#Polar

On la trouvait plutôt jolie

Michel Bussi

On la trouvait plutôt jolie, Leyli. Tout charme et tout sourire. Leyli Maal fait le ménage dans les hôtels à Port-de-Bouc, près de Marseille. Malienne, mère célibataire de trois enfants, Bamby, 21 ans, Alpha, 17 ans, Tidiane, 10 ans, Leyli nourrit un rêve immense et cache un grand secret. Leyli raconte sa vie à qui veut bien l'écouter, mais peut-elle avouer toute la vérité ? Peut-elle empêcher ses enfants de dévoiler ce qu'elle a caché ? Une vengeance ? Un trésor ? Un père ? François Valioni travaille pour une importante association d'aide aux migrants à Port-de-Bouc. Il est retrouvé au petit matin assassiné dans un hôtel. Dans sa poche, un bracelet de couleur et six coquillages. Julo Flores est un jeune lieutenant de police zélé, hyperconnecté. Méfiant envers son commandant et un peu trop sentimental, il ne peut pas croire que Bamby Maal, que tout accuse, soit la coupable. Surtout lorsque survient un second crime. En quatre jours et trois nuits, du désert sahélien à la jungle urbaine marseillaise, Michel Bussi nous offre un suspense de haut vol, dans lequel, comme toujours, priment l'humain, l'émotion, l'universel. Jusqu'au stupéfiant twist final.

Par Michel Bussi
Chez Presses de la Cité

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Genre

Policiers

Par les quatre horizons,

Qui crucifient le monde

La prière, Georges BRASSENS

(paroles de Francis JAMMES)

 

Tu vas dire que je rêve,

Mais je ne suis pas tout seul

Demain j’espère, tu nous rejoins

Et le monde ne fera qu’un

d’après Imagine, John LENNON

 

 

Aux géographes, amis, collègues,

qui explorent le monde

 

 

*

* *

— Qu’est-ce qui ne va pas, Leyli ? Vous êtes jolie. Vous avez trois jolis enfants. Bamby, Alpha, Tidiane. Vous vous en êtes bien sortie.

— Bien sortie ? Ce sont les apparences, tout ça. Du vent. Non, oh non, nous ne formons pas une jolie famille. Il nous manque l’essentiel.

— Un papa ?

Leyli lâcha un petit rire.

— Non, non. Un papa, ou même plusieurs, on peut bien s’en passer, tous les quatre.

— Qu’est-ce qu’il vous manque, alors ?

Les yeux de Leyli s’entrouvrirent, comme un store qui laisse filtrer un rayon de soleil et éclaire une chambre sombre, transforme en étoiles la poussière.

— Vous êtes bien indiscret, cher monsieur. On se connaît à peine, et vous croyez que je vais vous révéler mon plus grand secret ?

Il ne répondit rien. Le store des yeux de Leyli s’était déjà refermé, replongeant l’alcôve dans l’obscurité. Elle se tourna vers la mer, cracha sa fumée pour noircir les nuages.

— C’est davantage qu’un secret, monsieur le petit curieux. C’est une malédiction. Je suis une mauvaise mère. Mes trois enfants sont condamnés. Mon seul espoir est que l’un d’eux, l’un d’eux peut-être, échappe au sortilège.

Elle ferma les yeux. Il demanda encore :

— Qui l’a lancé, ce sortilège ?

Derrière le volet clos de ses paupières gronda l’éclair.

— Vous. Moi. La terre entière. Personne n’est innocent dans cette affaire.

*

* *

 

 

JOUR DE PEINE

 


* * *

 

 

– 1 –


6 h 48

 


* * *

 

 

Silencieuse, la péniche glissait sous l’autobus 22.

Leyli, le front collé à la vitre, deux rangées derrière le chauffeur, observait s’éloigner les immenses pyramides de sable blanc charriées par le bateau à fond plat, imaginant qu’on leur volait leur sable, qu’après leur avoir pris tout le reste, on leur prenait aussi la plage, grain après grain.

L’autobus 22 franchit le canal d’Arles à Bouc et continua de remonter l’avenue Maurice-Thorez. Les pensées de Leyli traînaient au rythme de la péniche. Elle s’était toujours représenté ce canal comme une couture qui se déchirait, et la ville de Port-de-Bouc comme un bout de terre qui, lentement, dérivait vers la mer, séparée aujourd’hui du reste du continent par un détroit large de vingt mètres. Par un océan demain.

C’est idiot, se raisonna Leyli alors que l’autobus rejoignait la rocade, les quatre voies de la nationale 568 et leur flux ininterrompu de voitures isolaient bien davantage Port-de-Bouc du reste du monde que le sage canal boisé où serpentaient quelques péniches paresseuses. Il n’était pas encore 7 heures du matin. Le jour s’était levé mais n’avait encore ouvert qu’un œil sombre. A travers la vitre du bus, les phares pâles des véhicules traversaient le reflet de son visage. Pour une fois, Leyli se trouvait jolie. Elle avait fait des efforts. Elle s’était réveillée il y a plus d’une heure pour tresser un à un ses cheveux de perles multicolores, comme sa mère, Marème, le faisait à Ségou, près du fleuve, pendant ces mois d’été où le soleil brûlait tout ; pendant ces mois où pourtant elle en avait été privée.

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12/10/2017 462 pages 22,50 €
Scannez le code barre 9782258145344
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