#Roman francophone

Je m'appelle Jeanne Mass

Thomas Lélu

Jeanne et son ami Derrick sont videurs au Coconut Café. Une nuit, entre concert mythique et recherche effrénée de l'âme sœur d'un soir, leur patron est assassiné par deux ours roses. Jeanne, qui découvre le corps, est soupçonné du meurtre. S'ensuit un road-movie haletant qui conduit les deux comparses de soirées décadentes en aventures improbables. En mêlant intrigue policière, roman d'amour et d'amitié, science-fiction décalée, Thomas Lélu crée un univers singulier et hilarant, proche de celui des Tex Avery et des Monty Python. Entre émotion et dérision, il joue avec les ficelles du roman pour rire de l'absurdité du monde et emporter le lecteur par sa drôlerie irrésistible.

Par Thomas Lélu
Chez Léo Scheer

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Genre

Littérature française

 

 

 

 

 

PREMIER CHAPITRE

 

 

Je m’appelle Jeanne Mass et je suis videur au Coconut Café. Mon groupe de musique préféré c’est les Gilles Deleuzes et j’ai pas mal d’amis dans le show-biz. En ce moment j’ai envie de faire l’amour avec des pigeons mais je n’ai pas les moyens alors je compense en matant des DVD. D’ailleurs, hier soir, j’ai regardé Dumb and Dumber pour la douzième fois. J’ai ensuite fait un classement des films que j’ai le plus regardés et Dumb and Dumber arrive deuxième derrière Le Septième Sceau d’Ingmar Bergman. Puis il y a L’Empire des sens en troisième place.

Si je vous dis tout ça, c’est parce qu’après, dans l’histoire, il m’arrive des trucs assez hallucinants. Avant, dans ma vie, je me faisais un peu chier quand même. Les DVD, ça va cinq minutes et le métier de videur, on s’en lasse assez vite. Quant aux peoples, une fois qu’on les côtoie, ça ne vous fait plus grand-chose. Mais je reviens à mes moutons. Ce samedi-là les Bobby Mac Fire se produisaient en concert au Coconut Café et ça je ne voulais le rater pour rien au monde. Seulement voilà, ce soir-là j’étais bloqué à l’entrée avec mon ami Derrick.

 

Derrick est videur lui aussi au Coconut depuis quelques mois. Il mesure 1,88 mètre pour 102 kilos. On est donc en train de se les geler devant l’entrée et moi j’entends les premiers sons de gratte des Bobby et je me dis que là tu dis que tu vas pisser et puis tu dis que tu es bloqué dans la foule et puis comme tu retrouves plus la sortie du coup tu arrives à voir un bout du concert. Je me tourne vers Derrick.

— J’ai méga envie de pisser.

— Super ! répond Derrick en fumant son clope comme dit Bernard-Pierre Donnadieu.

— Et tu sais quoi ?

— Je t’écoute.

— Je crois que je vais y aller.

— Ok mais ne traîne pas trop, j’aime pas rester seul, j’ai peur qu’on vienne me demander si je n’ai pas la monnaie sur cinq euros.

— Je reviens vite… Allez tchao !

 

J’entre dans la boîte et il y a un paquet de monde. La salle est totalement enfumée, c’est vraiment trop ouf donc je commence à sourire et je sors deux trois mots en anglais à une fille qui passe près de moi, une fille plutôt jolie qui me fait penser à un abat-jour.

Tout le public est surexcité. Les jeunes sont défoncés au cassoulet et je me dis que c’est le plus beau jour de ma vie et je cherche si je vois un oiseau et j’en aperçois un, alors je tends ma main et j’attends un bon quart d’heure mais l’oiseau ne vient pas donc je laisse tomber.

 

Je me dirige vers le bar où Jef me reconnaît parce que je le vois tous les jours et il me fait un clin d’œil, puis je me rapproche des toilettes parce que j’ai quand même sacrément envie de pisser et je croise Micheline Dax et Choubacca en train de s’embrasser sur les joues, puis je me précipite dans la salle qui sent mauvais et où il fait très froid.

Putain, chuis vraiment sexy, je ressemble à Julien Lepers jeune et je me dis que je devrais arrêter de regarder des DVD parce que j’ai les yeux rouges. J’ai aussi de grosses joues et je me dis qu’il faut que je me remette au tennis sur terre battue et que je calme ma consommation de bière et de féculents. À part ça, j’ai la classe, les épaules bien larges et une gueule de winner qui me rappelle quand j’étais petit et que le médecin a vérifié si mes deux testicules étaient bien en place après une mauvaise chute aux sports d’hiver.

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02/09/2005 187 pages 18,00 €
Scannez le code barre 9782915280968
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