#Essais

Trois essais sur la théorie sexuelle

Sigmund Freud

Voici le livre par où le " scandale " serait arrivé. Publié en 1905, sans arrêt remanié, corrigé, réécrit par Freud jusqu'à son édition définitive de 1920, il brise l'image de l'enfance innocente et place le " sexuel " au centre de toute l'activité psychique de l'être humain. C'est dans ces Trois essais que Freud parle pour la première fois de la pulsion, là aussi qu'il décrit l'enfant comme un pervers polymorphe, là encore qu'il explique comment l'on devient sexuellement adulte. S'en trouvent alors éclairés des débats très actuels de notre société, notamment ceux qui touchent à l'hypersexualisation des enfants, à l'homophobie, et plus généralement aux normes sexuelles.

Par Sigmund Freud
Chez Payot

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Editeur

Payot

Genre

Psychologie, psychanalyse



 

 

 

PRÉFACE

 

 

Éloge de l’égarement
par Sarah Chiche

 

 

 

Viennoiseries

 

« Passage suivant : à l’aide du tuyau en caoutchouc – je te montrerai comment – maintiens ce bâillon aussi solidement que possible dans ma bouche, de sorte que je ne puisse l’expulser avec la langue. Le tuyau est déjà prêt ! Afin d’augmenter mon plaisir, enveloppe s’il te plaît ma tête dans une de mes combinaisons et noue-la autour de mon visage dans les règles de l’art [etc., etc.] Prends je t’en prie une corde solide et passe-la en serrant autour de mes chevilles revêtues de bas nylon et de mes poignets puis, sans ma permission, avec cette même corde, entoure mes cuisses jusqu’en haut et plus haut encore et attache-les ensemble. Nous ferons des essais. Je t’expliquerai chaque fois ce que je veux en m’inspirant de tes réalisations antérieures [etc., etc.] Est-il bien vrai, ainsi qu’il est écrit là, qu’elle lui enfoncera la langue dans le derrière pendant qu’il sera à califourchon sur elle ? Klemmer doute énormément de ce qu’il lit et accuse les mauvaises conditions d’éclairage. Une femme qui joue Chopin comme elle ne peut pas avoir voulu dire ça. Pourtant, c’est cela et rien d’autre qu’elle désire, précisément parce que sa vie durant elle n’a joué que du Brahms et du Chopin1. »

Forme spectaculaire de la perversion dite masochiste, le « contrat pervers » trouve dans La Pianiste, du Prix Nobel de littérature Elfriede Jelinek, ainsi que dans l’adaptation au cinéma qu’en fera, une génération plus tard, Michael Haneke, l’illustration aussi rigoureuse que glaçante de cette curieuse intrication de la « cruauté » et de la « pulsion sexuelle » dont parle Sigmund Freud dans ses Trois essais sur la théorie sexuelle – et dont il fait un ingrédient essentiel de « l’histoire culturelle de l’humanité ».

C’est dans la splendeur pétrifiée de Vienne, deuxième capitale du nazisme, mais où une erreur d’interprétation dans Schubert peut vous faire mépriser comme un chien, que plein d’amour pour son professeur de piano et complètement aveugle à ses buts érotiques, le jeune Walter Klemmer se déclare. Mais Erika Kohut ne peut répondre à son impétuosité qu’en rejeton monstrueux d’une civilisation « boursouflée de culture », et en le ficelant à un pacte infernal – le contrat masochiste –, substitut défiguré, certes, mais à peine voilé de la relation incestueuse qui l’enchaîne à sa mère…

Freud, Jelinek, Haneke. Trois Viennois dont les œuvres s’étalent sur un siècle, tandis que les clauses du contrat masochiste semblent, quelles que soient les époques, strictement immuables – et c’est bien la fixité de ce théâtre pervers, son jeu au fond purement combinatoire, ses formes et ses affects prescrits, qui le rend si angoissant, comme une commedia dell’arte des ténèbres. Ces « peintures de mœurs » perverses (car on ne saurait négliger ce qu’elles donnent à voir au lecteur) correspondent en effet plus ou moins aux descriptions romanesques d’un quatrième Autrichien, l’écrivain Leopold von Sacher-Masoch (1836-1895), dont les récits2 avaient très tôt attiré l’attention des premiers sexologues, au point que c’est à partir de ces récits scabreux qu’un cinquième Autrichien, le psychiatre Richard von Krafft-Ebing (1840-1902), forgera, en 1890, le mot « masochisme »3. Freud y revient longuement, dès 1905, dans la nouvelle traduction du premier de ces Trois essais que vous tenez en main.

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trad. Cédric Cohen Skalli, Aline Weill, Olivier Mannoni
16/04/2014 235 pages 6,50 €
Scannez le code barre 9782228910705
9782228910705
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