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Théâtre

Saleté

Dans une société en crise, "l'autre" symbolise souvent une menace. Immigré, clandestin ou tout simplement citoyen jeté à la rue par un destin cruel, le "pas comme nous" est cible de toutes nos suspicions. Robert Schneider donne une voix singulière à ces êtres socialement et culturellement désespérés. Un homme entre en scène. Il s'appelle Sad, il est arabe. Il est seul dans son studio de Vienne. Il est clandestin mais pas ouvrier. Il était étudiant en philosophie. Il a fui l'Irak de Saddam Hussein, mais il n'est pas pour autant réfugié politique. C'est un sans-papiers basané qui a laissé un enfant aux yeux noirs quelque part, sa famille et un amour à Bassora, "port épouvantable". Le soir, Sad vend des roses dans les cinquante-huit cafés de la ville. Il ne s'assoit jamais sur les bancs publics car il se sait en situation irrégulière : il se méfie et observe. Saleté, c'est une nuit avec Sad. Il dit ce qu'il entend, ce qu'il ressent mais qui ne s'exprime pas : le regard de l'autre sur la différence de peau, différence d'habitudes et de comportement. Peu à peu, au fil de son récit, il s'enflamme, se révolte et parle par la bouche de ceux qui le jugent et le rejettent "Je m'appelle Sad. J'ai trente ans. En anglais, Sad veut dire triste. Je ne suis pas triste". Sad est tombé adolescent amoureux de la langue allemande à cause de la beauté du mot "Leica". C'est un type qui cogne ses mots contre les quatre murs de son studio viennois, mange du porc, boit du Gin et gagne sa vie chichement. Attention brûlot : ces mots de Robert Schneider, sorte de frère rageur de Thomas Bernhard, sont trempés dans l'acide et dans la honte, et nous font l'effet d'une claque.

09/2014

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Economie

LES MARCHES FINANCIERS. Entre hasard et raison, le facteur humain

Personne n'ignore désormais les fortunes accumulées par certains investisseurs ou spéculateurs sur les marchés financiers. Qui n'a pas entendu parier des succès boursiers de Georges Soros ou de Warren Buffet, par exemple ? On peut faire fortune en Bourse en anticipant mieux et plus vite que les autres acteurs l'évolution des cours. Pourtant, cette évidence est théoriquement impossible si l'on en croit l'analyse économique dominante : elle enseigne en effet que les marchés sont efficients, c'est-à-dire que les prix des actifs qui s'y échangent intègrent instantanément et en permanence toute information pertinente. Si tel est le cas, personne ne peut savoir quelque chose de plus que les autres. Personne ne peut faire mieux que le marché. Les cours sont alors censés suivre une marche au hasard, au gré des événements imprévisibles susceptibles d'influencer le marché. Mais si les cours sont imprévisibles, comment certains gestionnaires de fonds d'investissement font-ils pour néanmoins les prévoir mieux que les autres et ce, non pas de façon exceptionnelle, mais régulièrement durant de longues années ? Telle est l'énigme que Gérard Sauvage tente de résoudre. Il démonte les mécanismes et les raisons des succès de Georges Soros et de Warren Buffet. Il tire de ces investigations les pistes d'une remise en question de la théorie financière dominante. Dressant un tableau très didactique de cette dernière, il met au jour les limites des principaux modèles et ouvre la voie d'une nouvelle théorie financière. Entre une vision des marchés en tant que systèmes parfaitement rationnels et efficients, et celle de marchés livrés au hasard, Gérard Sauvage montre comment de nouvelles disciplines (théories du chaos, sciences de la complexité) introduisent une troisième vision, plus riche et plus convaincante, qui remet l'homme, avec sa raison, mais aussi ses illusions, au cœur des phénomènes financiers. Redécouverte, appliquée aux marchés financiers, de ce que, au-delà du hasard et de la nécessité, il y a la vie.

09/1999

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Littérature française

L'anneau

"Moi, c'est le loulou de Poméranie qui me faisait peur. Lorsqu'on entrait dans notre immeuble, sitôt montées les trois marches qui nous séparaient du palier, les aboiements furieux me faisaient reculer. Il fallait pourtant que j'aille au bout du couloir d'entrée, jusqu'aux escaliers, et gagner sur les hauteurs notre appartement. Sauf que la porte de l'endroit où habitait ce chien était juste en face de l'ascenseur. Alors là c'était le déchaînement. Jappements et hurlements du loulou qui se jetait contre le bois. Ma terreur était que Madame Picard ouvre sa porte pour nous saluer et que le chien se jette à mordre. Les chiens chez nous n'étaient pas commodes. Dans toutes les rues où erraient les molosses, Galoufa les traquait avec sa gaffe pour les mener à la fourrière. Un étage en dessous, les Spinosi avaient un couple de fox-terriers élevés à la ferme et dressés à attaquer les Arabes - disaient leurs maîtres, qui en avaient grand peur ? , mais un jour que l'un d'eux s'était échappé, il avait mordu la mère Corot aux fesses alors que, dressée sur ses talons, elle ouvrait sa boîte aux lettres. Certes, elle avait crié en moulinant des bras et la maîtresse du cabot était accourue : "Vous allez me payer une nouvelle culotte" , voilà ce qu'avait dit la voisine vilainement offensée". L'anneau, l'anneau merveilleux, le mirifique anneau, c'est le 'kholkhal' que portait la mère au temps où juifs et musulmans vivaient "séparés, mais ensemble" dans cette Algérie qui a disparu sous tant de couches de ténèbres - et dont l'auteur se souvient, ébloui. Sous la plume alerte d'Albert Bensoussan, traducteur émérite de l'espagnol, mais aussi - mais surtout ? - nouvelliste et romancier, c'est Alger d'avant et d'après-guerre qui revit, Alger l'arabe, Alger la juive, Alger des jeunes amours et du temps retrouvé - dans l'émotion de qui l'a vaiment aimée, et vraiment perdue.

01/2017

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Poésie

à A. Hymen père et fils, peut-être en vers

Nouvelle édition du manuscrit titré Tombeau d'Anatole de la Bibliothèque littéraire Jacques Doucet. En septembre 1898 Mallarmé meurt brusquement, laissant, à Valvins et Paris, oeuvres et papiers divers, dont une petite chemise aux plats cartonnés rouges qui contenait deux cent douze feuillets, écrits en 1879,liés à la maladie et au décès de son fils. L'ensemble, relié plus de soixante années plus tard, fut titré Tombeau d'Anatole. Leur contenu elliptique, jusqu'à présent publié dans l'ordre dans lequel il fut retrouvé – bien que divers accidents en aient rendu l'agencement incertain, juxtaposant des pages de façon aléatoire et multipliant les difficultés – imposait une nouvelle tentative de lecture et d'ordonnancement. Cette nouvelle édition du manuscrit reproduit, au plus près du document original, tout ce que le poète a tracé (mots, signes et traits), et redéploie les feuillets en s'efforçant, par la comparaison des multiples graphies, d'en cerner le temps de rédaction. Ainsi ajusté et réétudié, l'ensemble se révèle écrit aussi bien du vivant de l'enfant qu'après son décès. Mallarmé, luttant contre la mort, devance la disparition en une série de tentatives composites, esquissant les trois parties d'un plan, préfaces, préludes, pensées ou échos des paroles d'une famille meurtrie. En page de titre, la force de la seule adresse du poète à Anatole, à A. – hymen père et fils – peut-être en vers, ouvre d'autres chemins que celui d'un tombeau littéraire. De l'assemblage de textes jusqu'à présent disjoints, une approche se construit, des questionnements surgissent. Feuillets annotés et commentés, précédés de trois lettres inédites d'Anatole à son père, et suivis de onze pages extraites du Livre, d'un lexique comparatif, d'une chronologie détaillée de l'année 1879, de pour un nom sans tombeau de Mary Shaw et François Cornilliat, et de Tessères, 211 fragments d'un journal d'études de Pierre Magnier.

09/2019

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Psychologie, psychanalyse

L'incorporation émotionnelle. Aimer à en tomber malade

Même si le thème de l'incorporation est bien connu des psychanalystes et des psychologues, il est certainement peu ou pas utilisé. Le docteur Salomon Sellam l'inclut lui régulièrement dans sa pratique quotidienne. Ici, il nous livre toute une étude théorique et surtout pratique afin de donner à ce thème toute la place qu'il mérite. Il distingue ainsi cinq grands types d'incorporation, appartenant toutes à notre Système Psychique de Protection. L'incorporation psychanalytique habituelle : elle concerne surtout les deuils réels et bloqués, où l'incorporation représente une sorte de premier palier protecteur, afin de ne pas trop souffrir du manque de l'être cher. La personne incorpore le défunt en elle et de manière symbolique, comme un surpoids par exemple. Ensuite, les quatre autres, moins connues, font intervenir le contexte émotionnel dans lequel ce phénomène se met en place. Pour cette raison, elles sont regroupées sous la même appellation Incorporation émotionnelle. L'incorporation émotionnelle de l'enfant : ici, le cerveau de l'enfant est une véritable éponge émotionnelle. L'enfant pompe littéralement l'ambiance familiale et l'exprime par l'intermédiaire d'un symptôme organique, fonctionnel, comportemental, psychologique ou psychiatrique. L'incorporation émotionnelle de l'adulte, la plus novatrice : l'adulte, par amour, pompe la problématique de l'un de ses proches, enfant, conjoint(e), parent et même ami intime, et l'exprime par l'intermédiaire d'un symptôme. L'incorporation gestationnelle : ce n'est plus l'enfant ou l'adulte qui pompe le contexte émotionnel, mais l'embryon ou le foetus. Ce type d'incorporation a permis à de nombreux bébés de guérir ! L'incorporation transgénérationnelle permet elle d'expliquer l'existence de certains symptômes d'aujourd'hui, alors que la problématique se trouve dans l'arbre généalogique. Grâce à cette nouvelle manière de voir la maladie ou le symptôme et devant le nombre croissant d'améliorations et de guérisons, l'incorporation émotionnelle occupera certainement beaucoup plus de place au sein de la Psychosomatique Clinique et Humaniste.

03/2014

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Histoire de France

La vie quotidienne de Napoléon en route vers Sainte-Hélène

Georges Bordonove Né en 1920, Georges Bordonove a poursuivi une double carrière, couronnée à diverses reprises, de romancier et d'historien. D'une ceuvre qui compte près de trente volumes, tous remarquables par leur force émotive, leur élan, citons l'Histoire du Poitou, la Vie quotidienne en Vendée pendant la Révolution et la Vie quotidienne des Templiers au Xllle siècle parue en 1975. La Vie quotidienne de Napoléon en route vers Sainte-Hélène Pourquoi, après Waterloo, Napoléon s'est-il attardé à Rochefort et à l'île d'Aix ? Pourquoi renonçant aux projets d'évasion qu'on lui proposait, choisit-il de se rendre, le 15 juillet 1815, aux Anglais ? A travers l'évocation de la vie quotidienne de l'empereur déchu, contraint à l'exil, Georges Bordonove répond à ces questions : il apporte des précisions nouvelles, tirées des papiers, inexplorés jusqu'ici, de l'amiral Baudin qui, en 1815, commandait la corvette La Bayadère sur laquelle l'Empereur aurait pu aisément passer en Amérique. En outre l'auteur s'est attaché à montrer comment, au fil des jours, du Bellérophon au Northumberland, Napoléon, hier ennemi redouté et haï de l'Angleterre, devient un réfugié politique, puis un captif, enfin un déporté qui, par sa simplicité et sa dignité, éveille chez les soldats et les marins anglais commis à sa garde l'admiration autant que la pitié. Georges Bordonove raconte aussi comment à bord du vaisseau qui l'emmenait à Sainte-Hélène l'idée vint au proscrit de dicter ses mémoires, léguant ainsi à la postérité l'impérissable image devenue légendaire. Cette extraordinaire mutation psychologique méritait une étude ; elle s'inscrit parfaitement dans cet ouvrage historique qui est aussi le plus passionnant des récits. Le plus émouvant également puisqu'il nous permet de découvrir les rêves qui hantent l'Empereur tandis qu'il arpente le pont ou braque sa lorgnette sur l'horizon immense...

06/1977

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Sciences politiques

Célébrer Salazar en France (1930-1974). Du philosalazarisme au salazarisme français

"Célébrer Salazar". La formule peut étonner mais c'est bien l'idée d'une forme de laudatio rendue des années 1930 aux années 1960 au dirigeant de l'Estado Novo portugais (1889-1970) par une partie des élites françaises que cet ouvrage entend mettre en lumière. La recherche s'appuie ainsi sur le dépouillement des archives de Salazar mais aussi sur les papiers du critique et écrivain António Ferro, l'homme qui fut aux origines de la création de cette image de Salazar en France. Du côté français, ont été mobilisés des dizaines de livres, des centaines d'articles publiés dans les quotidiens et les revues, quatre décennies durant. La plupart de leurs auteurs décrivent avantageusement le régime portugais et son dirigeant qu'une partie de privilégiés parmi eux a réussi à rencontrer pour en dresser un portrait qui va parfois jusqu'au panégyrique. Car le regard positif porté sur Salazar, principalement dans les milieux de droite conservatrice et radicale français, exprime un soutien à l'homme et aux principes qu'il incarne. Le philosalazarisme tient ainsi une place notable dans l'histoire politique et intellectuelle française contemporaine. Son étude enrichit l'histoire des réceptions et des transferts à travers celles des circulations et des réseaux à l'oeuvre entre les bords du Tage et de la Seine, notamment après 1945 où il faut compter avec les exilés français installés à Lisbonne. Mais cette histoire n'est pas linéaire. L'entre-deux-guerres campe Salazar en Cincinnatus européen, héritier d'Henri le Navigateur. Au tournant des années 1950, c'est un Salazar humanisé que propose la journaliste Christine Garnier dans Vacances avec Salazar. Enfin, les quinze dernières consacrent le "Sage de l'Occident" que ses thuriféraires opposent aux modèles soviétique, cubain ou chinois et bien sûr à une Cinquième République gaullienne dont la politique algérienne est mise en regard des efforts de Salazar pour conserver l'empire portugais.

01/2018

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Littérature étrangère

Demain à Santa Cecilia

A 45 ans, Blanca Perea s'est construit une existence qu'elle croit solide : un mariage qui dure depuis plus de vingt-cinq ans et une carrière universitaire honorable. Lorsque son mari la quitte pour une femme plus jeune, elle ne sait plus quel sens donner à sa vie. Dévastée, Blanca décide de partir le plus loin possible, et accepte un emploi d'archiviste à Santa Cecilia, une modeste université de Californie. Elle devra classer les papiers légués à la fac par Andrès Fontana, un professeur mort depuis trente ans. Heureuse surprise : le travail n'est pas du tout fastidieux. À travers les souvenirs du professeur exilé du franquisme, Blanca, bouleversée, apprend à connaître l'Espagne des années 1930, mais aussi l'Espagne rêvée des écrivains de la diaspora. La vie du campus se révèle aussi intéressante, agitée par un mouvement de lutte contre le projet de construction d'un immense centre commercial. Et Blanca fait la connaissance du très séduisant Daniel Carter, professeur de renom et ancien élève de Fontana, qui manifeste un vif intérêt pour ses recherches... Peu à peu, Blanca constate que les écrits de Fontana s'éloignent de la littérature de l'exil pour se focaliser sur les missions espagnoles franciscaines du Camino Real en Californie. Pourquoi ce revirement de la part de Fontana ? Elle s'interroge également sur l'intérêt soudain de l'Université pour ces archives enfouies et abandonnées jusqu'alors. La concomitance entre sa mission et le mouvement contre les travaux de construction du centre commercial, dans lequel Carter semble très impliqué, est-elle une simple coïncidence ? En se penchant sur le passé, Blanca espère découvrir les secrets qui ébranlent le présent. Un roman sur la seconde chance et la possibilité de se reconstruire. Héroïne contemporaine, Blanca, après une trahison qui la laisse exsangue, refuse le rôle de victime passive et s'ouvre à l'inconnu.

05/2014

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Histoire de France

Darlan

On le sait, la France de la guerre est dominée par l'affrontement Pétain-de Gaulle, figures depuis longtemps bien connues des historiens. En revanche, le " troisième homme ", successeur désigné du Maréchal et rival le plus dangereux du Général, demeurait largement ignoré tant en raison du caractère énigmatique du personnage que de la " disparition " de beaucoup d'archives. Par surcroît, la vanité de Darlan, ses écarts de langage ont fait le lit d'une imagerie simpliste. En réalité, l'homme fut supérieur au style, comme les multiples révélations apportées par le présent ouvrage en administrent moult preuves. Ce fils de ministre est un vrai républicain, son rôle avant la guerre fait de lui un vrai marin et un chef d'état-major efficace. S'il approuve l'Armistice de 40, ce n'est pas par idéologie, mais parce qu'il est convaincu de l'impossibilité de poursuivre la lutte, et c'est le drame de Mers el-Kébir qui le détache à jamais de Churchill et des Français libres. Lorsqu'il est appelé à succéder à Laval en décembre 1940, il mène d'abord une politique assez molle envers l'occupant, mais se reprend, ne cède rien d'essentiel et travaille à faire entrer l'empire dans la guerre. Son assassinat, à Alger, en décembre 1942, reste l'une des plus grandes énigmes de l'histoire contemporaine : attribué aux seuls monarchistes, il a en fait été ourdi par des gaullistes qui ont su manipuler les partisans du comte de Paris. Première biographie scientifique de l'Amiral de la flotte, cet ouvrage se fonde sur de très importants dépouillements d'archives, publiques, bien sûr, mais aussi privées : les papiers personnels de l'Amiral (que l'on croyait perdus) et ceux de ses collaborateurs, ainsi que sur de nombreux témoignages. Il fait découvrir un personnage clef de l'histoire contemporaine, non sans inviter à une relecture de l'histoire de la France de Vichy.

11/1989

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Ethnologie

Le champignon de la fin du monde. Sur la possibilité de vivre dans les ruines du capitalisme

L'enquête de terrain d'Anna Lowenhaupt Tsing commence dans les forêts dévastées de l'Oregon aux Etats-Unis, où les grands pins ponderosas ont été coupés pour alimenter l'insatiable industrie du bois, et se termine dans celles du Yunnan, où la marchandisation fait des ravages dans les campagnes, après être passée par la Laponie et le Japon. Le sujet du livre ? Le matsutake, un champignon très cher au Japon qui ne pousse quasiment plus sur l'archipel nippon et qu'il faut donc importer. Anna Tsing va explorer les mondes que ce champignon éclaire ou même fabrique. Le matsutake n'est donc pas un prétexte ou une métaphore mais une loupe pour observer le monde. Les cueilleurs de l'Oregon sont des réfugiés d'Asie du Sud-Est, des vétérans des guerres américaines ne pouvant plus vivre en ville, des sans-papiers... Ce sont des précaires qui vendent chaque soir les champignons qu'ils ont trouvés. Pour l'auteure, la " précarité " n'est pas seulement un terme décrivant la condition des cueilleurs sans emploi stable ni aucun des avantages liés au salariat mais, avec celui de " ruines ", un concept pour penser le monde dans sa globalité. Anna Tsing montre comment le modèle de la plantation de canne à sucre au Brésil, en tout point opposé à une forêt de matsutakes, a été le modèle du capitalisme fordien aujourd'hui en train de disparaître. C'est dans les rapports entre le Japon et les Etats-Unis que le capitalisme s'est totalement réinventé depuis la Seconde Guerre mondiale, l'Europe ne jouant manifestement aucun rôle. Mais quelles seront les conséquences à terme de ces changements pour ce continent au-delà du seul problème dit des délocalisations ? Suivre les matsutakes mène aussi à une nouvelle manière d'apprécier la biologie et la science. Les champignons sont une espèce vivante si particulière qu'elle fait trembler les fondements de la biologie contemporaine. Ils révèlent aussi pourquoi la " science japonaise " et la " science américaine " ne coïncident pas.

08/2017

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Divers

Les mains glacees

Bande dessinée “reportage”, Les mains glacées donne une vision sensible du milieu marin polaire et de la fragilité de son éco-système. 

De retour d’une résidence le long des côtes du Groenland sur le voilier Knut de l’association MaréeMotrice, MarieMo élabore cette série de petits sketches magnifiquement illustrés à l’encre de chine. Mélanges entre réalité et imaginaire
marin, ils dévoilent un certain regard sur les aléas d’un continent en proie au réchauffement climatique. Un dialogue entre l’océan, la glace, la faune et l’illustratrice.

Plusieurs expositions ont déjà vu le jour autour de ce projet d’exploration : une installation « Iceberg » lors de l’exposition « Pôles, feu la glace » au Muséum d’histoire naturelle de Neuchâtel, une exposition et une lecture-projection dans le cadre du printemps culturel « Grand Nord » à Neuchâtel, ainsi qu’une exposition à Delémont’BD en 2019.

En 2021, l’autrice expose ses planches inédites et dédicace sa BD au festival Tramlabulle (Tramelan, BE), à la Ferme du Grand-Cachot-de-Vent (NE), signe chez Papiers gras et Cumulus (GE), au festival SO’BD (Paris, FR)...

Graphiste et illustratrice indépendante formée à l’École d’art de Bienne, Marie-Morgane Adatte se passionne pour la bande dessinée et la sérigraphie. Portée par ses voyages, la nature et le dessin, elle évolue dans un monde créatif entre illustrations, narrations et éditions, notamment avec La Bûche, un fanzine féminin suisse romand.

Soucieuse de l’avenir de la planète et de l’humanité, elle trouve les moyens de s’engager par le biais de ses projets artistiques. En 2018, elle quitte l’Atelier A, son espace collectif à Neuchâtel, et embarque sur le voilier de l’association MaréMotrice pour une résidence d’un mois dans les glaces du Groenland afin de rendre compte, sur place et en dessin des dégâts causés par le changement climatique. 

Dossier - Nouvelles têtes : les éditeurs suisses jeunesse et BD la jouent collectif

10/2021

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Histoire de France

Journal du camp de Vittel

Le 14 août 1942, Hannah, l'épouse d'Yitzhak Katzenelson, et leurs deux plus jeunes garçons, Ben Zion et Benjamin sont convoyés vers Treblinka depuis le ghetto de Varsovie. Katzenelson et son fils aîné, Zvi, en réchappent et travaillent alors quelques mois dans un atelier allemand situé dans les décombres du ghetto. Sans illusion sur le sort réservé à sa femme et ses enfants, celui qui est l'un des plus grands poètes juifs du XXe siècle cesse alors d'écrire. Grâce à la Résistance juive qui cherche à le protéger, il obtient des faux papiers de l'Etat du Honduras qui lui permettent de quitter la Pologne. Le 22 mai 1943 Katzenelson et son fils sont envoyés au camp de Vittel, en France, un camp pour "personnalités", c'est-à-dire des ressortissants de pays alliés ou neutres détenus comme d'éventuelles monnaies d'échanges. Miné par une terrible dépression, craignant de basculer dans la folie, Katzenelson écrit quelques lignes dans son journal puis s'emmure dans le silence. Ce n'est qu'à la veille de l'anniversaire de la liquidation du ghetto de Varsovie, qu'il commence à tenir véritablement son Journal. Bien qu'il ne coure que sur deux mois seulement, il s'agit là d'un document exceptionnel d'une rare intensité. A l'amie de Vittel qui le presse d'écrire, il répond : "Je ne peux pas écrire. Il n'existe pas de mots pour décrire ces horreurs ; ils n'ont pas encore été créés". Mais c'est aussi le même homme qui lui déclare un autre jour : "Non ! Non ! Cela doit être écrit. Le monde entier doit savoir ce qui est arrivé. Tout doit être raconté". C'est le témoignage d'un homme brisé qui survit dans un entre-deux de la mort. Dans un cri poignant, le poète mentionne déjà l'extermination par balles, les déportations et les chambres à gaz. Mais surtout, avec une terrible prescience, il avance dès 1943 le chiffre de six millions de Juifs assassinés.

09/2016

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témoignages personnels

Entre les lignes. Itinéraire surprenant d'un officier français dès 1940

Un officier va recevoir pour mission d'infiltrer la Résistance française. Les autorités de Vichy le font muter à Paray-le-Monial. Mais il entend faire savoir à la Résistance qu'il est de son côté. Pour montrer son allégeance, il exécute un collabo. Entré dans la Résistance, il rencontre Max, nom de code de Jean Moulin. Il se retrouve à Londres toujours sous sa fausse identité. On l'y formera pour repartir en France à la tête d'un commando parlant la langue allemande. On le suit dans ses aventures extraordinaires au rythme des interventions militaires. Il rencontre Vidal, alias le général Delestraint. Vers la fin de la guerre il vit le dernier bombardement à domicile à Clichy - Saint-Ouen. Blessé il sera hospitalisé, mais se papiers sont allemands. Une catastrophe. Il n'y a que la grâce du général De Gaulle qui pourrait le sauver du poteau. Comment en est-il arrivé là ? Pupille de la nation parce que son père est mort en héros lors de la Grande Guerre, ce jeune homme doué en langues est élevé par sa tante dans l'Est de la France, non loin de la frontière allemande, où il vendra même du Schnaps fabriqué par son oncle à la Feldgendarmerie. Il y poursuit ses études jusqu'au moment où il décide d'intégrer la prestigieuse école d'officiers de Saint-Cyr. Il croisera le colonel De Gaulle dans le train. Il deviendra lieutenant. Arrive la déclaration de ce qui devient la seconde guerre mondiale. Le jeune lieutenant est envoyé par rail avec son régiment vers l'Allemagne. Avant même de combattre, la troupe est décimée par un bombardement. Le lieutenant séjournera dans des maisons au hasard de sa route. Il manquera de se faire interpeller par des soldats allemands, pourra s'échapper, mais changera d'uniforme, revêtant celui de l'ennemi faute de choix, provisoirement. Il en maîtrise la langue de manière suffisante. Lui l'officier français va se retrouver confondu avec la propriétaire de l'uniforme, l'Oberleutnant Friedrich von Hauser.

06/2023

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Beaux arts

Duchamp déchets. Les hommes, les objets, la catastrophe

«Afin de saisir le devenir objet de l'humain, la domestication de l'homme par lui-même, en cours aujourd'hui, peut-on faire autrement que penser les objets - ready-made - comme des vivants ? L'expérience de l'indifférence - esthétique, érotique et éthique - appelée par la vie et l'oeuvre de Marcel Duchamp, ne peut elle pas être le mode d'accès à une possible vie spirituelle ? L'art qui s'adresse aux yeux du voyeur ne convoque-t-il pas, du même coup, son âme, s'il en a une ?» H.L Hadrien Laroche examine toute l'oeuvre de Duchamp à la lumière des objets, de la catastrophe et d'autrui (l'indifférence impossible). L'ouvrage confronte les ready-mades (1913-1914) à la Première Guerre mondiale, en tant qu'objets orphelins, et arrime la dernière oeuvre de Marcel Duchamp, Etant donnés (1946-1966), à la Seconde, comme représentation de la vie nue après Auschwitz. Au sortir des conflits, c'est une humanité plus froide, plus dure, qui, saturée de morts, de mutilés et d'orphelins, hantée par les massacres de masse, se drape de l'indifférence de l'Histoire. L'artiste prend acte de cette indifférence à l'égard de la vie et de la mort. Son oeuvre en tire les conséquences. Avec les ready-mades, ou Etant donnés, il remet en question la paternité de l'oeuvre, s'interroge sur l'identité du sujet et sa capacité à sentir. Dépersonnalisation, décision passive, indifférence : voilà les modes trouvés par Marcel Duchamp pour répondre à la question que lui posaient sa vie et son art. Pour répondre à la question de la souffrance. Celle-ci est immédiatement celle de son temps. Hadrien Laroche, dans cette relecture inédite de nombreuses oeuvres de Duchamp, illustrée de documents nouveaux (travaux préparatoires, papiers inédits, images rares), prend appui sur la lecture d'importants travaux non traduits en français et dialogue avec les philosophes contemporains.

09/2014

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Sciences historiques

L'aventure et l'espérance. Anthologie

Je viens de fêter mes 88 ans. Combien de fois ma vie n'a-t-elle tenu qu'à un fil ? A 19 ans, parce qu'un chef de réseau a cru en moi, j'ai été projeté dans l'aventure de la Résistance puis dans l'abîme de la déportation. A 44 ans, je suis sorti de prison, sans papiers, sans droit de vote, sans carnet de chèques. Entre-temps, pendant deux décennies d'une intensité sans pareille, j'ai été plongé dans l'Histoire. Je l'ai connue, comme Shakespeare dans Macbeth, "racontée par un idiot, pleine de bruit et de fureur, et qui ne signifie rien". J'ai pourtant choisi comme titre L'Aventure et l'Espérance à cette réédition qui retrace mon chemin à travers des extraits de livres et de conférences. L'aventure, parce que je n'ai pas passé ma vie en retrait. Thoreau a écrit qu'avant de s'asseoir pour écrire, il faut se lever pour vivre. J'inscris aussi le mot espérance. Au-delà de tout, il reste une flamme fragile, minuscule, chancelante, mais si bouleversante. L'espérance est une grâce, la seule peut-être qui compte à 88 ans. C'est celle que je veux confier aux lecteurs avant de quitter "le doux royaume de la terre". Hélie de Saint Marc Avec un DVD inédit offert : Indochine, notre guerre orpheline de Patrick Jeudy. Texte lu par Hélie de Saint Marc. En 2001, Hélie de Saint Marc faisait paraître un album, Indochine, notre guerre orpheline, avec des photos du service iconographique de l'armée. Le documentariste Patrick Jeudy a demandé à Hélie de Saint Marc de lire ses textes, évocation imagée et puissante de la guerre d'Indochine. Sur ce fil rouge du témoin qui se souvient, Patrick Jeudy a puisé dans les archives des cinéastes de l'époque, où s'illustraient de jeunes appelés comme Pierre Schoendoerffer, les images qui résonnaient avec ce texte. Ce film est inédit.

11/2013

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Littérature étrangère

Valet de pique

Quel auteur n'envierait-il pas le sort de Andrew J. Rush ? Ecrivain à succès d'une trentaine de romans policiers vendus à plusieurs millions d'exemplaires dans le monde, père de famille heureux, Andrew vit dans une petite ville du New Jersey où il trouve le calme nécessaire pour édifier son oeuvre. Mais Andrew a un secret que même ses plus proches ignorent : sous le pseudonyme de Valet de pique, il écrit des romans noirs, violents, pervers, romans publiés avec un énorme succès et qui scandalisent autant qu'intriguent le monde littéraire. Pourtant, cet équilibre tout en dissimulation que Andrew a patiemment élaboré va être menacé. Au départ, la plainte d'une voisine, Mrs Haider, probablement un peu dérangée, qui l'accuse d'avoir plagié ses romans auto-publiés, accusation qu'elle avait déjà formulée dans le passé à l'encontre de Stephen King. Innocenté par le tribunal, Andrew sera néanmoins affolé par cette affaire, et ira jusqu'à perquisitionner le domicile de Mrs Haider, où il découvrira dans ses papiers qu'elle n'a pas si tort que ça... Entre-temps, deux événements domestiques vont le perturber : sa fille tombe par hasard sur un roman du Valet de pique et commence à poser des questions gênantes après y avoir trouvé des traces autobiographiques ; le comportement étrange de sa femme Irina mène Andrew à la soupçonner fortement d'entretenir une liaison avec un professeur de maths. Ces éléments menaçants vont réveiller chez Andrew des fantômes du passé qu'il pensait avoir définitivement oubliés. Réveiller aussi la voix désormais plus insistante et terrifiante du Valet de pique... Un thriller magistral de Joyce Carol Oates, efficace, inquiétant, drôle aussi – jouant brillamment sur les références à Stevenson, Poe ou Stephen King. Un roman qui éclaire les forces noires manipulant la conscience d'un auteur à succès, et entraîne son lecteur hypnotisé sur une mince ligne de crête séparant génie et folie.

03/2017

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Littérature étrangère

Nouvelles du pays

Il y a la femme adultère condamnée à être lapidée, le carrossier qui reçoit des foules convaincues de voir la vierge Marie sur un pare-brise, le jeune théâtreux idéaliste et paumé, la jeune fille pénétrée de convictions sociales et religieuses qui n'ont rien d'un choix, le Nigérian qui remonte vers le Nord avec de faux papiers pour passer en Europe, la jeune femme qui travaille au noir à Londres, la mère célibataire devenue experte en transport de drogue, la jeune fille au pair qui travaille pour une famille de Nigérians expatriés aux Etats-Unis, la Nigériane enceinte qui se lie d'amitié avec sa voisine américaine elle aussi enceinte, la fillette qui accompagne ses parents lors du rendez-vous où ils espèrent obtenir la green card, le garçon issu d'un milieu modeste qui hésite à entrer dans des combines illégales... Au fil de ces onze nouvelles, c'est un vaste panorama tout en nuances que compose Sefi Atta, dans lequel les dialogues imposent un rythme narratif enlevé et permettent une perception immédiate des personnages. L'humour se mêle au désespoir et au tragique, et l'on passe d'une aspérité à l'autre, d'une facette du Nigeria à l'autre, toutes plus sombres les unes que les autres mais en même temps empreintes d'une vitalité qui force l'admiration, éclairées d'un humour et d'un amour de la vie qui s'imposent avec force. Ce recueil parcourt les diverses échappatoires qui s'offrent à chacun dans ce pays : la drogue, le sexe, la corruption, les ragots, la foi envers et contre tout, le trafic de tout et de rien, la fuite à l'étranger, mais aussi les liens familiaux, la transmission de génération en génération d'une identité évolutive mais forte, les improbables solidarités qui se créent, s'éprouvent, s'effritent, la quête de valeurs humaines, le désir de s'en sortir à tout prix. Autant de thèmes qui sont ici abordés avec une remarquable sincérité et une profonde humanité.

10/2012

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Beaux arts

Marie Cuttoli. Myrbor et l'invention de la tapisserie moderne

La vie de cette femme ambitieuse et instinctivement férue d'avant-gardisme se déroule comme un roman. Née à Tulle en 1879 d'un père limonadier, Marie Bordes épouse en 1920 Paul Cuttoli, maire de Philippeville en Algérie, devenue Skikda. Vivant alors entre Paris et l'Algérie, où Paul Cuttoli a construit pour elle le palais Dar Meriem ("la maison de Marie"), elle monte des ateliers de tapisserie, d'abord à Sétif puis, en France, à Aubusson. Rénovant cet art particulier en demandant à des artistes tels que Lurçat, Rouault, Coutaud, Picasso, Dufy, Braque, Laurens... des cartons qu'elle transforme en chef-d'œuvre textiles, elle ouvre la boutique de mode et de décoration Myrbor : MYR(iam) BOR(des). En 1924, la route de Marie Cuttoli prend un tournant inattendu : sa rencontre avec le jeune physiologiste, savant et collectionneur, Henri Laugier, est le départ d'une vie sous le signe d'un double passion partagée, affective, certes, mais aussi centrée sur les collections d'oeuvres d'art. Leur duplex rue de Babylone, écrin rêvé pour leurs tableaux et leurs fabuleuses tapisseries, et à Antibes la villa Shady Rock sont les lieux de rendez-vous de personnalités aussi diverses que Léon Blum, Man Ray, Pablo Picasso ou Helena Rubinstein. Avec l'aide du célèbre docteur Barnes, Marie organise des tournées dans les capitales étrangères, où elle expose et vend ses tapisseries. Elle s'allie à Jeanne Bucher pour créer la galerie Jeanne Bucher-Myrbor et, après la guerre, à Lucie Weill. En 1963, Henri Laugier et Marie Cuttoli lèguent une partie de leur collection au Musée national d'art moderne, dont vingt-quatre papiers collés de Picasso. Ils se retirent à Shady Rock, où ils disparaissent tous les deux, à trois mois d'intervalle, en 1973. Cet ouvrage est une promenade artistique entre Tulle, l'Algérie du début du XXe siècle, le Paris des avant-gardes, Aubusson rajeuni et les Etats-Unis.

06/2010

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Critique littéraire

Inquiétudes et reconstruction. Essai sur la littérature d'après-guerre (1931)

Dans une période particulièrement féconde en grands essais, 1931 est une année elle-même remarquable par l’abondance et la qualité des ouvrages qui paraissent. Est-ce, comme de nombreux auteurs l’affirment, pour célébrer la « fin de l’après-guerre » ? A la volonté d’analyser et de comprendre la période, Benjamin Crémieux ajoute celle de prévoir. Quelles seront les conséquences littéraires, mais aussi, et on serait tenté de dire donc- morales, psychologiques, politiques, de ce courant d’inquiétude qui a traversé les générations depuis la guerre ? Crémieux, avec son optimisme naturel parie sur une reconstruction brillante et pour cela dresse, comme à son habitude, un panorama des mouvements, des tendances, des auteurs qui contribuent à donner son identité et sa couleur à la période. Sans trancher, il propose des hypothèses, parie sur des possibles, dégage des probabilités. Ainsi, tout ce qui a pu sembler excessif, caricatural, désespéré, voire nihiliste dans la production de l’après-guerre est pour lui, dans le même temps, le terreau d’une grande littérature future, d’un humanisme nouveau, peut-être d’un classicisme refondé. En 1931, ne pouvait-on pas en effet, croire à la fin de l’après-guerre et, sans faire preuve d’aveuglement parier sur l’unité plutôt que sur la discorde, sur l’Europe et sur la paix plutôt que sur la destruction et sur le triomphe des nationalismes ? Ce n’est pas sur la littérature que Crémieux se trompe, c’est sur son pouvoir, elle sera en effet impuissante à empêcher que cette après-guerre rapidement ne se transforme en avant-guerre. Les écrivains quand à eux devront prendre parti, se classer, choisir. Viendra le temps de l’engagement. Cet engagement, Crémieux, l’homme des livres, le méridional prudent et sceptique ne s’y dérobe d’ailleurs pas, il meurt en déportation en avril 1944. Il nous laisse trop peu de livres et le témoignage d’un intellectuel exemplaire de cette période qui est devenue l’entre-deux-guerres.

10/2011

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Littérature étrangère

Dans le Jardin de la mémoire

Toscane, printemps 2001 : vingt-six personnes se réunissent pour la première fois. Cela tient du miracle. Elles sont les descendantes d'une famille juive hors du commun que deux guerres mondiales, les engrenages des totalitarismes et des cataclysmes humains ont dispersées. Elles viennent des quatre coins du monde. Leurs racines communes remontent au mariage, à la fin du XIXe siècle à Varsovie, de Julia Kleinemann - fille d'un important négociant - et de Gustaw Horowitz, Viennois issu d'une lignée de rabbins. Ce couple donne naissance à une famille fertile, qui va se fondre dans l'intelligentsia polonaise au cours d'une assimilation lente et difficile. Leur arrière-petite-fille, Joanna Olczak-Ronikier, en est devenue la chroniqueuse malgré elle. À la mort de sa mère lui restent deux malles en osier, quelques papiers sauvés du chaos, le seul témoignage tangible d'un passé à jamais englouti. " Elles me gênaient, m'irritaient, prenaient de la place. Je ne me sentais pas concernée par cet héritage fait d'attachements, de regrets et de nostalgies qui n'étaient pas les miens. " Mais " si ce n'est toi, alors, qui ? Et si ce n'est maintenant, alors, quand ? " dit le Talmud. Comme sur un appel venu de l'au-delà, Joanna Olczak Ronikier se met à cultiver ce jardin de la mémoire, tisse les fils et renoue les liens distendus. Elle défroisse les pages de ce passé avec délicatesse, réserve et discrétion, et surtout avec une simplicité jamais démentie. Il en résulte un récit chargé d'émotion et porteur des espoirs les plus nobles. On y croise la famille Citroën ou Pierre Pfeffer pour la branche parisienne, mais aussi bon nombre de personnalités marquantes de l'histoire politique, scientifique ou culturelle du XXe siècle. " Le metteur en scène le plus talentueux n'inventerait pas de situations si saisissantes. La vie seule dispose et embrouille les destins des hommes d'une façon aussi dramatique. " Andrzej WAJDA.

03/2005

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Critique littéraire

Garder tout en composant tout

Les carnets présentés ici sont des carnets posthumes qui, à la différence de Tous feux éteints parus en 1975, n'ont pas été réunis par l'auteur mais par son ami et exécuteur testamentaire Jean-Claude Barat, qui les a sauvés du chaos des brouillons laissés derrière lui. En quelque sorte, des carnets en marge des carnets qui s'étendent de 1924 à 1972. Un lent et minutieux travail a d'abord permis de déchiffrer des textes souvent illisibles, gribouillés à la hâte sur toutes sortes de papiers (publicités, courrier, factures, faire-part de décès...). Leur retranscription a ensuite abouti à la découverte de deux matériaux différents. D'un côté, des notes et des pensées inédites ; de l'autre, des fragments isolés par la main de l'auteur du reste de sa production littéraire : il peut s'agir ici d'une réplique de théâtre simplement manuscrite et que rien ne signale en tant que telle ; là d'une phrase qui, séparée de son contexte, se transforme soudain en aphorisme cinglant ou en adage définitif, ou encore de passages soigneusement prélevés au cœur de ses essais mais réécrits, comme " re-formatés " afin de venir s'intégrer à la formule des carnets. Bref, une somme d'éléments aussi épars que variés, provenant de tous les horizons de son œuvre. Pouvait-on, d'un point de vue éditorial, maintenir ensemble ces deux matériaux ? Fallait-il conserver au travers de ces multiples variantes ce qui constitue aujourd'hui l'un de ses derniers gestes d'écrivain ? C'est dans ces nouveaux carnets que, faute de réponse, s'est trouvée une justification indispensable à l'élaboration de cet ouvrage. Il s'agit d'un texte daté du 27 janvier 1954 qui s'intitule " Garder tout en composant tout " et qui est la définition du double concept qu'il a toujours revendiqué : le syncrétisme (garder tout) et l'alternance (en composant tout)...

11/2001

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Critique littéraire

Grammaire temporelle des récits

Si un ami vous disait : "Le jour où j'étais malade, tu feras venir le médecin", vous auriez sans aucun doute le sentiment qu'il use d'un bien étrange jargon. Pourtant, des énoncés de ce genre se rencontrent sous la plume d'écrivains bien connus, comme A. Dumas, P. Féval, J. Verne, etc., et il y a fort à parier que vous en avez lu de semblables sans y prendre garde, même si vous êtes puriste. Le présent ouvrage se propose de rendre compte de ces curieux exemples à partir d'une réflexion sur la nature des textes de fiction. Contrairement à ce qu'on est spontanément enclin à penser, il n'y a pas que l'histoire qui est fictive dans un roman, il y a aussi le processus narratif lui-même et ses protagonistes ; les auteurs du siècle dernier ont exploité cette donnée pour créer, en marge de l'histoire proprement dite, une fiction secondaire dans laquelle le narrateur et le lecteur sont décrits comme les contemporains et les témoins directs des événements narrés. Dans leurs romans, le site temporel du processus narratif n'est pas fixe : il est identifié tantôt à la date de publication du livre - et, dans ce cas, l'histoire est appréhendée rétrospectivement -, tantôt à l'époque où se déroulent les faits racontés, qui sont alors saisis au moment même où ils surviennent. Il en résulte de spectaculaires changements de perspective exprimés par des énoncés - comme par exemple celui-ci : "Le soir même du jour où Chicot partait pour la Navarre, nous retrouverons dans la grande chambre de l'hôtel de Guise [...] ce petit jeune homme que [...]" (A. Dumas) - qui semblent constituer un défi aux règles de la grammaire. Le présent ouvrage s'adresse évidemment à tous ceux qui s'intéressent à la fiction et aux techniques narratives, mais aussi aux linguistes, qui trouveront dans les exemples cités ample matière à réflexion.

02/1990

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Théâtre

Cailloux

La pièce se passe à Capri, mais c'est un Capri hors saison, débarrassé des touristes et des estivants, réduit à sa petite société cosmopolite qui, sur ce "caillou", espère trouver un remède à son angoisse. Arrive le vieux Douglas Forstetner, ex-roi du chocolat. Il est venu à Capri pour y acheter une maison et chercher à entrer dans ce milieu plein de prestige à ses yeux. Il est accompagné de son secrétaire, un jeune Hongrois réfugié, sans argent, sans papiers, sans appuis. Douglas lui fait cruellement sentir à quel point il dépend de lui. Le jeune Hongrois pourtant s'éprend de Sandra et, poussé par elle, il va lutter pour retrouver sa liberté. Par snobisme, Douglas multiplie les attentions à l'égard d'une Américaine, Marjorie Watson, dont tout peut faire penser qu'elle est une des reines de New York. En réalité, c'est une petite employée, à qui le hasard a fait gagner une certaine somme et qui s'en est servie pour vivre son rêve : mener la grande vie pendant quelques mois. Elle aime Vos, un peintre qui a renoncé à la peinture et qui a cru trouver à Capri son équilibre et sa paix. Déçue, à bout de ressources, Marjorie finira par se suicider. Pour sauver le jeune Hongrois, Sandra vole l'argent de Forstetner. Elle sera arrêtée. Le jeune Hongrois renonce au combat. Il accepte son esclavage. A côté de ces deux couples qui luttent pour leur bonheur, gravitent d'autres personnages dont l'exemple contribuera à les acheminer vers la défaite : Cetrilli, le play-boy mâtiné de bourgeois ingénu, lady Ambersford qui vole les petites cuillers, lady Noakes qui les rapporte, Passiekoc, l'antiquaire somnambule, Jacquot, le joli parasite. Comme l'île sur laquelle ils vivent, tous ces personnages sont des cailloux. Ils sont atteints de ce mal contemporain : l'impossibilité de communiquer. Il s'agit ici d'une pièce où l'essentiel peut-être se trouve dans ce qui est suggéré, non dans ce qui est dit.

04/1962

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Littérature française

Oeuvres

La postérité a retenu de Joseph de Maistre qu'il a été l'un des plus fermes partisans de la contre-révolution. Ses adversaires l'ont peint comme un doctrinaire sectaire, pourfendeur des idées nouvelles. Ce portrait comporte une part de vérité : ennemi déclaré des Lumières, Maistre développe une philosophie de l'autorité, dénonçant l'illusion des droits de l'homme et de la démocratie, qui peut légitimement révolter une conscience moderne. Quelles raisons a-t-on de lire un tel penseur au début du XXIe siècle ? A en croire les meilleurs esprits, ces raisons ne manquent pas. Cioran en propose un usage thérapeutique : il s'agit de parier ironiquement sur les excès d'un dogmatisme "aussi habile à compromettre ce qu'il aime que ce qu'il déteste ". Une autre raison de lire Maistre consiste à chercher dans son œuvre un révélateur, au sens chimique du terme. C'est ce que suggère George Steiner, lorsqu'il affirme que ce penseur est un prophète, qu'il annonce le malaise idéologique de la modernité en montrant la violence inscrite dès l'origine dans l'émancipation révolutionnaire. Mais on peut aussi lire Maistre, comme Valéry, à la façon du dilettante pour la saveur de son écriture. Ses traits d'esprit sont rehaussés par une langue admirable : causticité, imagination, acuité intellectuelle, Maistre séduit jusqu'à ses adversaires. Ce volume s'adresse aux historiens, aux philosophes, aux juristes et aux amateurs de littérature. Il réunit un choix des œuvres les plus célèbres de Maistre - Considérations sur la France, Essai sur le principe générateur..., Les Soirées de Saint-Pétersbourg, Eclaircissement sur les sacrifices -, mais aussi des textes moins connus et partiellement inédits - Six Paradoxes, Sur le protestantisme - établis dans le respect des manuscrits. Et, pour la première fois, sous forme de Dictionnaire, une petite encyclopédie de la pensée maistrienne. A redécouvrir, même si l'on n'est pas un "affreux réactionnaire ". Pierre Glaudes

04/2007

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Sciences politiques

Les enfants de la guerre

Les enfants-de-la-guerre Docteur Bernard Benedetti. Me ? decin fondateur de me ? decin du monde corse apre`s avoir effectue ? de nombreuses missions partout ou des conflits par la folie meurtrie`re et fe ? roce perse ? cutait les peuples. D'Afghanistan au Kosovo de la Roumanie l'Albanie de l'Iran et l'Irak au Kurdistan Turc, partout dans le monde ou la pauvrete ? , l'absence de soins, les famines et toutes formes de violences qui tuent sans te ? moins, il est alle ? soigner te ? moigner, crier son indignation et pratiquer l'inge ? rence humanitaire sans retenu. Apre`s une enfance meurtrie par des blessures et un statut de victime de guerre, apre`s une jeunesse trompe ? e par une lutte de libe ? ration nationale en Corse, mal de ? finie et pre ? texte a` toutes les violences en re ? ponses a` celles de l'e ? tat tout vous sera conte ? sans concession "En venant au Kosovo, je n'ignorais pas que j'allais au devant d'une ferme opposition des autorite ? s serbes, a` me laisser travailler. Nous n'en e ? tions qu'a` la premie`re phase. Leur attitude, violente, me confortait dans l'ide ? e que je devais continuer. J'avais en partie pre ? vu ce qui allait arriver par la suite. Il me fallait rapidement rassembler des preuves. Il fallait que je rencontre le plus d'intoxique ? s pre ? sume ? s, possibles. En Me ? decin habitue ? , aux missions difficiles, j'anticipais pour re ? pondre aux obstacles, pour ne pas avoir a` renoncer. Je m'e ? tais donc e ? quipe ? de mate ? riel pour effectuer diffe ? rents pre ? le`vements, dont le sang, divers papiers, des e ? tiquettes etc... Le tout dissimule ? contre ma peau. Je portais a` cet effet, sous mes ve^tements, la ceinture que portaient les moudjahidines, laquelle avait des loges pour les chargeurs des Kalachnikov".

09/2017

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Beaux arts

Dans le vrai, tout est faux ? Patrimoine : nouveaux usages. Actes du 10e colloque interdisciplinaire Icône-Image, 26-27 septembre 2014

L'association Les Trois P. (Plumes, Papiers, Pinceaux) poursuit depuis 2003, une réflexion autour de l'image et a organisé les 26 et 27 septembre 2014, en partenariat avec les Amis de Pontigny, un colloque intitulé Dans le vrai, tout est faux ? Patrimoine : nouveaux usages. Ce colloque s'inscrivait dans le cadre du deuxième Centenaire de la naissance de l'architecte Eugène Viollet-le-Duc, dont l'importante carrière commence dans l'Yonne avec le chantier de la Madeleine de Vézelay (1838-1858), mais se poursuit dans de nombreux autres lieux du département, dont Saint-Père-sous-Vézelay et le Palais synodal à Sens. En partant de cette forte personnalité dont l'action et les écrits ont marqué un siècle de restauration, nous examinons, avec notre regard d'aujourd'hui, les différents problèmes soulevés par la multiplication des monuments historiques. Et le problème numéro un : quand la construction actuelle devient-elle patrimoine ? Quels peuvent être les critères de sélection ? Au nom de quoi délivrer un permis de démolir et faut-il tout conserver ? Car si l'on ne restaure pas, le bâti tombe en ruine. Y a-t-il de belles ruines ? Rodin et Adolphe Guillon, peintre fixé à Vézelay, se sont opposés sur ce sujet à Viollet-le-Duc. Et si l'on restaure, jusqu'où pousser la reconstitution et la fidélité à un passé révolu (ou qui n'a jamais existé) ? Où est le vrai, où est le faux, et peut-il être plus vrai que le vrai ? Construire un château médiéval aujourd'hui, est-ce une leçon, un apprentissage pour nos contemporains ? Ou une opération seulement médiatique ? Quand le bâtiment est remis en état et ouvert au public, quelle peut être son utilité sociale en dehors de la délectation esthétique ? La piscine "art déco" de Roubaix est devenue un musée : est-ce généralisable ? Entre discussion, réflexion, convivialité, notre 10e colloque s'est terminé par une séquence musicale : les instruments anciens sont-ils eux aussi vrais ou faux ? Où se trouve la juste note ?

03/2016

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Littérature française

Les sources de l'ancien état civil parisien : répertoire critique (Éd.1898)

1871. Alors que la Commune fait rage à Paris, l'Hôtel de Ville, la préfecture de police et le Palais de justice prennent feu. Tout l'état civil parisien antérieur à 1860 - soit huit millions d'actes du XVIe au XIXe siècle ! - part en fumée. Une catastrophe pour tous les Parisiens et leurs descendants. Dès l'année suivante, il est entrepris de " reconstituer " l'état civil disparu mais l'opération, interrompue faute de crédits, ne permet de pallier qu'un tiers des lacunes, et souvent les plus récentes (i. e. postérieures à 1820). Faut-il en conclure que toute recherche généalogique à Paris est condamnée ? Evidemment non. Une multitude d'archives de toute nature sont à notre disposition pour contourner cet obstacle majeur. Mais encore s'agit-il d'en avoir connaissance... C'est précisément l'objet de cet ouvrage que de nous les faire découvrir. Son auteur, Marius Barroux, qui n'est autre que l'archiviste-adjoint de la Seine, nous livre en 1898 un guide incontournable pour entreprendre des recherches généalogiques à Paris, à travers son " répertoire critique " des sources de l'ancien état civil parisien. Il y dresse, par le menu détail, un inventaire complet de chaque source et de son étendue, son contenu, son lieu de conservation et son intérêt. Registres de catholicité, registres d'ordres religieux et hospitaliers, archives de l'enregistrement, fonds Andriveau, fonds Laborde, manuscrits français de la Bibliothèque nationale de France, procès-verbaux d'apposition de scellés, journaux anciens, archives des pompes funèbres et des cimetières, épitaphiers et obituaires, papiers de famille, publications généalogiques... Tout y est merveilleusement décrit avec la précision et la nuance caractéristiques des experts. Ce guide intemporel constitue une véritable pépite pour les chercheurs et les généalogistes ! Préface de Tony Neulat. Ce livre, réimprimé en fac-similé par Hachette-BnF, est identique à la publication originale de 1898 conservée à la Bibliothèque nationale de France. Pour découvrir tous les titres du catalogue, rendez-vous sur www. hachettebnf. fr.

03/2023

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Poches Littérature internation

L'Ile du Cundeamor

Si vous n'aimez ni la mer, ni la montagne, ni la campagne, ça tombe bien : l'Ile du Cundeamor ne se passe nulle part. Si, malgré la mode de la world-littérature, vous résistez à vous apitoyer consciencieusement sur le sort de ces bons sauvages crevant de faim, de guerre, de dictature ou d'acculturation, ça tombe encore mieux : voilà un Cubain de l'exil pour qui l'exil est matière à poétique plutôt qu'à bons sentiments. [...] Cette île mystérieuse où la tante Ulalume règne sur un panier de crabes-malfrats [...] se situe [...] théoriquement au large de Miami Beach. Outre qu'il utilise à peu près toutes les situations narratives imaginables (jusqu'à se déposséder de son livre, dont on apprendra in extremis quel en est l'auteur !), [Vazquez-Diaz] mélange tous les genres, avec une préférence marquée pour le feuilleton mélo. De temps en temps les personnages se mettent à parler aussi comme des livres, d'histoire ou de médecine [...]. Enfin, Vazquez-Diaz se joue des clichés de la littérature sud-américaine, en rajoute dans l'érotico-moite et la plante grasse. Mais s'il n'est dans l'Île du Cundeamor finalement question que d'amours, de cocufiages, de meurtres et de roses couleur de sang, le tout dans un style à faire pâlir d'envie une pub pour les infusions saveurs du soir, c'est que le cul et la politique sont ici inséparables : " Tout le monde m'a trahie ", résume dès le début Betty Boop, désignant les cibles du livres : " Fidel Castro, Kennedy, mes amants. " (Éric Loret, Purée de Morue, Libération, 13 novembre 1997.) L'écriture de Vazquez-Diaz, précise et désinvolte, solennelle et comique, élaborée et quotidienne, réussit à tirer d'éléments disparates une conclusion diaphane : le rêve de tous les Cubains, qu'ils copient de l'intérieur ou en exil, n'est autre que Cuba elle-même. (Ramon Chao, Le Monde, 10 avril 1998.)

11/2005

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Critique littéraire

Roussel and Co.

Michel Leiris aura au moins laissé une oeuvre inachevée : la biographie que, depuis la mort de Raymond Roussel, il avait envisagé de consacrer au " plus grand magnétiseur des temps modernes " (André Breton) dont le timbre de la voix (dans son enfance) puis le style d'écriture (plus tard) l'avaient littéralement fasciné. Dans une lettre à André Schaeffner du 8 mars 1935, le ton est donné, le programme en quelque sorte fixé ; il projette de mener cette enquête en parallèle à celle qu'il entend conduire sur lui-même, escomptant peut-être un effet de miroir : " Quant à moi, note-t-il, je prépare un travail sur Raymond Roussel et ai repris, en l'amplifiant beaucoup, un ancien essai autobiographique " (qui deviendra L'Age d'homme). De ce souci, mais aussi de cet échec, témoigne le Cahier Roussel retrouvé dans les papiers de Leiris par Jean Jamin qui en a établi le texte publié ici pour la première fois. Commencé probablement à son retour de la mission Dakar-Djibouti et poursuivi sa vie durant, ce cahier contient bien sûr la matière de ses différents écrits sur Roussel mais surtout ce qu'il n'a pas voulu transmettre ou n'a pas su dire autrement que dans ces notes. Et particulièrement un ensemble de considérations sur les Nouvelles Impressions d'Afrique révélant combien la radicalité de la démarche de Roussel aura hanté Leiris, bien au-delà du langage. Du coup, c'est l'oeuvre et même la vie de Leiris qui demandent à être reconsidérées à cette lumière, comme le montre Annie Le Brun dans la présentation et les annotations à ce volume, rassemblant non seulement la totalité des textes sur Roussel (articles, notes ou extraits d'ouvrage) publiés de son vivant par Leiris mais encore la correspondance, en partie inédite, que l'un et l'autre ont échangée entre 1915 et 1933.

11/1998

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Littérature française

Les confessions d’une vendeuse en baskets

"Vous, qui tenez mon livre dans les mains, bienvenu dans mon récit. Vous allez y découvrir un monde fantastique, peuplé de créatures magiques, d'une nature luxuriante, quelquefois aimante, souvent vengeresse. Vous y trouverez de preux chevaliers sauvant des princesses enfermées dans des tours dont la flèche côtoie la stratosphère. Vous y trouverez des chiens devenus rois et des chats voulant dominer le monde après une invasion de rats (c'est déjà pris comme sujet, je crois, il va falloir que je trouve autre chose). Vous y trouvez... Bon arrêtons là voulez-vous ? Vous risquerez d'être déçu. Si vous êtes fan de fantastique ou de philosophie fiction, vous risquez d'être frustré. Quoique... Non, le livre que vous tenez dans vos mains traite de mes ressentis, de mon expérience, de ma vision de ce beau métier qu'est celui de vendeuse en prêt-à-porter. Alors, certes, je ne suis pas médecin et je ne sauve pas des vies, je ne suis pas chirurgien et ne couds pas des mains dans le ventre d'un de mes patients pour éviter l'amputation, je ne fais pas de missions pour les chimpanzés à la Sierra Leone, je n'essaie pas non plus de sauver le panda roux de l'extinction, bien que sa disparition me fendrait le coeur. Je suis juste une vendeuse en baskets qui avait envie de partager certaines de ses impressions. Tout est organisé en chapitres, que l'on peut suivre à sa guise. Ce n'est pas un récit que j'ai voulu lourd, péremptoire, pompeux, barbant, fastidieux, monotone, scolaire, qui finirait, pour sûr, dans un joli panier en osier dans la salle d'attente du nouveau salon d'esthétique pour chien à la mode. C'est un récit que j'ai voulu réjouissant et léger, pour vous qui vous apprêtez à ouvrir ce livre pour en lire les premiers mots".

02/2022