#Essais

Winston Churchill. Le pouvoir de l'imagination, 2e édition

François Kersaudy

Jusqu’à 26 ans, les aventures du jeune officier et du reporter évoquent immanquablement celles de Tintin, mais, ensuite, le personnage devient une synthèse de Clemenceau et de De Gaulle, l’humour et l’alcool en plus… Et une imagination sans limites : «Winston, disait le président Roosevelt, a cent idées par jour, dont quatre seulement sont bonnes… mais il ne sait jamais lesquelles !» C’est pourtant le général de Gaulle qui l’a le mieux jugé : «Il fut le grand artiste d’une grande histoire.» Cette vie a été un roman, elle est racontée comme tel, sans un mot de fiction. Se fondant sur des recherches dans les archives de huit pays, la consultation de quelques quatre cents ouvrages et l’interview de nombreux acteurs et témoins, ce récit épique montre comment un homme solitaire, longuement façonné par d’exceptionnels talents et de singulières faiblesses, a pu infléchir le cours de notre siècle, avec la complicité d’un destin qui s’est radicalement départi de son impartialité.

Par François Kersaudy

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Genre

Histoire internationale

 

 

 

 

 

 

 

AVANT-PROPOS

 

 

En janvier 1950, l’hebdomadaire américain Time Magazine avait nommé Winston Churchill « l’Homme du demi-siècle » ; en juin 2000, le mensuel français Historia a jugé le « demi » superflu, et l’a baptisé « Homme d’État du siècle ». Comment justifier un tel honneur ? Le général de Gaulle s’en est chargé lui-même, en décrivant Churchill comme « le grand champion d’une grande entreprise, et le grand artiste d’une grande Histoire », et en ajoutant : « Dans ce grand drame, il fut le plus grand. » Depuis le grand drame, pourtant, Winston Churchill est resté au centre de furieuses controverses, qui ont terni son image sans jamais affecter sa stature ; en France, le personnage se résume trop souvent à Dresde et Mers el-Kébir ; en Grande-Bretagne, la presse se plaît à souligner ses travers, et la liste de ses crimes imaginaires est souvent plus longue qu’un discours de Fidel Castro.

Derrière un tel rideau de fumée, le personnage risque fort de s’estomper ; or, cet homme-là présente un intérêt unique : existe-t-il au cours du XXe siècle une vie aussi fabuleuse que celle de Winston Spencer-Churchill ? D’innombrables biographies ont tenté de la ressusciter : certaines sont trop courtes pour être lisibles, d’autres trop longues pour être lues ; certaines sont férocement critiques, d’autres béatement hagiographiques ; certaines sont si anciennes qu’elles sont devenues introuvables, d’autres si ennuyeuses qu’elles méritent de le rester ; certaines n’existent qu’en langue anglaise, d’autres ont été bien hâtivement traduites ; certaines font mourir le héros avant sa naissance, d’autres le font renaître après sa mort ; le somptueux Winston Churchill de William Manchester ne présente aucun de ces inconvénients, mais il s’arrête à 1940 – un quart de siècle trop tôt…

Décidément, nous voici obligés de repartir à la découverte du plus prodigieux homme-orchestre des temps modernes. Le voyage sera long, agité, parfois désopilant, souvent exténuant, et toujours affreusement dangereux… Mais, comme Winston Churchill lui-même, le lecteur ne trouvera jamais le temps de s’ennuyer ; et en revivant pas à pas cette existence fabuleuse, il ne peut manquer d’enrichir la sienne.

La première édition de cet ouvrage a été par nécessité quelque peu synthétique. Avec la disparition des contraintes d’espace et la parution d’innombrables nouveaux ouvrages et documents, il est devenu possible de présenter une version bien plus complète – tenant compte en outre des nombreux commentaires et témoignages suscités par l’édition originale.

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE PREMIER

 

LES CAPRICES DU DESTIN

 

 

Le 30 novembre 1874, au palais de Blenheim, dans l’Oxfordshire, naît Winston Leonard Spencer-Churchill, fils de Randolph Churchill et de Jennie, née Jerome. L’heureux père s’est empressé d’écrire à sa belle-mère : « Le garçon est merveilleusement beau, […] avec des cheveux noirs, et il est en très bonne santé, compte tenu de sa naissance avant terme1. » C’est là une version officielle : le bébé n’est probablement pas né avant terme, mais ses parents s’étant mariés sept mois plus tôt seulement, il fallait bien sauvegarder les apparences ; « merveilleusement beau » est sans doute un peu outré, s’agissant d’un gros poupon aux yeux tombants et au nez en trompette ; quant aux cheveux noirs, c’est une vue de l’esprit : le petit Winston est d’un roux flamboyant…

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