A l'heure de la prière, dans ce campement de Touaregs installé à faible distance de Tombouctou, chacun s'inquiète de l'absence d'Ibrahim parti à la Ville des333 Saints en début de journée et qui devrait être rentré depuis longtemps.
Malgré les encouragements de patience prodigués par leur père, Rhissa, le frère d'Ibrahim, ne tient plus en place, inquiet, et décide de partir à sa rencontre.
Après avoir rapidement équipé son dromadaire, Rhissa prend la direction de Tombouctou.
En confirmation de ses appréhensions, il finit par découvrir, au pied d'un arbre en bordure du chemin, le dromadaire d'Ibrahim attendant auprès du corps inanimé de son maître. En pleurs et totalement retourné, Rhissa installe le corps de son petit frère sur le dos du dromadaire de celui-ci et poursuit, à la manière d'un somnambule, son chemin jusqu'au poste de police de Tombouctou où il est reçu par le Commissaire Touré.
Le même soir, des coups de feu sont tirés vers la fenêtre de la chambre d'hôtel où loge un touriste français.
Préoccupé par les liens possibles de ces deux évènements avec les rumeurs d'approches terroristes autour de la ville, le Commissaire Touré informe sa hiérarchie qui décide de dépêcher sur les lieux le Commissaire Habib, patron de la Brigade Criminelle de Bamako. Un fin limier dont l'expérience ne peut que s'avérer d'une grande utilité dans une affaire aux rebondissements potentiellement internationaux.
Je n'avais jamais eu l'occasion de lire un roman policier de et c'est avec beaucoup de plaisir que j'ai découvert l'enquête de son héros, le Commissaire Habib (dont la consultation de la biographie de l'auteur montre que ce n'est pas la première apparition dans ses œuvres).
Au-delà d'une intrigue soigneusement ficelée et bien menée - bien qu'assortie des deux ou trois passages manquant un peu de crédibilité - c'est le contexte très particulier de cette enquête qui a surtout retenu toute mon attention et dont j'ai largement apprécié le cadre.
Faire évoluer un enquêteur qui fait fonctionner ses petites cellules grises - à la manière d'un Poirot africain - sans se laisser détourner de sa voie par des faux semblants ou, plus encore, par des pressions diverses dont on n'a aucun mal à fort bien imaginer le réalisme potentiel, est assez jubilatoire.
Quant au milieu dans lequel évolue l'enquêteur, il est source de dépaysement total, faisant découvrir, au détour des interrogatoires des divers protagonistes, une culture bien différente de celles auxquelles nous ont habitué les spécialistes du genre.
C'est une société, certes en mutation accélérée mais encore profondément ancrée dans ses traditions, qu'il nous est ainsi donné à découvrir avec ses codes, ses valeurs, ses coutumes et ses règles morales, religieuses ou d'honneur qui ne peuvent qu'intriguer et rendre curieux d'un mode de vie tellement éloigné des schémas occidentaux. Et il n'y a clairement aucun jugement de valeur de ma part dans ce propos !
C'est une plongée, un vrai voyage, dans un monde autre dont les travers et les conventions, sont si éloignés de nos quotidiens qu'ils peuvent sembler irréels ou au moins empreints d'une certaine désuétude tout en nous laissant complètement rêveurs.
Bref, une immersion totale dans la culture des peuples du désert - lieu mythique s'il en est - que l'histoire criminelle ne fait qu'agrémenter.