Il est bien tard
Le hasard mène-t-il la danse ? Commande-t-il seul à la suite de nos jours ? Se peut-il qu'il distribue, au petit bonheur, les cartes des amours, de l'amitié ou de la multitude des événements qui font la trame d'une existence ? Si la question vaut d'être posée, on sait bien qu'elle ne connaîtra jamais de réponse définitive. Toujours est-il qu'il faudra une succession de bien curieuses coïncidences pour que ce récit, en apparence si banal, vienne au jour. Maria Couzic et Jean Rodde, son mari, étaient des gens discrets et d'une très grande pudeur. Jamais ils n'auraient imaginé voir leur vie racontée dans un livre. Il faudra aussi un improbable enchaînement de rencontres et d'événements inattendus pour qu'un jour cette histoire toute simple suscite l'intérêt et se prête à la narration. Extrait : Au matin du 3 juin, Jean Rodde est sur la plage. C'est la première fois qu'il voit la mer. Il en rêvait depuis longtemps, mais il avait imaginé autrement cette première rencontre. Il est déçu. "On est sacrément dans la merde, mon Jeannot". "Sacrément" répond Jean au chauffeur de l'ambulance. Que dire de plus ? Avec quelques milliers d'autres soldats, ils se demandent bien ce qu'ils vont devenir. Rien ne va plus. Ils regardent s'effacer leur dernier espoir de quitter le piège infernal de ce bout de plage entre Malo-les-Bains et Bray-les-Dunes. Un peu plus loin au large, le Holland, un vieux cargo anglais s'enfonce doucement dans l'eau. Il a été touché à mort par deux bombes venues du ciel.
11/2018