Bernard Girard est auteur d'un essai intitulé Une révolution du management : le modèle Google. Mais ce n'est pas à ce titre qu'on parle de lui aujourd'hui. En fait, nos collègues de Cyberpresse ont pu laisser l'homme s'exprimer sur la liaison intime que le moteur entretient à l'égard des livres en général, et de la culture en particulier.
Pour lui les fondateurs du moteur jouent à l'exploration totale « du champ des possibles », comme disait Novalis. « Chez Google, on préfère multiplier les expériences afin de trouver le meilleur résultat. »
Et le livre n'échappe pas à cette prospection : « Les patrons de Google ont une ambition folle de numériser tout le savoir. En pratique, ils numérisent des bibliothèques en mettant à la disposition des utilisateurs des documents dont ils n'auraient jamais eu connaissance, auxquels ils n'auraient jamais eu accès. D'un premier point de vue, Google (et d'autres entreprises de même type) révèle que nous vivons sur des montagnes d'archives mortes, montagnes de bibliothèques avec des livres difficiles d'accès. »
Raviver la flamme et souffler sur la poussière
Partant du fait qu'un livre en bibliothèque est un livre mort, et pointant du doigt des cultures trop faibles pour se rendre visibles, « la première chose chez Google au plan culturel, donc, c'est de révéler cette perte considérable de contenu du savoir, et que nos règles de gestion du produit physique et les droits de protection ne sont pas adaptés à la redécouverte de ces contenus. » De même pour le cinéma avec des films dont les détenteurs de droit conservent la propriété.
«
D'un premier point de vue, Google révèle
que nous vivons sur des montagnes d'archives mortes. »
Bernard Girard
Pour autant, Google n'est pas une solution exempte de défauts : les références anglo-saxonnes priment (encore que la francophonie se rattrape) et « plus on s'éloigne de l'anglais, en fait, moins ce modèle fonctionne bien... C'est un souci qui conduira à la régionalisation; des engins de recherche concurrents de Google vont croître pour cette raison, comme Baidu en Chine ».
Vers un forfait culture ?
Vient bien sûr la question des auteurs. Peu d'entre eux vivent de leur plume, voilà un lieu commun, certes, mais « pourquoi interdire aux lecteurs de consulter [leurs] livres lorsqu'ils sont épuisés et qu'on ne peut les trouver nulle part ? » Et de proposer une sorte de forfait qui serait une solution alternative : « On me dirait qu'il faille payer quelques dizaines de dollars par an pour accéder à une banque infinie de contenus, je dirais oui. » Fut un temps, cette solution avait un nom, la licence globale, mais elle avait été bien vite balayée.
Vous pourrez retrouver l'intégralité de cet entretien chez nos confrères de Cyberpresse.