sa lente et inexorable désagrégation, le système mis en place précédemment maintient la vie lyrique dans une relative continuité avec le XIXe siècle. L'opéra du XXe siècle, que l'on élargira aux deux premières décennies du XXIe, est l'opéra de toutes les aventures et de toutes les crises, qui l'ont un temps conduit aux limites de ses possibles et menacé de disparition. Face aux révolutions de tout ordre - de la société des loisirs, de la démocratisation et de la décentralisation, du multiculturalisme et de la mondialisation, du langage musical occidental et de la mise en scène, des nouvelles technologies et des musiques populaires urbaines -, face aux avant-gardes, aux nouveaux médias et aux nouvelles formes d'art comme le cinéma, l'opéra a su se réinventer. Son aptitude à absorber sans se perdre les nouveaux outils et les nouvelles questions du monde contemporain est stupéfiante. A l'encontre des idées reçues, ce sont encore, de Debussy à Saariaho, des centaines d'oeuvres que ce siècle de turbulences a produites. Tragiques ou légères, formules radicales ou partitions pour enfants, grandes fresques ou opéras-minutes, opérettes ou comédies musicales, elles n'ont cessé de reconfigurer le genre et d'élargir son spectre. Ce continent lyrique restait à explorer dans la diversité de ses aspects. Une histoire s'imposait donc pour en faire le récit et en décrire les mécanismes, pour en reconstituer les valeurs et les tendances, pour suivre ses acteurs et découvrir ses productions. Entreprise sans précédent par ses dimensions et par sa conception, cette Histoire de l'opéra français en trois volumes réunit une équipe internationale de plus de cent cinquante auteurs - musicologues, littéraires et philosophes, historiens et spécialistes du théâtre, de la danse et des arts. Elle est placée sous la direction d'Hervé Lacombe, professeur de musicologie à l'université Rennes 2

05/2022

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Chanson française

Rappels. Mémoires du manager de Téléphone, Gainsbourg, Marianne Faithfull

Les souvenirs du manager mythique de Téléphone, Gainsbourg, Marianne Faithfull... François Ravard est un électron libre. De la folle aventure Téléphone aux Stades de France des Insus en passant par les iconiques Marianne Faithfull, Serge Gainsbourg, Jean-Pierre Mocky ou Les Rita Mitsouko, il raconte son incroyable parcours en forme de montagnes russes, avec l'aide de son ami Philippe Manoeuvre. "Backstage, je découvre que les quatre fabuleux (Corine, Jean-Louis, Louis et Richard, faut-il le rappeler) ont un succès aussi énorme que mérité, mais aussi un truc plus incroyable encore dans notre petit monde : un manager, le dénommé François Ravard, le cinquième Téléphone. François est un garçon fascinant, plus jeune que les musiciens pour qui il se démène. Dans l'ombre, Ravard fait le job, un oeil sur le modèle british, un autre sur le groupe. Un magicien... Nous ne nous sommes jamais perdus de vue. Et plus d'une fois, c'en était devenu un gag récurrent, Ravard ressortait sa vieille blague : "De toute façon, un jour, tu écriras ma biographie". " Philippe Manoeuvre A propos des auteurs Né en 1957, François Ravard est l'un des premiers managers français, également producteur et réalisateur. Journaliste, auteur, chroniqueur, critique musical, scénariste, Philippe Manoeuvre est aujourd'hui considéré comme une icône du rock en France. "C'est le genre de mémoires qu'on dévore d'une traite, bourrés d'anecdotes hilarantes et de portraits attachants". Libération " Des scènes rock'n'roll particulièrement bien écrites, 300 pages drôles, vivantes et évidemment totalement déjantées. " Le Figaro " [Ce] récit, discrètement bluffant, couvre plus de quatre décennies de rock et nous régale d'une époustouflante série de rencontres pas du tout fortuites avec tout le petit peuple du rock français". Rock & Folk " Montez le son, ouvrez le livre ! " Transfuge "Son livre Rappels est une histoire du rock et du cinéma. François Ravard, vous avez été le premier manager rock en France à pas même 20 ans ! " France Inter, Côté Club avec Laurent Goumarre " Le manager de Téléphone, ancien compagnon de Marianne Faithfull, ami de Serge Gainsbourg, se raconte dans un livre enlevé et émouvant. " Paris Match " François Ravard, manager historique de Téléphone, de Marianne Faithfull, des Insus, et qui connaît si bien la chanson et la musique en général, a eu la bonne idée d'en faire un livre, à 4 mains, avec Philippe Manoeuvre". Popopop, Antoine de Caunes " Plonger dans ce livre, c'est comme revivre l'explosion du rock français, en 1977. " L'indépendant

11/2022

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Actualité politique France

Adieu la liberté. Essai sur la société disciplinaire

La crise de la Covid-19 a révélé un nouveau totalitarisme " soft " soucieux du " safe ", comme le démontre cet essai particulièrement incisif. Mathieu Slama y analyse les faits, les mots qui ont fait croître l'acceptation de la servitude chez un peuple pourtant réputé rebelle depuis la Révolution. Comment un peuple réputé rebelle a-t-il pu consentir à ce qu'on lui retire, une à une, ses libertés ? Avec cet essai incisif, Mathieu Slama analyse l'intégralité de la séquence du confinement depuis le 16 mars 2020, les faits et les mots qui ont contribué à faire croître, dans les esprits, l'acceptation de la servitude. Réactualisant la pensée de La Boétie, Slama voit dans la crise de la Covid, le révélateur de l'apparition d'un nouveau totalitarisme " soft " soucieux du " safe ", c'est-à-dire de notre sécurité. En cause, Emmanuel Macron, responsable du dévoiement de l'art de gouverner en une technique de management, cherchant non pas le bien commun, mais le bien-être de chaque citoyen - au prix de toutes ses libertés. Ainsi le politique s'est-il effacé devant le médecin, ouvrant la voie au gouvernement de ce que Walter Benjamin appelait la " vie nue ". Dans une société où les citoyens ont été rendus à leurs seules existences biologiques, contrôlables, quantifiables par le " bio-pouvoir ", théorisé par Michel Foucault. Ainsi l'Etat et sa bureaucratie sont-ils responsables de l'infantilisation d'un peuple, soudain sommé de dire ce qu'il fait, avec qui et à quelle heure dans l'" absurdistan " français. Pour l'auteur, l'éclipse de démocratie qu'aura engendré la Covid-19 n'est pas un commencement mais au contraire l'aboutissement d'un mouvement déjà ancien qui a préparé à l'abdication volontaire en chaque citoyen de la première des libertés : celle de penser et de dire ce qu'il pense. La conception limitatrice de la liberté n'est pas née de la crise sanitaire. Mais elle a été préparée par des renoncements successifs avec un point de bascule en 2002, quand Michel Houellebecq est accusé d'avoir " blasphémé l'Islam ". Encadré par le double puritanisme, du protestantisme américain, ressuscité avec l'idéologie woke, et du puritanisme islamiste, le citoyen est ainsi prêt à accepter, comme l'écrivait en 1977, de façon prophétique, Gilles Deleuze, " ce néofascisme, qui est une entente mondiale pour la sécurité, avec l'organisation concertée de toutes les petites peurs, de toutes les petites angoisses qui font de nous autant de micro-fascistes, chargés d'étouffer chaque chose, chaque visage, chaque parole un peu forte, dans sa rue, son quartier, sa salle de cinéma ".

01/2022

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Littérature française

L'exercice du skieur

La Muche, Printemps 2022 : une autrice séjourne dans une petite station de ski familiale reconvertie en résidence pour artistes depuis que la neige s'est raréfiée sur les pistes. Convoquant les souvenirs d'une enfance dans les années 70 et 80, elle s'attelle à l'écriture d'un récit, " L'exercice du skieur" , sur les effets écocides de la société des loisirs dans laquelle elle a grandi. Des souvenirs, vestiges d'un passé, qu'elle considère, tels ces objets figés dans les boules à neige, comme les témoins du goût immodéré pour la consommation de cette génération-paillettes. Multipliant les anecdotes, elle souligne sur le mode humoristique que cette société des loisirs était promue jusque dans les manuels de français ou les exercices de physique et de mathématiques proposés à l'école et au collège. Des versions parodiques de ces énoncés mettent en lumière l'absurdité de cette fuite en avant : Soit un skieur bloqué à mi-pente dans la position du slalomeur. Vous calculerez le temps qu'il mettra à cesser d'être une icône des vacances d'hiver. A l'image de ce père de famille, dans un film suédois, qui reste figé alors qu'une avalanche se précipite sur le chalet d'altitude où lui et sa famille font une pause en terrasse, tout en déclarant : "Pas de panique ! Ils savent ce qu'ils font ! " La Muche, 2041 La seconde partie nous propulse 20 ans plus tard, dans la même station de ski sur le tournage de "La première trace" , une comédie dramatique qui se déroule en 1995 pendant les vacances de Pâques. La neige naturelle n'est plus qu'un lointain souvenir. Le scénario multipliant sur le papier les plans d'une montagne encore immaculée, le recours aux canons à neige s'avère indispensable pour reconstituer les paysages disparus. Rebecca, une des comédiennes qui a fortuitement mis la main sur le manuscrit abandonné 20 ans plus tôt dans une chambre de la station, se sent en porte-à-faux avec le déroulement du tournage. Elle ironise sur la médiocrité et la vanité du projet : Je crois que le réal voulait faire un mélange entre le cinéma suédois et Sautet, j'avais (déjà) un peu peur du résultat. A Au sein de l'équipe, les relations se tendent et l'effondrement soudain du massif montagneux fait prendre une nouvelle tournure à l'histoire. Dans ce roman écologique et dystopique, Sophie Coiffier met en perspective, avec une ironie mordante, cette insouciance qui a conduit au cataclysme climatique et à l'extinction du vivant dont nous prenons aujourd'hui la mesure.

01/2024

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Revues

Schnock N° 50, printemps 2024 : Johnny Hallyday

Si vous aussi, vous ressentez l'envie d'échapper à l'hystérie de l'époque en faisant un pas de côté et en tournant poliment le dos au jeunisme ambiant, cette revue est faite pour vous. Elle vous fera replonger dans des oeuvres parfois oubliées, rencontrer des personnages hauts en couleur, mémoires encore vivaces de notre patrimoine culturel, vous permettant ainsi de satisfaire vos goûts de jeune (ou vieux) schnock. Ni rétrograde, ni passéiste. Schnock, donc... Tout bonnement. Alors rejoignez-nous ! Après vous... SOMMAIRE p. 3 L'Edito p. 6 Le Trombinoschnock P. 8 Schnock des cultures tout ce que vous avez toujours voulu savoir etc. p. 10 "Bien entendu, c'est on" par Eléonore Cambret p. 14 Le Top 15 Johnny, objets du culte, par Michel Dalloni P. 26 Les Schnocks parlent aux Schnocks p. 28 Le Grand Dossier - Johnny Hallyday p. 30 Johnny Hallyday : "Les gens qui sourient tout le temps ont l'air con" par Serge Loupien p. 38 Le Petit Johnny illustré Karelle Fitoussi, Baptiste Vignol et Vincent Brunner p. 50 Léon Smet, le père invisible par Yves Bigot p. 58 Que j'aime "Que je t'aime" par Laurent Chalumeau p. 74 Nanette Workman : "Même dans ses excès, Johnny savait poser des limites" par Thibaut Geffrotin p. 78 Docteur Bamy et Mister Hallyday par Baptiste Vignol p. 86 Johnny par la bande par Christian Eudeline, Thibaut Geffrotin et Georgina Tacou p. 90 Top 20 Johnny Hallyday par Alister p. 100 Johnny Lagaffe par Armand Noël p. 104 Daniel Rondeau : "La mélancolie l'a accompagné jusqu'à la fin de sa vie" par Laurence Rémila p. 114 Nathalie Baye : "Johnny, c'était un pépère tranquille ! " par Luc Larriba p. 120 Johnny au cinéma vu par... Patrice Leconte, Laetitia Masson, Laurent Tuel, Costa-Gavras, Claude Lelouch et Hervé Palud par Luc Larriba et Marc Godin p. 128 Schnock vidéo présente Terminus par Sylvain Perret p. 138 Johnny au ciné - Le best of et le worst of par Marc Godin p. 142 Johnny : "Je suis un fou des sauces ! " par Alister p. 146 Johnny Canaille ! par Luc Larriba et Laurence Rémila p. 160 Johnny dans Schnock P. 168 Schnock chez soi lectures & autres loisirs de chambre p. 170-175 Nos Trésors cachés ne le restent jamais très longtemps p. 170 Trésor livre : Dans l'ombre de Johnny d'Alan Coriolan par Laurence Rémila p. 172 Trésor CD : Lorada de Johnny Hallyday par Alister p. 174 Trésor DVD : J'ai tout donné de François Reichenbach par Alister

03/2024

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Thèmes photo

Pack en 2 volumes : Le voyage mexicain. 1965-1966 ; Jungle.1966

Le voyage mexicain, livre mythique de Bernard Plossu paru en 1979 est enfin réédité dans sa version originale accompagné de Jungle, un livre inédit de photographies couleurs qu'il réalisa à la même époque lors d'une expédition dans la jungle du Chiapas mexicaine. L'ensemble ainsi constitué révèle comment un jeune homme d'à peine vingt ans, amateur de cinéma d'auteur et de films grand public met spontanément en place dès ses débuts de photographe une esthétique personnelle sans rien connaitre des photographes importants de son époque. Et dans le même temps, que ce soit sur la route à travers l'approche poétique du Voyage mexicain ou narrative de Jungle, on sent que tout est déjà en place : la conscience de son devenir d'auteur et son approche conceptuelle à travers les livres conçus comme des oeuvres à part entière. Les deux ouvrages tirés à 1000 exemplaires vendus exclusivement ensemble sont présentés dans un fourreau. Le voyage mexicain, préface de Denis Roche C'est un témoignage optimiste de la beat génération, une rupture dans l'histoire de la photographie avec des cadrages à l'opposé de la tradition française, des images qui nous en disent autant sur le photographe que sur le pays traversé. La critique fut enthousiaste à la sortie de ce petit livre en 1979, et son auteur qualifié de "Robert Frank heureux" . Dans sa mémorable préface Denis Roche explique ce qu'est la liberté de la photographie qui permet qu'un savoir et une esthétique soient mystérieusement spontanés comme chez Bernard Plossu. Jungle, textes de Bernard Plossu et Claude Nori Début 1966, Bernard Plossu qui n'a que vingt ans est engagé comme photographe dans une expédition anglaise à la recherche d'un temple maya. Ce sera pour lui une façon d'améliorer sa technique mais aussi l'art de la débrouille et de la survie au contact d'une nature souvent hostile avec les quatre autres jeunes membres de l'expédition. Il tiendra tout le long de cette expérience, un journal dont des extraits sont publiés dans l'ouvrage, donnant à cette approche de son périple mexicain une dimension aventurière. " Dans la vieille Packard 50, on file vers Guanajuato, dans l'infini de l'espace, des routes, dormant n'importe où autour d'un feu sous les étoiles, réveillés par les paysans, déjeunant dans les marchés ou les cantinas, dansant, chantant partout, bavardant avec des vieillards aux chapeaux de paille esquintés par le temps. "...

05/2023

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Art contemporain

Art is Magic

Publié à l'occasion de la première rétrospective en France de Jeremy Deller, lauréat du prestigieux Turner Prize en 2004 et représentant de son pays à la Biennale internationale d'art contemporain de Venise en 2013, Art is Magic dresse le panorama le plus complet de son travail des années 1990 à ce jour, à partir d'une quinzaine de projets et d'oeuvres majeures qui ont ponctué son parcours. Jeremy Deller s'intéresse aux cultures populaires et aux contre-cultures. Les questions sociales, l'histoire, mais aussi la musique, sont au centre des investigations de l'artiste. Teintées d'un discours socio-politique assumé, ses oeuvres font un lien entre la culture - vernaculaire ou de masse - et le monde du travail. Ses recherches l'ont mené à explorer l'histoire sociale de son pays et du monde à travers les conflits sociaux de l'ère thatchérienne, le groupe Depeche Mode, le monde du catch, les ferments du Brexit, ou encore l'Acid house et le mouvement rave, avec le souci constant d'impliquer d'autres personnes dans le processus créatif. Art is Magic constitue une tentative de relier les oeuvres clés de la carrière de Jeremy Deller avec l'art, la musique pop, le cinéma, la politique et l'histoire qui ont inspiré son travail. Deller a fait couler beaucoup d'encre au fil des décennies, mais c'est la première fois qu'il rassemble toutes ses sources culturelles. L'ouvrage est divisé en trois sections : un guide visuel de ses oeuvres préférées, des réflexions approfondies sur sa vie et sa pratique artistique et, enfin, un album d'images expliquant ce qui le motive (de Rod Stewart aux chauves-souris, du juke-box parfait aux têtes de hache néolithiques). Le livre présente des oeuvres qui ont jalonné la vie et la carrière de Deller, la plupart inédites. S'y entrecroisent ainsi son installation gonflable pour le festival international de Glasgow, la grève des mineurs (son film sur la bataille d'Orgreave), les chauves-souris (sujet d'au moins trois des oeuvres de Deller), Andy Warhol (qu'il a rencontré en 1986), les liens entre la révolution industrielle et le heavy metal, et les busards cendrés picorant les yeux d'un député conservateur (figurant dans sa fresque contre la chasse au gibier créée pour la Biennale de Venise). Publié à l'occasion de l'exposition Jeremy Deller : Art is Magic au Frac Bretagne, au Musée des beaux-arts et à La Criée, centre d'art contemporain, Rennes, en 2023.

05/2023

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Acteurs

Montgomery Clift, l'enfer du décor

Montgomery Clift a été une star immense entre la fin des années quarante et le milieu des années soixante. Mais il ne fut pas une étoile comme une autre. Il a traversé le ciel hollywoodien telle une comète : un peu plus de 13 années passées sur les planches, 20 sur les plateaux de cinéma, soit 17 films et une mort prématurée à 45 ans. Comme James Dean, il a été victime d'un accident de voiture. A la différence du rebelle sans cause qui l'admirait, celui que tout le monde appelait Monty a survécu. Rebelle, il l'a été à sa manière. Moins tonitruante que celle de son cadet. Il a été le premier à imposer ses conditions aux tout-puissants studios, se payant le luxe de réécrire ses dialogues. Aujourd'hui, le grand public se souvient davantage de Marlon Brando. Il était le concurrent numéro un de Monty. Dans les couloirs des rédactions, il se disait que si l'un n'obtenait pas un rôle, c'était l'autre qui l'aurait. Au-delà de cette rivalité, il y avait un grand respect mutuel. Elle révélait aussi l'envie d'approcher la perfection. Toute sa vie, Montgomery Clift n'a eu de cesse de donner le meilleur de lui-même, allant chercher profondément en lui, dans sa propre existence, les matériaux utiles à son art. Ses compositions sont le résultat d'un travail acharné. Ses personnages restent gravés dans les mémoires : Matthew Garth, le jeune cow-boy de Red River (La Rivière rouge) en lutte contre l'autorité, Robert E. Lee Prewitt, le soldat idéaliste de From Here to Eternity (Tant qu'il y aura des hommes), et Perce Howland, le héros blessé de The Misfits (Les Désaxés). Des êtres solitaires et écorchés, à l'image de l'homme qui les incarnait. Si ce livre doit prouver quelque chose, c'est l'étonnante proximité entre ces personnages et l'acteur. Montrer à quel point vie professionnelle et vie privée ont fini par se mêler. L'Enfer du décor n'est donc pas une biographie, mais un travail de synthèse mêlant éléments biographiques et analyse filmique conférant à cet ouvrage un aspect analytique qu'on ne trouve, à ce jour, dans aucun autre ouvrage consacré au comédien. Mais il a une autre particularité, celle d'être le seul en France à octroyer à cet acteur fabuleux et méconnu la place qu'il mérite, celui d'un créateur sensible, érudit et marginal, qui inspira de nombreux autres et changea le statut de l'acteur en insufflant à la profession un supplément d'âme et de coeur, une authenticité.

05/2023

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BD tout public

Bye bye Babylone. Beyrouth (1975-1979)

Dans ce livre, il y a des chewing-gums et des kalachnikovs. Il y a des bonbons, des chocolats, des barbes à papa, des bombes, des obus, des missiles et des grenades, des armes en tous genres. Il y a des Smacks, du Bonjus, et des roquettes de 140 mm. Il y a moi et mon petit frère, il y a des miliciens et des miliciennes, des phalangistes, des palestino-progressistes, des nassériens, des tigres, des fidayins, des moudjahidins et des mourabitouns. Il y a des leaders politiques. Des lugubres, des cruels, des cyniques, des monstres, ils planent sur la ville. Il y a des keffiehs, des treillis, des lunettes de soleil, des croix et des turbans, des chemises hawaiiennes et des sahariennes. Il y a les néons de Hamra et le hamburger du Holiday Inn, la bataille des hôtels et le massacre des camps, l'incendie des souks et le pillage de la rue des Banques. Il y a des enlèvements, des explosions, des assassinats, des rafales de mitraillette, et des cigarettes. Des Gitanes, des Marlboro, des Dunhill, des Viceroy, des Winston, et surtout des Kent. Des cendriers, des allumettes, des briquets Cartier en or, de la fumée, beaucoup de fumée, et du feu. Il y a des cartes à jouer, des dessins animés, des bandes dessinées, des jeux de société, des Matchbox, des bulles de savon, une panoplie d'Indienne et ma collection d'éclats d'obus. Il y a le magasin de mon grand-père et le foulard en soie de ma grand-mère, la Nivea de ma nounou et le Petzi de Walid. Il y a des cinémas en feu, le Roxy, le Radio City, le Dunia, l'Empire, le Rivoli, et des hôtels en flammes, le Palm Beach, le Vendôme, le Saint-Georges, le Phoenicia, l'Alcazar. Il y a la ligne de démarcation et la corniche de Manara. Dans ce livre il y a Beyrouth, en feu, en flammes, en étincelles, en explosions, dans le noir absolu, il y a Beyrouth qui brille.

10/2019

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BD tout public

O nuit ô mes yeux. Le Caire / Beyrouth / Damas / Jérusalem

Dans ce livre il y a les cabarets du Caire, les studios, villas, casinos du Caire, les maris, les amants, l'alcool, les somnifères, l'argent, les suicides, les brownings, les scandales, les palaces. Il y a le chant, la musique, la voix, les ovations, les triomphes, la gloire. Il y a l'audace, le génie, l'aventure, la tragédie. Il y a des poètes et des émirs, des danseuses, des banquiers, des officiers, des imams, des cheikhs, des actrices, des khawagates, des musiciens, des vamps, des noctambules, des révoltés, des sultans, des pachas, des beys, des espionnes, des prodiges, des rois d'Egypte et la cour. D'éminents journalistes, de célèbres compositeurs, des patronnes de clubs, des grands chambellans, des joueurs de oud. Il y a la petite paysanne du delta et la princesse druze, le fils du muezzin et le chanteur solitaire, la star juive et le colonel héroïque. Il y a Asmahan, Oum Kalthoum, Abdelwahab, Farid el Atrache, Samia Gamal, Leïla Mourad, Nour el Hoda, Sabah, Fayrouz, il y a les astres de l'Orient. Il y a la classe, le glamour, la touche, le style. Il y a l'amour, la passion, la haine, la vengeance. Il y a des verres et des cigarettes, des cartes à jouer, des jetons, des dés, des bijoux, des drapeaux, des corans. Il y a les cinémas de Beyrouth, les palais de Damas, les quais d'Alexandrie, les rues de Jérusalem, la cour de Bagdad. Il y a la radio, les disques, les micros, les caméras, les génériques, les néons, le rideau, l'orchestre, le concert, le public, la transe. Il y a la voix des Arabes. Il y a les grands hôtels, le Saint-Georges, le King David, l'Orient Palace, le Mena House. Il y a la chute de l'Empire ottoman et il y a la guerre en Palestine, il y a la prise du canal de Suez et la défaite de 1967, il y a un siècle au Proche-Orient.

10/2015

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Littérature française

La Tour Rouge. Souvenirs de Nice

A travers une suite de messages électroniques adressés à un ami d'enfance, un niçois retraité depuis peu et exilé malgré lui, évoque son enfance à Nice, dans le quartier du Port, pendant les années d'après guerre. Les personnages, inspirés en grande partie de la réalité, sont le reflet de cette époque pleine d'espoir, ils découvraient les nouveautés de la consommation de masse, la modernité et le confort de l'électroménager. Les enfants jouaient encore à des jeux bien innocents comme les billes ou le Pilou, tandis que les adolescents s'émancipaient à la plage ou sur l'Avenue, reluquant les filles et s'essayant aux plaisirs interdits... Une partie du récit concerne l'école du Port avec son cours complémentaire, sa cour de récréation et ses enseignants hauts en couleurs que tous les anciens élèves gardent à jamais dans leur mémoire. La plage de la Tour Rouge symbolise le refuge ludique des jeunes niçois apprenant à nager dans un bassin du port bien à l'abri des coups de mer et des touristes ! Aujourd'hui disparue, cette plage reste dans leur histoire intime le point d'orgue de leur enfance, une sorte de terrain d'aventure comme il ne peut plus en exister de nos jours, la modernité ayant avalé la fameuse tour rouge. A travers son héros, l'auteur nous fait vivre ou revivre, l'arrivée de la machine à laver dans la maisonnée, le charme des vieux trams et trolleys, les sorties au foot ou à l'aéroport en 4 CV, le chargement des bovins sur le bateau pour la Corse, le bal du bac. Nous visitons ou revisitons avec l'oeil de l'enfant les principales rues de Nice, les souterrains plus ou moins imaginaires sous l'école du Port, l'arrière boutique de La Sorbonne, les cinémas à toit ouvrant. Nous revoyons les passages cloutés avec de vrais clous, la glaciaire, ancêtre du réfrigérateur.

09/2015

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Histoire de France

Monsieur Barre

"Raymond Barre ou le plus mal connu des hommes connus." Tel aurait pu, également, être le titre de ce livre. De l'homme qui, pendant près de cinq ans, fut Premier ministre, les Français ne savent presque rien. Ils n'en ont qu'une image partielle? : celle du chef du gouvernement nommé, en août?1976, au plus fort des difficultés économiques et sociales, appelant à l'effort, au retour à la compétitivité, à la défense du franc, à l'adaptation des entreprises et, plus encore, à la transformation des mentalités face au monde dans lequel nous vivons, celui des fulgurantes évolutions. Mais il existe un autre Raymond Barre que l'homme politique. Pudique, discret, secret, Raymond Barre, qui n'est entré que très tard et par hasard en politique il a cinquante-deux ans en 1976 —, a toujours refusé de se livrer. Il n'aime ni les potins, ni les cancans, ni les "échos", ni les petites phrases ni les petites histoires. Aussi Henri Amouroux, auteur de "La grande histoire des Français sous l'occupation", a-t-il voulu écrire ce livre comme il le fallait, en historien qui va aux sources et retrouve l'écolier Raymond Barre, premier de sa classe, à la Réunion? ; l'étudiant, qui, en 1946, suit à Paris les cours de François Perroux et de Raymond Aron? ; l'agrégé, professeur en Tunisie, où il rencontrera celle qui deviendra sa femme? ; l'homme à qui le général de Gaulle demandera d'aller à Bruxelles pour y être vice-président de la commission unique des Communautés européennes avant d'expliquer l'action du ministre du Commerce extérieur, du Premier ministre et du député de Lyon. Historien, Henri Amouroux a également, depuis dix ans, noué des rapports privilégiés de journaliste et d'homme avec Raymond Barre. C'est grâce à ces rapports qu'il peut, le premier, faire prendre conscience au lecteur de la variété et de l'ampleur des connaissances de Raymond Barre. Qu'il s'agisse de peinture, de musique, de cinéma, de philosophie, d'histoire et, bien entendu, d'économie, Raymond Barre est un homme aux goûts éclectiques, aux compétences multiples, à la simplicité totale, dès lors qu'il ne se trouve plus en présence du "microcosme", mais de ces Françaises et de ces Français qui, par leur travail quotidien, font la France. Au-delà de l'homme et de son action, le livre d'Henri Amouroux éclaire vingt ans d'histoire récente. Il nous aide aussi à mieux comprendre le présent et à saisir les enjeux du proche avenir. Nous devons la préface de cet ouvrage à M. Jean-Pierre Raffarin, homme d'Etat français et ancien Premier ministre.

07/2019

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Photographie

Paul Strand

Né à New York en 1890, Paul Strand restera dans l’histoire de l’art photographique comme celui qui a fait basculer la photographie dans l’ère moderne. Il personnifie par excellence la figure de l’artiste d’avant-garde, pleinement engagé dans la vie sociale de son temps, qui impose une vision nouvelle à force de recherches et d’innovations. Formé par Lewis Hine et remarqué dès 1906 par Alfred Stieglitz auquel le liera une longue amitié, Paul Strand est, avec celui-ci, l’artiste qui symbolisera la critique et la fin du célèbre mouvement pictorialiste et de son esthétique picturale qui avait marqué depuis plusieurs décennies l’adolescence de la photographie. Influencé par le cubisme et le fauvisme, attiré par les oeuvres de Picasso, Braque ou Brancusi, Paul Strand s’intéresse à l’abstraction et au formalisme, sans négliger la dimension sociale de la photographie documentaire. Considéré comme un chef-d’oeuvre de la photographie, La barrière blanche, qu’il réalise en 1915, annonce une nouvelle ère de l’image fixe et l’émergence du courant inédit de la Straight Photography (“La photographie pure”) dont il deviendra le chef de file. À la fin de la première guerre mondiale, que Paul Strand effectuera dans un hôpital militaire, la Straight Photography impose internationalement sa révolution de la perception de l’objet et du champ de la photographie. Il n’est alors plus question de tenter d’inscrire la photographie dans l’art pictural par des procédés surannés mais, bien au contraire, de s’appuyer sur la particularité objective du médium et de ses dispositifs pour imposer une esthétique spécifique faite de netteté, de précision du détail, de rigueur du cadrage et de structuration par la seule lumière. La photographie est désormais libre de ses choix. Elle peut appliquer son art propre à une infinité de sujets qui vont de l’objet singulier au mouvement de la vie urbaine, en passant par une forme nouvelle d’abstraction. L’oeuvre de Paul Strand illustre à la perfection la richesse et la diversité de cette “nouvelle objectivité”. Expérimentant également le cinéma d’avant-garde à visée sociale, Paul Strand bénéficie dès la fin de la Seconde Guerre mondiale d’une reconnaissance internationale, et voyage à travers l’Europe en poursuivant ses recherches. Victime du maccarthysme en raison de ses opinions communistes, il choisit de s’installer en France, on se souvient de sa complicité avec l’écrivain Claude Roy, où il continue travaux et voyages et où il meurt en 1976. Si, comme l’affirme l’historien Peter C Brunnell, “la nouveauté de la perception est ce qui caractérise l’avant-garde moderne”, l’oeuvre de Paul Strand, déployée sur presque soixante années, incarne à elle seule la notion d’avant-garde rapportée à la photographie.

12/2011

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BD tout public

La revue dessinée N° 29, automne 2020

CHAIR A CARTON : Une enquête de Jean-Baptiste Malet et Benjamin Adam. Sous la contrainte. C'est ainsi que les six entrepôts français d'Amazon ont temporairement fermé leurs portes, le 16 avril dernier. Condamné par la justice pour avoir "méconnu son obligation de sécurité et de prévention de la santé des salariés", le géant américain du commerce en ligne a suspendu son activité en France alors que l'épidémie de Covid-19 battait son plein depuis plus d'un mois. Cet épisode signait le dénouement d'une saga qui dure depuis plusieurs semaines. Des semaines à ignorer les craintes des salariés et les plaintes des syndicats. Des semaines à répondre aux mises en demeure de l'Inspection du travail par des mesures tardives et un déluge de communication. Des semaines, surtout, à redoubler d'activité pour engranger des recettes mirifiques. Retour sur le mois où le géant du commerce en ligne a profité de la pandémie. LE FUTUR EST DANS LE PRE : Une enquête de Marion Touboul et Léo Quiévreux. Tracteurs intelligents, drones pulvérisateurs, robot de désherbage... Des machines toujours plus high tech envahissent les champs. Moderniser l'agriculture, telle est la volonté du gouvernement qui multiplie les appels du pied aux industriels afin qu'ils soutiennent les start-up de l'agroéquipement. "La France doit devenir un des pays leader de la robotique agricole", a annoncé le ministre de l'Agriculture. Il veut aussi une accélération du passage à la Big Data. Fermes et paysans doivent désormais être "connectés". Une révolution dans l'histoire de l'agriculture. Mais alors, la place de l'agriculteur est-elle encore dans les champs ? SAGES SUR ORDONNANCE : Une enquête de Julien Brygo et Singeon. Niels fait partie des quelque 62 000 enfants de moins de 20 ans en France qui ont consommé du méthylphénidate en 2016. Comme la plupart de ses camarades " hyperactifs ", il prend ses cachets uniquement les jours d'école. Le but ? Le faire tenir en place de 8 heures à 16 heures exactement. En France, la prescription de méthylphénidate a explosé : on en consomme trente fois plus aujourd'hui qu'en 1996, année de sa mise sur le marché. En 2017, il s'en est vendu quatre fois plus qu'en 2005. La pilule magique porte le nom de Ritaline et est, pour de nombreux parents, synonyme de calme et de réussite scolaire. Mais quels dangers se cachent derrière ces belles promesses ? Qu'est-ce que l'usage de plus en plus répandu de ce produit "miracle" raconte des sociétés dans lesquelles nous vivons ? LES CHRONIQUES : Sans oublier les traditionnelles chroniques avec un mélange de cinéma, d'humour, de musique, de sciences et d'anecdotes historiques. Avec, fidèle au rendez-vous, la drolatique "sémantique c'est élastique".

09/2020

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Philosophie

Qu'est-il arrivé à la beauté ?

La beauté, comme question et comme valeur, a été au centre de la culture occidentale depuis les Grecs jusqu'à l'aube du XXe siècle, en passant par le christianisme et l'âge classique. Elle occupe également une place centrale dans les civilisations orientales et arabo-musulmanes. Il semble que, depuis un siècle, cette centralité ait été perdue, les arts, qui l'exaltaient, ont joué à cet égard un rôle pionnier en cultivant des valeurs comme celles d'originalité, d'expressivité, d'étrangeté ou d'authenticité, qui peuvent jouer directement contre la beauté. Cet essai, né du constat de la presque totale absence d'une valeur qui fut, pendant plus de deux millénaires, la forme par excellence de l'idéal, commence par l'analyse de l'idée de beauté : comment elle a été conçue, à quelles controverses elle a donné lieu, quels sont ses différents domaines d'application ? Cette première partie, plus philosophique que les deux suivantes, s'achève sur la révolution de la modernité esthétique, qui a contribué à la dévalorisation de la beauté au profit d'autres valeurs. La deuxième partie de l'essai analyse la façon dont le monde, à travers les quatre domaines de réalisation de la beauté (l'art, la nature, la ville et le corps humain), est entré, depuis un siècle, dans un processus d'enlaidissent accéléré. Désormais, en effet, la beauté est à ce point refoulée et détruite qu'il n'est pas excessif de parler d'une véritable détestation à son égard. Même dans les secteurs où la beauté semble aujourd'hui particulièrement valorisée (le corps féminin, avec la mode, le cinéma, les spectacles d'une manière générale), le refoulement est sensible : on demande désormais à une actrice moins d'être belle que d'être excitante. La troisième et dernière partie traite des raisons profondes de cette rage particulière et jamais nommée qui s'en prend à ce qui, pendant longtemps, était par excellence source d'admiration. La sécularisation, c'est-à-dire la profanation du monde (la perte du sacré), l'universalisation de cet affect qu'est l'envie, et où Alexis de Tocqueville voyait le sentiment démocratique par excellence, et enfin la volonté de puissance d'autant plus destructrice qu'elle dispose désormais de moyens technoscientifiques pour s'exercer de manière illimitée sont, selon nous, les facteurs décisifs du refoulement et de la destruction de la beauté. Cet essai, qui contient une dimension historique et sociologique autant que philosophique, a été rédigé avec l'intention d'être lu et compris par le plus grand nombre. La question traitée intéresse en effet tous les gens de bonne volonté, et pas seulement une élite cultivée. Comment, en effet, concevoir sans la beauté un monde véritablement humain, accueillant au plaisir, à la joie et au bonheur ?

03/2019

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Beaux arts

Lavis

C'est un doux monde que dessine Pierre Mabille : si des dessins pouvaient murmurer, ses lavis seraient de ceux-là. Il y a une forme de distance, juste pour glisser le silence entre les choses, sans rien céder de la proximité du regard. Ce sont des paysages familiers, saisis dans la simultanéité du quotidien et du souvenir, avec le léger décalage du temps qui passe, de l'action qui continue au fil du dessin. C'est ce qui donne cette vie si mouvante aux dessins, qui semblent se dérouler sous nos yeux, et superposer plusieurs images par seconde. Le pinceau est vif, le trait imprécis et juste, comme le mouvement du monde, tout semble déborder, être un peu plus près ou déjà un peu plus loin qu'il n'y paraît. Ici et presque ailleurs. Les chats traversent le jardin, les enfants chahutent, jouent, dessinent, des papiers volent, l'eau coule dans la cuisine, on se croise, on se rencontre, on discute au coin de la rue, on oublie de rentrer le linge sous la pluie, on regarde le jour tomber... C'est l'existence au bord du regard, une existence proche, à portée de main, le portrait en creux de journées consacrées à des choses bouleversantes car paisiblement anodines : ouvrir la fenêtre sur la ville, longer une rivière, regarder les feuilles tomber à l'automne, donner un cours de couleur, organiser un pique-nique au parc, faire un tour de barque sur le lac, préparer le repas du soir, se rendre à un vernissage ou au cinéma, discuter tard dans la nuit autour d'un verre avec des amis, et recommencer. Ce livre est le fruit d'une coédition entre la Galerie Jean Fournier, qui expose les peintures de Pierre Mabille depuis 2005, et les Editions Unes, qui publient ses livres de poésie depuis quelques années. Il présente, à l'occasion de l'exposition des Lavis de l'artiste à la Galerie Jean Fournier à Paris entre novembre 2020 et janvier 2021, 50 reproductions de lavis qui forment le catalogue narratif et méditatif d'une série à part dans l'oeuvre de Pierre Mabille, renouant avec les figurations de ses débuts et abandonnant pour un temps la couleur qui est la grande question de son travail, tout en déclinant la présence de sa forme oblongue et innommée si caractéristique qui est le fil qui conduit le regard d'un dessin à l'autre en d'infinies variations. La douceur de l'encre, l'intimité du noir et blanc emplissent ces pages d'une réflexion à pulsation profonde sur la fabrique du temps qui passe et sur la façon, désordonnée, multiple, baroudeuse dont s'organise une vie.

01/2021

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Sciences historiques

La Légion étrangère. 1831-1962

Aucune force militaire au monde n'a autant que la Légion étrangère captivé l'imagination populaire par son image sulfureuse et par le mystère et le romantisme qu'elle cultive. Le mythe est même si puissant que le non-initié éprouve quelques difficultés à distinguer le vrai du faux : qui et que croire ? Les récits des anciens, simples légionnaires ou officiers, ne disent pas tous la même chose, loin de là ; le cinéma et la littérature, tantôt favorables, tantôt hostiles, exploitent les clichés jusqu'à l'absurde pour complaire au public ; les archives, peu accessibles, ne sont au demeurant pas très bavardes sur les sentiments des hommes. La légion est depuis le début une tour de Babel composée d'engagés de nationalités et d'origines sociales variées en quête d'une vie nouvelle, mais elle n'est pas le ramassis de criminels repentis, d'aristocrates déclassés, de têtes brûlées et de réfugiés politiques désorientés que l'on croit. Elle a toujours su redonner diginité et estime de soi à des gens pour qui elle constitue une famille de substitution, mais elle n'en fait pas des saints, et d'ailleurs la désertion a toujours été pour elle une plaie endémique. Ses exploits guerriers -principalement aux colonies mais aussi au cours des deux conflits mondiaux- justifient sa réputation de corps d'élite, mais elle a aussi connu la défaite, la démoralisation, le sous-équipement, le sous-encadrement. Elle a souvent obéi aveuglément (et les gouvernements en ont plus d'une fois abusé en l'envoyant au sacrifice sans nécessité ou en lui confiant les sales besognes), mais cela n'a pas empêché certaines de ses unités d'être à la pointe du putsch des généraux en 1962. Elle a développé -à usage interne et externe- un floklore outrancier, mais comment forger et perpétuer autrement un esprit de corps dans une troupe de mercenaires ne parlant pas la même langue et ne se battant ni pour une patrie ni même pour une idéologie ? Il ne s'agit pas de renvoyer dos à dos laudateurs et dédracteurs, mais de comprendre comment s'articulent sur la longue durée les contradictions et les ambiguïtés dont la Légion elle-même, abusée par son égocentrisme et par le regard des autres (malveillance de l'armée régulière, xénophobie, méfiance du pouvoir politique...), n'a pas eu pleine conscience. Fresque épique et chronique scrupuleuse en même temps, cet ouvrage américain est sans précédent par son ampleur -il couvre les cent trente et un ans (1831-1962) durant lesquels la Légion étrangère a été engagée ou stationnée outre-mer- par la sûreté et la diversité de son information, par la distance, l'objectivité et la finesse de ses jugements.

05/1994

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Théâtre

Rideau ! Les enfants aussi font la guerre ; Sur la plage, jour et nuit ; Alea et interprétations ; Le paradis n'est plus ce qu'il était... ; Les dédales de la nuit

Les enfants aussi font la guerre de Jean Manuel FLORENSA : Cette pièce nous propose une plongée terrifiante dans les souvenirs d'enfants et de jeunes gens qui ont connu la période sinistre de la guerre de 39/45. Les monologues défilent et reconstituent par petites touches d'histoires singulières le grand puzzle de l'Histoire Moderne...Au delà du tragique, cette pièce est une touchante illustration de la condition humaine... Sur la plage, jour et nuit de Annie RODRIGUEZ : Philippe et Jean viennent de quitter l'armée après plusieurs années d'une intense activité sur les zones de guerre. Cette rupture les plonge dans une période d'incertitude et de vide. Ils se retrouvent en vacances dans une ville au bord de la mer, oil Vincent et sa compagne Camille, jeunes étudiants, effectuent "des boulots d'été". Vincent, musicien, anime le déjeuner dans un bar tandis que Camille travaille le soir dans un restaurant. Ces quatre personnages vont se croiser sur la plage, tantôt le jour, tantôt la nuit. Entre Vincent, jeune homme sensible et imaginatif, mal dans sa peau, se laissant porter par la vie et Philippe qui lui, a surmonté ses blessures d'enfance à force de volonté et d'énergie, une relation insolite se noue... Alea et interprétations de Philippe VINTEJOUX : Avez-vous remarqué comme il est parfois difficile de communiquer entre individus ? Pourtant, loin d'avoir une attitude sauvage les gens sont plutôt enclin à échanger facilement lors de rencontres fortuites, non ? Un homme, certains le trouveront sans doute naïf, s'inquiète de ce manque de communication réelle. Il veut créer un groupe formé grâce à ses nombreuses rencontres de hasard. Son projet ? Réapprendre à se comprendre et ne pas se contenter d'échanges creux où chacun parle de manière égocentrique. Evidemment la satire pointe son nez dans cette galerie de portraits... Le paradis n'est plus ce qu'il était,.. de Evelyne FLACHAT : Et si Diable et Dieu prenaient leur retraite ? et si Adam et Eve s'étaient réconciliés avec Dieu ? et si St Pierre était remplacé par sa femme ? et si les anges voulaient un corps humain ? et si le paradis subissait des tracasseries aussi matérialistes qu'une fuite d'eau ou qu'une fissure dans le mur ? et si cette fissure était l'annonciation d'un cataclysme ? Tout pourrait être tragique, mais tout est dérision dans cette farce iconoclaste aux résonances furieusement actuelles... Les dédales de la nuit de Jean Manuel FLORENSA : 1990. La nuit développe ses dédales d'autant plus que, lors d'un tournage, la vedette de cinéma Gérard Parrald découvre Daniel Sanchez qu'il a malencontreusement conçu il y a plus de trente ans alors qu'il n'avait que dix-sept ans. Ils se cherchent sans se trouver à la recherche d'une lumière illusoire.

11/2018

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Ethnologie et anthropologie

Citoyens du monde ?. Le sujet à l'oeuvre à l'échelle globale

Daniel Argelès, Meghann Cassidy, Heidi Knörzer, Chantal Schütz et Jeffrey Swartwood enseignent au département Langues et Cultures de l'Ecole polytechnique. Ils sont membres du Groupe de Recherche "Identités, Cultures, Histoires" (GRICH). Comment habiter la planète en citoyens d'un monde toujours plus global ? Cette question, les enseignants du Département Langues et Cultures de l'Ecole polytechnique ont souhaité l'explorer en commun. Depuis les spécificités de leur discipline, de leur "aire culturelle" ou de leur champ de recherche, ils ont observé la façon dont individus et groupes cherchent ou aspirent à se constituer en sujets en négociant à leur manière, dans leurs pratiques sociales ou culturelles, leur engagement ou leurs créations, les dimensions enchevêtrées du local et du global. Les contributions abordent des sujets extrêmement divers. Sous un angle très actuel, elles s'inté¬ressent au plurilinguisme chez les Ouïghours de France, à la notion de citoyenneté mondiale chez les Kurdes, aux manifestations vite devenues virales des femmes chiliennes protestant par le geste et la parole contre les violences sexistes lors du mouvement social d'octobre 2019. Dans une approche plus historique, elles explorent la fluidité des identités de caste chez les habitants de la San Diego coloniale, les modalités d'écriture de la conquête du Mexique par un conquis¬tador et un romancier mexicain du XXe siècle, les tribulations et la place du globe de Gottorp dans la Russie de Pierre le Grand à aujourd'hui, le parcours et l'engagement cosmopolitique d'un essayiste juif de Moravie émigré en France et aux Etats-Unis. Dans une optique plus littéraire, elles se penchent sur la façon dont la littérature et le cinéma contemporains appréhendent l'échelle globale : romanciers et poètes afro-américains et afro-britanniques contemporains cherchant à se définir dans l'espace de la globalisation et de la Relation chère à Edouard Glissant, interrogations d'un auteur québécois sur les possibilités d'habiter (et de représenter) le monde à l'ère des flux de containers sillonnant la planète, possibilités de résistance, chez un cinéaste de science-fiction américain, face au dystopies cosmopolitiques d'Empires à venir reflets de notre présent. Cet ouvrage fait suite à une journée d'étude éponyme qui s'est tenue à l'Ecole polytechnique en 2021, elle-même nourrie par un séminaire de lectures théoriques où les travaux d'Arjun Appadurai et de Stuart Hall ont fait écho à ceux de David Harvey ou d'Hartmut Rosa, les réflexions d'Amin Maalouf et de Rosi Braidotti à celles d'Anna Lowenhaupt Tsing ou de Michel Agier. Il s'inscrit également dans la continuité de deux ouvrages collectifs précédemment parus aux Editions de l'Ecole Polytechnique : le Détail à l'oeuvre (2012) et le Sujet à l'oeuvre (2018).

10/2023

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Urbanisme

Ecologies visuelles de Los Angeles. De Reyner Banham aux séries contemporaines

Ce livre ouvre une discussion à propos des motifs visuels les plus reproduits pour figurer l'espace de Los Angeles dans les productions audiovisuelles, à la télévision et sur les écrans. Ce livre ouvre une discussion à propos des motifs visuels les plus reproduits pour figurer l'espace de Los Angeles dans les productions audiovisuelles, à la télévision et sur les écrans. Et vise à identifier quelles sont les alternatives, les contre-visualités imaginées qui permettent de prendre de la distance vis à vis de ces images, qui produisent des lieux communs qui dominent peut-être un peu trop les manières de décrire Los Angeles aujourd'hui. A la suite de sa thèse Gangs d'architectes : une histoire critique de l'architecture postmoderne (2018), Sophie Suma s'intéresse à la construction identitaire des représentations sociales en contexte urbain, étudiée du point de vue de la culture visuelle. Comment découvrir Los Angeles aujourd'hui ? Certainement à partir des multiples images dont elle est l'objet depuis des décennies. Que l'on soit immobilisé à la maison à cause d'une jambe dans le plâtre comme Jeff Jefferies dans Fenêtre sur cour, ou que l'on soit enfermé chez soi et contraint d'observer sur un écran son pays frappé par une pandémie, voir le monde à travers une fenêtre n'a jamais pris autant de sens qu'aujourd'hui. Mais si nous pouvons " voir à distance " pouvons-nous réellement " prendre de la distance " sur les images que nous voyons ? Peut-on par exemple comprendre et se faire une idée de Los Angeles à partir des séries dont elle est l'héroïne ? Dans l'histoire culturelle du cinéma et de la télévision, les écologies visuelles de Los Angeles ont fait apparaitre des motifs. Ces derniers participent d'un certain regard porté sur la ville qui n'est pas sans poser quelques conflits idéologiques. Certains d'entre eux renforcent les stéréotypes urbains, mais aussi sociaux. Diffusées en masse, ces représentations font autorité, elles infléchissent le regard porté sur la ville. Quelle est alors la visualité spatiale de Los Angeles ? Pour le dire autrement, en s'appuyant sur l'une des théories écologiques les plus stimulantes produite par l'historien anglais Reyner Banham, ce livre ouvre une discussion à propos des motifs visuels les plus reproduits pour figurer l'espace de Los Angeles dans les productions audiovisuelles, à la télévision et sur les écrans. Et vise à identifier quelles sont les alternatives, les contre-visualités imaginées qui permettent de prendre de la distance vis à vis de ces images, qui produisent des lieux communs qui dominent peut-être un peu trop les manières de décrire Los Angeles aujourd'hui.

01/2024

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Littérature française

Vivre vite

Aucun comédien de sa génération n'a réussi à incarner avec autant de naturel cette jeunesse rebelle prête à faire sauter les tabous de l'Amérique puritaine. Mais qui était vraiment James Dean, cet enfant terrible et surdoué du cinéma américain ? Que cachait-il en réalité derrière cette moue sensuelle et cette chevelure en bataille gravées dans toutes les mémoires ? On raconte souvent James Dean par le prisme de sa mort prématurée. Philippe Besson a fait le choix inverse : décrire une enfance singulière, heureuse, une adolescence tourmentée, une jeunesse fulgurante, tenter de cerner un jeune homme dans toute sa complexité, dans toute son ambiguïté, aussi. A l'inverse d'un documentaire où des vivants rendent hommage à un disparu, dans ce livre, ce sont des disparus qui évoquent un James Dean incarné et vivant. Philippe Besson réalise ici un tour de force en faisant s'exprimer une trentaine de personnages (sa mère, le professeur de théâtre de son lycée, ses colocataires à New York, les metteurs en scène - Nicholas Ray, Elia Kazan - et les actrices - Liz Taylor, Natalie Wood - qui l'ont côtoyé), recomposant par petites touches la personnalité de James Dean, avant tout dans sa dimension privée. Sa mère, qu'il adore, lui transmet le goût des arts, mais elle meurt hélas d'un cancer alors qu'il n'a que neuf ans. Son père l'abandonne alors aux bons soins de sa tante et part sur le front. L'adolescence de James Dean, dans l'Indiana, se partage entre les tâches de la ferme où il grandit et les cours de théâtre de son lycée, qui le passionnent. De New York à Los Angeles, entre ses classes à l'Actors Studio et divers petits boulots, Jimmy poursuit son seul rêve : devenir acteur, pour devenir un autre. Une première apparition dans une publicité pour Pepsi suffit à lancer sa carrière. Dès lors, les plus grands réalisateurs se l'arrachent. Redouté pour ses retards sur les plateaux, ses colères, ses enfantillages, obsédé par la vitesse et collectionneur de voitures de course, couvé par les femmes, adulé par les filles mais attiré par les garçons, il laisse flotter une aura de mystère autour de lui et ne laisse que de rares privilégiés partager son intimité. Jusqu'à ce qu'en 1955, sa Porsche Spyder 550 vienne s'écraser contre un poteau télégraphique, mettant fin à cette trajectoire foudroyante. "Il faut vivre vite, mourir jeune, et faire un beau cadavre" : telle était la formule provocatrice, mais ô combien prémonitoire que James Dean aimait répéter à son entourage. Dans ce portrait kaléidoscopique, on découvre un garçon inconsolable et myope, capable du pire comme du meilleur, et dont le destin semble n'avoir jamais été autre que de filer telle une comète.

01/2015

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Critique littéraire

Europe N° 1065-1066, Janvier-Février 2018 : Roland Dubillard ; Arthur Adamov

Ecrivain, dramaturge et comédien, Roland Dubillard (1923-2011) a tout fait pour refuser les étiquettes, déjouer les attentes, en créant un ensemble d'oeuvres qui se ressemblent le moins possible, en expérimentant une multiplicité de genres : théâtre, poésie, nouvelle, fable, récit, méditation, pièce en vers, pièce pour enfants, chanson, cinéma... Comme sur l'île de Robinson, il n'existe pas de colline d'où l'on pourrait embrasser du regard tout Dubillard On l'a classé d'office parmi les inclassables, les dingues du nonsense, mais si la créativité verbale et l'humour semblent jaillir spontanément de sa plume, cet écrivain n'en fut pas moins un travailleur opiniâtre, chacun de ses livres exigeant un processus de maturation prolongé. La poésie fut la matrice de son oeuvre protéiforme et lorsqu'il récitait l'un de ses poèmes, il suffisait d'écouter le phrasé si particulier et les intonations subtiles de sa voix pour s'en rendre compte : chez lui, le comique le plus irrésistible et l'émotion la plus profonde sont intimement liés. De même, sa façon de jouer était en adéquation parfaite avec sa façon d'écrire - rêveuse, imprévisible, mais d'une précision toute musicale. Au-delà même de ses illustres Diablogues et de ses quatre pièces majeures - Naïves hirondelles, Le Jardin aux betteraves, La Maison d'os et "...Où boivent les vaches" - ce cahier d'Europe nous invite à explorer l'archipel Dubillard et son univers si riche et singulier. Arthur Adamov. De novembre 1950, où furent créées à quelques jours d'intervalle La Grande et la Petite Manoeuvre et L'Invasion, à sa mort en 1970, puis de sa disparition jusqu'à aujourd'hui, Arthur Adamov n'a toujours pas pris au théâtre la place qui lui revient ni vaincu cette "sotte petite conspiration du silence" qu'Artaud dénonçait en 1946, à la sortie de L'Aveu, premier texte de son ami Adamov. De quel vice secret faut-il que cette oeuvre soit frappée ? Quel malentendu a pu se développer au fil des années entre Adamov et l'époque ? Avec Beckett, et dans le sillage de Strindberg et d'Artaud il est pourtant l'un des principaux inventeurs d'une dramaturgie éminemment moderne, une dramaturgie de la littéralité dont l'énigme s'inscrit dans le corps même des personnages, dans la matière même du théâtre. Il est grand temps de repenser aujourd'hui l'oeuvre d'Adamov et de la réévaluer. Le réexamen de sa dramaturgie puissamment subjective, mais qui sait prendre en change - et objectiver - les destinées collectives, pourrait inciter à proclamer l'actualité de cet auteur et l'impérieuse nécessité de sa présence "ici et maintenant".

01/2018