Editeur
Genre
Histoire internationale
LISTE DES ABRÉVIATIONS ET DES TERMES ALLEMANDS
La langue de la police politique est-allemande, et plus généralement la Lingua communista, mobilisent beaucoup les abréviations.
DSF
Gesellschaft für Deutsch-Sowjetische Freundschaft : Société pour l’amitié avec l’Union soviétique
EOS
Erweiterte Oberschule : Établissement secondaire, lycée
FDJ
Freie Deutsche Jugend : Jeunesse libre allemande
FDGB
Freier Deutscher Gewerkschaftsbund : Confédération syndi cale libre allemande
FIM
Führungs-Inoffizieller Mitarbeiter : Responsable de collabo rateurs officieux
GI
Geheimer Informator : Informateur secret
GMS
Gesellschaftlicher Mitarbeiter für Sicherheit : Collaborateur social pour la sécurité
HIM
Hauptamtliche Inoffizielle Mitarbeiter : Collaborateur offi cieux principal
IM
Inoffizieller Mitarbeiter: Collaborateur officieux
IMF
Inoffizieller Mitarbeiter mit Feindverbindung : Collaborateur officieux en relation avec des « ennemis »
IMK
Inoffizieller Mitarbeiter zur Sicherung der Konspiration : Collaborateur officieux chargé de la sécurité de la conspiration
KP
Kontaktpersonn : Personne de contact
MfS
Ministerium für Staatssicherheit : Ministère pour la Sécurité de l’État
NVA
Nationale Volksarmee : Armée nationale du peuple
OPK
Operative Personenkontrolle : Opération de contrôle de per sonnes
POS
Polytechnische Oberschule : École supérieure polytechnique qui correspond en France au cycle primaire et au collège
SED
Sozialistischer Einheitspartei Deutschlands : Parti socialiste unifié d’Allemagne
SMAD
Sowjetische militärische Administration: Administration mili taire soviétique en Allemagne
VP
Volkspolizei : Police du peuple
ZIJ
Zentralinstitut für Jugendforschung : Institut central de recherche sur la jeunesse
Introduction
«Merde, il pleut ! »
À la mi-janvier, comme chaque année depuis sa naissance en 1949, la République démocratique allemande (RDA) célèbre la mémoire de deux « martyrs » communistes qui figurent au panthéon « national » du « premier État socialiste sur le sol allemand » : Rosa Luxembourg et Karl Liebknecht1. À cette occasion, dans le cadre d’une manifestation obligatoire relevant de l’éducation antifasciste officielle, qui constitue l’un des piliers de la légitimité et de l’identité politique du régime socialiste, les élèves des lycées de Berlin-Est participent à une « marche du souvenir » qui les conduisent au monument des socialistes au cimetière de l’arrondissement de Friedrichsfelde, où reposent depuis 1926 R. Luxembourg et K. Liebknecht.
En ce 17 janvier 1989, T. S., élève du lycée Rudolf Seifert, âgé de dix-sept ans, participe sans grand enthousiasme à ce rituel antifasciste largement vide de sens pour cette seconde « génération du socialisme », née au début des années 1970. Il ne le sait pas encore, mais c’est la dernière fois qu’il se rend à ce monument commémoratif 2.
Au cours de la marche, il sort son parapluie noir pour se protéger de la pluie. Il a écrit dessus avec un feutre blanc une inscription en français «Merde, il pleut». T. S. sent qu’il est surveillé par deux hommes vêtus de parkas vertes et de chapeaux. Il les soupçonne d’être des agents travaillant pour le ministère pour la Sécurité de l’État (Ministerium für Staatssicherheit, MfS), la police politique de la RDA, plus connue sous l’abréviation Stasi. Ces soupçons sont rapidement confirmés lorsqu’il se voit interpeller par ces deux hommes qui le sortent du cortège pour le conduire dans une voiture blanche de la marque Lada. T. S. est désormais convaincu qu’il se trouve confronté pour la première fois de sa jeune existence à la Stasi. En effet, les deux hommes se présentent comme des officiers de la police politique est-allemande. L’interpellation et l’interrogatoire dans la voiture s’expliquent par le fait que ces agents ont été intrigués par l’inscription en langue étrangère sur le parapluie du lycéen. Ces derniers le questionnent une dizaine de minutes sur le sens des mots en français, sur ses parents, sur son école, son projet professionnel avant de le relâcher, non sans avoir cherché à l’intimider. Ils menacent clairement T. S. de l’empêcher de terminer ses études secondaires et donc de pouvoir entrer à l’université pour entamer des études d’ingénieur en thermodynamique. Au final, ils lui reprochent d’avoir inscrit quelque chose sur son parapluie qui aurait pu nuire à l’image de la RDA. Le moindre écart politique potentiel dans l’espace public est susceptible d’être pris en charge par la Stasi. Ce qui apparaît comme le geste innocent d’un adolescent a été interprété par les officiers du ministère pour la Sécurité de l’État comme l’expression d’une possible défiance, d’une possible déviance, voire d’une possible opposition déclarée au socialisme. Spontanément, le lecteur conclura tout à la fois à la paranoïa des services de surveillance de la RDA, à leur méconnaissance de la langue française et au caractère inutile, absurde voire ridicule de l’intervention.
Extraits
Commenter ce livre