À C., M., R., S.
J’ai expliqué les phénomènes célestes et marins par la force de gravitation, mais je n’ai pas encore attribué de cause à la gravitation.
Isaac Newton (1642-1727)
Levez-vous, enfants dorés ! Le ciel infini vous attend !
Extrait du Livre d’alchimie, de Peter Burgess (1523-1597)
1
En resserrant délicatement les doigts autour de la petite boîte qu’elle avait dans la poche de sa veste, Livy tendit le cou pour voir à travers la masse des gens qui montaient dans le bus en se bousculant. Elle commença à paniquer quand la mèche noire du garçon disparut en haut de l’escalier qui menait à l’étage. Il fallait absolument qu’elle trouve une place dans ce bus.
Indifférent au sort de la jeune fille, le chauffeur regardait droit devant lui. Il appuya sur le bouton de fermeture des portes. Livy joua des coudes pour avancer.
Ouf ! Elle était montée.
Les portes se fermèrent derrière elle et le bus démarra brusquement. Livy chercha sa carte de transport dans son sac à dos. Une fois qu’elle l’eut apposée sur le lecteur, elle se rendit compte qu’elle ne pourrait pas la ranger d’une seule main. Elle la coinça entre ses dents parce qu’elle ne voulait pas lâcher cette boîte dans sa poche. Elle contenait un minuscule cœur en verre bleu. C’était le cadeau qu’elle avait promis à sa meilleure amie Mahalia de remettre à ce garçon aux cheveux hérissés – et une promesse est une promesse, si difficile soit-elle à tenir.
À l’étage, Livy posa son sac à dos, lâcha son sac de sport et s’affala sur un siège. Elle retira sa carte de transport d’entre ses dents et la glissa dans la poche de sa veste. Le garçon était installé au fond du bus avec ses copains. Nerveuse, elle inspira à fond. Comment s’y prendre ? Elle regarda les nuages, dehors, comme s’ils pouvaient l’aider, mais cela ne fit que lui donner encore plus le vertige. Ils paraissaient aussi denses que des villes qui auraient été en suspension au-dessus d’elle. Elle ferait tout son possible pour que cette journée soit normale, décida-t-elle. Après tout, que pouvait-il y avoir de plus normal qu’un jour comme aujourd’hui ?
Elle s’était levée dès que le réveil avait sonné, comme elle se l’était promis : pas de maux de ventre. Elle avait réussi à avaler une bouchée entière de son petit déjeuner et à se rendre au collège. Certes, cela lui avait semblé bizarre d’y retourner après tout ce temps, mais les uns et les autres avaient été très gentils ; elle s’était assise à côté de Megan en maths et de Ciara en espagnol. Cela lui avait fait un drôle d’effet, car elle s’était toujours assise à côté de Mahalia. Mais elle avait tenu jusqu’à la fin de la journée et, à présent, elle rentrait chez elle en bus ; le garçon dont Mahalia avait été folle amoureuse était assis quelque part derrière elle. Comme d’habitude.
Dans sa robe d’été, ses genoux dénudés frottaient contre le siège devant elle. Elle regrettait de ne pas avoir mis son pantalon ; elle ne l’avait pas trouvé après toutes ces semaines sans aller au collège.
Extraits
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