Pour la deuxième année consécutive, l’œuvre de Rabelais Gargantua est au programme du baccalauréat de français, dans le cadre de l’objet d’étude dénommé « La littérature d’idées du XVIe siècle au XVIIIe siècle », aux côtés des Caractères de La Bruyère et de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne d’Olympe de Gouges.
Le 26/12/2023 à 14:46 par Victor De Sepausy
535 Partages
Publié le :
26/12/2023 à 14:46
535
Partages
Renouvelé par quart chaque année, le programme du bac de français impose une sélection d’œuvres classiques dans laquelle les enseignants sont invités à piocher pour construire leur progression annuelle. Les objectifs de la mise en œuvre d’une telle sélection, principe absent avant la réforme du lycée de 2019, sont multiples. S’il s’agit d’orienter les choix des enseignants vers des textes en particulier, à la place de la liberté dont ils jouissaient auparavant, c’est sans doute pour chercher à transmettre une culture littéraire solide à partir de la fréquentation assidue d’œuvres ardues mais incontournables.
Parmi les chefs-d’œuvre de la littérature française, le Gargantua a été retenu pour figurer dans la partie du programme intitulée « La littérature d’idées du XVIe siècle au XVIIIe siècle ». Si l’œuvre de Rabelais est souvent présentée comme un roman, ce n’est donc pas dans ce seul principe qu’il s’agit d’aborder l’ouvrage publié il y a presque cinq cents ans. En effet, le parcours associé propose l’entrée « Rire et savoir » pour aborder l’histoire de géants inventée par Rabelais.
Ce dernier, écrivain, mais d’abord moine, ainsi que médecin, à la vie elle-même toute romanesque, a choisi d’élaborer une forme nouvelle, associant un imaginaire populaire à des références particulièrement savantes. Et, si vous n’avez pas la réf, comme on dit aujourd’hui, vous passez à côté de la magie de l’œuvre…Il faut donc fournir un travail considérable de mise en contexte pour pouvoir s’approprier un tel ouvrage. Le contexte culturel, historique et artistique, est extrêmement important à avoir en tête pour pouvoir accéder à la substantifique moelle promise par l’auteur dans son prologue.
Après avoir publié avec succès en 1532 Pantagruel, Rabelais poursuit l’aventure en 1534, avec Gargantua. Mais, comme on dirait aujourd’hui, il s’agit d’un préquel. Cet anglicisme est regrettable et l’on peut lui préférer « présuite », venu cette fois du Canada francophone, le français étant assez dépourvu sur ce terme, une fois n’est pas coutume ! Gargantua est d’ailleurs l’une des présuites les plus célèbres s’il vous plaît. En effet, Gargantua, fils de Grandgousier et de Gargamelle, n’est autre que le père de Pantagruel…
Première difficulté à surmonter avec Rabelais, la langue… il s’agit du moyen français. S’il n’est pas de bon ton de parler de traduction, on peut tout du moins compter sur des adaptations, ce qu'offrent les différents éditeurs qui proposent une édition en lien avec les attendus du programme. On peut aller du côté de celle de GF qui a le sérieux avantage de mettre en regard le texte original et l’adaptation qui en est proposée par Myriam Marrache-Gouraud, une spécialiste de Rabelais et du XVIe siècle.
Des podcasts à déguster sans modération :
Rabelais en quatre épisodes :
Pour entrer dans l’œuvre de Rabelais, le plus simple est sans doute d’écouter quelques podcasts de qualité autour du célèbre humaniste. "La Compagnie des œuvres", en 2017, avec Matthieu Garrigou-Lagrange, avait consacré une série de quatre épisodes incontournables autour de Rabelais, à l’occasion de la publication dans la collection Quarto de Gallimard des Récits pantagruéliques – Les cinq livres des faits et dits de Gargantua et Pantagruel. En invités de choix, on retrouve Mireille Huchon, Marie-Madeleine Fragonard (à qui l’on doit l’édition Quarto), Lakis Proguidis, et Pierre Lepape.
Une adaptation radiophonique de Gargantua
Si vous souhaitez entrer dans l’œuvre de façon quelque peu ludique et originale, rien de tel que d’écouter cette adaptation radiophonique proposée par Georges Barbarin à l’occasion de la commémoration des quatre cents ans de la disparition de Rabelais. Diffusée sur la RTF en 1953, cette version fait intervenir des voix célèbres, dont Alain Cuny, Jean Topart, François Chaumette, ou encore Michel Piccoli.
Cette archive a été rendue accessible dans le cadre des Nuits de France Culture. Attention toutefois, ne vous trompez pas : il s’agit d’une adaptation, et non du texte original…C’est une aide à la compréhension de l’histoire, mais cela ne remplacera pas la lecture du texte dans son intégralité. On pourra aller faire un tour également du côté de l’émission « Relecture », aussi disponible sur le site de France Culture. Une émission qui posait la question de la lecture de l’œuvre au XXe siècle : un véritable défi. Alors, qu’en est-il au XXIe siècle ?
Une langue de Molière qui est aussi celle de Rabelais :
Si la langue pratiquée par Rabelais dans ses récits nous paraît parfois bien étrangère, paradoxalement, la langue française actuelle est pétrie de termes issus de l’œuvre du célèbre humaniste. On a bien sûr en tête des termes comme « gargantuesque », « pantagruélique » directement forgés à partir du nom des héros et renvoyant à leur appétit de géant, ou alors « quintessence » et « anicroche », mais aussi des expressions, comme « substantifique moelle », « guerre picrocholine », « moutons de Panurge », « aller à vau-l’eau », « être Gros-Jean comme devant », « l’habit ne fait pas le moine »....
Rabalais, véritable artisan des mots, par ses listes, ses accumulations et ses hyperboles, forge des néologismes à foison, tandis que, par sa soif de mots, il fait entrer pour la première fois dans l’écrit des termes qui ne sont pas attestés avant lui : ainsi des adjectifs célèbre, frugal, patriotique, ou encore bénéfique.
Gargantua à écouter :
De nombreuses versions en livre audio sont disponibles gratuitement en ligne. Vous avez bien sûr celle accessible sur le site littératureaudio.com, que l’on doit à la donneuse de voix Pomme. Une version identique a été mise en ligne sur YouTube, pour en faciliter l’écoute.
La prof qui lit a mis en ligne sur son compte YouTube une autre version, et l’on peut là aussi l’en remercier. A chacun de faire son choix. La seconde version est plus pédagogique, avec un ton clair. En un peu moins de six heures, vous aurez lu ainsi l’intégralité de l’œuvre.
Faire une escapade du côté du site de François Bon, Le Tiers livre, est aussi, à n’en pas douter, une riche expérience. On pourra écouter la mise en voix de quelques chapitres de Gargantua, ce qui nous plonge admirablement dans le XVIe siècle. On regrettera toutefois de ne pas avoir l’intégralité de l’œuvre avec la voix de François Bon…
Rire et savoir : le parcours
Autour du parcours proposé, on peut aller faire un tour du côté de l’émission tirée de la série « Le rire en philosophie ». Intitulé « Rabelais, rire est le propre de l’homme », cet épisode est revigorant, avec un Jean-Yves Pouilloux que l’on connaît aussi comme éminent spécialiste de Montaigne.
De façon plus synthétique, si l’on veut aller droit au but, écouter cette émission assure d’avoir une petite maîtrise sur le parcours. On doit cette vidéo au professeur de français Romain Boussot, qui est derrière le site Mediaclasse. Vous pouvez associer le visionnage de cette capsule avec celle proposée par Amélie Vioux (qui est derrière le site commentairecompose.fr). Cette fois, c’est un résumé clair et instructif de l’œuvre de Rabelais qui vous est ainsi fourni.
Rire et savoir : faire une dissertation
Si l’on peut compter sur les enseignants pour préparer les commentaires qu’il s’agira de présenter à l’oral, pour l’écrit, il faut aussi s’en remettre à l’entraînement. Rien de mieux, pour réussir la dissertation, que de s’entraîner à faire des plans, mais aussi à rechercher des arguments dans l’œuvre Gargantua. Si vous avez déjà une batterie d’arguments clairs et percutants autour de la question du rire et du savoir, vous vous en sortirez sans trop de problèmes.
Faire un tour sur le site de Gloria Lauzanne peut vous aider à réfléchir au bon plan. Lisez chaque sujet, et recherchez votre plan ainsi que vos arguments, avant d’aller lire le plan proposé. Un sujet développé et analysé est aussi disponible sur le site Annabac des éditions Hatier.
Crédits illustration Pexels CC 0
Commenter cet article